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Date : 20051212

Dossier : A-55-05

                                                                                                            Référence : 2005 CAF 429

CORAM :       LE JUGE ROTHSTEIN

                        LE JUGE NOËL                    

                        LE JUGE MALONE

ENTRE :

SUZANNE'S INC.

appelante

et

AULD PHILLIPS LTD.

intimée

Audience tenue à Edmonton (Alberta), le 12 décembre 2005

Jugement rendu à l'audience à Edmonton (Alberta), le 12 décembre 2005

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                             LE JUGE NOËL

Y ONT SOUSCRIT :                                                                           LE JUGE ROTHSTEIN

                                                                                                                        LE JUGE MALONE


Date : 20051212

Dossier : A-55-05

                                                                                                            Référence : 2005 CAF 429

CORAM :       LE JUGE ROTHSTEIN

                        LE JUGE NOËL                    

                        LE JUGE MALONE

ENTRE :

SUZANNE'S INC.

appelante

et

AULD PHILLIPS LTD.

intimée

MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE NOËL

[1]                Il s'agit d'un appel de la décision par laquelle la juge Simpson de la Cour fédérale a accueilli la demande de l'intimée tendant à faire biffer du registre des marques de commerce la marque « Suzanne's » de l'appelante sous le régime du paragraphe 57(1) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13.

[2]                Si l'appelante avait fait valoir un certain nombre de moyens d'appel dans son exposé des faits et du droit, les seuls arguments qu'elle a invoqués en appel se rapportaient à la conclusion de la juge de première instance selon laquelle sa marque avait perdu son caractère distinctif et était tombée dans le domaine public à la date de l'enregistrement.

[3]                L'appelante soutient en premier lieu que la juge de première instance a commis une erreur manifeste et dominante, étant donné qu'il n'y avait pas d'éléments de preuve à l'appui de cette conclusion. Subsidiairement, elle fait valoir qu'un seul contrefacteur tel que l'intimée ne suffit pas à faire perdre à une marque son caractère distinctif.

[4]                Pour ce qui concerne ce premier argument, je me contenterai de dire que, contrairement à l'affirmation de l'appelante, il y avait largement assez d'éléments de preuve pour étayer la conclusion de la juge de première instance selon laquelle la confusion était répandue et avait duré suffisamment longtemps pour faire perdre son caractère distinctif à la marque de l'appelante. Qu'il me suffise de rappeler l'expansion rapide des activités de l'intimée en Alberta et l'utilisation étendue que l'intimée faisait de sa marque sur le marché que l'appelante tenait pour sien.

[5]                Pour ce qui concerne le deuxième argument, je ferai observer que le point de savoir si une marque de commerce a perdu son caractère distinctif de manière à tomber dans le domaine public est une question de fait : Caricline Ventures Ltd. c. ZZTY Holdings Ltd., [2002] A.C.F. no 1600 (C.A.F.), aux paragraphes 9 et 12; et Novopharm Ltd. c.Bayer Inc. (2000), 9 C.P.R. (4th) 304 (C.A.F.), au paragraphe 6. L'avocat de l'appelante a semblé admettre la chose, mais a fait valoir - se fondant sur le passage suivant de l'ouvrage de Harold J. Fox, The Canadian Law of Trade-marks and Unfair Competition, 3e éd., page 285 -, qu'un contrefacteur unique ne peut faire perdre à une marque son caractère distinctif :

[traduction]

Quelques contrefaçons isolées de la part de plusieurs commerçants qui ne donnent pas lieu à des poursuites ne suffisent pas à faire tomber une marque dans le domaine public, pas plus qu'une contrefaçon de grande envergure de la part d'un commerçant unique54.        [Non souligné dans l'original.]

54. Dubiner c. Cheerio Toys and Games Ltd. (1965), 32 Fox Pat. C. 37, à la page 54; Ford c. Foster (1872), 7 Ch. App. 611, à la page 625; et Treasure Cot Co. Ltd. c. Hamley Bros. Ltd. (1950), 67 R.P.C., à la page 90, le juge Harman; voir aussi Lazenby c. White (1871), 41 L.J. Ch. 354n; Kuhn & Co.'s Trade Mark (1878), 53 L.J. Ch. 238; Hyde & Co.'s Trade Mark (1878), 7 Ch.D. 724; Re Heaton's Trade Mark (1884), 27 Ch.D. 570; National Starch Mfg.Co. c. Munn's Patent Maizena & Starch Co., [1894] A.C.. 275, 11 R.P.C. 281; Singer Mfg. Co. c. Spence (1893), 10 R.P.C. 297; et Singer Mfg. Co. c. British Empire Mfg. Co. Ltd. (1903), 20 R.P.C. 313.

[6]                Je ne pense pas que le passage en question visait à exclure la possibilité qu'un contrefacteur unique fasse perdre à une marque son caractère distinctif. Aucune des décisions citées dans la note de bas de page de Fox ne souscrit à cette proposition. La règle appliquée dans toutes ces affaires trouve sa meilleure expression dans l'observation formulée par le Conseil privé dans National Starch Mfg. Co. and the Glen Core Mfg. Co. c. Munn's Patent Maizena & Starch Co., [1894] A.C. 275, 11 R.P.C. 281, à la page 293 :

[TRADUCTION] On ne peut donner aucune définition complète ou liste exhaustive des circonstances qui font tomber un mot ou une marque dans le domaine public, de sorte que la décision à cet égard doit reposer sur les faits particuliers de l'espèce.

[7]         Évidemment, il ne peut arriver que rarement qu'un commerçant unique soit en mesure de faire perdre à une marque son caractère distinctif, mais rien ne l'empêche en principe. Dans la présente espèce, il y avait des éléments de preuve à l'appui de la conclusion que la marque de commerce de l'appelante avait perdu son caractère distinctif, et le fait que l'intimée fût la seule cause de cette perte n'est d'aucun secours à l'appelante.


[8]         L'appel sera rejeté avec dépens.

                                                                                                         « Marc Noël »

                                                                                    _________________________________

                                                                                                                Juge

« Je souscris aux présents motifs

               Marshall Rothstein, juge »

« Je souscris aux présents motifs

              B. Malone, juge »

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.


COUR D'APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                                             A-55-05

APPEL D'UNE ORDONNANCE DE MADAME LA JUGE SIMPSON, EN DATE DU 17 JANVIER 2005, DOSSIER NO T-233-04

INTITULÉ :                                                                            SUZANNE'S INC.

                                                                                                c.

                                                                                                AULD PHILLIPS LTD.           

LIEU DE L'AUDIENCE :                                                      EDMONTON (ALBERTA)

DATE DE L'AUDIENCE :                                                    LE 12 DÉCEMBRE 2005

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                 LE JUGE NOËL

Y ONT SOUSCRIT :                                                              LES JUGES ROTHSTEIN ET MALONE

DATE DES MOTIFS :                                                           LE 12 DÉCEMBRE 2005

COMPARUTIONS :

PATRICK D. KIRWIN

POUR L'APPELANTE

THOMAS K. O'REILLY

POUR L'INTIMÉE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Kirwin & Kirwin

14310, 111th Avenue, bur. 101

Edmonton (Alberta) T5M 3Z7

POUR L'APPELANTE

Field LLP

10235, 101st Street, bur. 2000

Edmonton (Alberta) T5J 3G1

POUR L'INTIMÉE

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