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Date : 20020122

Dossier : A-289-01

Montréal (Québec) le 22 janvier 2002

CORAM :       LE JUGE STONE

LE JUGE EVANS

LE JUGE MALONE

ENTRE :

SA MAJESTÉ LA REINE

appelante

et

CANADIAN HELICOPTERS LIMITED

intimée

JUGEMENT

L'appel est rejeté avec dépens.

                          « A.J. Stone »                    

Juge                             

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


Date : 20020122

Dossier : A-289-01

Référence neutre : 2002 CAF 30

CORAM :       LE JUGE STONE

LE JUGE EVANS

LE JUGE MALONE

ENTRE :

SA MAJESTÉ LA REINE

appelante

et

CANADIAN HELICOPTERS LIMITED

intimée

Audience tenue à Montréal (Québec), le 22 janvier 2002.

Jugement prononcé à l'audience à Montréal (Québec), le 22 janvier 2002.

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR PAR :                                       LE JUGE MALONE


Date : 20020122

Dossier : A-289-01

Référence neutre : 2002 CAF 30

CORAM :       LE JUGE STONE

LE JUGE EVANS

LE JUGE MALONE

ENTRE :

SA MAJESTÉ LA REINE

appelante

et

CANADIAN HELICOPTERS LIMITED

intimée

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(prononcés à l'audience à Montréal (Québec) le 22 janvier 2002)

LE JUGE MALONE

La question en litige

[1]         Il s'agit d'un appel d'un jugement du juge McArthur de la Cour canadienne de l'impôt en date du 9 avril 2001, qui accueillait les appels de l'intimée à l'encontre des cotisations d'impôt sur le revenu établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour ses années d'imposition 1990 et 1991 (cité à [2001] A.C.I. n ° 219).


Les faits

[2]         Ces questions de cotisation découlent d'un prêt de 8,95 millions de dollars américains obtenu par l'intimée, Canadian Helicopters Limited (Helicopters), en vue d'acheter les actions d'une société concurrente, Viking Helicopters Ltd. (Viking), en août 1989. La société mère d'Helicopters était CHC Helicopter Holdings Ltd. (Holdings) ayant elle-même pour société mère CHC Helicopter Corporation Ltd. (CHC). L'intimée a payé de l'intérêt sur le prêt par suite de l'achat des actions, bien que ce soit CHC qui ait acquis le titre des actions de Viking. Le ministre a refusé la déduction de l'intérêt du prêt réclamée par Helicopters aux termes de l'alinéa 20(1)c) de la Loi au titre de l'intérêt du prêt. L'alinéa 20(1)c) est rédigé dans les termes suivants :

20. (1) Déductions admises dans le calcul du revenu tiré d'une entreprise ou d'un bien -- Malgré les alinéas 18(1)a), b) et h), sont déductibles dans le calcul du revenu tiré par un contribuable d'une entreprise ou d'un bien pour une année d'imposition celles des sommes suivantes qui se rapportent entièrement à cette source de revenus ou la partie des sommes suivantes qu'il est raisonnable de considérer comme s'y rapportant_

...

c) Intérêts -- la moins élevée d'une somme payée au cours de l'année ou payable pour l'année (suivant la méthode habituellement utilisée par le contribuable dans le calcul de son revenu) et d'une somme raisonnable à cet égard, en exécution d'une obligation légale de verser des intérêts sur_:

20. (1) Deductions permitted in computing income from business or property -- Notwithstanding paragraphs 18(1)(a), (b) and (h), in computing a taxpayer's income for a taxation year from a business or property, there may be deducted such of the following amounts as are wholly applicable to that source or such part of the following amounts as may reasonably be regarded as applicable thereto:

...

(c) interest -- an amount paid in the year or payable in respect of the year (depending upon the method regularly followed by the taxpayer in computing the taxpayer's income), pursuant to a legal obligation to pay interest on

            (i) de l'argent emprunté et utilisé en vue de tirer un revenu d'une entreprise ou d'un bien (autre que l'argent emprunté et utilisé pour acquérir un bien dont le revenu serait exonéré ou pour contracter une police d'assurance-vie)

(i) borrowed money used for the purpose of earning income from a business or property (other than borrowed money used to acquire property the income from which would be exempt or to acquire a life insurance policy)

[3]         La question dans le présent appel consiste à déterminer si l'intérêt sur le prêt est déductible.

[4]         Le juge de la Cour de l'impôt a statué que, même si le prêt avait pour objet le financement de l'achat de Viking par la société mère, CHC, l'intimée avait accordé un prêt sans intérêt et sans condition à Holdings, et Holdings avait à son tour prêté l'argent à CHC; l'ensemble de cette opération équivalait à une utilisation directe inadmissible. Toutefois, le juge McArthur, de la Cour canadienne de l'impôt, a également statué que l'intérêt était déductible parce qu'il s'agissait d'une opération relevant de la catégorie des circonstances exceptionnelles auxquelles a fait référence le juge en chef Dickson dans l'arrêt Sa Majesté la Reine c. Phyllis Barbara Bronfman Trust, 87 D.T.C. 5059 (C.S.C.) à la page 5067, et qu'a analysé le juge Robertson dans l'arrêt 74712 Alberta Ltd. c. La Reine, [1997] 2 C.F. 471 (C.A.).


[5]         Essentiellement, cette analyse fait ressortir que les versements d'intérêts liés à une utilisation directe inadmissible peuvent quand même être déduits lorsque les fonds empruntés peuvent être rattachés à une fin et à une utilisation admissibles, c'est-à-dire lorsque le contribuable peut démontrer que la fin réelle (l'intention) qu'il visait en utilisant les fonds était de gagner un revenu, et qu'il s'attendait raisonnablement à ce que le revenu ainsi produit soit supérieur aux intérêts payés.

L'argumentation

[6]         Le ministre a fait valoir que le juge de la Cour de l'impôt a commis une erreur en statuant que le prêt de l'intimée relevait de la catégorie des circonstances exceptionnelles mentionnées dans l'arrêt Bronfman Trust. D'après lui, l'opération n'était pas exceptionnelle, étant donné que l'intimée était membre d'un groupe de sociétés complexes, connaissant les affaires commerciales, et que l'intimée n'avait aucun droit légal de toucher des revenus ultérieurs découlant de l'achat de Viking. L'intention était que l'achat profite à l'ensemble du groupe. Par conséquent, selon le ministre, ce n'est pas ce que le juge en chef Dickson avait en tête quand il a fait référence à des « circonstances exceptionnelles » dans l'arrêt Bronfman Trust, précité. D'après le ministre, le juge de la Cour de l'impôt aurait également commis une erreur en examinant des événements postérieurs à l'opération pour vérifier l'expectative de profit de Helicopters, et si cette expectative était raisonnable.

Analyse

[7]         À notre avis, le juge de la Cour de l'impôt a correctement suivi l'analyse faite dans l'arrêt 74712 Alberta Ltd., précité, quand il a statué qu'Helicopters avait démontré qu'il y avait des circonstances exceptionnelles justifiant la déduction d'intérêts.


[8]         Pour ce qui est de l'intention réelle, le juge McArthur, de la Cour canadienne de l'impôt, a jugé que la preuve fournie par les témoins de l'intimée concernant le fait que l'objectif véritable du prêt était de permettre à CHC d'acquérir la propriété de Viking, était convaincante. Il a également jugé, à partir de la preuve, que cette démarche avait pour but de fournir des bénéfices à Helicopters et les événements qui ont suivi ont confirmé ce fait. Nous sommes convaincus, comme l'a statué le juge de la Cour de l'impôt, que les événements postérieurs au prêt, comme l'entente de gestion entre Viking et Helicopters, de même que l'augmentation du revenu d'entreprise d'Helicopters et la réduction de la concurrence, constituent une preuve de la fin et de l'intention visées par Helicopters quand elle a obtenu le prêt. Une analyse qui exclut l'examen des événements et de la preuve après que les fonds ont été utilisés à leur fin initiale limiterait gravement l'examen visant à prouver l'existence de circonstances exceptionnelles. À notre avis, les événements qui se sont produits après le fait peuvent avoir une valeur probante dans un examen portant sur les circonstances exceptionnelles. À cet égard, l'analyse effectuée dans l'arrêt Shell Canada Ltée c. Canada, [1999] 3 R.C.S. 622 est de peu d'utilité étant donné que la catégorie de l'utilisation exceptionnelle, mentionnée dans l'arrêt Bronfman Trust, n'était pas en cause.


[9]         Pour ce qui concerne l'expectative raisonnable que le revenu soit supérieur aux intérêts payés, nous sommes également d'avis que le juge de la Cour de l'impôt a correctement fondé ses conclusions sur la preuve postérieure à l'achat des actions. La preuve indiquait que l'intimée s'attendait raisonnablement à toucher à la fois des frais de gestion après l'achat de Viking de même que de sept à huit millions de dollars de revenus annuels bruts une fois que les opérations de Viking à l'extérieur du Québec seraient intégrées à sa propre entreprise. Cette fusion des opérations s'est produite en fait en 1996. Par conséquent, les conclusions du juge de la Cour de l'impôt quant à l'expectative raisonnable ont toutes été correctement fondées sur le dossier dont il était saisi. Ces conclusions de faits ne peuvent être modifiées par la présente Cour à moins qu'elles révèlent une erreur manifeste et dominante qui aurait entaché son évaluation des faits. Ce n'est pas le cas en l'espèce. L'existence d'une expectative raisonnable de la part d'un contribuable selon laquelle les revenus futurs excéderont les intérêts payés sur un prêt est en grande partie une question de fait. Par conséquent, nous ne pouvons accepter la prétention de l'avocat du ministre qui prétend qu'en droit aucune expectative raisonnable n'existait dans cette affaire parce que l'intimée n'avait aucun droit légal de bénéficier ni du prêt ni de l'acquisition des actions de Viking par CHC. Une telle exigence limiterait artificiellement la portée de l'examen.

Dispositif

[10]       Je suis d'avis de rejeter l'appel avec frais.

                          « B. Malone »                    

                                                                                                                                                     Juge                               

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                 COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                              SECTION D'APPEL

Date : 20020122

Dossier :    A-289-01

ENTRE :

                        SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                                 appelante

                                               et

           CANADIAN HELICOPTERS LIMITED

                                                                                     intimée

                                                                                                                                          

          MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

                                                                                                                                           


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION D'APPEL

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

MODIFICATION

DOSSIER :                                            A-289-01

CORAM :                                              LE JUGE STONE

LE JUGE EVANS

LE JUGE MALONE

INTITULÉ DE LA CAUSE :            

SA MAJESTÉ LA REINE

appelante

et

CANADIAN HELICOPTERS LIMITED

intimée

LIEU DE L'AUDIENCE :                   Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                 le 22 janvier 2002

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :            LE JUGE MALONE

DATE :                                                   le 22 janvier 2002

COMPARUTIONS:

Peter J. Leslie                                                                     POUR L'APPELANTE

Pierre Barsalou                                                     POUR L'INTIMÉE

Sébastien Rhéault                                                              POUR L'INTIMÉE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Morris Rosenberg                                                              POUR L'APPELANTE

Sous-procureur général du Canada

Halifax (N.-É.)

Barsalou Lawson Auger                                                    POUR L'INTIMÉE

Montréal (Québec)

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