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Date : 20020206

Dossier : A-223-00

Toronto (Ontario), le mercredi 6 février 2002

CORAM :       LE JUGE EN CHEF RICHARD

LE JUGE EVANS

LE JUGE MALONE    

ENTRE :

                                                         

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                         appelant

                                                                              - et -

                                                                 PRAKASH PATEL

                                                                                                                                                            intimé

                                                                                                                                                                       

                                                                        JUGEMENT

L'appel est accueilli. La décision du juge des requêtes est annulée, et la décision de l'agente des visas de refuser un visa à l'intimé est rétablie.

La question suivante a été certifiée par le juge des requêtes :

La décision d'un agent des visas de refuser une demande d'admission au Canada devrait-elle être annulée lorsque l'agent des visas a commis une erreur d'évaluation, mais une erreur dont la rectification ne donnerait encore pas au requérant suffisamment de points pour que sa demande soit acceptée?


Il est répondu ainsi :

Si, dans une demande de contrôle judiciaire du refus d'un agent des visas de délivrer un visa, la Cour arrive à la conclusion que l'agent a commis une erreur sujette à révision et qu'il a accordé au requérant trop peu de points d'appréciation, la Cour peut si elle le juge opportun refuser d'annuler la décision lorsque, à son avis, la rectification de l'erreur ne pouvait modifier la décision de l'agent parce que le requérant demeurait avec un nombre de points insuffisant pour justifier la délivrance d'un visa.

                                                                                           « J. Richard »                

Juge en chef

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


Date : 20020207

Dossier : A-223-00

Référence neutre : 2002 CAF 55

CORAM :       LE JUGE EN CHEF RICHARD

LE JUGE EVANS

LE JUGE MALONE

ENTRE :

        LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                               appelant

                                                                 - et -

                                                    PRAKASH PATEL

                                                                                                                                  intimé

                  Audience tenue à Toronto (Ontario), le mercredi 6 février 2002.

                          Jugement prononcé à l'audience à Toronto (Ontario),

                                                le mercredi 6 février 2002.

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :                                LE JUGE EVANS


Date : 20020207

Dossier : A-223-00

Référence neutre : 2002 CAF 55

CORAM :       LE JUGE EN CHEF RICHARD

LE JUGE EVANS

LE JUGE MALONE

ENTRE :

        LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                               appelant

                                                                 - et -

                                                    PRAKASH PATEL

                                                                                                                                  intimé

                                MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

                                 (prononcés à l'audience à Toronto (Ontario),

                                                le mercredi 6 février 2002)

LE JUGE EVANS

[1]                 Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration fait appel d'une décision d'un juge de la Section de première instance datée du 2 juin 2000, qui faisait droit à une demande de contrôle judiciaire et annulait le refus d'une agente des visas de délivrer un visa de résident permanent à Prakash Patel. Le docteur Patel avait les diplômes requis en Inde pour exercer la médecine, mais il avait demandé un visa dans la catégorie indépendante, comme technologiste médical. Après s'être entretenu avec le docteur Patel, l'agente des visas lui avait attribué 66 points d'appréciation, soit quatre de moins que les 70 points normalement requis pour un visa.


[2]                 Le juge des requêtes a estimé que l'agente des visas avait commis une erreur en n'attribuant au docteur Patel que 13 points pour les études, au lieu des 15 points auxquels il avait droit selon l'annexe I du Règlement sur l'immigration de 1978, DORS/78-172. Le nombre de points d'appréciation accordés au docteur Patel passèrent donc à 68. Après avoir fait droit à la demande de contrôle judiciaire, le juge a certifié la question suivante conformément au paragraphe 83(1) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2 :

La décision d'un agent des visas de refuser une demande d'admission au Canada devrait-elle être annulée lorsque l'agent des visas a commis une erreur d'évaluation, mais une erreur dont la rectification ne donnerait encore pas au requérant suffisamment de points pour que sa demande soit acceptée?

[3]                    Nous observons que les motifs du juge ne disent rien de la possibilité qu'elle avait de refuser au docteur Patel le redressement qu'il demandait parce que l'erreur de l'agente des visas n'avait pas d'incidence sur la décision de refuser le visa.

[4]                    Dans les arguments qu'il nous a exposés, l'avocat du ministre a admis que l'agente avait commis une erreur dans le calcul des points d'appréciation au regard des études. Cependant, s'appuyant sur des précédents où des décisions d'agents des visas n'avaient pas été annulées parce que les erreurs commises étaient sans conséquence sur le résultat, l'avocat a soutenu que le refus de l'agente de délivrer un visa dans la présente affaire n'aurait pas dû être annulé, parce qu'il aurait encore manqué au docteur Patel deux points sur le nombre normalement requis pour une décision favorable : voir par exemple l'affaire Barua c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), (1998), 157 F.T.R. 65; Shen c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] A.C.F. no 2031 (C.F. 1re inst.); Syed c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] A.C.F. no 451 (C.F. 1re inst.).


[5]                 Un pouvoir discrétionnaire semblable a été exercé dans des procédures de contrôle judiciaire où le droit d'une personne à l'équité procédurale avait été nié, mais où la juridiction de contrôle était persuadée que la négation du droit n'avait pu avoir d'effet sur la décision : voir par exemple Mobil Oil Canada Ltd. c. Office Canada-Terre-Neuve des hydrocarbures extracôtiers, [1994] 1 R.C.S. 202, à la page 228; Yassine c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1994), 172 N.R. 308 (C.A.F.).

[6]                 Nous sommes d'avis que l'erreur commise par l'agente des visas a été sans conséquence sur le résultat de la demande de visa parce que, même après la rectification de l'erreur relative aux études, il manquait encore au docteur Patel deux points pour obtenir le nombre de points normalement requis pour qu'une demande de visa soit accordée. Nous notons également que, dans sa lettre de refus, l'agente des visas mentionnait qu'elle avait décidé de ne pas exercer son pouvoir de délivrer un visa en application du paragraphe 11(3) du Règlement, parce qu'elle était d'avis que les 66 points d'appréciation qu'elle avait attribués au docteur Patel rendaient compte fidèlement de sa capacité à s'établir avec succès au Canada.

[7]                 À notre avis, le juge des requêtes aurait dû se demander s'il ne fallait pas plutôt refuser d'annuler la décision de l'agente des visas. Au lieu de renvoyer l'affaire à la Section de première instance, nous sommes disposés à exercer le pouvoir discrétionnaire que le juge des requêtes aurait dû exercer : la décision du juge de première instance sera infirmée et la décision de l'agente des visas de refuser le visa sera rétablie.


[8]                 Deux autres points ont été soulevés devant nous. D'abord, l'avocat du ministre a affirmé que le juge des requêtes n'aurait pas dû réduire la valeur probante qu'elle avait accordée aux notes du STIDI consignées par l'agente des visas durant son entretien avec le docteur Patel, parce qu'en fait, par ordre d'un protonotaire, un double du sommaire de l'agente avait été établi sous serment et était devenu un affidavit. Cependant, même si le juge des requêtes a commis cette erreur, elle n'a aucune conséquence.

[9]                 Deuxièmement, l'avocat de l'intimé a soutenu que, lorsque l'agente des visas a évalué la connaissance qu'avait de l'anglais le docteur Patel, elle a manqué à son obligation d'équité procédurale. Ce point a été évoqué devant le juge des requêtes, mais le juge des requêtes n'en a pas fait mention dans ses motifs. L'avocat a avancé deux arguments sur l'aspect de l'équité procédurale.

[10]            Il a soutenu que, en ce qui concerne la manière dont l'agente avait mesuré la connaissance de l'anglais qu'avait le docteur Patel, le dossier ne renferme aucune explication montrant qu'elle s'est acquittée de son obligation de motiver sa décision, une obligation imposée par l'arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817. Nous ne sommes pas de cet avis. Dans le devoir d'équité procédurale, l'obligation de motiver la décision dépend du contexte décisionnel particulier auquel se rapporte l'obligation. Le devoir d'équité auquel est astreint un agent des visas lorsqu'il décide d'une demande de visa présentée par un requérant de la catégorie indépendante se situe vers l'extrémité inférieure du registre : Chiau c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2001] 2 C.F. 297 (C.A.).

[11]            À notre avis, l'observation que fait dans le dossier l'agente des visas à propos des difficultés du docteur Patel à communiquer oralement, sans compter l'échantillon d'écriture en anglais qu'il avait produit, montre assez clairement pourquoi elle lui a attribué pour la langue six points d'appréciation sur un nombre possible de neuf.


[12]            L'avocat a aussi avancé que l'agente avait nié au docteur Patel son droit à l'équité procédurale en évaluant sa capacité de lire l'anglais à un niveau inférieur à celui auquel il l'avait lui-même évaluée, sans lui donner la possibilité de démontrer sa véritable capacité de lire l'anglais. On peut raisonnablement déduire du dossier que l'agente a attribué au docteur Patel deux points pour sa capacité de parler l'anglais, deux points pour sa capacité de l'écrire et deux points pour sa capacité de le lire. Ainsi, même s'il obtenait le maximum de trois points pour sa capacité de lecture, il n'aurait encore qu'un total de 69 points d'appréciation. Autrement dit, même si l'agente avait commis un manquement à l'équité procédurale dans son évaluation de la capacité du docteur Patel à lire l'anglais, ce manquement a été sans conséquence.

[13]            Pour ces motifs, l'appel sera accueilli, sans dépens, la décision du juge des requêtes sera annulée et la décision de l'agente des visas de refuser un visa au docteur Patel sera rétablie. Nous répondrions ainsi à la question certifiée:

Si, dans une demande de contrôle judiciaire du refus d'un agent des visas de délivrer un visa, la Cour arrive à la conclusion que l'agent a commis une erreur sujette à révision et qu'il a accordé au requérant trop peu de points d'appréciation, la Cour peut si elle le juge opportun refuser d'annuler la décision lorsque, à son avis, la rectification de l'erreur ne pouvait modifier la décision de l'agent parce que le requérant demeurait avec un nombre de points insuffisant pour justifier la délivrance d'un visa.

                                                                                      « John M. Evans »             

                                                                                                             Juge                             

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                          COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                       SECTION D'APPEL

                                  Avocats inscrits au dossier

DOSSIER :                          A-223-00     

INTITULÉ:                       MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                          appelant

- et -

PRAKASH PATEL

                                                            intimé

DATE DE L'AUDIENCE :             LE MERCREDI 6 FÉVRIER 2002

LIEU DE L'AUDIENCE :             TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS DU JUGEMENT

DE LA COUR :              LE JUGE EVANS

DATE DES MOTIFS :         LE MERCREDI 6 FÉVRIER 2002

PRONONCÉS À L'AUDIENCE À TORONTO (ONTARIO), LE 6 FÉVRIER 2002.

ONT COMPARU :

Marcel Larouche                                            pour l'appelant

Max Chaudhary                                      pour l'intimé

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada                         pour l'appelant

Cabinet Chaudhary                                        pour l'intimé

18, promenade Wynford, bureau 707

North York (Ontario)

M3C 3S2


                        

           COUR FÉDÉ RALE DU CANADA

                 SECTION D'APPEL

Date : 20020207

Dossier :    A-223-00

ENTRE :

       LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

            ET DE L'IMMIGRATION

                                     appelant

et

PRAKASH PATEL

                                      intimé

                                                                                                                

       MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

                                                                                                                            

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