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                                                             A-441-95

 

 

 

CORAM :    LE JUGE STRAYER, J.C.A.

 

 

 

ENTRE :

 

 

 

                             MAVIS BAKER,

 

                                                           appelante,

 

                                - et -

 

          LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

 

                                                              intimé.

 

 

 

                        MOTIFS DE L'ORDONNANCE

 

 

 

LE JUGE STRAYER, J.C.A.

 

     Le 1er octobre 1996, une demande a été déposée au nom des enfants de l'appelante afin d'obtenir une ordonnance les joignant comme parties au présent appel et autorisant le dépôt de nouveaux éléments de preuve.  J'ai rejeté la demande et condamné la requérante à des dépens de 200 $.

 

     Même s'il paraissait évident que pareille demande ne pouvait être accueillie, j'ai pensé qu'il pourrait être utile pour l'avenir que je prononce des motifs écrits.

 

     L'appel en lui-même se rapporte à une décision en date du 26 juin 1995 par laquelle Madame le juge Simpson de la Section de première instance a rejeté une demande de contrôle judiciaire tendant à l'annulation de la décision défavorable prise par un agent d'immigration le 18 avril 1994 dans le cadre d'une demande, fondée sur des raisons d'ordre humanitaire, concernant une mesure d'expulsion prise contre l'appelante le 29 décembre 1992.  Le juge des requêtes a rejeté la demande de contrôle judiciaire, mais a certifié la question suivante en vue d'un examen en appel :

 

Vu que la Loi sur l'immigration n'incorpore pas expressément le langage des obligations internationales du Canada en ce qui concerne la Convention internationale relative aux droits de l'enfant, les autorités d'immigration fédérales doivent-elles considérer l'intérêt supérieur de l'enfant né au Canada comme une considération primordiale dans l'examen du cas d'un requérant sous le régime du paragraphe 114(2) de la Loi sur l'immigration?

 

     J'ai rejeté la demande de jonction de nouvelles personnes comme parties parce que je n'étais pas convaincu que la présence de la représentante des enfants était nécessaire pour régler de manière efficace et complète les points réellement soulevés par les questions.  Les éléments de preuve que la représentante cherchait à produire se rapportent aux circonstances véritables des enfants, qui ne sont pas un point soulevé par la question certifiée; et les arguments de droit qu'elle cherchait à invoquer correspondaient fondamentalement à ceux qui figurent déjà dans le mémoire de l'appelante[1].

 

     J'ai condamné la requérante aux dépens en raison de la nature manifestement futile et inopportune de la demande.  La requérante est associée à la Canadian Foundation for Children, Youth and the Law.  Le 10 mai 1995, un autre représentant de cet organisme a demandé à la Section de première instance, par voie de requête fondée sur la règle 324, d'ordonner la jonction des enfants comme parties à la demande de contrôle judiciaire.  Le juge Richard a rejeté cette demande le 9 juin 1995 et a fondé sa décision sur la jurisprudence établie de la présente Cour selon laquelle les enfants n'ont aucun droit légalement protégé vis‑à‑vis du gouvernement fédéral relativement à l'expulsion d'un parent.  La représentante des enfants n'a pas cherché à interjeter appel de cette décision et elle n'aurait pas pu le faire : le paragraphe 83(1) de la Loi sur l'immigration exclut tout appel d'une décision portant sur une question soulevée par la Loi, à moins qu'une «question grave de portée générale» soit certifiée.  Aucune question n'a été certifiée.  Malgré tout, une autre personne associée au même organisme a déposé, dans la présente espèce, une requête similaire fondée sur les mêmes affidavits et sur un affidavit complémentaire en date du 25 mai 1995 en vue de constituer les enfants parties à l'appel.  Il s'agit manifestement d'une tentative pour faire indirectement ce que le paragraphe 83(1) ne permet pas de faire, à savoir contrôler la décision par laquelle la Section de première instance a refusé de constituer les enfants parties à la présente instance.  De plus, la demande allait précisément à l'encontre de la jurisprudence de la présente Cour relative à la situation juridique d'enfants dans le cadre de procédures d'expulsion visant des parents[2].  On s'attendrait à ce qu'un effort sérieux pour surmonter pareil obstacle soit fait bien avant la date fixée pour l'audition de l'appel.

 

     Toutefois, la demande était inopportune et, en raison de la prolongation de l'appel qu'elle aurait entraîné si elle avait été accordée, vexatoire.  Il importe de souligner le dépôt très tardif de la présente demande.  Comme il a été mentionné, la représentante des enfants a été déboutée le 9 juin 1995 dans une demande visant à constituer les enfants parties au contrôle judiciaire.  La demande de contrôle judiciaire a par la suite été rejetée le 26 juin 1995.  Il convient de faire remarquer que ces faits se sont produits une quinzaine de mois avant la date fixée pour l'audition de l'appel interjeté contre l'ordonnance rendue par le juge Simpson, soit le 9 octobre 1996.  Dans l'intervalle, l'appelante a interjeté un appel fondé sur la question certifiée et, le 28 juin 1996, la date du 9 octobre 1996 a été fixée pour l'audition de l'appel.  Toutefois, ce n'est pas avant le 23 septembre, soit près de quinze mois après que le juge Simpson eut rendu sa décision, que la représentante des enfants a demandé à la Cour d'entendre la présente demande de jonction de nouvelles personnes comme parties à l'appel au début de l'audience le 9 octobre.  Cela a obligé l'intimé à produire de nombreux documents à très bref délai.  Si les enfants avaient été constitués parties à ce stade-ci, il ne fait aucun doute qu'il aurait fallu prolonger le temps accordé il y a environ trois mois et demi pour la tenue de l'audience.  Dans l'un des mémoires qu'elle a déposés dans le cadre de la demande de jonction des enfants comme parties, la représentante des enfants déclare :

 

[TRADUCTION] Il est allégué que les requérants mineurs, en tant que parties jointes, auraient la possibilité de déposer des affidavits et des documents pertinents dans le domaine des sciences sociales, et de présenter des observations orales et écrites.  La règle 1102 régit la réception d'éléments de preuve par la Cour d'appel.

 

Il est allégué qu'à titre d'intervenants en vertu de la règle 1102 des Règles de la Cour fédérale, les requérants mineurs pourraient déposer des affidavits.  Les intervenants ont aussi coutume de déposer des documents pertinents dans le domaine des sciences sociales.  En tant qu'intervenants, les requérants mineurs voudraient avoir la possibilité de présenter des observations orales et écrites.

 

Par conséquent, la jonction des requérants mineurs aurait nécessité un ajournement, ce qui aurait entraîné des retards et présenté des inconvénients pour la Cour et l'intimé.  Ce dernier a adopté le point de vue selon lequel des dépens devraient être adjugés dans le cadre de la présente demande tardive et, à mon avis, l'attribution de dépens est entièrement justifiée dans les circonstances de l'espèce.

 

                                               B. L. Strayer

OTTAWA (ONTARIO)                             a signé l'original    

LE 29 NOVEMBRE 1996                                 J.C.A.

 

 

 

Traduction certifiée conforme                                      

                                           Marie Descombes, LL.L.


                                     COUR D'APPEL FÉDÉRALE

 

 

 

                                              No du greffe : A-411-95

 

 

                                ENTRE :

 

 

 

                                              MAVIS BAKER,

 

                                                          requérante,

 

                                                  - et -

 

                                     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                           ET DE L'IMMIGRATION,

 

                                                              intimé.

 

 

 

                                                                   

 

 

                                       MOTIFS DE L'ORDONNANCE

 

                                                                   


                       COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                           SECTION D'APPEL

 

              AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

No DU GREFFE :                  A-441-95

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :     Mavis Baker c. Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration

 

LIEU DE L'AUDIENCE :       Toronto (Ontario)

 

DATE DE l'AUDIENCE :       Le 9 octobre 1996

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DU JUGE STRAYER, J.C.A.

 

DATE DES MOTIFS :               Le 29 novembre 1996

 

 

 

 

 

ONT COMPARU :

 

M. Roger Rowe                              pour l'appelante

 

Mme Cheryl Mitchell                        pour l'intimé

Mme Kathryn Hucal

 

Mme Sheena Scott                      pour l'intervenante

 

 

 

 

 

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

 

The Law Offices of Daniel Zaretsky         pour l'appelante

Toronto (Ontario)

 

 

M. George Thomson                          pour l'intimé

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

 

 

Canadian Foundation for Children,          pour l'intervenante

Youth and the Law

Toronto (Ontario)


 



    [1]Les seules autres décisions importantes auxquelles la représentante se réfère dans ses observations écrites sont celles qu'a rendue la Cour suprême du Canada dans B. c. Children's Aid Society [1995] 1 R.C.S. 315 et Goertz c. Gordon [1996] 2 R.C.S. 27.  Ces deux décisions affirment simplement qu'il n'appartient pas toujours aux parents ou au conjoint ayant la garde de décider de ce qui est dans l'intérêt de l'enfant.  La présente Cour a pleinement reconnu que la question de savoir si un parent visé par une mesure d'expulsion emmène un enfant né au Canada à l'étranger est une question qui peut nécessiter une intervention extérieure, dans l'intérêt de l'enfant : voir Langner c. M.E.I. (1995) 184 N.R. 230, à la p. 234.  Cela ne veut pas dire qu'il devrait incomber à un agent d'immigration de décider de ce qui est dans l'intérêt d'un enfant, dans le cadre d'une décision administrative prise sous le régime du paragraphe 114(2) de la Loi sur l'immigration.

    [2]Langner c. M.E.I. (1995) 184 N.R. 230, autorisation de pourvoi devant la C.S.C. refusée le 17 août 1995; Naredo et autre c. M.E.I. (1995) 184 N.R. 382; Alouache c. M.E.I. (A‑681‑95, décision en date du 26 avril 1996).

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