Date : 20041214
Dossier : A-322-04
Référence : 2004 CAF 432
CORAM : LE JUGE DÉCARY
LE JUGE MALONE
ENTRE :
JOAN A. WILLIAMSON
appelante
et
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
représentant le ministre chargé de l'application
de la Loi sur l'exportation et l'importation de biens culturels
intimé
Audience tenue à Edmonton (Alberta), le 14 décembre 2004
Jugement rendu à l'audience à Edmonton (Alberta), le 14 décembre 2004
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR : LE JUGE ROTHSTEIN
Date : 20041214
Dossier : A-322-04
Référence : 2004 CAF 432
CORAM : LE JUGE DÉCARY
ENTRE :
JOAN A. WILLIAMSON
appelante
et
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
représentant le ministre chargé de l'application
de la Loi sur l'exportation et l'importation de biens culturels
intimé
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR
(Prononcés à l'audience à Edmonton (Alberta),
le 14 décembre 2004)
LES FAITS
[1] L'appelante a fait don de certains biens à la Fort Saskatchewan Historical Society, qui a ensuite présenté une demande de désignation en vertu du paragraphe 32(2) de la Loi sur l'exportation et l'importation de biens culturels, L.R.C. 1985, ch. C-51. L'acceptation de cette demande aurait pu entraîner certaines incidences fiscales favorables pour l'appelante.
[2] Dans une lettre datée du 3 juillet 2002, la demande de désignation a été refusée par Victoria Baker, qui était à l'époque gestionnaire intérimaire du Programme des biens culturels mobiliers de la Direction générale des politiques du patrimoine du ministère du Patrimoine canadien.
[3] L'appelante a présenté une demande de contrôle judiciaire visant la décision de Mme Baker.
[4] Le juge O'Keefe, de la Cour fédérale, a décidé que Mme Baker et Michel Francoeur, qui ont déposé des affidavits dans le cadre de la procédure de contrôle judiciaire, n'étaient pas tenus de répondre à certaines questions posées par l'appelante au cours du contre-interrogatoire sur leurs affidavits. Les questions avaient trait aux communications entre Mme Baker et un avocat du ministère de la Justice, Philippe Madgin. Le juge O'Keefe a déterminé que ces communications avaient pour but d'obtenir un avis juridique et qu'elles étaient donc protégées par le secret professionnel de l'avocat. Il a refusé d'ordonner que des réponses soient données aux questions concernant les communications.
[5] C'est cette décision qui fait l'objet du présent appel.
ANALYSE
[6] Nous devons d'abord mentionner que la Cour devrait avoir accès aux communications en question. Cependant, ces communications n'ont pas été produites en l'espèce, et on ne nous a pas demandé de les examiner. La décision rendue par Mme Baker le 3 juillet 2002 n'a pas non plus été produite. En conséquence, nous devons trancher l'appel en fonction des documents dont nous disposons.
[7] L'appelante dit que les réponses qu'elle demande serviront à déterminer si les communications sont protégées par le secret professionnel de l'avocat.
[8] L'appelante s'appuie sur les propos suivants formulés par le juge Binnie dans R. c. Campbell, [1999] 1 R.C.S. 565, au paragraphe 50 :
Le secret professionnel de l'avocat s'appliquera ou non à ces situations selon la nature de la relation, l'objet de l'avis et les circonstances dans lesquelles il est demandé et fourni.
Le juge Binnie semble s'être fondé à cet égard sur une observation faite par lord Hanworth, M.R., dans Minter c. Priest, [1929] 1 K.B. 655 (C.A.), aux pages 668 et 669 :
[TRADUCTION] [I]l ne suffit pas que le témoin dise : « Je suis allé voir un avocat. » ... Il est permis de poser des questions pour découvrir et déterminer pour quelle raison et dans quelles circonstances le client présumé est allé voir l'avocat.
[9] S'appuyant sur ces arrêts, l'appelante soutient qu'il faut tenir compte de trois facteurs pour déterminer si les communications entre M. Madgin et Mme Baker sont privilégiées :
1. la nature de la relation entre M. Madgin et Mme Baker;
2. l'objet de l'avis;
3. les circonstances dans lesquelles il a été demandé et fourni.
[10] Devant la Cour, l'avocat de l'appelante a reconnu que la relation entre M. Madgin et Mme Baker était une relation entre un avocat et un client. Il a cependant mis en cause l'objet de l'avis et les circonstances dans lesquelles il a été demandé et fourni.
[11] Nous avons pris connaissance des affidavits de Mme Baker et de M. Francoeur qui ont été déposés. Mme Baker décrit son poste et ses fonctions. Elle déclare qu'elle devait rendre une décision concernant une demande présentée par l'appelante en vertu de la Loi sur l'exportation et l'importation de biens culturels et qu'elle a demandé un avis juridique à cette fin. M. Francoeur dit qu'il a reçu la demande d'avis juridique de Mme Baker, que c'est M. Madgin qui était chargé de fournir l'avis demandé et que l'avis a été fourni.
[12] Dans les circonstances de l'espèce, ces affidavits renferment une preuve prima facie de l'objet de l'avis et des circonstances dans lesquelles il a été demandé et fourni.
[13] L'appelante demande cependant d'autres détails. Elle veut savoir si une certaine lettre a été remise par Mme Baker à M. Madgin, si un avis juridique a été demandé relativement à cette lettre et si Mme Baker disposait de cet avis juridique lorsqu'elle a rendu sa décision.
[14] Les affidavits de Mme Baker et de M. Francoeur parlent de l'objet de l'avis et des circonstances dans lesquelles il a été demandé et fourni. Les questions posées ne portent pas sur ces aspects des affidavits de Mme Baker et de M. Francoeur.
[15] Nous ne voyons pas comment les réponses à ces questions aideront à déterminer si le secret professionnel de l'avocat s'applique. Il semble plutôt qu'il s'agisse d'une tentative d'en savoir plus au sujet de la nature de l'avis qui a été donné.
[16] Si des réponses étaient données aux questions posées, l'appelante en saurait plus au sujet de l'avis qui a été donné, mais cela ne permettrait pas de savoir si les communications en cause sont protégées par le secret professionnel de l'avocat.
[17] L'appel sera rejeté avec dépens.
« Marshall E. Rothstein »
Juge
Traduction certifiée conforme
Jacques Deschênes, LL.B.
COUR D'APPEL FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : A-322-04
(APPEL D'UNE ORDONNANCE DE LA COUR FÉDÉRALE DATÉE DU 9 JUIN 2004, DOSSIER : T-1214-02)
INTITULÉ : JOAN A. WILLIAMSON
c.
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
représentant le ministre chargé de l'application de la Loi sur l'exportation et l'importation de biens culturels
LIEU DE L'AUDIENCE : EDMONTON (ALBERTA)
DATE DE L'AUDIENCE : LE 14 DÉCEMBRE 2004
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR : (LES JUGES DÉCARY, ROTHSTEIN
ET MALONE)
PRONONCÉS À L'AUDIENCE PAR: LE JUGE ROTHSTEIN
COMPARUTIONS :
David Rolf POUR L'APPELANTE
Tracy King POUR L'INTIMÉ
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Parlee McLaws POUR L'APPELANTE
Edmonton (Alberta)
Morris A. Rosenberg POUR L'INTIMÉ
Sous-procureur général du Canada