A-490-96
(T-2077-93)
CORAM :LE JUGE EN CHEF
LE JUGE MARCEAU
LE JUGE DESJARDINS
Entre :
LA COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE,
appelante,
- et -
LE GOUVERNEMENT DES TERRITOIRES DU NORD-OUEST
et L'ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA,
intimés.
Audience tenue à Ottawa (Ontario), le mercredi 5 février 1997.
Jugement rendu à l'audience le mercredi 5 février 1997.
MOTIFS DU JUGEMENT PRONONCÉS PAR : LE JUGE MARCEAU
A-490-96
(T-2077-93)
CORAM :LE JUGE EN CHEF
LE JUGE MARCEAU
LE JUGE DESJARDINS
Entre :
LA COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE,
appelante,
- et -
LE GOUVERNEMENT DES TERRITOIRES DU NORD-OUEST
et L'ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA,
intimés.
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR
(Prononcés à l'audience à Ottawa (Ontario),
le mercredi 5 février 1997)
LE JUGE MARCEAU
La décision de la Section de première instance contestée devant nous aujourd'hui a annulé une mesure prise par la Commission canadienne des droits de la personne (la «Commission») dans le cadre de l'étude d'une plainte déposée en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne (la «Loi») par l'Alliance de la fonction publique du Canada (l'«Alliance») à l'encontre du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest (G.T.N.-O.). Les trois parties intéressées ont déposé des appels (le premier a été enregistré comme appel principal, et les deux autres comme appels incidents). Deux questions sont soulevées dans ces appels : la première est une question de compétence, à savoir si la Loi s'applique au G.T.N.-O.; la deuxième, une question de justice naturelle, consiste à décider s'il y a eu partialité de la part de la Commission dans son examen de la plainte.
Abordant d'abord la question de compétence, nous sommes d'avis qu'elle n'est pas fondée.
Il se peut que l'article 63 de la Loi canadienne sur les droits de la personne n'indique pas avec précision la portée de son application à certaines actions et omissions qui surviennent dans les Territoires du Nord-Ouest. Mais si cet article est lu en rapport avec le paragraphe 66(1) de la Loi, il ne fait aucun doute dans notre esprit que les actions et omissions du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest sont visées par la Loi et, par conséquent, le juge de première instance a conclu à bon droit que la plainte à l'étude relève de la compétence de la Commission au niveau de l'enquête et du règlement.
Toutefois, nous sommes unanimement d'avis que, concernant la deuxième question portant sur la partialité, les appels de la Commission et l'appel incident de l'Alliance doivent être accueillis.
L'existence d'une crainte raisonnable de partialité doit être démontrée d'une façon objective, rationnelle et éclairée. Il est clair qu'un simple soupçon de partialité ne suffit pas; il doit y avoir un fondement factuel certain pour soutenir l'allégation. Il est également clair que, conformément aux décisions de la Cour suprême du Canada depuis Newfoundland Telephone[1], portant sur la partialité des offices fédéraux, il doit y avoir un continuum dans le degré de crainte fondé sur la nature des fonctions de l'office fédéral. Ce continuum s'échelonne de la norme moins stricte de «l'esprit fermé» applicable aux tribunaux administratifs traitant de questions de politique ou agissant à l'étape de l'enquête, au critère strict de la «crainte raisonnable» applicable aux fonctions d'arbitrage des offices fédéraux.
Considérant la procédure en cause, la nature purement administrative des mesures que la Commission peut prendre en recevant un rapport d'enquête, de même que les observations des parties; considérant que ces mesures, même si elles sont appelées des décisions, abstraction faite de celle qui rejette la plainte, sont strictement préliminaires et ne portent aucunement atteinte à la validité de la plainte ni aux droits des parties, situation qui est particulièrement frappante quand la seule chose qui est faite, comme en l'espèce, est de transmettre la plainte à l'attention du conciliateur qui s'efforcera officieusement de la régler; considérant également que les critiques formulées afin de démontrer qu'il y a eu partialité ne sont adressées qu'aux enquêteurs, nous croyons que la norme appropriée en l'espèce est le critère moins strict de «l'esprit fermé» qui est à l'opposé du critère strict de la «crainte raisonnable». Nous sommes d'accord, à cet égard, avec la conclusion à laquelle en est arrivée la Cour d'appel de la Saskatchewan dans Reimer[2].
Il ne fait aucun doute dans notre esprit que si le juge de première instance avait réellement appliqué ce que nous jugeons comme étant le critère approprié avant de parvenir à sa conclusion, elle aurait rejeté les allégations de partialité relativement à l'enquêteur Dallas, de façon aussi claire qu'elle l'a fait, en vertu du critère strict, au sujet de l'enquêteur Sadler. Il n'y a pas un soupçon de preuve au dossier qui laisse entendre que Dallas avait préjugé de la question dont elle était saisie, ni qu'elle l'a examinée avec un esprit fermé. Le simple fait qu'elle ait adhéré volontairement à l'Alliance, qui par ailleurs défend la parité salariale, n'est certainement pas une raison, à notre avis, pour qu'une personne raisonnable croit qu'elle n'a pas fait preuve de l'objectivité nécessaire pour évaluer si la parité salariale existait au G.T.N.-O. ou qu'elle a dû faire un effort spécial pour conclure que cette parité salariale n'existait pas.
L'appel de la Commission et l'appel incident de l'Alliance sur la question de la partialité sont donc accueillis avec dépens, et la décision de la Section de première instance d'annuler la décision de la Commission de renvoyer la plainte à la conciliation est infirmée.
L'appel incident du G.T.N.-O. est rejeté avec dépens.
«Louis Marceau»
Juge
Traduction certifiée conforme
François Blais, LL.L.
COUR D'APPEL FÉDÉRALE
A-490-96
(T-2077-93)
E n t r e :
LA COMMISSION CANADIENNE
DES DROITS DE LA PERSONNE,
appelante,
- et -
LE GOUVERNEMENT DES TERRITOIRES
DU NORD-OUEST
et L'ALLIANCE DE LA FONCTION
PUBLIQUE DU CANADA,
intimés.
MOTIFS DU JUGEMENT
DE LA COUR
COUR D'APPEL FÉDÉRALE
AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER
N° DU GREFFE :A-490-96
INTITULÉ DE LA CAUSE :La Commission canadienne des droits de la personne c.
Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et autre
LIEU DE L'AUDIENCE :Ottawa (Ontario)
DATE DE L'AUDIENCE :le 5 février 1997
MOTIFS DU JUGEMENT :(Le juge en chef, le juge Marceau, le juge Desjardins)
PRONONCÉS À L'AUDIENCE PAR :le juge Marceau
ONT COMPARU :
M. René Duvalpour l'appelante
M. Russel Jurianszpour le gouvernement des
M. Robert KwinterTerritoires du Nord-Ouest
Mme Cayley Thomas
M. Andrew Ravenpour l'Alliance de la fonction
M. David Yazbeckpublique du Canada
PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :
Commission canadienne des droits de la personnepour l'appelante
Ottawa (Ontario)
Russel Juriansz Barristerspour le gouvernement des
Toronto (Ontario)Territoires du Nord-Ouest
Raven, Jewitt & Allenpour l'Alliance de la fonction
Ottawa (Ontario)publique du Canada