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Date : 20030329

 

Dossier : A-125-02

 

Référence neutre : 2003 CAF 193

 

 

CORAM :      LE JUGE STRAYER

LE JUGE EVANS

LE JUGE MALONE

 

 

ENTRE :

 

                                                       SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                                                                                    demanderesse

 

                                                                             et

 

                              POLYGON SOUTHAMPTON DEVELOPMENT LTD.

                                                                                                                                      défenderesse

 

 

                      Audience tenue à Vancouver (Colombie-Britannique), le 6 mars 2003.

 

                                    Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 29 avril 2003.

 

 

 

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                            LE JUGE MALONE

 

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                      LE JUGE STRAYER

                                                                                                                             LE JUGE EVANS


Date : 20030329

 

Dossier : A-125-02

 

Référence neutre : 2003 CAF 193

 

 

CORAM :      LE JUGE STRAYER

LE JUGE EVANS

LE JUGE MALONE

 

 

ENTRE :

 

                                                       SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                                                                                    demanderesse

 

                                                                             et

 

                              POLYGON SOUTHAMPTON DEVELOPMENT LTD.

                                                                                                                                      défenderesse

 

 

                                                       MOTIFS DU JUGEMENT

 

LE JUGE MALONE

                                                                             

I.  Introduction


[1]               La question principale dans cette demande de contrôle judiciaire consiste à savoir si certains actes formalistes de transport effectués par Polygon Southampton Development Ltd. (Polygon) au profit des acheteurs de nouveaux logements en copropriété doivent suivre les règles de la fourniture à soi-même prévues par le paragraphe 191(1) de la Loi sur la taxe d’accise modifiée, L.R. 1985, ch. E-15 (la Loi). La question accessoire consiste à savoir, au cas où Polygon ne serait pas régie par les règles de la fourniture à soi-même et où les remboursements pour habitation neuve à la disposition des acheteurs auraient par conséquent été sous-calculés, si Polygon, en sa qualité de constructeur, a maintenant droit à la portion du remboursement qui n’a pas déjà été réclamée par les acheteurs.

 

[2]               Le savant juge de la Cour de l’impôt (juge) a accueilli un appel interjeté par Polygon à l’encontre de l’établissement de la taxe sur les produits et services (TPS) s’appliquant à ces logements. Le juge a déterminé que les règles de fourniture à soi-même du paragraphe 191(1) ne s’appliquaient pas, que l’aliénation des logements par Polygon constituait une fourniture imposable ne bénéficiant pas de l’exemption et que les remboursements pour maisons neuves pouvaient être demandés à l’égard de la totalité du prix d’achat, conformément au paragraphe 254(2) de la Loi. La décision est publiée dans [2002] G.S.T.C. 17.

 

[3]               La décision de la Cour canadienne de l’impôt est exclusivement fondée sur des questions de droit et a été rendue en vertu de la procédure informelle établie à l’article 18.3001 de la Loi sur la Cour canadienne de l’impôt, L.R. 1985 ch. T-2. Mon examen est effectué selon la norme de la décision correcte (Metropolitan Toronto Hockey League c. Canada, [1995] G.S.T.C. 31; [1995] A.C.F. no 944).

 

II.  Faits


[4]               Polygon est un « constructeur » aux fins de la TPS, inscrit en vertu de la partie IX de la Loi. Au cours de la période allant de 1996 à 2000, son activité principale consistait en la construction de nouveaux logements en copropriété sur des terrains loués à la Ville de Vancouver en vertu d’un bail foncier. Ce bail foncier et toute amélioration des terrains effectuée par Polygon étaient assujettis à la partie 3 de la Condominium Act de la Colombie-Britannique, R.S.B.C. 1996, ch. 64 [maintenant abrogée] (Condominium Act) qui régissait la construction de logements en copropriété sur des terrains loués à des instances gouvernementales ou publiques.

 

[5]               Les dispositions pertinentes de la Condominium Act sont les suivantes :

 

[TRADUCTION]

 

94. Malgré les articles 2 et 3, le registrateur ne doit pas accepter le dépôt d’un plan de condominiums à bail à moins qu’il soit satisfait aux exigences suivantes :

 

a) le titre d’un bien-fonds inclus dans le plan de condominiums à bail est inscrit au nom du gouvernement, de la Couronne fédérale, d’une municipalité, d’un district régional ou d’un autre organisme public;

 

[...]

 

©) le bail foncier est encore valide pour au moins 50 années après la date du dépôt du plan de condominiums à bail;

 

  95. Malgré les articles 2 et 3, lors du dépôt d’un plan de condominiums à bail, le registrateur doit inscrire les nouveaux titres de propriété incontestables au nom du propriétaire en fief simple du terrain, y compris le plan de condominiums à bail pour chacun des logements indiqués sur le plan, le cas échéant.

 

  96. (1) Le dépôt du plan de condominiums à bail convertit le bail foncier enregistré en baux individuels établis au nom du propriétaire promoteur pour les droits que détient le gouvernement ou le locateur dans chaque unité condominiale et dans les parties communes. Les modalités du bail, notamment le loyer ou la contrepartie, sont celles énoncées dans le bail foncier et le bail type d'unité condominiale, sous réserve des dispositions de la présente loi et des règlements pris en application de celle-ci.

 

[...]

 

        (5) Le cessionnaire des droits du propriétaire promoteur à titre de locataire d'unité condominiale est réputé s'être engagé par écrit avec le gouvernement ou le locateur à être lié par les modalités du bail type unité condominiale et à les exécuter. Il n'est cependant pas lié par les modalités du bail foncier qui ne figurent pas également dans le bail type unité condominiale, et n'est pas tenu de les exécuter et ce, malgré toute entente contraire.

 

  97. (1) Le gouvernement ou tout autre bailleur doit acheter les droits du preneur à bail lors de la fin du bail de l’unité condominiale. 

 

        (2) Le prix d’achat doit être déterminé à la date d’expiration du bail de l’unité condominiale et doit être

 

a) le prix calculé sur la base indiquée dans une annexe accompagnant le plan de condominiums à bail ou

 

b) s’il n’en existe pas, la valeur marchande équitable du droit du locataire concernant l’unité condominiale évaluée comme si le bail ne prenait pas fin.

 

        (3) Le gouvernement ou tout autre bailleur en vertu du plan d’unités condominiales peut, si l’association condominiale y consent par voie de résolution unanime, changer la base du calcul du prix d’achat de l’unité condominiale indiquée dans l’annexe et doit déposer l’annexe modifiée auprès du régistrateur.

 

        (4) Sauf indication expresse du contraire dans le bail d’unité condominiale ou sauf convenu par écrit entre le gouvernement ou tout autre bailleur et le bailleur de l’unité condominiale, si le gouvernement ou tout autre bailleur ne se sont pas accordés sur le prix d’achat en vertu de l’alinéa (2)b), 30 jours avant la date d’expiration à la fin du bail ou 30 jours après la date d’expiration en vertu du paragraphe 109(2), le prix d’achat en vertu de l’alinéa (2)b) doit être déterminé par l’intermédiaire de l’arbitrage en vertu de la Commercial Arbitration Act.

 

  98. Si, lors du défaut de respect et de réalisation de ses propres obligations en vertu du bail d’unités condominiales par un locataire d’une unité condominiale, le gouvernement ou tout autre bailleur possède de nouveau le droit d’entrée dans l’unité condominiale et d’en reprendre possession, le gouvernement ou tout autre bailleur ne doit pas, malgré toute entente ou législation indiquant le contraire, entrer de nouveau dans l’unité condominiale ou en reprendre possession ou agir en sorte que le bail de l’unité se termine mais présentera une demande au tribunal pour obtenir une ordonnance de vente.

 


[6]               Afin de se conformer aux dispositions ci-dessus, Polygon a déposé un plan d’unités condominiales qui divisait les terrains loués en unités condominiales individuelles. De nouveaux certificats de propriété ont ensuite été délivrés à la Ville de Vancouver en tant que locateur pour chacune des unités indiquées sur ce plan. Le bail foncier original a également été converti en baux d’unités condominiales individuelles portant le nom de Polygon en tant que locataire. Chaque bail d’unité condominiale comprenait les modalités d’un bail type d’unité condominiale mentionné dans le bail foncier. Tous les baux sont d’une durée de 99 années.

 

[7]               Le bail type d’unité condominiale prévoit une forme de cession de l’intérêt à bail de Polygon dans les unités condominiales aux acheteurs de logements en copropriété. À la rubrique [traduction] « Modalités des actes – Partie 2 – Cession », ce formulaire explique ce qui suit:

Polygon convient de céder son droit sur l’unité condominiale en question à chaque acquéreur en contrepartie du montant à payer par l’acquéreur. Le contrat indique un montant unique comme prix d’achat et ne le répartit pas entre le bâtiment et le terrain de l’unité condominiale. 

 

 

 

[8]               Conformément au formulaire type, le contrat d’achat et de vente passé entre Polygon et les acheteurs des logements en copropriété prévoit ce qui suit au paragraphe 5 :

L’acquéreur reconnaît que le présent contrat porte sur l’achat de la cession du droit de Polygon sur la durée restant au bail de 99 ans de l’unité condominiale, payé d’avance, portant sur l’unité condominiale locative comprenant la résidence.

 

 

 


[9]               En vertu des sous-alinéas 191(1)b)(I) et 191(1)b)(iii) de la Loi, lorsqu’un constructeur construit un nouveau logement en copropriété et loue ou occupe ce logement, les règles sur la fourniture à soi‑même le réputent avoir vendu le logement à lui-même et la TPS est alors payable par le constructeur sur la valeur marchande juste du logement. En vertu du sous‑alinéa 191(1)b)(ii), la règle s’applique également lorsqu’un constructeur vend un nouveau bâtiment et loue des terrains liés au bâtiment ou cède un bail sur ces terrains.

 

[10]           Ce sous-alinéa est libellé comme suit :

 

  191. (1) Pour l'application de la présente partie, lorsque les conditions suivantes sont réunies :

 

  191. (1) For the purposes of this Part, where

 

 a) la construction ou les rénovations          majeures d'un immeuble d'habitation ‑‑      immeuble d'habitation à logement unique ou logement en copropriété ‑‑ sont achevées en grande partie,

 

(a) the construction or substantial renovation of a residential complex that is a single unit residential complex or a residential condominium unit is substantially completed,

 

      b) le constructeur de l'immeuble :

 

        (b) the builder of the complex

 

(i) soit en transfère la possession à une personne aux termes d'un bail, d'une licence ou d'un accord semblable (sauf un accord qui est connexe à un contrat de vente visant l'immeuble et qui porte sur la possession ou l'occupation de l'immeuble jusqu'au transfert de sa propriété à l'acheteur aux termes du contrat) conclu en vue de l'occupation de l'immeuble à titre résidentiel,

 

(i) gives possession of the complex to a particular person under a lease, licence or similar arrangement (other than an arrangement, under or arising as a consequence of an agreement of purchase and sale of the complex, for the possession or occupancy of the complex until ownership of the complex is transferred to the purchaser under the agreement) entered into for the purpose of its occupancy by an individual as a place of residence,

 

(ii) soit en transfère la possession à

une personne aux termes d'une

convention, sauf une convention

portant sur la fourniture d'une maison

mobile et d'un emplacement pour

celle‑ci dans un parc à roulottes

résidentiel, portant sur l'une des

fournitures suivantes :                       

 

 

(ii) gives possession of the complex to a particular person under an agreement for

 

(A) la fourniture par vente de tout ou partie du bâtiment dans lequel est située l'habitation faisant partie de l'immeuble,

 

(A) the supply by way of sale of the building or part thereof in which the residential unit forming part of the complex is located, and

 

 

(B) la fourniture par bail du fonds faisant partie de l'immeuble ou la fourniture d'un tel bail par cession,

 

(B) the supply by way of lease of the land forming part of the complex or the supply of such a lease by way of assignment,

 

 

 

 

other than an agreement for the supply of a mobile home and a site for the home in a residential trailer park, or

 

(iii) soit, s'il est un particulier, occupe lui‑même l'immeuble à titre résidentiel,

 

(iii) where the builder is an individual, occupies the complex as a place of residence, and

 

 

c) le constructeur, la personne ou le particulier locataire de celle‑ci ou titulaire d'un permis de celle‑ci est le premier à occuper l'immeuble à titre résidentiel après que les travaux sont achevés en grande partie,

 

©) the builder, the particular person or an individual who is a tenant or licensee of the particular person is the first individual to occupy the complex as a place of residence after substantial completion of the construction or renovation,

 

 

 le constructeur est réputé :

 

the builder shall be deemed

 

d) avoir effectué et reçu, par vente, la fourniture taxable de l'immeuble au dernier en date du jour où les travaux sont achevés en grande partie et du jour où la possession de l'immeuble est transférée à la personne ou l'immeuble est occupé par lui;

 

 

(d) to have made and received, at the later of the time the construction or substantial renovation is substantially completed and the time possession of the complex is so given to the particular person or the complex is so occupied by the builder, a taxable supply by way of sale of the complex, and

 

e) avoir payé à titre d'acquéreur et perçu à titre de fournisseur, au dernier en date de ces jours, la taxe relative à la fourniture, calculée sur la juste valeur marchande de l'immeuble ce jour‑là.

 

(e) to have paid as a recipient and to have collected as a supplier, at the later of those times, tax in respect of the supply calculated on the fair market value of the complex at the later of those times.

 

 


[11]           Pour calculer les remboursements pour maisons neuves à la disposition des acheteurs de ses logements en copropriété, Polygon a institué une pratique interne selon laquelle il répartit le prix d’achat entre le terrain (24 p. 100) et les bâtiments (76 p. 100). Conformément à l’article 254.1 qui s’applique lorsqu’un constructeur se procure un logement à lui-même en vertu du sous‑alinéa 191(1)b)(ii), les remboursements pour maisons neuves n’ont été demandés que sur la portion du prix d’achat correspondant au bâtiment. Polygon a crédité les montants à ses acheteurs et a déduit les montant de la TPS pouvant être perçue conformément à cette répartition (toutes les dispositions pertinentes au régime des remboursements pour maisons neuves sont reproduites au paragraphe 41 des présents motifs).

 

[12]           Par un avis en date du 4 janvier 2000, le ministre a établi la cotisation de Polygon, déterminant que pour les besoins du calcul des remboursements pour maisons neuves, il était approprié d’allouer 32,5 p. 100 du prix d’achat des logements en copropriété au terrain, et non pas 24 p. 100. Polygon s’est opposée à cette décision et cette portion de la cotisation a été finalement retirée par le ministre. Cependant, le ministre n’était pas d’accord avec l’objection supplémentaire soulevée par Polygon aux termes de laquelle cette dernière n’était pas obligée d’effectuer une fourniture à soi-même et que, par conséquent, les remboursements pour maisons neuves auraient dû être calculés sur la base de la totalité du prix d’achat, conformément au paragraphe 254(2) de la Loi.

 


[13]           Polygon a ensuite interjeté appel à l’encontre de la décision du ministre devant la Cour Canadienne de l’impôt.

 

III.  Décision de la Cour canadienne de l’impôt

[14]           Le juge a conclu que les règles de la fourniture à soi-même ne s’appliquaient pas car toutes les transactions grâce auxquelles les intérêts de Polygon dans le bail de 99 années avaient été transférés à un acheteur ne constituaient pas une cession du bail mais, pour reprendre ses termes « plutôt une vente aux termes de la Loi [sur la taxe d’accise] » (paragraphe 45 de ses motifs). À partir de là, il a conclu que chaque transaction constituait une vente imposable et que les règles de la fourniture à soi-même ne s’appliquaient pas. Les répercussions de cette décision sur les remboursements pour maisons neuves consistaient en ce que le paragraphe 254(2) s’appliquait et non l’article 254.1, ce qui signifiait que les remboursements pour maisons neuves pouvaient être réclamés sur la totalité du prix d’achat. Puisque le remboursement mis au crédit des acheteurs par Polygon était fondé sur la seule portion du prix d’achat concernant le bâtiment, Polygon avait sous-calculé le remboursement et avait, en fait, remis un montant trop élevé au ministre au titre de la TPS.

 


[15]           La dernière questions tranchée par le juge consistait à savoir si Polygon ou les acheteurs avaient le droit de recevoir les remboursements non demandés. Le juge a fait remarquer que, de façon générale, la Loi prévoit que le remboursement appartient à l’acheteur. Cependant, dans ce cas particulier, l’acheteur avait convenu de laisser Polygon porter les remboursements pour maisons neuves contre le prix d’achat. Par conséquent, l’article 234 permet à Polygon de déduire un montant égal au crédit de son calcul de la TPS nette. Puisque les acheteurs pouvaient s’en remettre à Polygon pour recevoir le bon montant, le juge a conclu que Polygon devait être en mesure de s’en remettre au ministre pour obtenir le crédit ou le remboursement supplémentaire.

 

IV.  Analyse

Introduction

[16]           Pour réaliser la présente analyse, je me fonde sur deux impératifs. D’abord, comme la Loi de l’impôt sur le revenu, la Loi sur la taxe d’accise consiste en une loi complexe dans laquelle le Parlement a réussi à équilibrer de nombreux principes et intérêts opposés. La Cour suprême du Canada a maintes fois répété aux tribunaux d’être prudents lorsqu’ils trouvent une intention législative non explicite dans des dispositions claires d’une loi fiscale (voir Shell Canada Ltd. c. Canada, [1999] 3 R.C.S. 622 au paragraphe 43). Ensuite, je dois examiner la véritable nature des transactions par rapport à la Condominium Act, aux documents à l’appui et à tous les principes juridiques applicables afin de déterminer leurs conséquences fiscales (voir Hidden Valley Golf Resort Association, c. La Reine, [2000] G.S.T.C. 42 (C.A.F.)).

 


[17]           La première question devant être tranchée consiste à savoir si les règles de la fourniture à soi‑même en vertu de l’alinéa 191(1)b) s’appliquent à ces transactions entre Polygon et les acheteurs. La question essentielle consiste à savoir si ces transactions sont des baux, des baux similaires à des ventes, des cessions uniques d’intérêts à bail ou des baux sur des terrains combinés à des ventes de bâtiments. Sur la base de la Condominium Act, du libellé des conventions d’achat et d’autres considérations de politique, le juge a conclu que les règles de la fourniture à soi‑même n’étaient pas applicables. Dans son analyse, le transport des intérêts à bail était similaire à la vente d’un intérêt franc et, par conséquent, ne constituait pas la cession d’un bail en vertu du sous-alinéa 191(1)b)(ii). Le juge n’a pas déclaré explicitement s’il pensait que la propriété des bâtiments était transmise d’une façon distincte de celle des terrains.

 

[18]           Alors que je suis d’accord avec la conclusion du juge aux termes de laquelle les règles de la fourniture à soi-même ne s’appliquent pas et j’arrive à cette conclusion pour des raisons différentes. À mon avis, le transport en litige constitue une fourniture unique taxable, non pas parce qu’elle ressemble à la vente d’un intérêt en fief simple, mais parce qu’en l’espèce il n’existe aucune vente séparée du bâtiment, distincte de la cession du bail sur le terrain sur lequel est sis le bâtiment.

 

[19]           Dans la décision Taylor c. Canada, [1998] A.C.I. no 617 (Taylor), la Cour canadienne de l’impôt a abordé cette même question de la fourniture à soi-même. Les faits pertinents liés aux transactions dans l’affaire Taylor et ceux apparaissant dans la présente demande sont, au fond, exactement les mêmes. Dans la décision Taylor, le juge de la Cour canadienne de l’impôt a soutenu que le transport d’un logement en copropriété construit sur un terrain loué auprès d’une autorité publique devait être caractérisé comme un bail du terrain combiné à la vente du bâtiment et que, par conséquent, conformément au sous-alinéa 191(1)b)(ii), la fourniture à soi-même s’appliquait. Pour les motifs qui suivent, je ne suis pas d’accord avec cette conclusion.

 


Survol

[20]           Avant d’examiner les questions particulières en litige, je ferai un survol de la façon dont la TPS s’applique à la vente de nouvelles habitations ou de nouveaux logements en copropriété et de la façon dont les règles complexes de la fourniture à soi-même s’opposent au système général. L’article 165 de la Loi exige des bénéficiaires d’une fourniture taxable qu’ils paient une taxe équivalente à 7 p. 100 de la valeur de la contrepartie. Le terme « fourniture » est défini au paragraphe 123(4) comme la « livraison de biens ou prestation de services, notamment par vente, transfert, troc, échange, louage, licence, donation ou aliénation. » On trouve également, dans ce paragraphe, la définition d’« immeuble » qui comporte « les terres, les fonds et les immeubles, de toute nature et désignation, ainsi que les droits y afférents, qu'ils soient fondés en droit ou en équité ». Par conséquent, un intérêt à bail constitue une propriété au sens du paragraphe 123(1). Le terme « vente » est également défini comme comprenant « le transfert de la propriété d'un bien et le transfert de la possession d'un bien en vertu d'une convention prévoyant le transfert de la propriété du bien ». Les fournitures exemptées qui ne sont pas soumises à la TPS sont celles énumérées à l’annexe V de la Loi.

 


[21]           La vente d’une nouvelle habitation par un constructeur sera normalement une fourniture taxable et donc soumise à la TPS calculée comme étant 7 p. 100 du prix d’achat. Cependant, le paragraphe 254(2) de la Loi prévoit un remboursement partiel de la TPS dans certaines situations où une nouvelle habitation est achetée auprès d’un constructeur. Ce nouveau remboursement pour habitation neuve égale 36 p. 100 de la TPS payée sur le prix d’achat total de l’habitation, bien qu’il soit assujetti à un plafond de 8 750 $ et graduellement éliminé pour les habitations de plus de 350 000 $ et ne soit pas disponible pour les habitations de plus de 450 000 $. La revente d’une habitation est généralement exempte de TPS, conformément à l’article 2 de la partie I de l’annexe V de la Loi.

 

[22]           Comme nous l’avons déjà fait remarquer, les règles de la fourniture à soi-même s’appliquent dans certaines situations pour considérer le constructeur d’une nouvelle habitation ou d’un logement en copropriété comme ayant effectué ou reçu une fourniture taxable égale à la totalité de la valeur marchande de l’habitation et, par conséquent, avoir payé et perçu la TPS sur la fourniture. Ces règles s’appliquent lorsqu’un constructeur bâti une nouvelle habitation et s’en sert lui-même comme lieu de résidence (sous-alinéa 191(1)b)(iii)) ou lorsque le constructeur donne la possession à une autre personne en vertu d’un bail, d’une licence ou d’un arrangement similaire (sous-alinéa 191(1)b)(I)). En vertu du sous-alinéa 191(1)b)(ii), ces règles s’appliquent également lorsque le constructeur d’une nouvelle habitation vend le bâtiment en tout ou en partie et loue ou cède un bail pour le terrain sur lequel est construit le bâtiment. Pour faciliter les choses, le paragraphe 191(1) est reproduit encore une fois :

 

  191. (1) Pour l'application de la présente partie, lorsque les conditions suivantes sont réunies :

 

  191. (1) For the purposes of this Part, where

 

a) la construction ou les rénovations          majeures d'un immeuble d'habitation ‑‑      immeuble d'habitation à logement unique ou logement en copropriété ‑‑ sont achevées en grande partie,

 

(a) the construction or substantial renovation of a residential complex that is a single unit residential complex or a residential condominium unit is substantially completed,

 

b) le constructeur de l'immeuble :

 

(b) the builder of the complex                  

 

 

(i) soit en transfère la possession à une personne aux termes d'un bail, d'une licence ou d'un accord semblable (sauf un accord qui est connexe à un contrat de vente visant l'immeuble et qui porte sur la possession ou l'occupation de l'immeuble jusqu'au transfert de sa propriété à l'acheteur aux termes du contrat) conclu en vue de l'occupation de l'immeuble à titre résidentiel,

 

(I) gives possession of the complex to a particular person under a lease, licence or similar arrangement (other than an arrangement, under or arising as a consequence of an agreement of purchase and sale of the complex, for the possession or occupancy of the complex until ownership of the complex is transferred to the purchaser under the agreement) entered into for the purpose of its occupancy by an individual as a place of residence,

 

(ii) soit en transfère la possession à une personne aux termes d'une convention, sauf une convention portant sur la fourniture d'une maison mobile et d'un emplacement pour celle‑ci dans un parc à roulottes résidentiel, portant sur l'une des fournitures suivantes :

 

(ii) gives possession of the complex to a particular person under an agreement for                          

 

(A) la fourniture par vente de tout ou partie du bâtiment dans lequel est située l'habitation faisant partie de l'immeuble,

 

(A) the supply by way of sale of the building or part thereof in which the residential unit forming part of the complex is located, and

 

(B) la fourniture par bail du fonds faisant partie de l'immeuble ou la fourniture d'un tel bail par cession,

 

(B) the supply by way of lease of the land forming part of the complex or the supply of such a lease by way of assignment,

 

 

 

other than an agreement for the supply of a mobile home and a site for the home in a residential trailer park, or

 

(iii) soit, s'il est un particulier, occupe lui‑même l'immeuble à titre résidentiel, [...]

 

[Je souligne]

 

(iii) where the builder is an individual, occupies the complex as a place of residence, [...]

 

[Emphasis added]

 


[23]           Dans mon analyse, ces règles pour les nouvelles habitations ont été mises en œuvre afin de mettre les bailleurs-constructeurs et les bailleurs non constructeurs ainsi que les occupants‑constructeurs et les occupants non constructeurs sur un pied d’égalité. Comme il a été  mentionné ci-dessus, lorsqu’un constructeur bâti une nouvelle habitation et la vend, la TPS est payable sur la vente. Par conséquent, une personne qui n’est pas un constructeur et qui souhaite acheter une nouvelle habitation et la louer à une autre personne ou l’occuper elle-même devrait payer la TPS sur son achat. Sauf les règles de la fourniture à soi-même, un constructeur qui loue ou occupe une nouvelle habitation aurait donc un avantage concurrentiel sur un non-constructeur en raison d’économies fiscales. En tant que telle, l’occupation ne créerait pas une fourniture taxable et la location de l’habitation à une autre personne serait exemptée de la TPS puisque les baux résidentiels sont exemptés en vertu de l’annexe V, partie 1, article 6. De même, un constructeur qui vend le bâtiment mais loue le terrain qui le soutient pourrait également réaliser des économies fiscales car la location du terrain serait exempte en vertu de l’article 7 de la partie I de l’annexe V. Ces dispositions ont un autre objectif : veiller à ce qu’une nouvelle habitation soit taxée à sa juste valeur marchande totale dès qu’elle est occupée en tant que nouvelle habitation afin qu’un bail ou une occupation personnelle ne soit pas un moyen de retarder l’application de la TPS ou d’en exempter l’application.

 

[24]           Lorsqu’un constructeur est soumis aux règles de la fourniture à soi-même, la Loi veille à ce que tout transfert ultérieur à un acheteur soit exempté de la TPS. Une modification a été apportée à la Loi précisément pour faire en sorte que la portion relative au bâtiment d’une fourniture, effectuée aux termes de la combinaison de la vente du bâtiment et de la location du terrain, soit exemptée pour l’acheteur postérieur (voir articles 3, 4 et 5.1 de la partie I de l’annexe V de la Loi).


 

[25]           Les répercussions de ces règles de la fourniture à soi-même consistent en ce que les acheteurs postérieurs ne paient plus la TPS sur l’achat de l’habitation et ne sont donc plus admissibles à demander les remboursements sur les nouvelles habitations en vertu de l’article 254. Cela représentait un problème particulier pour le genre de transfert que vise le sous‑alinéa 191(1)b)(ii), car le constructeur qui a payé la TPS ferait payer simplement ce coût à l’acheteur postérieur en l’incluant dans le prix du bail du terrain et de l’habitation. Par conséquent, l’article 254.1 a été promulgué pour offrir les remboursements pour maisons neuves aux acheteurs même si le constructeur a effectué une fourniture à lui-même en aliénant une nouvelle habitation grâce à la combinaison d’une vente et d’un bail. Cependant, en vertu de cet article, si la juste valeur marchande de l’habitation et du terrain n’excède pas 374 500 $, le remboursement ne sera que de 2,34 p. 100 de la contrepartie totale versée pour l’habitation. Au‑dessus de ce prix, le remboursement est graduellement éliminé. Sans l’article 254.1, l’acheteur aurait, en fait, payé la TPS sur une nouvelle habitation mais, contrairement à d’autres acheteurs de nouvelles habitations, n’aurait reçu aucun remboursement.

 

[26]           Maintenant que le système établi par les règles de la fourniture à soi-même a été expliqué, je vais examiner la nature précise de la fourniture effectuée par Polygon à chaque acheteur.

 


Y a-t-il eu vente d’une partie du bâtiment?

[27]           L’intérêt de Polygon dans le bail foncier était celui d’un locataire : la ville de Vancouver avait conservé l’intérêt en fief simple. Le bail foncier, à la clause 15.02, prévoit la cession de l’intérêt de Polygon dans ce bail à des cessionnaires qui s’engagent directement avec la ville de Vancouver et qui conviennent d’être liés par toutes les obligations de Polygon en vertu du bail foncier et du bail type d’unité condominiale. Tout ce que Polygon pouvait aliéner était son intérêt dans le bail foncier et dans le bail type d’unité condominiale, et elle ne pouvait pas fournir les logements en copropriété par l’intermédiaire de la cession de son intérêt à bail.

 

[28]           Même si la ville de Vancouver représentait une signataire de la vente de l’intérêt à bail par Polygon à l’acheteur final, et avait, par le fait même, consenti à la cession, rien, dans le contrat d’achat‑vente, ne modifie la nature de la transaction. L’essence de ces transactions consiste donc en ce que la ville de Vancouver a donné à bail des terrains vagues à Polygon dans le but précis de faire construire de nouveaux logement locatifs en copropriété. Ces logements devaient être occupés par les acheteurs pour le reste de la durée du bail foncier.

 

[29]           Le principal document est la cession aux acheteurs, cession à laquelle Polygon et la ville de Vancouver sont parties. Il déclare :

[TRADUCTION]

 

 

En échange de la somme de 249 000 $ payés par l’acheteur au vendeur (dont la réception est reconnue par les présentes par le vendeur), le vendeur, en sa qualité de propriétaire effectif, cède par les présentes à l’acheteur son intérêt dans l’unité condominiale, en fiducie à l’acquéreur pour le reliquat de la durée du bail, sous réserve du versement à la ville du loyer fixé dans le bail, de l’exécution et du respect des obligations du locataire et des modalités du bail.


 

[30]           Selon un des principes de base du droit immobilier, un bien meuble comme un bâtiment fixé au sol est présumé constituer un accessoire fixe et fait partie du terrain devant être transféré. Il existe cependant des situations où cette présomption peut être réfutée et où un locataire peut récupérer certains accessoires fixes (voir B. Ziff, Principles of Property Law, 2e éd., Scarborough, Carswell, 1996, aux pages 100 à 103). Cependant, rien dans la présente cession ne réserve de tels droits aux acheteurs. Polygon a tout simplement transféré son intérêt à bail sans aucune restriction et la propriété des terrains et des bâtiments demeurait aux mains de la ville de Vancouver. À mon avis, il ne s’agit pas de la vente d’un titre de participation distinct concernant l’habitation combiné à un bail.       

 

[31]           À mon avis, pour que cette situation soit décrite comme la vente d’un titre de participation distinct concernant l’habitation combiné à un bail sur le terrain sous-jacent, elle devrait être précisée dans les documents de transaction. Le point de départ des transactions immobilières consiste en ce que la propriété d’un bâtiment suit celle du terrain et cette hypothèse devrait être clairement réfutée dans les conventions. En l’espèce, les documents ne créent pas cette exception. Et ce n’est pas non plus le cas dans l’affaire Taylor, à mon avis. Le renvoi à l’« habitation » dans les conventions d’achat passées avec les acheteurs dans l’affaire Taylor n’est pas suffisant.       

 


Y a-t-il eu cession d’un bail?

[32]           La preuve documentaire soutient largement la conclusion selon laquelle il n’y a eu qu’une cession des intérêts à bail. Ainsi, une seule somme est versée pour la cession du bail et aucun des contrats de vente ne séparait la contrepartie versée pour le terrain de celle versée pour le bâtiment. Les contrats de vente indiquaient tous que seule la durée non encore écoulée du bail était cédée. Il est également intéressant de remarquer que rien, dans le bail foncier, n’indique que la ville a passé un contrat avec Polygon pour lui conférer quelque type de titre de participation distinct ou absolu dans les logements en copropriété. Le bail foncier ne fait qu’exiger de Polygon qu’il réalise les améliorations.

 

[33]           Les baux d’unités condominiales apportent également des éléments intéressants. La clause 21.01 déclare explicitement que lors de l’expiration du bail, l’acheteur peut se voir demander par la ville de Vancouver de quitter les lieux tout en s’assurant que le bâtiment est laissé en bon état. La clause 22.02 permet à l’acheteur de n’enlever que les accessoires fixes du locataire habituel qui ne font pas partie des bâtiments ou des terrains. Ces exigences n’indiquent certainement pas que l’acheteur possède un droit de propriété absolu sur quelque partie du bâtiment que ce soit.

 


[34]           Le paragraphe 96(1) de la Condominium Act aide également. Il prévoit que le dépôt du plan d’unités condominiales au bureau d’enregistrement des titre de participation [Traduction] « convertit le bail foncier enregistré en baux individuels établis au nom du propriétaire promoteur pour les droits ... dans chaque unité condominiale et dans les parties communes ». Chacun de ces baux peut être cédé à un acheteur. Aucun intérêt franc n’est créé.   

 

[35]           Enfin, les documents mêmes qui ont été déposés en vertu de la Land Title Act, RSBC 1996 ch. 250 de la Colombie-Britannique indiquent un bail accordé à Polygon par la ville et une cession dudit bail accordée par Polygon à l’acheteur. Aucun titre de participation distinct dans le bâtiment n’est inscrit au nom de l’acheteur.

 

[36]           Sur la base de ces documents et de la législation provinciale, la fourniture de ces logements en copropriété construits sur un terrain loué à la ville de Vancouver ne peut être considérée que comme une transaction unique, c’est-à-dire la cession de l’intérêt à bail dans le terrain et les accessoires fixes qui l’accompagnent, ce qui comprend les bâtiments. 

 

[37]           Une cession de l’intérêt à bail sur le terrain accompagné de ses bâtiments n’est pas envisagée par l’alinéa 191(1)b). Plus particulièrement, elle n’est pas envisagée par le sous-alinéa 191(1)b)(I) qui s’applique à « un bail », à « une licence » ou « un accord semblable » mais pas à la cession d’un bail. Si le législateur avait voulu inclure la cession de bail dans le sous‑alinéa 191(1)b)(I) il l’aurait fait expressément comme c’est le cas pour la division 191(1)b)(ii)(B).

 


Conclusion

[38]           Il s’ensuit que la cession de ces intérêts à bail constitue une fourniture taxable faite aux acheteurs puisque Polygon n’est pas réputée avoir effectué une fourniture à soi-même conformément aux dispositions de l’alinéa 191(1)b) de la Loi et que la cession d’un bail ne constitue pas une fourniture exemptée en vertu de l’article 5.1 de la partie I de l’annexe V de la Loi. Polygon doit donc percevoir la TPS conformément au paragraphe 221(1). Puisque Polygon a structuré ses conventions avec les acheteurs en partant de l’hypothèse que les règles de la fourniture à soi-même s’appliquaient, les acheteurs en l’espèce n’ont pas payé la TPS, contrairement à ce qui leur incombait selon mon interprétation. L’article 194 de la Loi prévoit que, dans un cas comme celui dont je suis saisi, lorsque les acheteurs ont été informés erronément par un constructeur que leur achat était exempté de TPS, le prix d’achat sera réputé comporter la TPS et celle-ci sera réputée avoir été perçue par le constructeur. Cette règle de présomption ne pose pas de problème pour Polygon, car elle avait déjà évalué et signalé la TPS concernant l’aliénation des logements en copropriété en vertu des dispositions sur la fourniture à soi-même.

 

[39]           Le résultat de mon analyse correspond également à l’objectif des règles de fourniture à soi‑même, tel qu’il est décrit ci-dessus. Dans ces cas, la totalité du coût de la TPS sur le prix d’achat d’un bail de logement en copropriété de 99 années prépayé est assumée par l’acheteur. Polygon n’a aucun avantage par rapport à un tiers qui souhaiterait effectuer une transaction similaire. En outre, la TPS payable sur la nouvelle habitation ne sera ni différée ni évitée.

 


Sur quelle base les remboursements pour maisons neuves devraient-ils être calculés et payés?

[40]           Je me penche donc maintenant sur la question accessoire des remboursements pour habitation nouvelle. Puisque Polygon n’est pas soumise aux règles de la fourniture à soi‑même en ce qui concerne les transactions en litige, les acheteurs sont imposables sur la totalité du prix d’achat et ont droit aux remboursements calculés conformément au paragraphe 254(2).

 

[41]           Pour les besoins de l’espèce, nous devons renvoyer au paragraphe 234(1), à l’article 254 et à l’article 254.1 qui sont libellés comme suit :

 

  234. (1) La personne qui, dans les circonstances visées aux paragraphes 252.41(2), 254(4), 254.1(4) ou 258.1(3), verse à une autre personne, ou porte à son crédit, un montant au titre d'un remboursement et qui transmet la demande de remboursement de l'autre personne au ministre conformément aux paragraphes 252.41(2), 254(5), 254.1(5) ou 258.1(4) peut déduire ce montant dans le calcul de sa taxe nette pour la période de déclaration au cours de laquelle le montant est versé à l'autre personne ou porté à son crédit.

 

  234. (1) If, in the circumstances described in subsection 252.41(2), 254(4), 254.1(4) or 258.1(3), a particular person pays to or credits in favour of another person an amount on account of a rebate and transmits the application of the other person for the rebate to the Minister in accordance with subsection 252.41(2), 254(5), 254.1(5) or 258.1(4), as the case requires, the particular person may deduct the amount in determining the net tax of the particular person for the reporting period in which the amount is paid or credited.

 

  254. (1) Les définitions qui suivent s'appliquent au présent article.

 

    254. (1) In this section,

 

 

 

"relation" of a particular individual means another individual who is related to the particular individual or who is a former spouse or common‑law partner of the particular individual;

 

« immeuble d'habitation à logement unique » Est assimilé à un immeuble d'habitation à logement unique :

 

"single unit residential complex" includes

 

a) l'immeuble d'habitation à logements multiples de deux habitations;

 

(a) a multiple unit residential complex that does not contain more than two residential units, and

 

b) tout autre immeuble d'habitation à logements multiples, s'il est visé à l'alinéa c) de la définition de « immeuble d'habitation » au paragraphe 123(1) et contient une ou plusieurs habitations qui sont destinées à être fournies comme chambres dans un hôtel, un motel, une auberge, une pension ou un gîte semblable et qui ne seraient pas considérées comme faisant partie de l'immeuble d'habitation si celui‑ci n'était pas visé à cet alinéa.

 

(b) any other multiple unit residential complex if it is described by paragraph ©) of the definition "residential complex" in subsection 123(1) and contains one or more residential units that are for supply as rooms in a hotel, motel, inn, boarding house, lodging house or similar premises and that would be excluded from being part of the residential complex if the complex were a residential complex not described by that paragraph.

 

« proche » L'ex‑époux ou ancien conjoint de fait d'un particulier ou un autre particulier lié à ce particulier.

 

 

 

  (2) Le ministre verse un remboursement à un particulier dans le cas où, à la fois :

 

(2) Where

 

a) le constructeur d'un immeuble d'habitation à logement unique ou d'un logement en copropriété en effectue, par vente, la fourniture taxable au profit du particulier;

 

(a) a builder of a single unit residential complex or a residential condominium unit makes a taxable supply by way of sale of the complex or unit to a particular individual,

 

[...]

 

[...]

 

Le remboursement est égal au montant suivant :

 

 

the Minister shall, subject to subsection (3), pay a rebate to the particular individual equal to

 

h) si la contrepartie totale est de 350 000 $ ou moins, un montant égal à 8 750 $ ou, s'il est inférieur, le montant représentant 36 % du total de la taxe payée par le particulier;

 

(h) where the total consideration is not more than $350,000, an amount equal to the lesser of $8,750 and 36% of the total tax paid by the particular individual, and

 

i) si la contrepartie totale est supérieure à 350 000 $ mais inférieure à 450 000 $, le montant calculé selon la formule suivante :

 

(I) where the total consideration is more than $350,000 but less than $450,000, the amount determined by the formula

 

A × [(450 000 $ ‑ B)/100 000 $]

 

A × [($450,000 ‑ B)/$100,000]

 

où :

 

where

 

A représente le moins élevé de 8 750 $ et de        36 % du total de la taxe payée par le                 particulier;

 

A is the lesser of $8,750 and 36% of the total        tax paid by the particular individual, and

 

B la contrepartie totale.

 

B is the total consideration.

 

  254.1 (1) Les définitions qui suivent s'appliquent au présent article.                         

 

  254.1 (1) In this section,

 

« bail de longue durée » Bail, licence ou accord semblable portant sur un fonds et prévoyant la possession continue du fonds pour une période d'au moins vingt ans ou une option d'achat du fonds.

 

"long‑term lease", in respect of land, means a lease, licence or similar arrangement under which continuous possession of the land is provided for a period of at least twenty years or a lease, licence or similar arrangement that contains an option to purchase the land;

 

 

 

"relation" of a particular individual means another individual who is related to the particular individual or who is a former spouse or common‑law partner of the particular individual;

 

« immeuble d'habitation à logement unique » Est assimilé à un immeuble d'habitation à logement unique :

 

"single unit residential complex" includes

 

a) l'immeuble d'habitation à logements multiples de deux habitations;

 

(a) a multiple unit residential complex that does not contain more than two residential units, and

 

b) tout autre immeuble d'habitation à logements multiples, s'il est visé à l'alinéa c) de la définition de « immeuble d'habitation » au paragraphe 123(1) et contient une ou plusieurs habitations qui sont destinées à être fournies comme chambres dans un hôtel, un motel, une auberge, une pension ou un gîte semblable et qui ne seraient pas considérées comme faisant partie de l'immeuble d'habitation si celui‑ci n'était pas visé à cet alinéa.

 

(b) any other multiple unit residential complex if it is described by paragraph ©) of the definition "residential complex" in subsection 123(1) and contains one or more residential units that are for supply as rooms in a hotel, motel, inn, boarding house, lodging house or similar premises and that would be excluded from being part of the residential complex if the complex were a residential complex not described by that paragraph.

 

« proche » L'ex‑époux ou ancien conjoint de fait d'un particulier ou un autre particulier lié à ce particulier.

 

 

 

  (2) Sous réserve du paragraphe (3), le ministre rembourse un particulier dans le cas où, à la fois :

 

(2) Where

 

a) le constructeur d'un immeuble d'habitation -- immeuble d'habitation à logement unique ou logement en copropriété ‑‑, aux termes d'un contrat qu'il a conclu avec le particulier, effectue au profit de celui‑ci :

 

(a) under an agreement entered into between a particular individual and a builder of a residential complex that is a single unit residential complex or a residential condominium unit, the builder makes to the particular individual

 

(i) une ou plusieurs fournitures exonérées, effectuées aux termes d'un bail de longue durée, du fonds attribuable à l'immeuble, ou la fourniture de ce fonds par cession d'un tel bail,

 

(I) one or more exempt supplies under a long‑term lease of, or a supply by way of an assignment of a long‑term lease of, the land attributable to the complex, and

 

(ii) la fourniture exonérée, effectuée par vente, de tout ou partie du bâtiment dans lequel est située l'habitation faisant partie de l'immeuble;

 

(ii) an exempt supply by way of sale of the building or part thereof in which the residential unit forming part of the complex is situated,

 

Le montant remboursable est égal au montant suivant :

 

the Minister shall, subject to subsection (3), pay a rebate to the particular individual equal to

 

h) si la juste valeur marchande visée à l'alinéa c) est de 374 500 $ ou moins, 8 750 $ ou, s'il est inférieur, le montant correspondant à 2,34 % du total (appelé « contrepartie totale » au présent paragraphe) des montants représentant chacun la contrepartie payable par le particulier au constructeur pour la fourniture par vente au particulier du bâtiment ou de la partie de bâtiment visé à l'alinéa a), ou de toute autre construction qui fait partie de l'immeuble, à l'exception de la contrepartie qui peut être considérée comme un loyer pour les fournitures du fonds attribuable à l'immeuble ou comme la contrepartie de la fourniture d'une option d'achat de ce fonds;

 

(h) where the fair market value referred to in paragraph ©) is not more than $374,500, an amount equal to the lesser of $8,750 and 2.34% of the total (in this subsection referred to as the "total consideration") of all amounts each of which is the consideration payable by the particular individual to the builder for the supply by way of sale to the particular individual of the building or part of a building referred to in paragraph (a) or of any other structure that forms part of the complex, other than consideration that can reasonably be regarded as rent for the supplies of the land attributable to the complex or as consideration for the supply of an option to purchase that land, and

 

i) sinon, le résultat du calcul suivant :

 

(I) where the fair market value referred to in paragraph ©) is more than $374,500 but less than $481,500, the amount determined by the formula

 

A x [(481 500 $ ‑ B)/107 000 $]

 

A x [($481,500 ‑ B)/$107,000]

 

où :

 

where

 

A représente le moins élevé de 8 750 $ et de        2,34 % de la contrepartie totale,

 

 

A is the lesser of $8,750 and 2.34% of the             total consideration, and

 

B la juste valeur marchande visée à l'alinéa          c).

 

B is the fair market value referred to in                  paragraph ©).

 


[42]           Il découle de mon analyse que l’application de l’article 254 à cette affaire pose des difficultés évidentes puisque les remboursements pour maisons neuves appartiennent aux acheteurs et non aux vendeurs. L’article  234 de la Loi prévoit que les constructeurs obtiennent une déduction pour les remboursements pour maisons neuves seulement dans la mesure où lesdits remboursements pour maisons neuves ont été payés aux acheteurs ou versés à leur crédit. Les acheteurs, et non les constructeurs, sont les « particuliers » visés pour l’octroi des remboursements pour maisons neuves conformément à l’article 254 de la Loi. Dans ce cas, Polygon n’a pas le droit, par elle-même, de recevoir les remboursements pour maisons neuves. Dans les documents signés le jour de la clôture de la transaction, les acheteurs ont déclaré et garanti qu’ils avaient droit à un remboursement pour habitations neuves d’un montant précis à la date d’achèvement et Polygon a convenu d’imputer les sommes particulières au crédit des acheteurs. 

 

[43]           Bien que Polygon ait calculé un montant de TPS trop élevé en sous-calculant le montant du remboursement, les acheteurs doivent en appeler au ministre. Permettre à Polygon de demander un remboursement pour les impôts collectés et remis par erreur, alors que la taxe n’est pas remboursée aux acheteurs par Polygon n’est pas prévu par la partie IV de la Loi. Les inscrits comme Polygon ne paient généralement pas la taxe ou ne portent pas la charge, mais fonctionnent comme de simples percepteurs, transférant les revenus au gouvernement (voir Renvoi relatif à la taxe de vente du Québec, [1994] G.S.T.C. 44 (C.S.C.)). Par conséquent, le juge a erré en droit lorsqu’il a conclu que Polygon pouvait s’en remettre au ministre pour obtenir les crédits de remboursement supplémentaires. 


 

[44]           J’accueillerais partiellement la présente demande de contrôle judiciaire et j’annulerais le jugement de la Cour canadienne de l’impôt en date du 4 février 2002. Je renverrais la cotisation au juge pour un nouvel examen en tenant compte du fait que les transactions constituent une simple cession d’un intérêt à bail à chacun des acheteurs, que Polygon n’est donc pas réputée avoir effectué une fourniture à soi-même conformément aux dispositions du sous‑alinéa 191(1)b)(ii) de la Loi et que les remboursements pour maisons neuves doivent être calculés conformément aux dispositions du paragraphe 254(2). En tant que constructeur, Polygon ne se trouve pas dans une situation où elle peut demander l’excédent de remboursement supplémentaire qui découlerait du calcul effectué en vertu du paragraphe 254(2). Aucun dépens n’a été demandé et aucun ne devrait être accordé.

 

                                                                                     « B. Malone »               

                                                                                                     Juge                    

 

« Je souscris aux présents motifs », le juge B.L. Strayer

 

« Je souscris aux présents motifs », le juge John M. Evans

 

 

 

Traduction certifiée conforme

 

Martine Guay, LL. L.


                       COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION D’APPEL

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

DOSSIER :                            A-125-02

 

INTITULÉ :                          La Reine c. Polygon Southampton Development Ltd.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :  Vancouver (Colombie-Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE : Le 6 mars 2003

 

MOTIFS DU JUGEMENT : Le juge MALONE

 

Y ONT SOUSCRIT :           LE JUGE STRAYER

LE JUGE EVANS

 

DATE DES MOTIFS :         Le 29 avril 2003

 

COMPARUTIONS :

 

Lynn Burch                                                     POUR LA DEMANDERESSE

 

Joscelyn Baker                                                POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Ministère de la Justice                         POUR LA DEMANDERESSE

 

Avocat de société

Polygon Homes Ltd.

Vancouver (C.-B.)                                          POUR LA DÉFENDERESSE

 

 


Date : 20030429

 

Dossier : A-125-02

 

Ottawa (Ontario), le 29 avril 2003

 

CORAM :      LE JUGE STRAYER

LE JUGE EVANS

LE JUGE MALONE

 

ENTRE :

 

                               SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                                    demanderesse

 

                                                     et

 

 

      POLYGON SOUTHAMPTON DEVELOPMENT LTD.

                                                                                      défenderesse

 

 

                                           JUGEMENT

 

La demande de contrôle judiciaire est partiellement accueillie et le jugement de la Cour canadienne de l’impôt en date du 4 février 2002 est annulé. La cotisation est renvoyée devant le juge de la Cour canadienne de l’impôt pour une nouvelle décision en tenant compte du fait que les transactions constituent une simple cession d’un intérêt à bail à chacun des acheteurs, que Polygon n’est donc pas réputée avoir effectué une fourniture à soi-même conformément aux dispositions du sous‑alinéa 191(1)b)(ii) de la Loi et que les remboursements pour maisons neuves doivent être calculés conformément aux dispositions du paragraphe 254(2). Polygon ne


peut demander le remboursement supplémentaire qui découlerait du calcul effectué en vertu du paragraphe 254(2). Aucun dépens n’est accordé aux parties.

 

 

                                                                                     « B. Malone »               

                                                                                                     Juge                    

 

 

Traduction certifiée conforme

 

Martine Guay, LL. L.

 

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