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     Date: 19990204

     Dossier: A-215-98

CORAM :      LE JUGE DESJARDINS

         LE JUGE DÉCARY
         LE JUGE NOËL

ENTRE :

     APOTEX INC.,

     appelante

     (intimée),

     -ET-

     MERCK FROSST CANADA INC.

     et MERCK & CO., INC.,

     intimées

     (requérantes),

     -et-

     LE MINISTRE DE LA SANTÉ,

     intimé

     (intimé).

     JUGEMENT

L'appel est rejeté avec dépens.

                             Alice Desjardins                                          J.C.A.

Traduction certifiée conforme

Ghislaine Poitras, LL.L.

     Date: 19990204

     Dossier: A-215-98

Coram :      LE JUGE DESJARDINS

         LE JUGE DÉCARY
         LE JUGE NOËL

Entre :

     APOTEX INC.,

     appelante

     (intimée),

     -ET-

     MERCK FROSST CANADA INC.

     et MERCK & CO., INC.,

     intimées

     (requérantes),

     -et-

     LE MINISTRE DE LA SANTÉ,

     intimé

     (intimé)

     Entendu à Montréal (Québec) le jeudi 4 février 1999.

     Jugement prononcé à l'audience à Montréal (Québec),

     le jeudi 4 février 1999

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR RENDUS PAR      LE JUGE NOËL

     Date: 19990204

     Dossier: A-215-98

CORAM :      LE JUGE DESJARDINS

         LE JUGE DÉCARY
         LE JUGE NOËL

ENTRE :

     APOTEX INC.,

     appelante

     (intimée),

     -ET-

     MERCK FROSST CANADA INC.

     et MERCK & CO., INC.,

     intimées

     (requérantes),

     -et-

     LE MINISTRE DE LA SANTÉ,

     intimé

     (intimé).

     MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

     (Prononcés oralement à l'audience à Montréal (Québec)

     le jeudi 4 février 1999)

LE JUGE NOËL

[1]      L'appelante Apotex Inc. (Apotex) interjette appel d'une ordonnance interlocutoire rendue par le juge Pinard le 27 mars 1998, dans laquelle le juge a refusé de radier les mentions du brevet canadien no 1,161,380 (le brevet 380) de l'avis de demande d'ordonnance d'interdiction présentée par Merck Frosst Canada Inc. et Merck & Co, Inc. (Merck) sous le régime du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), DORS/98-166 (le Règlement).

[2]      Par avis de requête daté du 13 mars 1998, Merck a introduit la présente instance visant à interdire au ministre de la Santé (le ministre) de délivrer un avis de conformité à Apotex relativement à la simvastatine avant l'expiration des brevets 380 et 322. Merck est propriétaire du brevet canadien no 1,199,322 (le brevet 322) comportant une revendication relative à la fabrication du composé connu sous le nom de simvastatine et relative au composé lui-même fabriqué suivant les méthodes et processus décrits et revendiqués dans le brevet. Merck est également propriétaire du brevet 380, renfermant une revendication relative au processus de fabrication d'un composé connu sous le nom de lovastatine et relative au composé lui-même fabriqué suivant ce processus. Dans son avis de requête introductive d'instance, Merck allègue que la lovastatine constitue un composé intermédiaire utilisé dans le processus de fabrication de la simvastatine et qu'elle est elle-même un médicament au sens de la définition énoncée à l'article 2 du Règlement1.

[3]      Par avis de requête daté du 20 mars 1998, Apotex a demandé à la Cour de rendre, sous le régime du paragraphe 6(5) du Règlement, une ordonnance rejetant la demande d'ordonnance d'interdiction de Merck uniquement en rapport avec le brevet 380. Apotex fondait cette requête sur des arguments voulant que ce brevet ne renferme pas de revendication concernant la simvastatine ou son utilisation et que, portant sur un composé intermédiaire, il ne devait pas figurer sur la liste de brevets de la simvastatine et ne pouvait être inscrit au registre. Apotex alléguait que la demande, relativement au brevet 380, était scandaleuse, frivole ou vexatoire ou constituait autrement un abus de procédure2.

[4]      Le paragraphe 6(5) prévoit ce qui suit :

         Lors de l'instance relative à la demande visée au paragraphe (1), le tribunal peut, sur requête de la seconde personne, rejeter la demande si, selon le cas :         
         a) il estime que les brevets en cause ne sont pas admissibles à l'inscription au registre ou ne sont pas pertinents quant à la forme posologique, la concentration et la voie d'administration de la drogue pour laquelle la seconde personne a déposé une demande d'avis de conformité;         
         b) il conclut qu'elle est inutile, scandaleuse, frivole ou vexatoire ou constitue autrement un abus de procédure.         

[5]      Le juge saisi de la requête d'Apotex l'a rejetée au motif que le libellé clair de la disposition ne permettait pas à une seconde personne de demander qu'une partie seulement de la demande présentée conformément au Règlement soit rejetée. Il a en outre jugé que même si la Cour pouvait ordonner un rejet partiel, il ne s'agissait pas en l'espèce d'un cas clair et manifeste justifiant une telle mesure. L'argument de Merck selon lequel la lovastatine - l'objet du brevet 380 -, même si elle était utilisée comme composé intermédiaire dans la fabrication de la simvastatine, était un médicament au sens de la définition de ce terme énoncée à l'article 2 du Règlement, ne pouvait, selon lui, être qualifié de prétention futile au point de n'avoir aucune chance de succès3.

[6]      Nous sommes d'avis que le juge des requêtes a conclu avec raison que le paragraphe 6(5) ne permet pas à un tribunal de ne rejeter qu'une partie d'une demande d'ordonnance d'interdiction. La partie qui présente la "demande" visée au paragraphe 6(1) cherche à faire interdire au ministre de délivrer à une seconde personne un avis de conformité concernant un médicament. La demande porte sur la question de savoir si l'utilisation, la fabrication, la construction ou la vente du médicament faisant l'objet de la demande d'avis de conformité contreferait l'un quelconque des brevets énumérés dans la liste de brevets. Une demande unique peut par conséquent porter sur plusieurs brevets, ainsi qu'il ressort clairement du libellé du paragraphe 6(5) où il est fait mention du rejet de la demande lorsque "les brevets en cause" ne sont pas admissibles à l'inscription au registre.

[7]      Le paragraphe 6(5) a été promulgué après la décision de notre Cour dans l'affaire David Bull Laboratories (Canada) Inc. c. Pharmacia Inc.4, où il a été jugé que la façon dont il convient de démontrer qu'une demande d'ordonnance d'interdiction est dénuée de fondement consiste à comparaître à l'audition de la demande principale et à y faire valoir ses prétentions. La Cour s'est exprimée ainsi dans cette affaire :

         La présente [requête en radiation] illustre bien le gaspillage de ressources et de temps qu'entraîne l'examen additionnel d'une requête interlocutoire en radiation dans le cadre d'une procédure de contrôle judiciaire qui devrait être sommaire. La présente requête en radiation a donné lieu, inutilement, à une audience devant le juge de première instance et à plus d'une demi-journée devant la Cour d'appel, ainsi qu'au dépôt, devant cette dernière, de plusieurs centaines de pages de documents5.         

[8]      Conformément à l'objectif d'intérêt public voulant que les instances fondées sur le Règlement soient instruites sommairement, le paragraphe 6(5) prévoit maintenant qu'une demande peut être rejetée aux premiers stades de la procédure. Toutefois, il semble évident que ce nouveau recours ne peut faciliter le règlement rapide des instances régies par le Règlement que s'il entraîne le rejet intégral de la demande6. C'est pourquoi le paragraphe 6(5) ne prévoit de rejet que lorsqu'il peut être démontré que tous les brevets en cause sont inadmissibles7.

[9]      Comme c'est le Règlement lui-même qui prévoit ce résultat, Apotex n'est pas fondée à invoquer la compétence implicite de la Cour à diriger son fonctionnement et à ordonner la radiation du brevet 380 de l'avis de requête initial.

[10]      Compte tenu de notre conclusion quant au premier motif, il n'y a pas lieu de statuer sur l'autre motif pour lequel le juge des requêtes a rejeté la requête en radiation.

[11]      Nous sommes d'avis de rejeter l'appel avec dépens.

                             Marc Noël

                                 J.C.A.

Traduction certifiée conforme

Ghislaine Poitras, LL.L.

     COUR D'APPEL FÉDÉRALE

     Date: 19990204

     Dossier: A-215-98

ENTRE :

     APOTEX INC.,

     appelante

     (intimée),

     -ET-

     MERCK FROSST CANADA INC.

     et MERCK & CO. INC.,

     intimées

     (requérantes),

     -et-

     LE MINISTRE DE LA SANTÉ,

     intimé

     (intimé).

     MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

     COUR D'APPEL FÉDÉRALE

     AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :                  A-215-98
INTITULÉ :                      APOTEX INC.,

                                 Appelante (Intimée),

                             et

                         MERCK FROSST CANADA INC.

                         et MERCK & CO., INC.,

                                 Intimées (Requérantes),

                             et

                         LE MINISTRE DE LA SANTÉ,

                                 Intimé (Intimé).

LIEU DE L'AUDIENCE :              Montréal (Québec)
DATE DE L'AUDIENCE :          le 4 février 1999

MOTIFS DU JUGEMENT DU JUGE NOËL (DESJARDINS, DÉCARY, NOËL) PRONONCÉS ORALEMENT À L'AUDIENCE

EN DATE DU                  4 février 1999

COMPARUTIONS :

M. David Scrimger                  pour l'appelante

M. Patrick E. Kierans              pour les intimées

Mme Judith Robinson                  (Merck Frosst Canada Inc. et Merck & Co. Inc.)

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Goodman, Phillips & Vineberg          pour l'appelante

Toronto (Ontario)

Ogilvy, Renault                  pour les intimées

Montréal (Québec)                  (Merck Frosst Canada Inc. et Merck & Co. Inc.)

Morris Rosenberg                  pour l'intimé

Sous-procureur général du Canada          (Le ministre de la Santé)

Ottawa (Ontario)

__________________

     1 Dossier d'appel, onglet 3, à la p. 2.

     2 Dossier d'appel, onglet 4, aux p. 2 et 3.

     3 Ordonnance et motifs de l'ordonnance du juge Pinard, en date du 27 mars 1998, Dossier d'appel, onglet 2.

     4 [1995] 1 C.F. 588; (1995) 58 C.P.R. (3d) 209.

     5 Idem, à la p. 597.

     6      Permettre une décision parcellaire recréerait la situation même que notre Cour s'est efforcée d'éviter dans l'affaire David Bull Laboratories, précitée, note 5.

     7 S'il y en a plus d'un.

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