Date : 20020131
Dossier : A-546-00
HALIFAX (NOUVELLE-ÉCOSSE), LE 31 JANVIER 2002
CORAM : LE JUGE DESJARDINS
ENTRE :
LA COMMISSION DE L'ASSURANCE-EMPLOI DU CANADA
et LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
appelants
et
BRIAN BENTLEY
intimé
JUGEMENT
Cet appel est rejeté, avec dépens.
« Alice Desjardins »
Juge
Traduction certifiée conforme
Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.
Date : 20020131
Dossier : A-546-00
Référence neutre : 2002 CAF 49
CORAM : LE JUGE DESJARDINS
ENTRE :
LA COMMISSION DE L'ASSURANCE-EMPLOI DU CANADA
et LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
APPELANTS
et
BRIAN BENTLEY
INTIMÉ
Audience tenue à Halifax (Nouvelle-Écosse), le 31 janvier 2002.
Jugement prononcé à l'audience à Halifax (Nouvelle-Écosse), le 31 janvier 2002.
MOTIFS DU JUGEMENT : LE JUGE ROTHSTEIN
Date : 20020131
Dossier : A-546-00
Référence neutre : 2002 CAF 49
CORAM : LE JUGE DESJARDINS
ENTRE :
LA COMMISSION DE L'ASSURANCE-EMPLOI DU CANADA
et LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
APPELANTS
et
BRIAN BENTLEY
INTIMÉ
MOTIFS DU JUGEMENT
(prononcés à l'audience à Halifax (Nouvelle-Écosse),
le 31 janvier 2002)
[1] Cet appel, dirigé contre un jugement du juge Dubé, de la Section de première instance, concerne l'interprétation du paragraphe 35(4) de la Loi sur l'assurance-chômage, L.R.C. (1985), ch. U-1, et ses modifications. Le paragraphe 35(4) est ainsi rédigé :
(4) Le recouvrement des créances visées au présent article se prescrit par soixante-douze mois à compter de la date où elles ont pris naissance. |
(4) No amount due as a debt to Her Majesty under this section may be recovered after seventy-two months from the date on which the liability arose. |
[2] Le juge Dubé a estimé que le paragraphe 35(4) avait pour effet d'empêcher la Commission de l'assurance-chômage de recouvrer de quelque façon des trop-perçus et pénalités en vertu de la Loi sur l'assurance-chômage plus de soixante-douze mois après que les trop-perçus et pénalités ont pris naissance.
[3] L'avocat de la Commission admet que le paragraphe 35(4) empêche le recouvrement au moyen des procédures de recouvrement prévues par la Loi sur l'assurance-chômage. Cependant, il dit que ce paragraphe ne fait pas obstacle à des procédures de recouvrement si la Commission enregistre auprès de la Cour fédérale, en vertu du paragraphe 94(1) de la Loi sur l'assurance-chômage, un certificat pour la somme due, ou si elle tente de recouvrer la créance par voie de compensation selon l'article 155 de la Loi sur la gestion des finances publiques, L.R.C. (1985), ch. F-11, et ses modifications.
[4] L'avocat de la Commission voudrait que la Cour adopte pour le paragraphe 35(4) une interprétation contextuelle et téléologique. Il dit aussi que, d'un point de vue pratique, empêcher tout recouvrement après soixante-douze mois forcera la Commission à se montrer plus ferme qu'auparavant dans ses activités de recouvrement, ce qui va à l'encontre de la protection sociale conférée par la législation sur l'assurance-emploi.
[5] Nous reconnaissons avec le ministre que les lois doivent être interprétées selon leur contexte, ou plus exactement selon le « principe moderne d'interprétation » . Voir E.A. Driedger, Construction of Statutes (2e éd., 1983), à la page 87. Cependant, la règle moderne d'interprétation n'autorise pas la Cour à faire dire à la loi ce qu'elle ne dit pas. La Cour doit prendre la loi telle qu'elle est.
[6] La Commission a soutenu que, si un certificat est enregistré auprès de la Cour fédérale, alors les délais de prescription qui devraient être appliqués sont ceux des procédures de recouvrement prévues par les règles de la Cour fédérale, et, selon elle, le paragraphe 35(4) ne peut avoir pour effet de rendre inapplicables les délais de prescription prévus par lesdites règles.
[7] Cependant, le texte du paragraphe 35(4) n'énonce aucune réserve. Lu isolément ou en même temps que le paragraphe 94(1) de la Loi, il ne dit pas que la Commission peut procéder au recouvrement après soixante-douze mois si le mode de recouvrement consiste à enregistrer un certificat auprès de la Cour fédérale. On ne voit non plus dans le paragraphe 35(4) aucune indication qu'il ne s'applique pas au recouvrement par voie de compensation selon l'article 155 de la Loi sur la gestion des finances publiques.
[8] Nous partageons l'avis du juge Dubé selon lequel, si l'argument de la Commission était accepté, le paragraphe 35(4) serait alors dépourvu de signification. La Commission pourrait simplement tourner le délai de prescription de soixante-douze mois énoncé au paragraphe 35(4) en enregistrant un certificat auprès de la Cour fédérale ou en prenant des mesures de recouvrement selon la Loi sur la gestion des finances publiques.
[9] L'argument du ministre est d'ailleurs illogique sur le plan interne. Dans tous les cas, c'est la Commission qui prend des mesures pour recouvrer sa créance, qu'elle se serve des dispositions de recouvrement prévues par la Loi sur l'assurance-chômage, ou qu'elle procède plutôt par enregistrement d'un certificat auprès de la Cour fédérale ou par compensation selon la Loi sur la gestion des finances publiques. Le texte du paragraphe 35(4) n'autorise tout simplement pas une interprétation de ce paragraphe de telle sorte qu'il s'applique à certains moyens que la Commission pourrait prendre, mais non à d'autres.
[10] Nous remarquons que le paragraphe 35(4) n'énonce pas le délai de prescription comme le font en général les lois provinciales de même nature, ou comme le fait l'article 39 de la Loi sur la Cour fédérale. La formule habituelle en la matière fait obstacle à l'introduction de l'instance ou à l'application des mesures de recouvrement qu'autoriserait la cause d'action. Le paragraphe 35(4) eût-il été formulé d'une manière qui empêche la Commission d'introduire une procédure de recouvrement après soixante-douze mois, la situation eût été alors entièrement différente, tout au moins pour une procédure de recouvrement introduite devant la Cour fédérale. Cependant, le paragraphe 35(4) empêche davantage que l'introduction d'une procédure de recouvrement, il empêche le recouvrement lui-même.
[11] Il appartient au législateur de modifier le paragraphe 35(4) s'il souhaite donner à la Commission le pouvoir de recouvrer une créance plus de soixante-douze mois après la date à laquelle elle a pris naissance.
[12] L'appel sera rejeté, avec dépens.
« Marshall Rothstein »
Juge
Traduction certifiée conforme
Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.
COUR D'APPEL FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : A-546-00
INTITULÉ : Commission de l'assurance-emploi du Canada et al.
c. Brian Bentley
LIEU DE L'AUDIENCE : Halifax (Nouvelle-Écosse)
DATE DE L'AUDIENCE : le 31 janvier 2002
MOTIFS DU JUGEMENT (les juges Desjardins, Rothstein et Noël)
DE LA COUR :
PRONONCÉS À L'AUDIENCE PAR : le juge Rothstein
ONT COMPARU :
Michael Donovan POUR LES APPELANTS
Kathleen McManus
Donald Murray POUR L'INTIMÉ
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Morris Rosenberg POUR LES APPELANTS
Sous-procureur général du Canada
Ottawa (Ontario)
Pink, Murray, Graham POUR L'INTIMÉ
Halifax (Nouvelle-Écosse)