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     Date : 19980506

     Dossier : A-193-95

CORAM :      LE JUGE STONE

         LE JUGE LINDEN

         LE JUGE ROBERTSON

ENTRE :

     LIGNES AÉRIENNES CANADIEN INTERNATIONAL LTÉE,

     Appelante,

     (Demanderesse),

     - et -

     IMTAZ HUSAIN,

     Intimé,

     (Défendeur).

AUDITION tenue à Toronto (Ontario), le mardi 5 mai 1998.

JUGEMENT rendu à l'audience à Toronto (Ontario), le mardi 5 mai 1998.

MOTIFS DU JUGEMENT PRONONCÉS PAR :      LE JUGE STONE

     Date : 19980506

     Dossier : A-193-95

CORAM :      LE JUGE STONE

         LE JUGE LINDEN

         LE JUGE ROBERTSON

ENTRE :

     LIGNES AÉRIENNES CANADIEN INTERNATIONAL LTÉE,

     Appelante,

     (Demanderesse),

     - et -

     IMTAZ HUSAIN,

     Intimé,

     (Défendeur).

     MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

     (Prononcés à l'audience à Toronto (Ontario)

     le mardi 5 mai 1998)

LE JUGE STONE

[1]      Il s'agit d'un appel d'une ordonnance par laquelle la Section de première instance a confirmé la sentence d'un arbitre rendue en vertu de l'article 242 du Code canadien du travail (le Code). L'arbitre a décidé que le licenciement de l'intimé par l'appelante était " injuste ".

[2]      L'alinéa 242(3.1)a) interdit l'instruction d'une plainte par l'arbitre dans le cas suivant :

         ...le plaignant a été licencié en raison du manque de travail ou de la suppression d'un poste;         

[3]      La preuve produite devant l'arbitre établissait que l'intimé a commencé a travailler pour l'appelante en juin 1990 sur un système de formation assistée par ordinateur. Le 29 novembre de cette année-là, il a été informé par son employeur que son poste était supprimé et que cette décision était [Traduction] " due au ralentissement très marqué de l'économie auquel notre industrie fait face et à la réorganisation du personnel qui en découle, entraînant un manque de travail. "

[4]      L'arbitre a conclu, à la page 9 de sa sentence :

         [Traduction] La réorganisation était une décision d'entreprise fondée sur le désir de Canadien de transférer la formation assistée par ordinateur de la Division de la formation technique à la Division des services aériens.         

Il a poursuivi en concluant, aux pages 9 et 10 :

         [Traduction] ... le plaignant n'a pas été licencié en raison du manque de travail ou de la suppression d'un poste. Je conclus que le plaignant a été licencié de façon injuste. Son licenciement est imputable au fait que les Services aériens ont réussi a obtenir le contrôle du programme de formation assistée par ordinateur.         

[5]      Les fonctions qu'exerçaient l'intimé sont décrites dans l'annexe " A " jointe à la sentence arbitrale. Des éléments de preuve ont été présentés à l'arbitre concernant la question de savoir si ces fonctions ont continué d'être exercées après son licenciement. L'une de ces fonctions consistait en la " création de didacticiels ". La preuve révélait que cette fonction serait désormais exercée par l'avionneur à Toulouse, en France. L'arbitre a tiré la conclusion suivante, à la page 9 de sa sentence :

         ... mis à part les fonctions de création de didacticiels, le travail exécuté par le plaignant a continué d'être effectué par d'autres employés de Canadien.         

[6]      La preuve indique effectivement que l'ensemble des fonctions restantes ont été exercées par des techniciens en simulateurs auxquels la formation assistée par ordinateur a été confiée pour les Services aériens et pour le service Entretien et Réparations, et que l'intimé n'avait pas les qualités requises pour travailler avec les simulateurs de vol utilisés pour la formation du personnel naviguant technique.

[7]      Le juge des requêtes qui a rejeté la demande de contrôle judiciaire de la sentence arbitrale présentée par l'appelante a déclaré, à la page 5 de ses motifs :

              [Traduction] La plainte de la demanderesse se résume donc à une plainte concernant l'appréciation par l'arbitre de la preuve qui lui a été présentée, mais je ne relève aucune erreur dans la façon dont il a traité la preuve ni dans sa conclusion. À son avis, les faits indiquaient que le poste du défendeur n'a pas été supprimé dans un objectif de " réduction des coûts " comme l'ont prétendu les Lignes aériennes Canadien, mais plutôt en raison d'un conflit entre les divisions qui, une fois résolu en faveur des Services aériens, a mené au licenciement de M. Husain. Cette conclusion relevait parfaitement de sa compétence et elle était étayée par la preuve produite devant lui.         

[8]      Dans l'arrêt Flieger c. Nouveau-Brunswick, [1993] 2 R.C.S. 651, la Cour suprême du Canada devait interpréter le libellé du paragraphe 26(1) de la Loi sur la Fonction publique, L.N.-B. 1984, ch. C-5.1, qui contient l'expression " suppression d'une fonction ", équivalente à celle figurant dans le paragraphe 242(3.1) du Code. À la page 664, le juge Cory a écrit, au nom de la majorité :

              Par conséquent, il y a " suppression d'une fonction " lorsque cet ensemble d'activités qui constitue un poste n'est plus exécuté par suite de la décision arrêtée de bonne foi par l'employeur. Par exemple, si un ensemble donné d'activités est tout simplement confié intégralement à une autre personne, ou si l'activité ou la tâche reçoit simplement un titre nouveau et différent de façon à pouvoir figurer dans une autre description de poste, alors on ne pourrait parler de la " suppression d'une fonction ". En revanche, si les activités qui font partie de l'ensemble ou du groupe d'activités sont réparties entre d'autres personnes, comme ce fut le cas dans Murdath , précité, il y aurait " suppression d'une fonction ". Il y aurait également " suppression d'une fonction " si les responsabilités sont décentralisées, comme ce fut le cas dans Coulombe , précité.         

[9]      L'examen du dossier nous convainc que l'appelante a raison d'affirmer que les fonctions du poste occupé auparavant par l'intimé ne sont plus intactes et qu'elles sont exécutées ailleurs ou qu'elles ont été ajoutées aux fonctions rattachées au poste d'employés existants ou qu'elles ne sont plus exécutées à l'intérieur de l'entreprise de l'appelante. Bref, la majeure partie des fonctions exécutées auparavant par l'intimé ont été décentralisées ou sont exécutées à l'extérieur de l'entreprise de l'appelante par l'avionneur. Comme l'a conclu l'arbitre, mis à part la fonction de création de didacticiels, le travail accompli par l'intimé a été confié à d'autres employés de l'appelante.

[10]      Comme l'a affirmé le juge Cory dans Flieger, précité, la décision de supprimer une ou plusieurs fonctions doit être prise " de bonne foi ". L'intimé a souligné certains éléments du dossier comme dénotant l'absence de bonne foi. Nous avons examiné la question de savoir si, en fait, le dossier contient des éléments de preuve qui établiraient clairement que la décision de licencier l'intimé n'a pas été prise de bonne foi. À notre avis, le dossier ne comporte pas de telle preuve. Bien que l'arbitre ait mentionné ces mêmes éléments dans sa sentence, il n'a pas conclu expressément que l'appelante avait agit de mauvaise foi.

[11]      Nous concluons donc que l'arbitre a commis une erreur dans son interprétation du paragraphe 242(3.1) du Code et dans l'application subséquente de cette disposition à la situation factuelle dont il était saisi. L'arbitre n'avait donc pas compétence pour rendre la sentence qu'il a rendue. En conséquence, le juge des requêtes a commis une erreur de droit en la confirmant.

[12]      L'appel sera accueilli, l'ordonnance prononcée par la Section de première instance le 3 mars 1995 est annulée, la demande de contrôle judiciaire est accueillie et la sentence rendue par l'arbitre le 6 octobre 1993 est annulée.

     " A.J. Stone "

                                         J.C.A.

Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL.L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     Avocats et avocats inscrits au dossier

DOSSIER DU GREFFE :                  A-193-95

INTITULÉ DE LA CAUSE :              LIGNES AÉRIENNES CANADIEN INTERNATIONAL LTÉE

                             - et -

                             IMTAZ HUSAIN

DATE DE L'AUDITION :                  5 MAI 1998

LIEU DE L'AUDITION :                  TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR PRONONCÉS

à l'audience à Toronto (Ontario)

le mardi 5 mai 1998                      PAR LE JUGE STONE

ONT COMPARU :                      M e William J. McNaughton

                                 pour l'appelante

                             M e Michael B. Fraleigh

                             M e Stephen Shantz

                                 pour l'intimé

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :          Smith Lyons

                             5800-40, rue King ouest

                             Toronto (Ontario)

                             M5H 3Z7

                                 pour l'appelante

                             McCarthy Tétrault

                             4700, Tour de la Banque TD

                             C.P. 48

                             Succursale Toronto Dominion

                             Toronto (Ontario)

                             M5K 1E6

                                 pour l'intimé

COUR D'APPEL FÉDÉRALE

     Date : 19980506

     Dossier : A-193-95

ENTRE :

LIGNES AÉRIENNES CANADIEN INTERNATIONAL LTÉE,

     Appelante,

- et -

IMTAZ HUSAIN,

     Intimé.

     MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR


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