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     Date : 19971120

     Dossier : A-41-97

CORAM :      Le juge DESJARDINS

         Le juge LÉTOURNEAU

         Le juge suppléant CHEVALIER

         AFFAIRE intéressant la Loi sur l'assurance-chômage;
         ET une demande de prestations faite par Rosalia Corbo;
         ET l'appel interjeté par Rosalia Corbo devant la Cour canadienne de l'impôt, de la décision rendue le 11 mai 1995 par l'intimé en matière d'emploi assurable

Entre :

     ROSALIA CORBO,

     requérante,

     - et -

     LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

     intimé.

Audience tenue à Toronto (Ontario) le jeudi 20 novembre 1997

Jugement rendu à l'audience tenue à Toronto (Ontario) le jeudi 20 novembre 1997

MOTIFS DU JUGEMENT

PRONONCÉS PAR :      Le juge LÉTOURNEAU

     Date : 19971120

     Dossier : A-41-97

CORAM :      Le juge DESJARDINS

         Le juge LÉTOURNEAU

         Le juge suppléant CHEVALIER

         AFFAIRE intéressant la Loi sur l'assurance-chômage;
         ET une demande de prestations faite par Rosalia Corbo;
         ET l'appel interjeté par Rosalia Corbo devant la Cour canadienne de l'impôt, de la décision rendue le 11 mai 1995 par l'intimé en matière d'emploi assurable

Entre :

     ROSALIA CORBO,

     requérante,

     - et -

     LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

     intimé.

     MOTIFS DU JUGEMENT

     (prononcés à l'audience tenue à Toronto (Ontario)

     le jeudi 20 novembre 1997)

[1]      Nous concluons qu'il y a lieu de faire droit au recours en contrôle judiciaire pour deux motifs.

[2]      En premier lieu, rien dans la décision du juge de la Cour de l'impôt n'indique qu'il a examiné l'exercice par le ministre du pouvoir discrétionnaire de conclure, sous le régime du sous-alinéa 3(2)c)(ii) de la Loi sur l'assurance-chômage, que les parties n'auraient pas conclu entre elles un contrat de travail semblable s'il n'y avait pas eu un lien de dépendance.

[3]      Il est vrai que dans Ferme Émile Richard et Fils Inc. c. Ministre du Revenu national et al., (1994) 178 N.R. 361, page 363, notre Cour a conclu que dans les circonstances de la cause, la requérante ne pouvait se prévaloir d'une erreur du même genre qu'avait commise le juge de la Cour de l'impôt, puisque l'inobservation par ce dernier de la procédure l'avantageait :

     [5] En l'espèce, il est clair que le juge a sauté la première étape et s'est lancé tout de go dans la seconde, oubliant qu'avant de décider du bien-fondé de la décision du Ministre il aurait dû en vérifier la légalité.         
     [6] Cela dit, cependant, nous ne croyons pas que la requérante, dans les circonstances, puisse se plaindre de cette erreur de droit. Cette erreur, au fond, a joué en sa faveur. Le juge de la Cour canadienne de l'impôt, au lieu d'exiger dans un premier temps que la requérante fasse la preuve d'un comportement capricieux ou arbitraire du Ministre, preuve qui n'est généralement pas chose facile, a fait un examen approfondi de la preuve pour en arriver à la conclusion ferme qu'à son propre avis, l'emploi de la requérante devait être exclu. En décidant de la justesse plutôt que de la légalité de la décision du Ministre, le juge a manifestement appliqué un critère qui favorisait la requérante.         

[4]      La situation est cependant tout autre en l'espèce. Le ministre a fondé sa décision sur diverses présomptions, dont certaines étaient fausses et auraient pu lui inspirer une conclusion différente. L'avocate de l'intimé soutient avec force que ces erreurs n'étaient pas importantes au point de déformer le résultat et que le ministre serait parvenu à la même conclusion.

[5]      À notre avis, pareil argument ne s'adresse pas à la question en litige. L'appel formé contre une décision du ministre comporte un processus à deux étapes, la première consistant en l'examen de la légalité de cette décision. Nous concluons que l'appelante avait le droit, lorsqu'elle a fait appel, à un examen de la légalité de la décision du ministre, d'autant plus que celui-ci l'a fondée sur un certain nombre de fausses présomptions.

[6]      En outre, à la différence de ce qui se passait dans l'affaire Richard, le juge de la Cour de l'impôt, comme nous le verrons plus en détail par la suite, n'a pas examiné avec soin les preuves et témoignages produits et est parvenu à une décision fondée sur des conclusions de fait qui ne sont pas étayées par la preuve et qui semblent avoir été déterminantes dans sa décision.

[7]      En second lieu, il ressort de la décision du juge de la Cour de l'impôt, qui est passé à la seconde étape du processus, qu'il n'a pas examiné si les autres faits mis en preuve au procès pouvaient servir de fondement juridique à la décision du ministre. Cette omission est d'autant plus grave qu'il a amalgamé ensemble des faits erronés et des faits qui, n'avaient pas été soumis en preuve, pour parvenir à une conclusion erronée qui servait de fondement à sa décision de huit lignes par laquelle il a rejeté l'appel, comme en témoigne le texte de cette décision :

     Ces appels ont été entendus à la lumière des mêmes preuves et témoignages. La Cour les a rejetés par de brefs motifs prononcés à l'audience mais, en résumé, le principal argument proposé par les appelants, leur avocat ou mandataire, était que le payeur " savoir la firme Buffalo Paving and General Contracting Co. Ltd. " payait un total de quelque 2 000,00 $ par semaine aux deux appelants et à Rosalia Corbo, l'épouse du président de la compagnie, pour distribuer des dépliants publicitaires de porte à porte dans la région de Toronto. Outre les divers autres éléments des témoignages et preuves qui laissaient un nombre considérable de questions sans réponse, la Cour n'ajoute pas foi à cet élément de preuve en particulier dans les circonstances telles que je les vois.         

[8]      L'intimé reconnaît, contrairement aux conclusions tirées par le juge de la Cour de l'impôt dans sa décision, qu'il n'avait été saisi d'aucune preuve que Rosalia Corbo, qui faisait fonction de secrétaire exécutive, eût jamais distribué des dépliants, de même qu'il n'y avait aucune preuve du salaire versé par le payeur à Rosalia ou à Giuseppina Corbo en 1992. Le seul élément de preuve produit pour cette dernière année, qui concerne la requérante puisque la décision du ministre s'y rapporte, indique un montant brut de 500,00 $ versé par le payeur à la requérante au lieu des 2 000,00 $ dont faisait état le juge de la Cour de l'impôt.

[9]      Il se peut qu'en fin de compte, la décision du ministre doive être et soit la même. Nous ne le savons pas, mais nous ne saurions accepter un jugement qui ne respecte pas la procédure à laquelle la requérante avait droit sur appel devant le juge de la Cour de l'impôt1.

[10]      Par ces motifs, il y a lieu de faire droit au recours en contrôle judiciaire, d'annuler la décision du juge de la Cour de l'impôt et de renvoyer l'affaire à cette dernière juridiction pour une nouvelle instruction par un autre juge.

     Signé : Gilles Létourneau

     ________________________________

     J.C.A.

Toronto (Ontario),

le 20 novembre 1997

Traduction certifiée conforme      ________________________________

     F. Blais, LL. L.

     COUR D'APPEL FÉDÉRALE

     Avocats et procureurs inscrits au dossier

DOSSIER :                  A-41-97

INTITULÉ DE LA CAUSE :      Rosalia Corbo

                     c.

                     Le ministre du Revenu national

DATE DE L'AUDIENCE :      20 novembre 1997

LIEU DE L'AUDIENCE :          Toronto (Ontario)

MOTIFS DU JUGEMENT PRONONCÉS PAR LE JUGE LÉTOURNEAU

À l'audience tenue à Toronto (Ontario) le jeudi 20 novembre 1997

ONT COMPARU :

M. J. Michael Mulroy              pour la requérante

Mme Alexandra V. Brown              pour l'intimé

M. Arnold Bornstein

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

M. J. Michael Mulroy              pour la requérante

Howard Levitt and Associates

Avocats

401 rue Bay, Bureau 1500

Toronto (Ontario)

M5H 2Y4

George Thomson                  pour l'intimé

Sous-procureur général du Canada

     COUR D'APPEL FÉDÉRALE

     Date : 19971120

     Dossier : A-41-97

Entre

     ROSALIA CORBO,

     requérante,

     - et -

     LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

     intimé

     MOTIFS DU JUGEMENT


__________________

1      Voir Procureur général et Thibault, Montréal, A-277-97, 27 octobre 1997 (C.A.F.).

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