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                                                                                                                                 Date : 20040423

                                                                                                                               Dossier : A-36-03

                                                                                                                  Référence : 2004 CAF 32

CORAM :      LE JUGE LÉTOURNEAU

LE JUGE NADON

LE JUGE PELLETIER

ENTRE :

                                                        SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                                                                                            appelante

                                                                             et

                                                         GEORGE AGAZARIAN

                                                                                                                                                  intimé

                    Audience tenue à Vancouver (Colombie-Britannique), le 18 décembre 2003.

                                      Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 23 avril 2004.

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                              LE JUGE PELLETIER

Y A SOUSCRIT :                                                                                                   LE JUGE NADON

MOTIFS CONCOURANTS :                                                                    LE JUGE LÉTOURNEAU


Date : 20040423

Dossier : A-36-03

Référence : 2004 CAF 32

CORAM :      LE JUGE LÉTOURNEAU

LE JUGE NADON

LE JUGE PELLETIER

ENTRE :

                                                        SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                                                                                            appelante

                                                                             et

                                                         GEORGE AGAZARIAN

                                                                                                                                                  intimé

                                                       MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE PELLETIER

[1]                Il est interjeté appel du jugement rendu par le juge Bell, de la Cour canadienne de l'impôt, qui concernait un point de droit soulevé en application de l'article 58 des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale). La question que les parties avaient soumise à la Cour de l'impôt était la suivante :

Le ministre du Revenu national était-il fondé à établir une nouvelle cotisation pour l'année d'imposition 1987 de l'appelant, en application du sous-alinéa 152(4)b)(i) de la Loi de l'impôt sur le revenu, après le 5 octobre 1991, fin de la période normale de nouvelle cotisation de l'appelant pour l'année d'imposition 1987?


[2]                La décision a été rendue sur le fondement d'un exposé conjoint des faits, dont les extraits pertinents sont ci-dessous reproduits :

[traduction]

ANNÉE D'IMPOSITION 1987

1. Le 30 avril 1988 ou avant, l'appelant a produit, pour son année d'imposition 1987, la déclaration de revenus (la « déclaration d'impôt de 1987 » ) exigée par l'article 150.

2. Par avis de cotisation en date du 5 octobre 1988, le ministre du Revenu national (le « ministre » ) calculait les impôts de l'appelant pour l'année d'imposition 1987. L'avis de cotisation est annexé comme pièce « A » .

3. Dans sa déclaration de revenus pour l'année d'imposition 1988 (la « déclaration d'impôt de 1988 » ), l'appelant incluait un formulaire intitulé « Demande de report de perte en amont » , dans laquelle il demandait qu'une perte, autre qu'en capital, de 1 747 617 $ (la « perte de société de 1988 » ), représentant sa part d'une perte subie par la société Grand Bell Property, Ltd., soit appliquée comme déduction (le « report de perte en amont de 1988 » ) pour son année d'imposition 1987. Le formulaire de demande de report de perte en amont est annexé comme pièce « B » .

4. Par avis de nouvelle cotisation en date du 11 juillet 1989, le ministre calculait de nouveau le revenu imposable de l'appelant pour l'année d'imposition 1987, en réponse à une opposition ou une demande d'ajustement que l'appelant avait produite. Le ministre appliquait au revenu imposable de l'appelant pour l'année d'imposition 1987 des pertes, autres qu'en capital, reportées en aval des années d'imposition 1984, 1985 et 1986 de l'appelant. Cet avis de nouvelle cotisation est annexé comme pièce « C » .

5. Par lettre datée du 8 septembre 1989, un représentant du ministère du Revenu national (aujourd'hui l'Agence des douanes et du revenu du Canada) (l'ADRC) accusait réception de la déclaration d'impôt de 1988 et informait l'appelant que la perte de société de 1988 serait revue avant que ne soit traitée la déclaration d'impôt de 1988; en conséquence, la déclaration d'impôt de 1988 serait mise en suspens jusqu'à l'achèvement de l'examen entrepris par l'ADRC. La lettre en question est annexée comme pièce « D » .

6. Par lettre datée du 6 février 1990, un représentant de l'ADRC informait l'appelant que la déclaration d'impôt de 1988 serait traitée telle qu'elle avait été produite. La lettre indiquait aussi que l'examen de la perte de société de 1988 se poursuivait et que l'appelant serait informé des conclusions de l'ADRC avant la fin de la vérification. La lettre en question est annexée comme pièce « E » .


7. Par avis de nouvelle cotisation en date du 22 août 1990 (la « deuxième nouvelle cotisation de 1987 » ), le ministre calculait de nouveau les impôts de l'appelant pour son année d'imposition 1987 d'une manière qui autorisait la déduction du report de perte en amont de 1988, dans la mesure du revenu imposable de l'appelant pour l'année d'imposition 1987. La deuxième nouvelle cotisation de 1987 est annexée comme pièce « F » .

8. La « période normale de nouvelle cotisation » , au sens du paragraphe 152(3.1), pour ce qui concerne l'année d'imposition 1987 de l'appelant, a pris fin le 5 octobre 1991.

9. L'appelant n'a produit aucun autre formulaire officiel modifiant la déclaration d'impôt de 1987 pour réclamer d'autres déductions de son revenu pour son année d'imposition 1987.

10. Par avis de nouvelle cotisation en date du 1er avril 1993 (la « troisième nouvelle cotisation de 1987 » ), le ministre prétendait calculer de nouveau les obligations fiscales de l'appelant pour l'année d'imposition 1987, en refusant de déduire du revenu imposable de l'appelant pour l'année d'imposition 1987 le report de perte en amont de 1988. La troisième nouvelle cotisation de 1987 est annexée comme pièce « G » .

11. Le 7 mai 1993, l'appelant s'opposait à la troisième nouvelle cotisation de 1987 et signifiait dûment des avis d'opposition, en conformité avec le paragraphe 165(1). Les motifs de l'opposition était notamment que la troisième nouvelle cotisation de 1987 avait été établie après l'expiration de la période normale de nouvelle cotisation pour l'année et que, en conséquence, elle était nulle.

12. Par avis de confirmation en date du 20 avril 1995, le ministre confirmait la troisième nouvelle cotisation de 1987. L'appelant déposait un avis d'appel auprès de la Cour d'appel fédérale le 18 juillet 1995 à l'égard de la troisième nouvelle cotisation de 1987.

                                                                    [. . .]

[Pièces non annexées]

[3]                Les parties expriment des points de vue différents sur ce que le juge des requêtes a décidé. Selon l'appelante, le juge a décidé que :

a) le sous-alinéa 152(4)b)(i) de la Loi de l'impôt sur le revenu, L.R.C. 1985 (5e suppl.) ch. 1, et modifications, ... restreint le ministre à la délivrance d'une seule nouvelle cotisation pour une demande de report de perte en amont; et


b) une nouvelle cotisation ne peut être établie selon l'alinéa 152(6)c) et, en conséquence, la nouvelle cotisation contestée était la deuxième nouvelle cotisation établie conformément au paragraphe 152(4).

[4]                L'intimé dit que c'est là une mauvaise interprétation de la décision du juge des requêtes :

[traduction] a) Le juge des requêtes n'a pas dit que le sous-alinéa 152(4)b)(i) restreignait le ministre à la délivrance d'une seule nouvelle cotisation pour une demande de report de perte en amont. Le juge des requêtes a plutôt décidé que le sous-alinéa 152(4)b)(i) restreignait le ministre à la délivrance d'une seule nouvelle cotisation en réponse à la demande d'un contribuable selon le paragraphe 152(6), après qu'avait expiré la période normale de nouvelle cotisation pour l'année.

b) Le juge des requêtes n'a pas dit qu'une nouvelle cotisation ne pouvait être établie selon l'alinéa 152(6)c) et que, en conséquence, la troisième nouvelle cotisation de 1987 [la nouvelle cotisation contestée] était la deuxième nouvelle cotisation établie en conformité avec le paragraphe 152(4). Le juge des requêtes a dit plutôt que la troisième nouvelle cotisation de 1987 n'était pas établie selon l'alinéa 152(6)c) parce que le ministre avait rempli ses obligations selon la loi lorsqu'il avait établi la deuxième nouvelle cotisation de 1987, et le ministre était empêché par le paragraphe 152(4) d'établir une autre nouvelle cotisation.

[5]                Je suis arrivé à la conclusion que, quelle que soit la manière dont est interprétée la décision du juge des requêtes, la manière que préconise l'appelante ou celle que préconise l'intimé, la décision ne saurait subsister, pour les motifs suivants.

Quel texte législatif est applicable?


[6]                Dans les mémoires et les arguments qu'elle nous a présentés, l'appelante se demandait si le texte législatif applicable était la Loi de l'impôt sur le revenu telle qu'elle existait en 1993, année au cours de laquelle avait été établie la nouvelle cotisation contestée, ou bien la Loi de l'impôt sur le revenu telle qu'elle existait après les modifications adoptées en 1998, qui sont entrées en vigueur après le 27 avril 1989. Les parties se sont accordées pour dire que, quelle que soit la réponse, l'effet était le même.

[7]                Le paragraphe 152(4) (tel qu'il était formulé alors) a été remplacé par la version actuelle de cette disposition, en conséquence du paragraphe 181(4) de la Loi de 1997 modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu, L.C. 1998, ch. 19, ainsi formulé : « Le paragraphe 152(4) de la même loi est remplacé par ce qui suit : ... » Suivait la version actuelle du paragraphe 152(4). La date d'application de la modification est indiquée au paragraphe 181(8) dans les termes suivants : « Les paragraphes (3) à (5) s'appliquent à compter du 27 avril 1989 » , puis apparaît ensuite une liste de réserves qui n'intéressent pas le présent débat.


[8]                Quel effet doit être donné à cette directive concernant l'application temporelle de la modification? Je relève en premier lieu que la date d'application est une date précise et non une référence à une année d'imposition. Si la modification a pour effet de modifier le droit, l'emploi d'une date précise d'application soulève la possibilité d'une différence de traitement des contribuables à l'intérieur d'une année d'imposition donnée. Par exemple, le pouvoir du ministre de calculer ou de recalculer l'impôt d'un contribuable pour l'année d'imposition 1987 dépendrait de la date à laquelle le ministre a calculé ou recalculé l'impôt du contribuable. Puisque le système fiscal repose sur l'équité horizontale et verticale, ce genre de traitement inégal est improbable par nature. Voir Krishna, The Fundamentals of Canadian Income Tax (7e édition) Carswell, Toronto, 2002, aux pages 12-13.

[9]                L'autre possibilité est que la modification n'a pas pour effet de changer le droit, de telle sorte que la date d'application ne présente qu'un intérêt administratif. Il n'existe aucune présomption qu'une modification a pour objet de modifier le droit. La Loi d'interprétation, L.R.C. 1985, ch. I-21, dit même le contraire. Son alinéa 44f) est ainsi formulé :


44. En cas d'abrogation et de remplacement, les règles suivantes s'appliquent :

                              . . .

44. Where an enactment, in this section called the "former enactment", is repealed and another enactment, in this section called the "new enactment", is substituted therefor,

                            [. . .]

f) sauf dans la mesure où les deux textes diffèrent au fond, le nouveau texte n'est pas réputé de droit nouveau, sa teneur étant censée constituer une refonte et une clarification des règles de droit du texte antérieur;

(f) except to the extent that the provisions of the new enactment are not in substance the same as those of the former enactment, the new enactment shall not be held to operate as new law, but shall be construed and have effect as a consolidation and as declaratory of the law as contained in the former enactment;



[10]            Devant nous, les parties ont reconnu que la version actuelle et la version ancienne du paragraphe 152(4) avait le même effet. Nonobstant cette communauté de vues, l'appelante a exprimé l'avis que la version actuelle s'appliquait, compte tenu de la date d'application prévue dans le texte modificateur. Nous ne sommes pas liés en droit par la communauté de vues des parties, mais la conclusion selon laquelle les deux versions du texte disent la même chose s'accorde avec l'emploi d'une date précise d'application (par opposition à la mention d'une année d'imposition donnée). Je me propose donc d'examiner les deux dispositions pour voir si en réalité elles disent bien la même chose. Dans l'affirmative, la question de savoir laquelle des deux versions du texte est applicable devient une question uniquement administrative.

Analyse

[11]            Je commence par examiner l'ancien texte législatif. Je crois qu'il est utile, avant de le reproduire, de dire quelques mots sur sa structure. Nous avons affaire à deux notions, le pouvoir du ministre de calculer et de recalculer le revenu du contribuable, et les délais à l'intérieur desquels le ministre peut exercer ce pouvoir. Le paragraphe 152(1) confère au ministre le pouvoir de calculer le revenu du contribuable après avoir reçu la déclaration du contribuable, et le paragraphe 152(6) confère au ministre le pouvoir de recalculer le revenu du contribuable dans certains cas, dont l'un est la demande de nouveau calcul faite par le contribuable afin d'obtenir un report de perte vers une année antérieure d'imposition.


152.(1) Cotisation.- Le Ministre doit, avec toute la diligence possible, examiner la déclaration de revenu d'un contribuable pour une année d'imposition, fixer l'impôt pour l'année, l'intérêt et les pénalités payables, s'il en est, et déterminer

152.(1) Assessment.- The Minister shall, with all due dispatch, examine a taxpayer's return of income for a taxation year, assess the tax for the year, the interest and penalties, if any, payable and determine

a) le montant du remboursement, s'il en est, auquel il a droit en vertu des articles 129, 131, 132 ou 133, pour l'année, ou

(a) the amount of refund, if any, to which the taxpayer may be entitled by virtue of section 129, 131, 132 or 133 for the year, or


b) le montant d'impôt réputé en application des paragraphes 120(2), 120.1(4), 122.5(3), 127.1(1), 144(9) ou 210.(3) ou (4) avoir été versé au titre de l'impôt du contribuable en vertu de la présente partie pour l'année ou réputé par le paragraphe 119(2) être un paiement en trop.

                              . . .

(b) the amount of tax, if any, deemed by subsection 119(2), 120(2), 120.1(4), 122.2(1), 127.1(1), 127.2(2), 144(9), 210.2(3) or (4) to have been paid on account of his tax under this Part for the year.

                [. . .]152.(6) Nouvelle cotisation.- Lorsqu'un contribuable a produit la déclaration de revenu prescrite par l'article 150 pour une année d'imposition et que, par la suite, une somme est réclamée pour l'année par lui ou pour son compte à titre de

152.(6) Reassessment.- Where a taxpayer has filed for a particular taxation year the return of income required by section 150 and an amount is subsequently claimed by him or on his behalf for the year as

a) déduction, en application de l'alinéa (3)e), résultant de son décès au cours d'une année d'imposition subséquente ayant entraîné l'application de l'article 71 relativement à une perte en capital déductible pour l'année,

(a) a deduction under paragraph 3(e), by virtue of his death in a subsequent taxation year and the consequent application of section 71 in respect of an allowable capital loss for the year,

b) déduction d'un montant en vertu de l'article 41 relativement à sa perte relative à des biens personnels désignés pour une année d'imposition subséquente,

(b) a deduction under section 41 in respect of his listed-personal-property loss for a subsequent taxation year,

b.1) déduction, en application de l'alinéa 60i), relativement à une prime, au sens du paragraphe 146(1), versée au cours d'une année d'imposition subséquente dans le cadre d'un régime enregistré d'épargne-retraite et déductible en application du paragraphe 146(6.1),

(b.1) a deduction under paragraph 60(i) in respect of a premium (within the meaning assigned by subsection 146(1)) paid in a subsequent taxation year under a registered retirement savings plan where the premium is deductible by reason of subsection 146(6.1),

c) déduction, en application de l'article 118.1, relativement à un don fait au cours d'une année d'imposition subséquente ou, en application de l'article 111, relativement à une perte subie pour une année d'imposition subséquente,

(c) a deduction under section 118.1 in respect of a gift made in a subsequent taxation year or under section 111 in respect of a loss for a subsequent taxation year,

c.1) déduction, en application du paragraphe 126(2), relativement à la fraction inutilisée du crédit pour impôt étranger (au sens donné par l'alinéa 126(7)e)) pour une année d'imposition subséquente,

(c.1) a deduction under subsection 126(2) in respect of an unused foreign tax credit (within the meaning assigned by paragraph 126(7)(e)) for a subsequent taxation year,

d) déduction, en application du paragraphe 127(5), relativement à des biens acquis ou des dépenses faites dans une année d'imposition subséquente,

(d) a deduction under subsection 127(5) in respect of property acquired or an expenditure made in a subsequent taxation year,

e) déduction, en application de l'article 125.2, au titre d'un crédit d'impôt de la partie VI inutilisé - au sens du paragraphe 125.2(3) - pour une année d'imposition ultérieure,

(e) a deduction under subsection 125.2 in respect of an unused Part VI tax credit (within the meaning assigned by subsection 125.2(3)) for a subsequent taxation year,

f) déduction, en application de l'article 125.3, au titre d'un crédit d'impôt de la partie I.3 inutilisé, au sens du paragraphe 125.3(3), pour une année d'imposition ultérieure, ou

(f) a deduction under section 125.3 in respect of an unused Part I.3 tax credit (within the meaning assigned by subsection 125.3(3) for a subsequent taxation year, or

g) [Abrogé par 1988, chap. 55, art. 136(6).]

(g) [Repealed.]


h) déduction à cause d'un choix pour une année d'imposition subséquente effectué par son représentant légal en vertu de l'alinéa 164(6)c) ou d),

en produisant auprès du Ministre, au plus tard le jour où le contribuable est tenu, ou le serait s'il était tenu de payer de l'impôt en vertu de la présente Partie pour cette année d'imposition subséquente, de produire en vertu de l'article 150 une déclaration de revenu pour cette année d'imposition subséquente, une formule prescrite modifiant la déclaration, le Ministre doit fixer de nouveau l'impôt du contribuable pour toute année d'imposition pertinente (autre qu'une année d'imposition antérieure à l'année donnée) afin de tenir compte de la déduction réclamée.

(h) a deduction by virtue of an election for a subsequent taxation year under paragraph 164(6)(c) or (d) by his legal representative,

by filing with the Minister, on or before the day on or before which the taxpayer is, or would be if a tax under this Part were payable by him for that subsequent taxation year, required by section 150 to file a return of income for that subsequent taxation year, a prescribed form amending the return, the Minister shall reassess the taxpayer's tax for any relevant taxation year (other than a taxation year preceding the particular taxation year) in order to take into account the deduction claimed.


[12]            Le pouvoir de calculer et de recalculer le revenu du contribuable n'est pas absolument sans limite. Il y a des délais à l'intérieur desquels ce pouvoir doit être exercé, et il y a des limites à l'objet qui peut être soumis à un nouveau calcul. Ces deux genres de limites se trouvent dans le paragraphe 152(4) tel qu'il existait au moment où les nouvelles cotisations en cause ont été établies.


152.(4) Cotisation.- Sous réserve du paragraphe (5), le ministre peut, à un moment donné, fixer l'impôt pour une année d'imposition, ainsi que les intérêts ou pénalités payables en vertu de la présente partie par un contribuable, ou donner avis par écrit, à toute personne qui a produit une déclaration de revenu pour une année d'imposition, qu'aucun impôt n'est payable pour l'année, et peut, selon les circonstances, établir des nouvelles cotisations, des cotisations supplémentaires ou des cotisations d'impôt, d'intérêts ou de pénalités en vertu de la présente partie :

152.(4) Assessment.- Subject to subsection (5), the Minister may at any time assess tax for a taxation year, interest or penalties, if any, payable under this Part by a taxpayer or notify in writing any person by whom a return of income for a taxation year has been filed that no tax is payable for the taxation year, and may

a) à un moment donné, si le contribuable ou la personne produisant la déclaration :

(a) at any time, if the taxpayer or person filing the return


(i) soit a fait une présentation erronée des faits, par négligence, inattention ou omission volontaire, ou a commis quelque fraude en produisant la déclaration ou en fournissant quelque renseignement sous le régime de la présente loi,

(i) has made any misrepresentation that is attributable to neglect, carelessness or wilful default or has committed any fraud in filing the return or in supplying any information under this Act, or(ii) soit a adressé au ministre une renonciation, selon le formulaire prescrit, au cours de la période normale de nouvelle cotisation applicable au contribuable pour l'année;

(ii) has filed with the Minister a waiver in prescribed form within the normal reassessment period for the taxpayer in respect of the year,

b) avant le jour qui est trois ans après la fin de la période normale de nouvelle cotisation applicable au contribuable pour l'année, lorsque, selon le cas :

(b) before the day that is 3 years after the expiration of the normal reassessment period for the taxpayer in respect of the year, if

(i) une cotisation ou une nouvelle cotisation de l'impôt du contribuable a été exigée conformément au paragraphe (6), ou l'aurait été si le contribuable avait déduit un montant en produisant le formulaire prescrit visé à ce paragraphe au plus tard le jour qui y est mentionné,

(i) an assessment or reassessment of the tax of the taxpayer was required pursuant to subsection (6) or would have been required if the taxpayer had claimed an amount by filing the prescribed form referred to in that subsection on or before the day referred to therein,

(ii) il y a lieu, par suite de l'établissement de la cotisation ou de la nouvelle cotisation de l'impôt d'un autre contribuable conformément au présent alinéa ou au paragraphe (6), d'établir une cotisation ou une nouvelle cotisation de l'impôt du contribuable pour toute année d'imposition pertinente,

(ii) there is reason, as a consequence of the assessment or reassessment of another taxpayer's tax pursuant to this paragraph or subsection (6), to assess or reassess the taxpayer's tax for any relevant taxation year,

(iii) il y a lieu, par suite d'une opération à laquelle le contribuable et une personne non résidante avec laquelle il a un lien de dépendance sont parties, d'établir une cotisation ou une nouvelle cotisation de l'impôt du contribuable pour toute année d'imposition pertinente,

(iii) there is reason, as a consequence of a transaction involving the taxpayer and a non-resident person with whom the taxpayer was not dealing at arm's length, to assess or reassess the taxpayer's tax for any relevant taxation year, or

(iv) il y a lieu, par suite d'un paiement supplémentaire ou d'un remboursement d'impôt sur le revenu ou sur les bénéfices au gouvernement d'un autre pays que le Canada ou par suite d'un tel paiement ou d'un tel remboursement par ce gouvernement, d'établir une cotisation ou une nouvelle cotisation de l'impôt du contribuable pour toute année d'imposition pertinente;

(iv) there is reason, as a consequence of an additional payment or reimbursement of any income or profits tax to or by the government of a country other than Canada, to assess or reassess the taxpayer's tax for any relevant taxation year, and


c) au cours de la période normale de nouvelle cotisation applicable au contribuable pour l'année, dans les autres cas; toutefois, une nouvelle cotisation, une cotisation supplémentaire ou une cotisation peut être établie en application de l'alinéa b) après la période normale de nouvelle cotisation applicable au contribuable pour l'année seulement s'il est raisonnable de la considérer comme se rapportant à la cotisation ou nouvelle cotisation visée au sous-alinéa b)(i) ou (ii), à l'opération visée au sous-alinéa b)(iii) ou au paiement supplémentaire ou remboursement visé au sous-alinéa b)(iv).

(c) within the normal reassessment period for the taxpayer in respect of the year, in any other case,

reassess or make additional assessments, or assess tax, interest or penalties under this Part, as the circumstances require, except that a reassessment, an additional assessment or an assessment may be made under paragraph (b) after the normal reassessment period for the taxpayer in respect of the year only to the extent that it may reasonably be regarded as relating to

(d) the assessment or reassessment referred to in subparagraph (b)(i) or (ii),

(e) the transaction referred to in subparagraph (b)(iii), or(f) the additional payment or reimbursement referred to in subparagraph (b)(iv).


[13]            On relève que, même si le paragraphe 152(1) confère au ministre le pouvoir (et l'obligation) de calculer le revenu du contribuable, et de le faire avec toute la diligence possible, cette disposition ne prévoit aucun délai à l'intérieur duquel le ministre doit exercer ce pouvoir. De même, bien que le paragraphe 152(6) confère au ministre l'obligation de recalculer le revenu du contribuable pour tenir compte de la demande de report de perte en amont faite par le contribuable, cette disposition ne prévoit aucun délai à l'intérieur duquel ce nouveau calcul doit être fait. Pour savoir ce que sont les délais en question, il faut s'en rapporter au paragraphe 152(4).

[14]            Le paragraphe 152(4) parle, dans son introduction, de l'absence de tout délai à l'intérieur duquel le ministre doit exercer au départ son pouvoir d'établir la responsabilité fiscale du contribuable. Le ministre peut « à un moment donné » (n'importe quand) fixer l'impôt pour une année d'imposition. Puisque la cotisation initiale est en général déclenchée par le dépôt de la déclaration de revenus du contribuable, et puisque le moment du dépôt dépend entièrement de la volonté du contribuable, le ministre doit être libre de calculer l'impôt n'importe quand, sans égard à l'année au cours de laquelle le revenu a été gagné (et au cours de laquelle la responsabilité fiscale a pris naissance).


[15]            Le paragraphe 152(4) parle aussi du pouvoir du ministre d'établir de nouvelles cotisations. Les mots « et peut » , qui apparaissent quelques lignes avant l'alinéa a), se rapportent aux mots « établir des nouvelles cotisations, des cotisations supplémentaires... » , qui précèdent immédiatement l'alinéa a). Les alinéas a), b) et c) précisent les délais à l'intérieur desquels certaines nouvelles cotisations peuvent être établies. L'alinéa a) dit que de nouvelles cotisations peuvent être établies « à un moment donné » si le contribuable a renoncé au bénéfice de la période normale de nouvelle cotisation, ou s'il y a eu fraude. L'alinéa b) prévoit que les nouvelles cotisations se rapportant à divers pouvoirs particuliers d'établir de nouvelles cotisations doivent avoir lieu dans les trois ans qui suivent la période normale de nouvelle cotisation (la « période élargie de cotisation » ) et l'alinéa c) prévoit que, dans tout autre cas, le pouvoir d'établir de nouvelles cotisations doit être exercé au cours de la période normale de nouvelle cotisation.

[16]            Le pouvoir d'établir de nouvelles cotisations à l'intérieur de la période élargie de cotisation selon ce que prévoit l'alinéa 152(4)b) est ensuite réduit dans la dernière partie du paragraphe 152(4). Lorsqu'une nouvelle cotisation du genre est établie, elle se limite à l'objet du pouvoir particulier qui autorise la nouvelle cotisation. En l'espèce, le pouvoir d'établir une nouvelle cotisation à la suite d'une demande de nouvelle cotisation faite par le contribuable qui veut réclamer un report de perte en amont se limite au report de perte lui-même. Ce pouvoir ne permet pas de procéder à une nouvelle cotisation à un autre titre pour l'année d'imposition considérée.


[17]            La version française et la version anglaise du texte sont semblables, mais la structure de la version française est moins évidente que celle de la version anglaise. Les mots introductifs de la version française du paragraphe 152(4) parle d'abord du pouvoir d'établir une cotisation initiale :

Sous réserve du paragraphe (5), le Ministre peut, à un moment donné, fixer l'impôt pour une année d'imposition, ainsi que les intérêts ou pénalités payables en vertu de la présente partie par un contribuable, ou donner avis par écrit, à toute personne qui a produit une déclaration de revenu pour une année d'imposition, qu'aucun impôt n'est payable pour l'année...

[18]            Ces mots reflètent les mots introductifs de la version anglaise du paragraphe 152(4). L'expression « à un moment donné » correspond à l'expression « at any time » , dans la version anglaise. Puis la version française parle des pouvoirs du ministre à la suite de la cotisation initiale, avant d'énumérer les délais à l'intérieur desquels ces pouvoirs peuvent être exercés. Dans la version anglaise, les délais sont d'abord exprimés, suivis des pouvoirs dont l'exercice dépend de tels délais. La version française se présente ainsi :

...et peut, selon les circonstances, établir des nouvelles cotisations, des cotisations supplémentaires ou des cotisations d'impôts, d'intérêts ou de pénalités en vertu de la présente partie...

[19]            Le texte correspondant de la version anglaise apparaît immédiatement après l'alinéa c).


[20]            Dans les deux versions, la dernière partie énonce les limites d'objet à l'exercice du pouvoir conféré au début de la disposition.

[21]            Je ne partage pas l'avis du juge des requêtes selon lequel le sous-alinéa 152(4)b)(i) autorise une nouvelle cotisation unique parce que ce sous-alinéa fait état de la nouvelle cotisation « exigée » conformément au paragraphe 152(6). Le sous-alinéa 152(4)b)(i) indique simplement les cas où la période élargie de nouvelle cotisation, dans l'alinéa 152(4)b), s'applique; il ne définit pas ce qui peut arriver à l'intérieur de cette période élargie de nouvelle cotisation. La définition de ce qui peut arriver durant la période élargie est exprimée par les mots qui précèdent l'alinéa 152(4)c) : « selon les circonstances, établir des nouvelles cotisations, des cotisations supplémentaires ou des cotisations d'impôt, d'intérêts ou de pénalités en vertu de la présente partie » . Le pouvoir d'établir une nouvelle cotisation plus d'une fois à l'égard de chacune des périodes de nouvelle cotisation définies aux alinéas 152(4)a), b) et c) se trouve dans les mots en italique « selon les circonstances » . Voir deux précédents : Abrahams c. Canada (M.R.N.) (No. 1), [1967] 1 R.C.É. 314 et Loukras c. M.R.N. [1990] 2 C.T.C. 2044 (C.C.I.). Ces mots s'appliquent également à chacune de ces périodes. Il n'y a en principe pas plus de raison de les traiter différemment par rapport à la période élargie de nouvelle cotisation, dans l'alinéa 152(4)b), qu'il n'y a de raison de les traiter différemment par rapport à la période normale de nouvelle cotisation, dans l'alinéa 152(4)c).


[22]            L'expression « selon les circonstances » correspond à l'expression anglaise « as the circumstances may require » . Dans les deux versions, cette expression qualifie les actions précédentes, à savoir « établir des nouvelles cotisations, des cotisations supplémentaires » ( « reassess or make additional assessments » ), ou « des cotisations d'impôt, d'intérêts ou de pénalités en vertu de la présente partie » ( « assess tax, interest or penalties under this Part » ). Logiquement, l'attribution du pouvoir de faire certaines choses « selon les circonstances » peut s'entendre de l'attribution :

1) du pouvoir de faire l'une quelconque de ces choses; ou

2) du pouvoir de faire l'une quelconque de ces choses plus d'une fois.

[23]            L'intention du législateur peut, à mon avis, être trouvée dans la version française du texte. La version anglaise dit simplement « may ... reassess » , ce qui ne donne aucune indication du nombre, tandis que la version française dit « établir des nouvelles cotisations » , ce qui est évidemment un pluriel. Par conséquent, même si l'expression « selon les circonstances » ( « as the circumstances may require » ) s'applique à un choix entre les catégories énumérées, la catégorie des nouvelles cotisations est définie comme davantage qu'une nouvelle cotisation.

[24]            Je suis donc d'avis que la version française non seulement appuie, mais renforce l'argument selon lequel l'ancienne version du texte législatif autorise une pluralité de nouvelles cotisations à l'intérieur de la période élargie de nouvelle cotisation, en ce qui a trait à une demande de nouvelle cotisation présentée conformément au paragraphe 152(6).


[25]            Je passe maintenant au texte de la disposition tel qu'il existe actuellement, un exemple de rédaction législative auquel, pour employer les mots du juge des requêtes, fait défaut « l'attribut insaisissable de la clarté » . Mais, si difficile soit-il, il est intelligible.


(4) Le ministre peut établir une cotisation, une nouvelle cotisation ou une cotisation supplémentaire concernant l'impôt pour une année d'imposition, ainsi que les intérêts ou les pénalités, qui sont payables par un contribuable en vertu de la présente partie ou donner avis par écrit qu'aucun impôt n'est payable pour l'année à toute personne qui a produit une déclaration de revenu pour une année d'imposition. Pareille cotisation ne peut être établie après l'expiration de la période normale de nouvelle cotisation applicable au contribuable pour l'année que dans les cas suivants :

(4) The Minister may at any time make an assessment, reassessment or additional assessment of tax for a taxation year, interest or penalties, if any, payable under this Part by a taxpayer or notify in writing any person by whom a return of income for a taxation year has been filed that no tax is payable for the year, except that an assessment, reassessment or additional assessment may be made after the taxpayer's normal reassessment period in respect of the year only if

a) le contribuable ou la personne produisant la déclaration :

(a) the taxpayer or person filing the return

(i) soit a fait une présentation erronée des faits, par négligence, inattention ou omission volontaire, ou a commis quelque fraude en produisant la déclaration ou en fournissant quelque renseignement sous le régime de la présente loi,

(i) has made any misrepresentation that is attributable to neglect, carelessness or wilful default or has committed any fraud in filing the return or in supplying any information under this Act, or

(ii) soit a présenté au ministre une renonciation, selon le formulaire prescrit, au cours de la période normale de nouvelle cotisation applicable au contribuable pour l'année;

(ii) has filed with the Minister a waiver in prescribed form within the normal reassessment period for the taxpayer in respect of the year; or

b) la cotisation est établie avant le jour qui suit de trois ans la fin de la période normale de nouvelle cotisation applicable au contribuable pour l'année et, selon le cas :

(b) the assessment, reassessment or additional assessment is made before the day that is 3 years after the end of the normal reassessment period for the taxpayer in respect of the year and


(i) est à établir en conformité au paragraphe (6) ou le serait si le contribuable avait déduit un montant en présentant le formulaire prescrit visé à ce paragraphe au plus tard le jour qui y est mentionné,

(i) is required pursuant to subsection 152(6) or would be so required if the taxpayer had claimed an amount by filing the prescribed form referred to in that subsection on or before the day referred to therein,(ii) est établie par suite de l'établissement, en application du présent paragraphe ou du paragraphe (6), d'une cotisation ou d'une nouvelle cotisation concernant l'impôt payable par un autre contribuable,

(ii) is made as a consequence of the assessment or reassessment pursuant to this paragraph or subsection 152(6) of tax payable by another taxpayer,

(iii) est établie par suite de la conclusion d'une opération entre le contribuable et une personne non résidente avec laquelle il avait un lien de dépendance,

(iii) is made as a consequence of a transaction involving the taxpayer and a non-resident person with whom the taxpayer was not dealing at arm's length,

(iii.1) si le contribuable est un non-résident exploitant une entreprise au Canada, est établie par suite :

(iii.1) is made, if the taxpayer is non-resident and carries on a business in Canada, as a consequence of

(A) soit d'une attribution, par le contribuable, de recettes ou de dépenses au titre de montants relatifs à l'entreprise canadienne (sauf des recettes et des dépenses se rapportant uniquement à l'entreprise canadienne qui sont inscrits dans les documents comptables de celle-ci et étayés de documents conservés au Canada),

(A) an allocation by the taxpayer of revenues or expenses as amounts in respect of the Canadian business (other than revenues and expenses that relate solely to the Canadian business, that are recorded in the books of account of the Canadian business, and the documentation in support of which is kept in Canada), or

(B) soit d'une opération théorique entre le contribuable et son entreprise canadienne, qui est reconnue aux fins du calcul d'un montant en vertu de la présente loi ou d'un traité fiscal applicable,

(B) a notional transaction between the taxpayer and its Canadian business, where the transaction is recognized for the purposes of the computation of an amount under this Act or an applicable tax treaty.

(iv) est établie par suite d'un paiement supplémentaire ou d'un remboursement d'impôt sur le revenu ou sur les bénéfices effectué au gouvernement d'un pays étranger, ou d'un état, d'une province ou autre subdivision politique d'un tel pays, ou par ce gouvernement,

(iv) is made as a consequence of a payment or reimbursement of any income or profits tax to or by the government of a country other than Canada or a government of a state, province or other political subdivision of any such country,

(v) est établie par suite d'une réduction, opérée en application du paragraphe 66(12.73), d'un montant auquel il a été censément renoncé en vertu de l'article 66,

(v) is made as a consequence of a reduction under subsection 66(12.73) of an amount purported to be renounced under section 66, or

(vi) est établie en vue de l'application des paragraphes 118.1(15) ou (16).

(vi) is made in order to give effect to the application of subsection 118.1(15) or 118.1(16).


[26]            J'ai reproduit l'intégralité du paragraphe 152(4) pour que sa structure puisse être entrevue, mais j'ai mis en caractères gras les portions de cette disposition qui intéressent le présent appel, afin de simplifier la lecture du texte.


[27]            Les mots introductifs de la version anglaise de la disposition actuelle disent que le ministre peut [n'importe quand] établir une cotisation ou une nouvelle cotisation. Ce pouvoir, on le remarquera, s'applique à la cotisation initiale et à toute nouvelle cotisation. Cependant, le paragraphe 152(4) dit ensuite que pareille cotisation, nouvelle cotisation ou cotisation supplémentaire ne peut être établie après l'expiration de la période normale de nouvelle cotisation que dans certains cas. Puisque la période normale de nouvelle cotisation commence à courir à compter de la date de mise à la poste de la cotisation initiale, cette limite ne s'applique pas à la cotisation initiale, mais uniquement aux nouvelles cotisations et cotisations supplémentaires subséquentes. Voilà pour la règle générale : le ministre peut n'importe quand établir une cotisation ou une nouvelle cotisation; et voilà pour la limite : la cotisation ou la nouvelle cotisation doit être établie à l'intérieur de la période normale de nouvelle cotisation, sauf dans certains cas.

[28]            Les cas en question sont exposés aux sous-alinéas a) et b). L'alinéa 152(4)a) parle de renonciation et de fraude. Puisqu'il tient lieu d'exception à la période normale de nouvelle cotisation et qu'aucune autre limite n'est prévue, le pouvoir d'établir une cotisation ou une nouvelle cotisation selon l'alinéa 152(4)a) peut donc être exercé n'importe quand. On arrive donc au même résultat que celui de l'alinéa 152(4)a) de l'ancien texte législatif.


[29]            L'alinéa 152(4)b) prévoit une autre exception à la période normale de nouvelle cotisation en ce qui a trait aux cas qui sont exposés aux sous-alinéas 152(4)b)(i) à (vi). La disposition qui présente un intérêt particulier dans la présente instance est le sous-alinéa 152(4)b)(i), qui traite de nouvelles cotisations établies pour donner effet à un report de perte en amont qui est réclamé en vertu du paragraphe 152(6). Contrairement au cas de l'alinéa 152(4)a), cette exception à la règle selon laquelle le pouvoir d'établir une cotisation ou une nouvelle cotisation doit être exercé à l'intérieur de la période normale de nouvelle cotisation est sujette à sa propre limite : il doit être exercé dans un délai de trois ans après la fin de la période normale de nouvelle cotisation. C'est la même période élargie de nouvelle cotisation que celle que l'on trouve à l'alinéa 152(4)b) de l'ancien texte législatif. Tout autre cas, par exemple nouvelle cotisation après examen plus détaillé des affaires du contribuable par le ministre, entre dans la limite générale selon laquelle le pouvoir d'établir une cotisation ou une nouvelle cotisation doit être exercé à l'intérieur de la période normale.


[30]            On peut voir que, s'agissant des délais, la version actuelle et la version ancienne du paragraphe 152(4) donnent le même résultat. Mais, contrairement à la version actuelle, l'ancienne version renfermait aussi des limites d'objet au pouvoir d'établir une nouvelle cotisation à l'intérieur de la période élargie de nouvelle cotisation. Cependant, on obtient le même résultat avec les limites d'objet qui apparaissaient dans l'ancien paragraphe 152(4) et qui se trouvent aujourd'hui dans le paragraphe 152(4.01) du texte actuel, qu'il ne m'est pas nécessaire de reproduire intégralement. La portion qui nous intéresse est le sous-alinéa 152(4.01)b)(i), ainsi formulé :


(4.01) Malgré les paragraphes (4) et (5), la cotisation, la nouvelle cotisation ou la cotisation supplémentaire à laquelle s'appliquent les alinéas (4)a) ou b) relativement à un contribuable pour une année d'imposition ne peut être établie après l'expiration de la période normale de nouvelle cotisation applicable au contribuable pour l'année que dans la mesure où il est raisonnable de considérer qu'elle se rapporte à l'un des éléments suivants :

                              . . .

(4.01) Notwithstanding subsections 152(4) and 152(5), an assessment, reassessment or additional assessment to which paragraph 152(4)(a) or 152(4)(b) applies in respect of a taxpayer for a taxation year may be made after the taxpayer's normal reassessment period in respect of the year to the extent that, but only to the extent that, it can reasonably be regarded as relating to,

                            [. . .]

b) en cas d'application de l'alinéa (4)b) :

(b) where paragraph 152(4)(b) applies to the assessment, reassessment or additional assessment,

(i) la cotisation, la nouvelle cotisation ou la cotisation supplémentaire à laquelle s'applique le sous-alinéa (4)b)(i),

                              . . .

(i) the assessment, reassessment or additional assessment to which subparagraph 152(4)(b)(i) applies,

                            [. . .]


[31]            Le paragraphe 152(4.01) restreint le droit d'établir une nouvelle cotisation, à l'intérieur de la période élargie de nouvelle cotisation, à l'objet qui a donné lieu au droit d'établir une nouvelle cotisation en dehors de la période normale de nouvelle cotisation. Il va donc dans le même sens que les dispositions finales de l'ancien paragraphe 152(4).


[32]            Un dernier point de comparaison est le pouvoir d'établir une nouvelle cotisation plus d'une fois. Dans l'ancien texte, ce pouvoir se trouvait dans les mots « selon les circonstances » . Dans le texte actuel, le ministre a le pouvoir d'établir une cotisation ou une nouvelle cotisation « at any time » . Stroud's Judicial Dictionary (5e édition) (Londres, Sweet and Maxwell Limited, 1986) donne la définition principale suivante de cette expression :

[traduction] (1) Le pouvoir de faire une chose, par exemple de révoquer un usage « en tout temps » , ne se limite pas à une seule exécution; les mots « en tout temps » signifient « de temps à autre, aussi souvent que celui qui a conféré le pouvoir le jugera à propos » (Digges Case 1 Rep. 173) . . .

[33]            Eu égard au sens ordinaire des mots « at any time » , je n'ai guère d'hésitation à conclure que le pouvoir d'établir une cotisation ou une nouvelle cotisation plus d'une fois s'applique non seulement aux nouvelles cotisations qui entrent dans la période normale de nouvelle cotisation, mais également à celles qui sont en dehors de cette période. Le texte de la disposition ne renferme rien pouvant appuyer la conclusion contraire.

[34]            Pour ce qui est de la disposition actuelle, la version française du texte renferme une ambiguïté qui ne se trouve pas dans la version anglaise. Dans cette disposition, la structure de la version française correspond à celle de la version anglaise, mais elle omet certains mots :

Le ministre peut établir une cotisation, une nouvelle cotisation ou une cotisation supplémentaire concernant l'impôt pour une année d'imposition, ainsi que les intérêts ou les pénalités, qui sont payables par un contribuable en vertu de la présente partie...


Les mots correspondant à « at any time » sont manifestement absents de la version française, ce qui donne à penser qu'un seul exercice seulement du pouvoir d'établir une nouvelle cotisation est autorisé.

[35]            On pourrait prétendre que l'expression « à un moment donné » [n'importe quand] est implicite dans les mots introductifs de l'actuel paragraphe 152(4). Ces mots seraient nécessaires pour donner effet au pouvoir d'établir une nouvelle cotisation dans le cas de fraude ou de renonciation, qui apparaît à l'alinéa a) et qui constitue une exception à la période normale de nouvelle cotisation. Si le pouvoir du ministre d'établir une nouvelle cotisation dans un tel cas n'est pas limité par la période normale de nouvelle cotisation (à laquelle il constitue une exception) et par la période normale de nouvelle cotisation (qui ne s'applique pas à lui), alors le pouvoir doit être susceptible d'exercice n'importe quand. Puisque le pouvoir est conféré par les mots introductifs de la disposition, il doit s'appliquer à tous les éléments qui sont mentionnés dans cette partie de la disposition.


[36]            Lorsqu'on est confronté à la possibilité d'une différence entre la version anglaise et la version française d'un texte, comme c'est le cas ici, il est nécessaire de concilier les deux versions pour donner effet au sens qui s'accorde avec l'esprit et l'intention du texte législatif, afin que ses objets soient atteints. Voir l'arrêt Canada c. Compagnie Immobilière BCN, [1979] 1 R.C.S. 865, aux pages 871-872. Cet arrêt établissait aussi qu'il n'existe aucune règle générale selon laquelle la version la plus restrictive renferme le sens recherché. Voir également l'arrêt Beothuk Data Systems Ltd., Division Seawatch c. Dean, [1998] 1 C.F. 433 (C.A.), où la Cour d'appel fédérale s'exprimait ainsi : « il ne s'agit pas d'un cas où une version est ambiguë et l'autre claire, de sorte que la deuxième version peut être utilisée pour interpréter la première. Il s'agit plutôt d'un cas où une version peut avoir un sens plus large que l'autre, et la question à trancher est alors de savoir quel est le sens qui correspond le mieux à l'intention qu'avait le législateur en adoptant la disposition » (au paragraphe 32).

[37]            Pour savoir quelle était l'intention du législateur lorsqu'il a promulgué la disposition, on peut considérer les anciennes versions du texte. Voir l'arrêt Sarvanis c. Canada, [2002] 1 R.C.S. 921, à la page 929. L'ancienne version, par l'emploi qu'elle fait de l'expression « selon les circonstances » et de l'expression « as the circumstances require » , permet d'affirmer que le législateur voulait que le ministre ait le pouvoir d'établir une nouvelle cotisation plus d'une fois. Cette affirmation s'impose également lorsque l'on considère la différence entre l'ancienne version du texte et sa version actuelle. Puisqu'une disposition législative dit que la nouvelle disposition s'applique à compter du 27 avril 1989, la différence entre les deux versions signifie que les contribuables seront traités différemment pour la même année d'imposition selon le moment auquel le ministre a choisi d'établir une nouvelle cotisation. Cela est manifestement contraire à l'équité et doit être évité s'il est le moindrement possible de le faire.


[38]            Cette possibilité me porte à croire que l'expression « à un moment donné » [n'importe quand] figure implicitement dans les mots introductifs de la version française du paragraphe 152(4). Cette présence implicite de l'expression se justifie par la logique interne du texte lui-même, mais la validité d'une telle approche est confirmée par le préjudice qui résulterait de toute autre interprétation.

[39]            Je suis donc conforté dans mon opinion selon laquelle la version actuelle et la version ancienne du paragraphe 152(4) ont la même signification. En conséquence, la date d'application de la disposition actuelle ne présente qu'un intérêt administratif.


[40]            Ma conclusion sur l'effet du texte législatif s'accorde avec certaines remarques incidentes du juge Rothstein (son titre à l'époque) dans l'affaire Greene c. Canada (Ministre du Revenu national - M.R.N.), (1995), 95 D.T.C. 5078. Il s'agissait de savoir si le ministre, après avoir reçu une demande de report de perte en amont selon le paragraphe 152(6), devait établir une nouvelle cotisation pour le contribuable de manière à donner effet au report de perte en amont. Le juge Rothstein a estimé que le ministre devait uniquement considérer la demande de report de perte en amont et n'était pas tenu d'accorder le redressement demandé par le contribuable. En arrivant à cette conclusion, le juge Rothstein faisait observer que, même si le ministre devait agir comme le lui demandait le contribuable, il pouvait toujours corriger une nouvelle cotisation inexacte établie en vertu du paragraphe 152(6) par une autre nouvelle cotisation établie en vertu du sous-alinéa 152(4)b)(i). On a fait valoir devant nous que cela permettait d'affirmer que le ministre peut établir une nouvelle cotisation pour corriger une nouvelle cotisation initiale établie conformément au paragraphe 152(6). Je souscris à cette conclusion, encore que je ne reconnaisse pas que le pouvoir d'agir ainsi découle du sous-alinéa 152(4)b)(i).

[41]            Ma conclusion s'accorde également avec la conclusion à laquelle est arrivé le juge Cullen dans l'affaire Flexi-Coil Ltd. c. Canada (Ministre du Revenu national - M.R.N.) (C.F. 1re inst.) (1991), 92 D.T.C. 6047.

[42]            L'avocat de l'intimé a appelé notre attention sur l'anomalie intrinsèque de l'interprétation que j'ai adoptée pour le paragraphe 152(4). Cette anomalie est simplement que le ministre pourrait établir une nouvelle cotisation pour un report de perte en amont, dans des circonstances où il ne pourrait établir une nouvelle cotisation pour tenir compte de la déduction de la perte dans l'année d'imposition durant laquelle elle s'est produite.

[43]            On peut utiliser un graphique linéaire pour éclaircir la question :

1                 2                       3                          4                          5                       6           7

Perte subie

Report de perte en amont

| Année 2 période normale de nouvelle cotisation |

|                            Année 1 période élargie de nouvelle cotisation                             |


[44]            Un contribuable qui subit une perte durant l'année 2 peut réclamer un report de perte en amont vers l'année 1. La période normale de nouvelle cotisation qui est applicable à l'année 2 (et donc à la nouvelle cotisation de la déductibilité de la perte) se termine durant l'année 5. Mais la période élargie de nouvelle cotisation pour l'année 1, applicable à la nouvelle cotisation du report de perte en amont, expire à la fin de l'année 7. Par conséquent, le ministre pourrait durant les années 6 et 7 établir une nouvelle cotisation tenant compte du report de perte en amont, même s'il était empêché d'établir une nouvelle cotisation tenant compte de la déductibilité de la perte dans l'année au cours de laquelle elle a été subie.

[45]            Mais l'interprétation contraire, c'est-à-dire celle selon laquelle le ministre ne peut qu'une seule fois établir une nouvelle cotisation tenant compte d'un report de perte en amont, conduit elle aussi à une anomalie. Par exemple, la réclamation d'un report de perte en amont de trois ans pour une perte subie durant l'année 4 conduirait à un report de perte en amont vers l'année 1, report qui deviendrait impossible à la fin de l'année 4. Mais, le ministre pourrait établir une nouvelle cotisation tenant compte de la perte elle-même durant les années 5, 6 et 7, pour la refuser, même s'il lui a été impossible de refuser le report de perte en amont.

1                       2                          3                       4                       5                       6        7

Report de perte en amont                                        Perte subie

| Année 1 période normale de nouvelle cotisation |

   |Année 4 période normale de nouvelle cotisation|

[46]            Les deux cas conduisent à une anomalie, qui découle du fait qu'aucune période commune de nouvelle cotisation n'est prévue pour l'événement qui donne lieu à la demande de nouvelle cotisation et au report vers une année antérieure.


CONCLUSION

[47]            S'agissant de la question que les parties ont soumise au juge des requêtes, ma conclusion est que le ministre avait le pouvoir d'établir pour l'intimé une nouvelle cotisation plus d'une fois au-delà de la période normale de nouvelle cotisation, mais les nouvelles cotisations devaient être établies à l'intérieur de la période élargie de nouvelle cotisation. Le pouvoir d'établir une nouvelle cotisation pour donner effet à un report de perte en amont se trouve dans le paragraphe 152(6), tandis que le pouvoir d'établir une nouvelle cotisation plus d'une fois se trouve dans les mots « selon les circonstances » ou « à un moment donné » , selon la version considérée du texte législatif.

DISPOSITIF

[48]            J'accueillerais donc l'appel et, rendant l'ordonnance que le juge des requêtes aurait dû rendre, je répondrais par l'affirmative à la question qui était soumise au juge des requêtes. L'appelante a droit à ses dépens.

                                                                                                 _ J.D. Denis Pelletier _          

                                                                                                                             Juge                        

« Je souscris aux présents motifs

     M. Nadon, juge »

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


LE JUGE LÉTOURNEAU (motifs concourants)

[49]            Je souscris à la conclusion à laquelle est arrivé mon collègue. Je m'abstiendrai d'exprimer tout point de vue sur la question de savoir quelle disposition (la version ancienne ou la version actuelle du paragraphe 152(4)) s'applique, puisque les parties ont reconnu que l'effet serait le même dans les deux cas.

[50]            Je m'empresse d'ajouter que je ne suis nullement persuadé que le pouvoir d'établir une nouvelle cotisation plus d'une fois après la période normale de nouvelle cotisation du contribuable découle des mots « selon les circonstances » , dans l'ancien paragraphe 152(4). Je crois que ces mots évoquent la nature du pouvoir conféré et l'objet de ce pouvoir, davantage que la fréquence d'utilisation de ce pouvoir.


[51]            En réalité, conformément à la disposition, une nouvelle cotisation ou une cotisation supplémentaire, selon les circonstances, peut être établie, et cette nouvelle cotisation ou cotisation supplémentaire peut, selon les circonstances, concerner des impôts, des intérêts ou des pénalités. La version anglaise et la version française du texte (sur ce point, la version française est plus claire) admettent toutes deux ma conclusion. Le pouvoir d'établir une nouvelle cotisation plus d'une fois résulte plus naturellement, je crois, des mots « à un moment donné » ( « at any time » en anglais), qui apparaissent dans la première phrase de l'ancien paragraphe 152(4), ainsi que par l'emploi constant du pluriel en français (des nouvelles cotisations, des cotisations supplémentaires ou des cotisations d'impôt, d'intérêts ou de pénalités) et l'emploi plus parcimonieux du pluriel en anglais (make additional assessments).

[52]            J'observe en passant que, dans le nouveau texte du paragraphe 152(4), la version française et la version anglaise emploient maintenant toutes deux le singulier pour décrire le pouvoir conféré au ministre, que les mots « selon les circonstances » ont été remplacés par « if any » dans la version anglaise, que ces mots de remplacement ont été omis dans la version française et, comme l'a fait observer mon collègue, que les mots « at any time » n'apparaissent pas dans la version française. Tout cela ne facilite certainement pas la quête d'une clarté insaisissable.

[53]            La nouvelle cotisation demandée par un contribuable pour un report de perte en amont est, comme le souligne mon collègue, limitée au report de perte en amont lui-même. Elle ne permet pas d'établir une nouvelle cotisation à un autre titre. Cela dit, je ne crois pas cependant que la nouvelle cotisation soit limitée à une seule, comme le prétend l'intimé.

[54]            Les dispositions législatives qui nous concernent sont un véritable cafouillis. Sans vouloir contredire qui que ce soit, je ne crois pas qu'elles se prêtent à une interprétation littérale. Elles présentent une telle confusion que l'interprétation littérale conduit à des résultats incongrus, quelle que soit la position adoptée, celle de l'appelante ou celle de l'intimé.


[55]            Les prétentions de l'intimé conduisent cependant à une incongruité qui me porte à croire que le législateur ne voulait pas que la nouvelle cotisation soit limitée à un seul cas après la période normale de cotisation. Supposons qu'une perte est déclarée à l'origine par un contribuable vers l'année d'imposition 1990 et que le contribuable demande son report en amont à l'année d'imposition 1987. Supposons aussi, puisque c'est généralement ce qui arrive, que la perte déclarée dans l'année d'imposition 1990 est acceptée après une cotisation automatique initiale et que la déduction demandée est par conséquent accordée dans l'année d'imposition 1987. Si, après nouvelle cotisation du contribuable pour l'année d'imposition 1990 à l'intérieur de la période normale de cotisation, le ministre arrive à la conclusion que la perte déclarée n'est pas une perte qui est juridiquement admissible à une déduction, il n'aura pas le pouvoir de corriger la cotisation établie pour 1987 de manière à refuser la perte. Cela voudrait dire que le contribuable déduirait en fait une perte juridiquement non admissible. Je ne crois pas que le législateur voulait un résultat aussi absurde lorsqu'il a promulgué ces dispositions mal conçues.


[56]            Les dispositions relatives au report de perte en amont ont été promulguées pour l'avantage du contribuable. Cependant, le législateur ne voulait pas que ces dispositions, ou leur interprétation « débouche[nt] sur une solution très limitée » , selon les mots employés par le juge Rothstein dans l'affaire Greene c. Sa Majesté la Reine, [1995] 1 C.T.C. 135, jugement confirmé par la Cour d'appel fédérale, 95 DTC 5684, et qu'elles soient préjudiciables à l'intérêt public, alors qu'une interprétation juste et équitable de telles dispositions pour les deux parties est possible et ne fait pas violence à un texte qui, comme l'ont dit certains auteurs à propos de la Loi de l'impôt sur le revenu considérée globalement, semble écrit dans ni l'une ni l'autre des langues officielles du Canada : Rand, Clifford and Stitt, Understanding the Income Tax Act, 2e édition, Toronto, Carswell, 1991, page v.

[57]            Je disposerais de l'appel ainsi que le propose mon collègue.

                                                                                                    _ Gilles Létourneau _          

                                                                                                                             Juge                        

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                                         COUR D'APPEL FÉDÉRALE

                                  AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                            A-36-03

APPEL INTERJETÉ CONTRE UNE ORDONNANCE DE LA COUR CANADIENNE DE L'IMPÔT EN DATE DU 6 JANVIER 2003

INTITULÉ :                                          SA MAJESTÉ LA REINE ET GEORGE AGAZARIAN

LIEU DE L'AUDIENCE :                    VANCOUVER (COLOMBIE-BRITANNIQUE)

DATE DE L'AUDIENCE :                  LE 18 DÉCEMBRE 2003

MOTIFS DU JUGEMENT :               LE JUGE PELLETIER

Y A SOUSCRIT :                                   LE JUGE NADON

MOTIFS CONCOURANTS :               LE JUGE LÉTOURNEAU

DATE DES MOTIFS :                          LE 23 AVRIL 2004

COMPARUTIONS :

Robert Carvalho                                                                                    POUR L'APPELANTE

Edwin G. Kroft                                                                                      POUR L'INTIMÉ

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Morris Rosenberg                                                                                  POUR L'APPELANTE

Sous-procureur général du Canada

Vancouver (Colombie-Britannique)

McCarthy Tetrault                                                                                 POUR L'INTIMÉ

Vancouver (Colombie-Britannique)


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