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Date : 20000914


Dossier : A-755-98


CORAM :      LE JUGE DESJARDINS

         LE JUGE LÉTOURNEAU

         LE JUGE NOËL


ENTRE :

     ENTRELEC INC.,

     APPELANTE

     (demanderesse),


     ET

     LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

     INTIMÉ

     (défendeur).


     MOTIFS DU JUGEMENT

     (Prononcés à l'audience, à Montréal,

     le 14 septembre 2000.)



[1]          Nous ne sommes pas convaincus que le Tribunal canadien du commerce extérieur (le Tribunal) a mal interprété les termes « devant servir aux » qui sont employés relativement au code 2101 de l'annexe II du Tarif des douanes, L.R.C. (1985), ch. 41 (3e suppl.). Cette disposition est ainsi rédigée :

Articles (other than goods of the tariff item Nos. enumerated below) for use in:

2101      The goods of tariff item No:

     ...9032.89.20.

Articles (autres que les marchandises des nos tarifaires énumérées ci-dessous) devant servir aux marchandises des nos tarifaires:

2101      Les marchandises des nos tarifaires:

     ...9032.89.20.

[2]          Pour décider si les marchandises en cause de l'appelante peuvent bénéficier des avantages du code 2101, lequel prévoit l'entrée en franchise d'articles devant servir aux marchandises visées par le numéro tarifaire 9032.89.20, le Tribunal a tenu compte de la définition qui est donnée de ces termes à l'article 4 de la Loi. Voici le texte de cette disposition :

4. The expression "for use in", wherever it occurs in a tariff item in Schedule I or a code in Schedule II in relation to goods, means, unless the context otherwise requires, that the goods must be wrought into, attached to or incorporated into other goods as provided for in that tariff item or code.

4. Les expressions « devant servir dans » et « devant servir à » , mentionnées en regard d'un numéro tarifaire de l'annexe I ou d'un code de l'annexe II, signifient que, sauf indication contraire du contexte, les marchandises en cause entrent dans la composition d'autres marchandises par voie d'ouvraison, de fixation ou d'incorporation, selon ce qui est indiqué en regard de ce numéro ou code.

[3]          Le Tribunal a conclu que, suivant cette définition, il était impératif d'établir qu'il y avait eu une « utilisation effective » des articles postérieurement à l'importation pour bénéficier du code 2101. Comme il est prévu à l'article 4, ces articles doivent donc, « par voie d'ouvraison, de fixation ou d'incorporation » , « entre[r] dans la composition » des marchandises à l'égard desquelles on invoque un numéro tarifaire.

[4]          Même s'il est exact que les termes « devant servir dans » ou « devant servir à » (en anglais « for use in » ), plutôt que « servant à » , devraient normalement renvoyer à l'utilisation prévue par l'importateur, la définition se trouvant à l'article 4 leur donne un sens précis, différent de leur signification habituelle. En établissant que les marchandises importées « entrent » (en anglais « must be » ) dans la composition d'autres marchandises par voie d'ouvraison, de fixation ou d'incorporation, cette définition, comme l'a à bon droit conclu le Tribunal, rend nécessaire l'existence d'un lien concret, par opposition à un lien envisagé, entre les composants importés et les marchandises auxquelles ils servent.

[5]          Le Tribunal a en outre tiré une conclusion de fait fondée sur la preuve dont il était saisi, savoir que les marchandises en cause étaient susceptibles de servir à des marchandises autres que celles mentionnées au numéro tarifaire 9032.89.20. Plus précisément, il a estimé que les articles en litige pouvaient également servir aux marchandises du numéro tarifaire 85.37, qui comprend les automates programmables, tandis que la réclamation de l'appelante visant la franchise de droits fondée sur le code 2101 concerne l'utilisation prévue de ces articles dans les appareils de processus industriel. Or, nous ne pouvons intervenir relativement à une conclusion de cette nature que si elle découle d'une erreur manifeste.

[6]          Nous n'avons pas à expliquer de façon détaillée les différences qui existent entre les automates programmables et les appareils de processus industriel. Il suffit de dire que M. Turnbull, expert en la matière, a préparé et expliqué une liste dans laquelle il mentionne, pour chacun des numéros tarifaires en cause, des utilisations autres que la commande de processus.

[7]          En outre, dans son témoignage, M. Turnbull a déclaré que les biens en question étaient plutôt de nature générique. Il a ensuite expliqué comment certains articles, tels les « blocs de jonction » et les « relais » , pouvaient servir de diverses façons à des marchandises autres que des appareils de processus industriel. À notre avis, ce témoignage fondait le Tribunal à conclure que les marchandises en question pouvaient avoir des utilisations et applications autres que le processus industriel. La question n'est toutefois pas réglée pour autant puisque les diverses applications ou utilisations n'empêchent pas les marchandises de bénéficier des avantages du code 2101 dans la mesure où on produit des éléments de preuve établissant une utilisation conforme aux exigences fixées par cette disposition. C'est à cet égard que l'appelante fait valoir que le Tribunal a commis une erreur manifeste en concluant qu'elle n'a pas réussi à montrer une quelconque utilisation effective dans le processus industriel. Le Tribunal mentionne ce qui suit aux pages 18 et 19 de sa décision :

     Selon le Tribunal, l'appelante, dans le présent appel, n'est pas admissible aux avantages du code 2101 parce qu'elle n'a pas démontré que certaines des marchandises en cause servaient effectivement aux appareils de processus industriel [...] Les agents de l'intimé ont expliqué à l'appelante le type de preuve dont ils avaient besoin pour établir l'utilisation ultime. De tels éléments de preuve auraient pu inclure des certificats d'utilisation ultime, des commandes, des factures ou d'autres documents qui se rapportaient clairement aux marchandises en cause. Cependant, de tels éléments de preuve n'ont jamais été soumis.

     [Non souligné dans l'original.]

[8]          L'appelante a présenté trois sortes d'éléments de preuve devant le Tribunal : des certificats d'utilisation ultime émanant de clients, les dépositions de deux directeurs de l'appelante ainsi que des organigrammes de projets. Les témoignages rendus par les deux directeurs portaient sur les cinq organigrammes qui, selon eux, établissent une certaine utilisation effective des marchandises en cause dans des appareils de processus industriel du même genre que ceux visés par le numéro tarifaire 9032.89.20. L'avocat de l'intimé a admis que les organigrammes concernaient les marchandises en cause et que la preuve établissait donc dans une certaine mesure que ces marchandises avaient effectivement servi aux appareils de processus industriel. Il a par contre soutenu que cette utilisation ne visait qu'une petite partie des marchandises importées et qu'il ne s'agissait donc pas d'une preuve probante. De plus, le Tribunal a reconnu à la page 12 de sa décision qu'un des directeurs, M. Ménager, a expliqué comment les marchandises en cause servaient aux applications de commande de processus.

[9]          Compte tenu de la situation, force nous est de conclure qu'on a satisfait au critère touchant [TRADUCTION] « l'utilisation effective de certaines des marchandises en cause » adopté par le Tribunal. L'appelante aurait peut-être dû fournir davantage d'éléments de preuve relatifs à l'utilisation véritable des marchandises en cause, mais on ne peut toutefois dire, à l'instar du Tribunal, qu'aucune preuve [TRADUCTION] « quelconque » n'a été présentée en ce sens.

[10]          Il ne nous appartient pas de décider comment le Tribunal aurait tranché l'affaire s'il avait pris en considération les éléments de preuve dont il était saisi. Nous pouvons uniquement renvoyer l'affaire devant lui pour qu'il se prononce à nouveau sur la demande de l'appelante puisqu'il disposait d'éléments de preuve établissant que certaines des marchandises en cause servaient effectivement aux appareils de processus industriel.

[11]          Pour ces motifs, l'appel sera accueilli avec dépens, la décision du Tribunal sera annulée et l'affaire sera renvoyée devant le Tribunal pour qu'il se prononce à nouveau sur la demande présentée par l'appelante en vue de bénéficier des avantages du code 2101, conformément aux présents motifs.


                                 GILLES LÉTOURNEAU

                                                 Juge




Traduction certifiée conforme


Martine Guay, LL.L.






Date : 20000914


Dossier : A-755-98


MONTRÉAL (QUÉBEC), LE 14 SEPTEMBRE 2000



CORAM :      MADAME LE JUGE DESJARDINS

             MONSIEUR LE JUGE LÉTOURNEAU

             MONSIEUR LE JUGE NOËL



ENTRE :

     ENTRELEC INC.,

     APPELANTE

     (demanderesse),

     ET

     LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

     INTIMÉ

     (défendeur).


     J U G E M E N T

         Le présent appel est accueilli avec dépens, la décision du Tribunal est annulée et l'affaire est renvoyée devant le Tribunal pour qu'il se prononce à nouveau sur la demande présentée par l'appelante en vue de bénéficier des avantages du code 2101 compte tenu du fait qu'il existe des éléments de preuve établissant que certaines des marchandises en cause servaient aux appareils de processus industriel.





                                 ALICE DESJARDINS

                                             Juge






Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL.L.






Date : 20000914


Dossier : A-755-98


CORAM :      LE JUGE DESJARDINS

             LE JUGE LÉTOURNEAU

             LE JUGE NOËL


ENTRE :

     ENTRELEC INC.,

     APPELANTE

     (demanderesse),


     ET

     LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

     INTIMÉ

     (défendeur).






Jugement rendu à l'audience à


Montréal (Québec) le jeudi 14 septembre 2000.






MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR PRONONCÉS PAR LE JUGE LÉTOURNEAU.


LES JUGES DESJARDINS ET NOËL ONT SOUSCRIT À CES MOTIFS.

COUR D'APPEL FÉDÉRALE


AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :                  A-755-98

INTITULÉ DE LA CAUSE :      ENTRELEC INC.

                         ET

                         LE SOUS-MINISTRE DU REVENU NATIONAL

LIEU DE L'AUDIENCE :          Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE:          Le 14 septembre 2000


MOTIFS DU JUGEMENT PRONONCÉS PAR MONSIEUR LE JUGE LÉTOURNEAU LE 14 SEPTEMBRE 2000.


ONT SOUSCRIT À CES MOTIFS, MADAME LE JUGE DESJARDINS ET MONSIEUR LE JUGE NOËL.



ONT COMPARU :

Michael Kaylor                          POUR L'APPELANTE

Louis Sébastien                          POUR L'INTIMÉ



AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Lapointe Rosenstein                          POUR L'APPELANTE

Morris Rosenberg                          POUR L'INTIMÉ

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

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