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Date : 20031217

Dossier : A-323-03

Référence : 2003 CAF 492

CORAM :       LE JUGE ROTHSTEIN

LE JUGE NOËL

LE JUGE MALONE

ENTRE :

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA au nom de L'AGENCE CANADIENNE D'INSPECTION DES ALIMENTS

                                                                                                                                                     demandeur

                                                                                   et

                                                            DWAYNE MAGNOWSKI

                                                                                                                                                      défendeur

                                  Audience tenue à Edmonton (Alberta), le 17 décembre 2003.

                       Jugement rendu à l'audience à Edmonton (Alberta), le 17 décembre 2003.

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :                                               LE JUGE ROTHSTEIN


Date : 20031217

Dossier : A-323-03

Référence : 2003 CAF 492

CORAM :       LE JUGE ROTHSTEIN

LE JUGE NOËL

LE JUGE MALONE

ENTRE :

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA au nom de L'AGENCE CANADIENNE D'INSPECTION DES ALIMENTS

                                                                                                                                                     demandeur

                                                                                   et

                                                            DWAYNE MAGNOWSKI

                                                                                                                                                      défendeur

                                                           MOTIFS DU JUGEMENT

                      (Prononcés à l'audience à Edmonton (Alberta), le 17 décembre 2003)

LE JUGE ROTHSTEIN

[1]                 Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision rendue le 4 juin 2003 par la Commission de révision de l'Agence canadienne d'inspection des aliments.

LES FAITS


[2]                 Le 5 février 2003, une inspectrice de l'Agence canadienne d'inspection des aliments a inspecté des bovins au marché à l'encan de Ponoka (Alberta). L'inspectrice a remarqué que deux vaches ne portaient pas à leurs oreilles les étiquettes requises. Le paragraphe 176(2) du Règlement sur la santé des animaux, DORS/91-525, (le Règlement) est ainsi libellé :

176(2) Sous réserve de l'article 183, nul ne peut retirer ou faire retirer un animal de toute ferme ou tout ranch, autre que sa ferme d'origine, à moins que l'animal ne porte une étiquette approuvée.

176(2) Subject to section 183, no person shall remove, or cause the removal of, an animal from a farm or ranch other than its farm of origin unless the animal bears an approved tag.                                                 

[3]                 L'inspectrice a conclu que le défendeur était le propriétaire inscrit des vaches et qu'elles avaient été retirées de sa ferme pour être envoyées à Ponoka le 4 février 2003. Elle a dressé un procès-verbal en vertu de la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d'agriculture et d'agroalimentaire, L.C. 1995, ch. 40, (la Loi) qu'elle a notifié au défendeur et qui comportait une amende de 500 $.

[4]                 Le défendeur a interjeté appel du procès-verbal devant la Commission de révision. L'instance a été instruite sur la foi d'observations écrites. Dans son mémoire le défendeur a affirmé ce qui suit :

1.          Il a accroché des étiquettes aux oreilles des vaches la journée de la Fête des Mères 2002;

2.          Les étiquettes d'oreille ont pu se détacher dans une engreneuse située sur la ferme;

3.          Les étiquettes d'oreille ont pu tomber alors que les vaches du troupeau se bousculaient;

4.          Les étiquettes ont pu se détacher au marché à l'encan de Ponoka.


[5]                 Il de plus ajouté ce qui suit dans son mémoire :

[traduction] Comme justification additionnelle, j'aimerais affirmer que je crois que lorsque j'ai expédié les vaches, elles portaient leurs étiquettes. Toutefois, je déclare que je n'ai pas fait l'inspection que, en rétrospective j'aurais dû faire et que je ne manquerai pas de faire à l'avenir.

LA DÉCISION DE LA COMMISSION DE RÉVISION

[6]                 Dans sa décision, le président de la Commission de révision a déclaré ce qui suit :

[traduction] Le demandeur a soumis des éléments de preuve selon lesquels il avait acheté des étiquettes d'oreille approuvées le 9 avril 2002 et que son épouse l'avait aidé à étiqueter leurs vaches la journée de la Fête des Mères 2002. Il croit également que lorsqu'il a expédié les vaches, celles-ci portaient leurs étiquettes.

[....]

Afin d'avoir gain de cause, le défendeur doit établir que, selon la prépondérance des probabilités, le demandeur a retiré les vaches de sa ferme alors qu'elles ne portaient pas les étiquettes approuvées. Il ne l'a pas fait en l'espèce. La preuve du demandeur l'emporte facilement sur celle du défendeur.

[7]                 En conséquence, le président de la Commission de révision a conclu que le défendeur n'avait pas commis la violation et n'avait pas à payer l'amende de 500 $.

L'ANALYSE

[8]                 À notre humble avis, la Commission de révision a commis une erreur de droit en tirant cette conclusion.


[9]                 L'article 19 de la Loi est ainsi libellé :

19. En cas de contestation devant le ministre ou de révision par la Commission, portant sur les faits, il appartient au ministre d'établir, selon la prépondérance des probabilités, la responsabilité du contrevenant.                 

19. In every case where the facts of a violation are reviewed by the Minister or by the Tribunal, the Minister must establish, on a balance of probabilities, that the person named in the notice of violation committed the violation identified in the notice.

Interprété hors contexte, l'article 19 autoriserait la Commission qui apprécie les éléments de preuve à conclure que, selon la prépondérance des probabilités, le défendeur n'a pas commis la violation.

[10]            Toutefois, le paragraphe 18(1) de la Loi est ainsi libellé :

18. (1) Le contrevenant ne peut invoquer en défense le fait qu'il a pris les mesures nécessaires pour empêcher la violation ou qu'il croyait raisonnablement et en toute honnêteté à l'existence de faits qui, avérés, l'exonéreraient.

18. (1) A person named in a notice of violation does not have a defence by reason that the person

(a) exercised due diligence to prevent the violation; or

(b) reasonably and honestly believed in the existence of facts that, if true, would exonerate the person.

Par conséquent, la prise des mesures nécessaires ou une croyance raisonnable et honnête que les vaches ont été étiquetées ne peuvent être invoquées en défense.


[11]            Selon les éléments de preuve dont a été saisie la Commission de révision, les vaches ne portaient pas d'étiquettes d'oreille lorsqu'elles ont été inspectées à Ponoka le 5 février 2003. Les vaches ont été emmenées à Ponoka le 4 février 2003. Prima facie, la conclusion qui peut être tirée de cette preuve est que les vaches ont été retirées de la ferme du défendeur alors qu'elles ne portaient pas d'étiquettes d'oreille.

[12]            Il était loisible au défendeur de prouver que les vaches portaient des étiquettes d'oreille lorsqu'elles ont été retirées de la ferme. Par exemple, si des étiquettes avaient été trouvées au marché à l'encan de Ponoka, cela aurait pu constituer une preuve suffisante.

[13]            Toutefois, selon le paragraphe 18(1), la prétention du défendeur selon laquelle il croyait que les vaches portaient des étiquettes d'oreille lorsqu'elles ont quitté la ferme ne peut être invoquée en défense, surtout qu'il a reconnu qu'il n'a pas fait d'inspection à ce moment-là. Les autres explications qu'il a données, c'est-à-dire que les vaches avaient été étiquetées la journée de la Fête des Mères 2002 et que les étiquettes d'oreille ont pu se détacher au marché à l'encan de Ponoka, ne font qu'invoquer le fait qu'il aurait pris les mesures nécessaires ou qu'il croyait en toute honnêteté à l'existence de faits qui, avérés, l'exonéreraient. Ces explications ne peuvent également pas être invoquées en défense.

[14]            La Commission de révision n'a été saisie d'aucun élément de preuve pertinent permettant de réfuter la preuve prima facie de l'appelant selon laquelle les vaches ne portaient pas d'étiquettes d'oreille lorsqu'elles ont été inspectées à Ponoka, le jour après qu'elles furent retirées de la ferme du défendeur, et, donc, qu'elles ont été retirées de la ferme alors qu'elles n'étaient pas étiquetées.


[15]            Les motifs pour lesquels le paragraphe 18(1) a été édicté sont évidents. S'il n'existait pas, il serait loisible à quiconque de se soustraire aux exigences du paragraphe 176(2) en affirmant simplement qu'il a étiqueté des animaux et que, lorsque les animaux ont été retirés de la ferme, il croyait que les animaux portaient toujours les étiquettes. Les inspecteurs du gouvernement n'inspectent pas les animaux lorsqu'ils quittent la ferme et, de ce fait, on ne peut prouver qu'il y a eu violation.

[16]            Cela ne veut pas dire qu'aucune défense ne peut être invoquée; cela veut simplement dire que nous ne pouvons pas invoquer en défense le fait que nous avons pris les mesures nécessaires ou que nous croyions en toute honnêteté à l'existence de faits qui, avérés, nous exonéreraient.

CONCLUSION

[17]            Nous sommes donc d'avis d'accueillir l'appel, d'annuler la décision de la Commission de révision et de renvoyer l'affaire à la Commission pour nouvel examen en tenant pour acquis que le défendeur a violé le paragraphe 176(2) du Règlement et que l'appel qu'il a interjeté devant la Commission devrait être rejeté.


[18]            Compte tenu de l'état pitoyable notoire dans lequel se trouve actuellement l'industrie bovine dans l'Ouest canadien, on a demandé à l'appelant si le gouvernement accepterait que l'on réduise l'amende de 500 $ ou que l'on donne un avertissement au lieu d'une amende. L'avocat a affirmé que le gouvernement ne voulait pas modifier l'amende de 500 $.

                                                                             _ Marshall Rothstein _            

                                                                                                             Juge                          

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B., trad. a.


                               COUR D'APPEL FÉDÉRALE

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                               A-323-03

(DEMANDE DE CONTRÔLE JUDICIAIRE D'UNE DÉCISION RENDUE LE 4 JUIN 2003 PAR LA COMMISSION DE RÉVISION DE L'AGENCE CANADIENNE D'INSPECTION DES ALIMENTS)

INTITULÉ :                              LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA AU NOM DE L'AGENCE CANADIENNE D'INSPECTION DES ALIMENTS

c.

DWAYNE MAGNOWSKI

                                                         

LIEU DE L'AUDIENCE :                   EDMONTON (ALBERTA)

DATE DE L'AUDIENCE :                 LE 17 DÉCEMBRE 2003

MOTIFS DU JUGEMENT                 (LES JUGES ROTHSTEIN, NOËL, ET

DE LA COUR :                        MALONE)                   

PRONONCÉS À L'AUDIENCE PAR :        LE JUGE ROTHSTEIN

COMPARUTIONS :

Camille Audain

POUR LE DEMANDEUR

Dwayne Magnowski

POUR SON PROPRE COMPTE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

POUR LE DEMANDEUR


Date : 20031217

Dossier : A-323-03

Edmonton (Alberta), le 17 décembre 2003

CORAM :       LE JUGE ROTHSTEIN

LE JUGE NOËL

LE JUGE MALONE

ENTRE :

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA au nom de L'AGENCE CANADIENNE D'INSPECTION DES ALIMENTS

                                                                                                 demandeur

                                                         et

                                  DWAYNE MAGNOWSKI

                                                                                                  défendeur

                                              JUGEMENT

L'appel est accueilli, la décision de la Commission de révision est annulée et l'affaire est renvoyée à la Commission pour nouvel examen en tenant pour acquis que le défendeur a violé le paragraphe 176(2) du Règlement et que l'appel qu'il a interjeté devant la Commission devrait être rejeté.                                                                                        

                                                                             _ Marshall Rothstein _            

                                                                                                             Juge                          

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B., trad. a.

                                                                                                                   


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