Décisions de la Cour d'appel fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20060405

Dossier : A-367-05

Référence : 2006 CAF 134

CORAM :       LE JUGE LÉTOURNEAU

                        LE JUGE NOËL

                        LE JUGE EVANS

ENTRE :

MANJIT BAGRI

demanderesse

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

Audience tenue à Vancouver (Colombie-Britannique), le 3 avril 2006

Jugement rendu à Vancouver (Colombie-Britannique), le 5 avril 2006

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                                   LE JUGE EVANS

Y ONT SOUSCRIT :                                                            LES JUGES LÉTOURNEAU ET NOËL


Date : 20060405

Dossier : A-367-05

Référence : 2006 CAF 134

CORAM :       LE JUGE LÉTOURNEAU

                        LE JUGE NOËL

                        LE JUGE EVANS

ENTRE :

MANJIT BAGRI

demanderesse

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE EVANS

[1]                Manjit Bagri sollicite un contrôle judiciaire visant l'annulation d'une décision de la Commission d'appel des pensions datée du 15 juillet 2005. La Commission a rejeté l'appel que Mme Bagri avait interjeté contre une décision du Tribunal de révision concluant qu'elle n'avait pas droit à une prestation d'invalidité prolongée. À la lumière de la preuve médicale dont elle était saisie, la Commission a conclu que Mme Bagri n'avait pas établi qu'en avril 1994, à la fin de sa période minimale d'admissibilité (PMA), elle était atteinte « d'une invalidité physique ou mentale grave et prolongée » au sens du paragraphe 42(2) du Régime de pensions du Canada, L.R.C. 1985, ch. C-8 (RPC).

[2]                Malgré la multitude de questions soulevées par l'avocat de Mme Bagri, je ne suis pas convaincu qu'en rendant sa décision, la Commission a commis une erreur susceptible de révision. Dans sa plaidoirie, celui-ci a formulé cinq arguments principaux à l'appui de la demande de contrôle judiciaire.

[3]                Premièrement, il a dit que la Commission avait commis une erreur de droit en concluant que les rapports médicaux se rapportant à Mme Bagri rédigés après le mois d'avril 1994 étaient irrecevables. En fait, il ressort clairement de ses motifs que la Commission a admis les rapports, mais a trouvé qu'ils avaient peu de valeur probante. Je ne suis pas convaincu que la conclusion de la Commission sur une question aussi essentiellement factuelle soit manifestement déraisonnable.

[4]                Deuxièmement, il a fait valoir que les motifs de la Commission avaient un aspect punitif et qu'ils ne tenaient pratiquement pas compte de la preuve. Je ne suis pas de cet avis. La Commission a correctement noté que les rapports médicaux antérieurs au 30 avril 1994, soit la fin de la PMA de Mme Bagri, ne laissaient pas entendre qu'elle était atteinte d'une invalidité physique ou mentale qui l'empêchait de travailler. La Commission a aussi fait remarquer qu'il n'y avait pas de rapport médical entre 1992 et 1996, et que, suivant l'avis de son médecin, Mme Bagri avait occupé, en 1994 et 1995, un emploi saisonnier moins exigeant sur le plan physique que son travail précédent.

[5]                Dans les circonstances, il était loisible à la Commission d'accorder peu de poids, sinon aucun, aux rapports médicaux rédigés en 1996 et par la suite. Même si la Commission a pu s'exprimer sans ménagements à l'occasion, l'avocat de la demanderesse a été incapable d'indiquer où dans ses motifs elle avait commis une erreur importante dans la qualification des faits.

[6]                Troisièmement, l'avocat de la demanderesse a fait valoir que, sur le plan de l'équité procédurale, la Commission était tenue d'enregistrer l'audience. En l'absence d'obligation prévue par la loi, le tribunal administratif qui n'enregistre pas ses séances ne manque pas à son obligation d'agir équitablement, à la condition que la cour de révision dispose des motifs pour lesquels le demandeur a contesté la décision en litige : Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 301 c. Montréal (Ville), [1997] 1 R.C.S. 793, paragraphe 81 et suivants.

[7]                L'avocat de la demanderesse a déclaré que la Commission n'avait fait aucune référence au témoignage de vive voix de Mme Bagri, et qu'en l'absence d'une transcription de l'audience, la Cour ne pouvait pas déterminer si elle avait ainsi commis une erreur. Je ne suis pas de cet avis. Les principales questions de fond dans la présente affaire ont trait à la qualité de la preuve médicale présentée à l'appui de l'affirmation de Mme Bagri selon laquelle elle avait droit à une prestation d'invalidité prolongée à compter du mois d'avril 1994 au plus tard. Son avocat ne m'a pas convaincu que l'absence d'un enregistrement de la déposition orale de Mme Bagri empêchait la Cour de décider si les documents dont disposait la Commission étaient suffisants pour constituer un fondement rationnel à sa décision.

[8]                Quatrièmement, l'avocat de la demanderesse a fait valoir que la Commission avait commis une erreur de droit en imposant à Mme Bagri le fardeau de prouver qu'à l'époque pertinente, elle était atteinte d'une invalidité au sens du RPC. Encore une fois, je me dois d'être en désaccord. Il est de droit constant à la Cour que les personnes qui réclament une prestation d'invalidité prolongée doivent prouver qu'elles y ont droit (voir, par exemple, Kent c. Canada (Procureur général), 2004 CAF 420, au paragraphe 4), et que la norme de preuve normale en matière civile, la prépondérance des probabilités, s'applique.

[9]                Cinquièmement, l'avocat de la demanderesse a plaidé que les délais dans la procédure avaient rendu inéquitable la décision de la Commission, et que la Cour devait faire droit à sa demande de prestation d'invalidité prolongée. Le Tribunal de révision a rejeté en juin 1998 l'appel interjeté par Mme Bagri du refus de sa demande de prestation d'invalidité prolongée. Les délais subséquents sont en grande partie attribuables à un appel et à une demande de contrôle judiciaire de Mme Bagri qui ont précédé la présente instance.

[10]            Même s'il est malheureux que la présente affaire n'ait pu être décidée plus tôt, le temps qu'il a fallu pour en arriver à une conclusion, à la suite de l'appel et du contrôle judiciaire précédents, ne justifie pas que soit annulé, au motif d'iniquité, le rejet par la Commission de l'appel de Mme Bagri. Il justifie encore moins que la Cour décide qu'elle a droit à une prestation d'invalidité prolongée.

[11]            Pour ces motifs, je suis d'avis de rejeter la demande de contrôle judiciaire, sans frais.

   « John M. Evans »

Juge

« Je souscris aux présents motifs »

« Gilles Létourneau »

Juge

« Je souscris aux présents motifs »

« Marc Noël »

Juge

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes, LL.B.


COUR D'APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                                             A-367-05

INTITULÉ :                                                                            Manjit Bagri c. PGC

LIEU DE L'AUDIENCE :                                                      Vancouver (C.-B.)

DATE DE L'AUDIENCE :                                                    Le 3 avril 2006

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                 LE JUGE EVANS

Y ONT SOUSCRIT :                                                              LES JUGES LÉTOURNEAU

                                                                                                ET NOËL

DATE DES MOTIFS :                                                           Le 5 avril 2006

COMPARUTIONS :

Craig Paterson                                                                           POUR LA DEMANDERESSE

Adrian Bieniasiewicz                                                                  POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Paterson and Associates                                                            POUR LA DEMANDERESSE

Vancouver (Colombie-Britannique)

John Sims, c.r.                                                                          POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.