Décisions de la Cour d'appel fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision



     Date: 20000417

     Dossier: ITA-225-98


MONTRÉAL (QUÉBEC), CE 17e JOUR D'AVRIL 2000

PRÉSENT: ME RICHARD MORNEAU, PROTONOTAIRE



     DANS L'AFFAIRE DE LA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU

     - et -

     DANS L'AFFAIRE D'UNE COTISATION OU DES COTISATIONS ÉTABLIES

     PAR LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL EN VERTU D'UNE OU

     PLUSIEURS DES LOIS SUIVANTES: LA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU,

     LE RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA ET LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI


Contre:

     MICHEL FRÉCHETTE

     Débiteur judiciaire

     ET

     LÉVESQUE BEAUBIEN GEOFFRION

     Tierce-saisie

     ET

     FIDUCIE D'INVESTISSEMENT SINOSA

     et

     MICHEL FRÉCHETTE ès-qualité de Fiduciaire

     de la FIDUCIE D'INVESTISSEMENT SINOSA

     Mis en cause




     MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET

     ORDONNANCE DÉFINITIVE DE SAISIE-ARRÊT

     (Règles 451 et 455(1) des Règles de la Cour fédérale (1998)

     et article 625 du Code de procédure civile



ME RICHARD MORNEAU, PROTONOTAIRE:


[1]      APRÈS AVOIR ENTENDU les procureurs des parties et après lecture des affidavits de Ghislain Émond, fonctionnaire autorisé au ministère du Revenu national, déposés au soutien de la requête de Sa Majesté la Reine, à laquelle était annexé un Certificat déposé le 19 janvier 1998 au greffe de cette Cour sous l'autorité de l'article 223 de la Loi de l'impôt sur le revenu et qui porte le numéro ITA-225-98 des dossiers de cette Cour;

[2]      ATTENDU qu'aux termes du Certificat, qui a la même valeur et le même effet qu'un jugement de cette Cour, il a été certifié que le débiteur judiciaire est endetté envers Sa Majesté la Reine du Chef du Canada pour la somme de 1 285 473,09 $, plus des intérêts composés quotidiennement prescrits en application de la Loi de l'impôt sur le revenu sur ladite somme pour la période allant du 13e jour de janvier 1998 au jour du paiement;

[3]      ATTENDU que la somme de 1 285 473,09 $ et les intérêts demeurent dus et impayés;

[4]      ATTENDU qu'il appert qu'une ordonnance provisoire de saisie-arrêt a été rendue le 8 juin 1999 par laquelle il a été ordonné que:

-      Toutes sommes dues ou qui deviendraient dues par Lévesque Beaubien Geoffrion à Michel Fréchette et/ou Fiducie d'Investissement Sinosa, Michel Fréchette ès-qualité de fiduciaire de la Fiducie d'Investissement Sinosa et plus particulièrement aux titres suivants:

     Quantité

     Description

     Valeur au marché au

     8 décembre 1998

500

Air Canada Corp.
     3 025,00 $

200

Banque de Montréal
     12 550,00 $

700

Transcanada Pipelines Ltd.
     15 505,00 $

500

Dofasco Inc.
     10 225,00 $

400

Groupe CGI Inc. SVS CL-A
     10 800,00 $
     52 105,00 $
     ou tout solde au sujet desdits titres ou montant à recevoir desdits titres, soient saisies-arrêtées en faveur de Sa Majesté la Reine du chef du Canada, afin de satisfaire et jusqu'à concurrence de la somme de 1 285 473,09 $ plus les intérêts composés quotidiennement au taux prescrit en vertu de la présente loi ou la Loi de l'impôt sur le revenu sur ladite somme pour la période allant du 13 janvier 1998 au jour du paiement plus les frais des présentes procédures de saisie-arrêt, lesquelles sommes sont dues à Sa Majesté la Reine du chef du Canada en vertu du Certificat déposé en l'instance le 19 janvier 1998 contre le débiteur judiciaire en vertu de l'article 223 de la Loi de l'impôt sur le revenu;
-      La tierce-saisie, Lévesque Beaubien Geoffrion, comparaisse devant cette Cour pour déclarer sous serment:
         1.      Toutes les sommes que la tierce-saisie doit, devra ou pourrait devoir à Michel Fréchette et/ou Fiducie d'Investissement Sinosa, Michel Fréchette ès-qualité de fiduciaire de la Fiducie d'Investissement Sinosa et plus particulièrement aux titres suivants:

     Quantité

     Description

     Valeur au marché au

     8 décembre 1998

500

Air Canada Corp.
     3 025,00 $

200

Banque de Montréal
     12 550,00 $

700

Transcanada Pipelines Ltd.
     15 505,00 $

500

Dofasco Inc.
     10 225,00 $

400

Groupe CGI Inc. SVS CL-A
     10 800,00 $
     52 105,00 $
             ou tout solde au sujet desdits titres ou montant à recevoir desdits titres; et
         2.      Tous les effets mobiliers appartenant au débiteur judiciaire et détenus par la tierce-saisie;
-      La tierce-saisie ne se dessaisisse pas desdits titres, sommes ou desdits effets mobiliers avant que le tribunal n'ait décidé de leur destination;
-      La Fiducie d'Investissement Sinosa et Michel Fréchette ès-qualité de fiduciaire de la Fiducie d'Investissement Sinosa, soient portés comme mis en cause sur les présentes procédures de saisie-arrêt;
-      La Fiducie d'Investissement Sinosa et Michel Fréchette ès qualité de fiduciaire de la Fiducie d'Investissement Sinosa comparaissent devant cette Cour pour exposer les motifs qu'ils pourraient avoir pour ne pas que cette Cour rende une ordonnance définitive de saisie-arrêt par laquelle il serait ordonné à la tierce-saisie de verser à Sa Majesté la Reine du chef du Canada les titres visés par la présente ordonnance de saisie-arrêt ou le produit des titres à être liquidés par la tierce-saisie;

[5]      ATTENDU que par déclaration datée du 23 juin 1999, la tierce-saisie Lévesque Beaubien Geoffrion Inc., par son représentant Me Lucie Brunet, a déclaré que:

3.      Nous détenons les titres suivants pour et au nom de Michel Fréchette et/ou Fiducie d'Investissement Sinosa, Michel Fréchette ès-qualité de fiduciaire de la Fiducie d'Investissement Sinosa:

     Quantité

Description

     Valeur au marché au

     8 décembre 1998

500
Air Canada Corp.

     3 025,00 $

200
Banque de Montréal

     12 550,00 $

700
Transcanada Pipelines Ltd.

     15 505,00 $

500
Dofasco Inc.

     10 225,00 $

400
Groupe CGI Inc. SVS CL-A

     10 800,00 $

     52 105,00 $

4.      Il nous est dû la somme de 23 350 $, en capital, intérêts et frais raisonnablement engagés, laquelle somme est garantie par hypothèque légale du courtier de premier rang en vertu du Code civil du Québec et Lévesque Beaubien Geoffrion Inc. est en droit d'exercer ses droits de créancier hypothécaire de préférence à quiconque;
5.      La tierce-saisie est en droit de vendre ou de prendre en paiement un nombre de titres suffisant pour payer la créance qui lui est due avant de remettre le résidu desdits titres à qui de droit;
6.      Le 1er juin 1999, nous avons reçu signification d'une hypothèque légale de second rang à l'égard des titres décrits au paragraphe 3 de la présente déclaration, tel qu'en fait foi l'acte d'hypothèque ci-joint à titre d'Annexe B;

[6]      ATTENDU que les mis-en-cause n'ont déposé aucune déclaration au dossier de cette Cour;

[7]      ATTENDU que puisque les mis-en-cause n'ont pas déposé de déclaration, la créancière-saisissante ne pouvait les interroger;

[8]      ATTENDU que l'article 625 du Code de procédure civile du Québec se lit comme suit:

625. La saisie en main tierce est pratiquée en signifiant au tiers-saisi et au débiteur un bref de saisie-arrêt. Ce bref enjoint au tiers-saisi de comparaître, à la date et à l'heure indiquées, pour déclarer sous serment les sommes qu'il doit au débiteur ou qu'il aura à lui payer, ainsi que les meubles, appartenant à ce dernier et qu'il détient, et de ne pas s'en dessaisir avant que le tribunal n'ait décidé de leur destination. Le bref assigne aussi le débiteur à comparaître au jour fixé, pour faire valoir les motifs pour lesquels la saisie-arrêt ne serait pas valable.
Si le débiteur n'a ni domicile, ni résidence, ni bureau d'affaires connus, dans le district où le jugement a été rendu, le bref lui est signifié au greffe du tribunal.

[9]      ATTENDU que l'article 56(1) de la Loi sur la Cour fédérale du Canada se lit comme suit:

56.(1) Outre les brefs de saisie-exécution ou autres moyens de contrainte prescrits par les règles pour l'exécution des jugements ou ordonnances de la Cour, celle-ci peut délivrer des moyens de contrainte visant la personne ou les biens d'une partie et ayant la même teneur et le même effet que ceux émanant d'une cour supérieure de la province dans laquelle le jugement ou l'ordonnance doivent être exécutés. Si, selon le droit de la province, le moyen de contrainte que doit délivrer la Cour nécessite l'ordonnance d'un juge, un juge de la Cour peut rendre une telle ordonnance.

[10]      ATTENDU que face à la preuve soumise par la créancière-saisissante, qu'il est raisonnable de déclarer que les faits et circonstances exposés dans ledit affidavit de Ghislain Émond sont tels qu'il y a lieu de considérer que Fiducie d'Investissement Sinosa n'est que l'instrument et/ou le prête-nom de Michel Fréchette afin de permettre à ce dernier de canaliser des sommes importantes qui lui appartiennent, de façon à lui permettre de se soustraire à ses obligations;

[11]      ATTENDU qu'il y a lieu de lever le voile à l'égard de la Fiducie d'Investissement Sinosa, Michel Fréchette ès-qualité de fiduciaire, et/ou de qualifier son existence de fictive ou simulée et de la constituer, partant, partie à la présente procédure de saisie-arrêt au même titre que Michel Fréchette;

[12]      ATTENDU que la Fiducie d'Investissement Sinosa fut créée le 18 juillet 1995, par acte notarié, en fraude des droits de la créancière-saisissante et a été simulée et qu'elle est fictive;

[13]      ATTENDU que cette Cour a juridiction pour effectuer une telle détermination dans le cadre des présentes procédures de saisie-arrêt au sens de l'arrêt Le Bois de Construction du Nord (1971) Ltée v. The Queen, 1986 2 C.T.C. 227;

[14]      EN CONSÉQUENCE, LA COUR DÉCLARE illégal, frauduleux, et absolument nul et de nul effet l'acte de fiducie et la fiducie invoquée par les mis-en-cause à l'endroit de la créancière saisissante;

[15]      DE PLUS, LA COUR DÉCLARE bonne et valable à toutes fins que de droit la saisie-arrêt pratiquée en l'instance par la créancière-saisissante à l'endroit de la tierce-saisie et les mis-en-cause;

[16]      DE PLUS, LA COUR DÉCLARE que l'hypothèque légale mobilière de second rang donnée en faveur de Me Jean-Claude Bureau sur les biens mobiliers faisant l'objet de la présente saisie est illégale, frauduleuse et absolument nulle et de nul effet à l'endroit de la créancière-saisissante puisque Michel Fréchette, un failli non libéré depuis le 6 décembre 1991, est une personne insolvable et donc son intention était de commettre une fraude à l'endroit de la créancière-saisissante;

[17]      DE PLUS, LA COUR DÉCLARE les titres détenus par la tierce-saisie, Lévesque Beaubien Geoffrion Inc., comme étant la propriété absolue de Michel Fréchette;

[18]      DE PLUS, LA COUR ORDONNE à la tierce-saisie, Lévesque Beaubien Geoffrion Inc., de liquider les titres qu'elle détient au nom de Michel Fréchette et/ou Fiducie d'Investissement Sinosa, Michel Fréchette ès-qualité de fiduciaire de la Fiducie d'Investissement Sinosa, pour ensuite verser le produit de réalisation à Sa Majesté la Reine afin d'acquitter une partie de la dette due à Sa Majesté la Reine par Michel Fréchette tout en faisant abstraction d'un montant de 23 350,00 $ payable à la tierce-saisie;

[19]      DE PLUS, LA COUR ORDONNE que le montant de 545,25 $ représentant les frais occasionnés à la créancière-saisissante par les présentes procédures de saisie-arrêt, soit payé conjointement et solidairement par les mis-en-cause.


Richard Morneau

     protonotaire

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     NOMS DES AVOCATS ET DES PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER


NO DU DOSSIER DE LA COUR:      ITA-225-98

INTITULÉ DE LA CAUSE:

         Dans l'affaire de la Loi de l'impôt sur le revenu,

         - et -

         Dans l'affaire d'une cotisation ou des cotisations établies par le ministre du Revenu national en vertu d'une ou plusieurs des lois suivantes: la Loi de l'impôt sur le revenu, le Régime de pensions du Canada et la Loi sur l'assurance-emploi,

         CONTRE:

         MICHEL FRÉCHETTE

     Débiteur judiciaire

         ET

         LÉVESQUE BEAUBIEN GEOFFRION

     Tierce-saisie

         ET

         FIDUCIE D'INVESTISSEMENT SINOSA et MICHEL FRÉCHETTE ès-qualité de Fiduciaire de la FIDUCIE D'INVESTISSEMENT SINOSA

     Mis en cause



LIEU DE L'AUDIENCE:Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE:le 31 mars 2000

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE ME RICHARD MORNEAU, PROTONOTAIRE

DATE DES MOTIFS DE L'ORDONNANCE:le 17 avril 2000


ONT COMPARU:


Me Daniel Beauchamp

pour Sa Majesté la Reine

Me Jean-Claude Bureau

pour les mis en cause

Me Gérard Dugré

pour la tierce-saisie


PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER:


Me Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Pour Sa Majesté la Reine

Wingender, Bureau, Savard

Laval (Québec)

pour les mis en cause

Byers Casgrain

Montréal (Québec)

pour la tierce-saisie

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.