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Date : 20050506

Dossier : A-396-04

Référence : 2005 CAF 164

CORAM :        LE JUGE ROTHSTEIN

LE JUGE NOËL

LE JUGE MALONE

ENTRE :

                                          PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                      demandeur

                                                                            et

                                                          ROSELYN S. LINGAM

                                                                                                                                  défenderesse

                                    Audience tenue à Ottawa (Ontario) le 3 mai 2005

                                    Jugement rendu à Ottawa (Ontario) le 6 mai 2005

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                                    LE JUGE NOËL

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                   LE JUGE ROTHSTEIN

                                                                                                                          LE JUGE MALONE


Date : 20050506

Dossier : A-396-04

Référence : 2005 CAF 164

CORAM :    LE JUGE ROTHSTEIN

LE JUGE NOËL

LE JUGE MALONE

ENTRE :

                                          PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                      demandeur

                                                                            et

                                                          ROSELYN S. LINGAM

                                                                                                                                  défenderesse

                                                       MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE NOËL

[1]                La Cour est saisie d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision d'un juge-arbitre qui a estimé que sept fausses déclarations faites par Roselyn S. Lingam en réclamant des prestations en vertu de la Loi sur l'assurance-emploi (la Loi) devaient être considérées comme une seule et même violation continue et qui a réduit la pénalité qui lui avait été infligée. Le juge-arbitre a également modifié l'avis de violation adressé à la prestataire en vertu de la Loi.

Genèse de l'instance


[2]                La prestataire a réclamé des prestations le 17 mai 2000 et a commencé à recevoir des prestations. Le 21 août 2002, un représentant d'Integrated Business Analysts Inc. a informé la Commission que la prestataire avait travaillé pour cette entreprise entre le 17 juillet 2000 et le 8 novembre 2000. La prestataire a expliqué qu'elle n'avait pas travaillé pendant chacune des périodes hebdomadaires de prestation étant donné qu'elle n'avait pas touché de rémunération dans le cadre de son emploi chez Integrated Business Analysis.

[3]                Le 1er mars 2003, la Commission a informé la prestataire qu'elle avait conclu qu'elle avait été une représentante des ventes à temps plein entre le 17 juillet 2000 et le 21 octobre 2000 et elle l'a condamnée à une pénalité de 2 843 $ pour les sept fausses déclarations qu'elle avait faites au cours de sa période de prestation. Le 20 octobre 2003, le conseil arbitral a rejeté l'appel de Mme Lingam, mais a ramené sa pénalité de 2 843 $ à 2 430 $ après avoir conclu qu'une des déclarations n'était pas fausse.

[4]                En appel, le juge-arbitre a confirmé que la prestataire avait travaillé au cours de la période en cause et que la somme de 4 455 $ lui avait été versée en trop à titre de prestations. Le juge-arbitre a estimé que la conclusion de la Commission suivant laquelle la prestataire avait sciemment fait une série de fausses déclarations était incontestable.


[5]                Il a toutefois estimé que la Commission n'avait pas tenu compte du fait que les déclarations de la prestataire avaient toutes été faites alors qu'elle travaillait pour le même employeur et qu'elles devaient par conséquent être considérées comme une seule et même violation continue et non comme des violations distinctes au sens de l'article 38 de la Loi. Il a par conséquent estimé que la pénalité était trop sévère et il l'a ramenée à 500 $. Il a également remplacé l' « avis de violation grave » envoyé à Mme Lingam par un « avis de violation mineure » en vertu de l'article 7.1.

[6]                Voici les dispositions législatives sur lesquelles le juge-arbitre s'est fondé :

Pénalité : prestataire

38. (1) Lorsqu'elle prend connaissance de faits qui, à son avis, démontrent que le prestataire ou une personne agissant pour son compte a perpétré l'un des actes délictueux suivants, la Commission peut lui infliger une pénalité pour chacun de ces actes :

a)à l'occasion d'une demande de prestations, faire sciemment une déclaration fausse ou trompeuse;

b) étant requis en vertu de la présente loi ou des règlements de fournir des renseignements, faire une déclaration ou fournir un renseignement qu'on sait être faux ou trompeurs;

c)omettre sciemment de déclarer à la Commission tout ou partie de la rémunération reçue à l'égard de la période déterminée conformément aux règlements pour laquelle il a demandé des prestations;

d)faire une demande ou une déclaration que, en raison de la dissimulation de certains faits, l'on sait être fausse ou trompeuse;

e)sciemment négocier ou tenter de négocier un mandat spécial établi à son nom pour des prestations au bénéfice desquelles on n'est pas admissible;

f) omettre sciemment de renvoyer un mandat spécial ou d'en restituer le montant ou la partie excédentaire comme le requiert l'article 44;

g) dans l'intention de léser ou de tromper la Commission, importer ou exporter, ou faire importer ou exporter, un document délivré par elle;

h) participer, consentir ou acquiescer à la perpétration d'un acte délictueux visé à l'un ou l'autre des alinéas a) à g).

38(2) Maximum

(2) La pénalité que la Commission peut infliger pour chaque acte délictueux ne dépasse pas :

a) soit le triple du taux de prestations hebdomadaires du prestataire;

Penalty for prestataires, etc.

38. (1) The Commission may impose on a claimant, or any other person acting for a claimant, a penalty for each of the following acts or omissions if the Commission becomes aware of facts that in its opinion establish that the claimant or other person has

(a) in relation to a claim for benefits, made a representation that the claimant or other person knew was false or misleading;

(b) being required under this Act or the regulations to provide information, provided information or made a representation that the claimant or other person knew was false or misleading;

(c) knowingly failed to declare to the Commission all or some of the claimant's earnings for a period determined under the regulations for which the claimant claimed benefits;

(d) made a claim or declaration that the claimant or other person knew was false or misleading because of the non-disclosure of facts;

(e) being the payee of a special warrant, knowingly negotiated or attempted to negotiate it for benefits to which the claimant was not entitled;

(f) knowingly failed to return a special warrant or the amount of the warrant or any excess amount, as required by section 44;

(g) imported or exported a document issued by the Commission, or had it imported or exported, for the purpose of defrauding or deceiving the Commission; or

(h) participated in, assented to or acquiesced in an act or omission mentioned in paragraphs (a) to (g).

38(2) Maximum penalty

(2) The Commission may set the amount of the penalty for each act or omission at not more than

(a) three times the claimant's rate of weekly benefits;



b) soit, si cette pénalité est imposée au titre de l'alinéa (1)c), le triple :

(i) du montant dont les prestations sont déduites au titre du paragraphe 19(3),

(ii) du montant des prestations auxquelles le prestataire aurait eu droit pour la période en cause, n'eût été la déduction faite au titre du paragraphe 19(3) ou l'inadmissibilité ou l'exclusion dont il a fait l'objet;

c) soit, lorsque la période de prestations du prestataire n'a pas été établie, le triple du taux de prestations hebdomadaires maximal en vigueur au moment de la perpétration de l'acte délictueux.

38(3) Détermination au titre du paragraphe 145(2)

(3) Il demeure entendu que les semaines de prestations régulières remboursées par suite de la perpétration d'un acte délictueux visé au paragraphe (1) sont considérées comme des semaines de prestations régulières versées pour l'application du paragraphe 145(2).

1996, ch. 23, art. 38; 2001, ch. 5, art. 8.

(b) if the penalty is imposed under paragraph (1)(c),

(i) three times the amount of the deduction from the claimant's benefits under subsection 19(3), and

(ii) three times the benefits that would have been paid to the claimant for the period mentioned in that paragraph if the deduction had not been made under subsection 19(3) or the claimant had not been disentitled or disqualified from receiving benefits; or

(c) three times the maximum rate of weekly benefits in effect when the act or omission occurred, if no benefit period was established.

38(3) Determination under subsection 145(2)

(3) For greater certainty, weeks of regular benefits that are repaid as a result of an act or omission mentioned in subsection (1) are deemed to be weeks of regular benefits paid for the purposes of the application of subsection 145(2).

1996, c. 23, s. 38; 2001, c. 5, s. 8.

[...]

Qualification de la violation

7.1(5) À l'exception des violations pour lesquelles un avertissement est donné, chaque violation est qualifiée de mineure, de grave, de très grave ou de subséquente, en fonction de ce qui suit :

a) elle est mineure, si sa valeur est inférieure à 1 000 $, grave, si elle est inférieure à 5 000 $, et très grave, si elle est de 5 000 $ ou plus;

b) elle est subséquente si elle fait l'objet d'un avis de violation donné dans les deux cent soixante semaines suivant une autre violation, même si l'acte délictueux sur lequel elle est fondée a été perpétré avant cette dernière.

Valeur de la violation

7.1(6) La valeur d'une violation correspond à la somme des montants suivants :

a) le versement excédentaire de prestations lié à l'acte délictueux sur lequel elle est fondée;

b)si le prestataire est exclu ou inadmissible au bénéfice des prestations, ou si l'acte délictueux en cause a trait aux conditions requises au titre de l'article 7, le montant obtenu, sous réserve du paragraphe (7), par multiplication de son taux de prestations hebdomadaires par le nombre moyen de semaines à l'égard desquelles des prestations régulières sont versées à un prestataire, déterminé conformément aux règlements.

...

Classification of violations

7.1(5) Except for violations for which a warning was imposed, each violation is classified as a minor, serious, very serious or subsequent violation as follows :

(a) if the value of the violation is

(i) less than $1,000, it is a minor violation,

(ii) $1,000 or more, but less than $5,000, it is a serious violation, or

(iii) $5,000 or more, it is a very serious violation; and

(b) if the notice of violation is issued within 260 weeks after the person accumulates another violation, it is a subsequent violation, even if the acts or omissions on which it is based occurred before the person accumulated the other violation.

Value of violations

7.1(6) The value of a violation is the total of

(a) the amount of the overpayment of benefits resulting from the acts or omissions on which the violation is based, and

(b) if the claimant is disqualified or disentitled from receiving benefits, or the act or omission on which the violation is based relates to qualification requirements under section 7, the amount determined, subject to subsection (7), by multiplying the claimant's weekly rate of benefit by the average number of weeks of regular benefits, as determined under the regulations.

[7]                Au soutien de son appel, le procureur général affirme que le juge-arbitre a commis une erreur de droit dans son interprétation de l'article 38 de la Loi, qu'il a outrepassé sa compétence en diminuant le montant de la pénalité et qu'il a également commis une erreur en remplaçant l'avis de violation grave par un avis de violation mineure en vertu de l'article 7.1 de la Loi.

Analyse et décision

[8]                L'article 38 autorise la Commission à infliger une pénalité pour « chacun » des actes énumérés au paragraphe 38(1). Il est évident que chacune des cartes de déclaration soumise par la prestataire contenait une déclaration distincte.


[9]                Il n'était donc pas loisible au juge-arbitre d'intervenir au motif que la Commission aurait dû considérer les fausses déclarations comme une seule et même fausse déclaration. Ce n'est pas ce que la Loi prévoit et la Commission n'est pas tenue de renoncer à l'application du paragraphe 38(1) parce que la prestataire travaillait pour le même employeur au moment où elle a fait les fausses déclarations.

[10]            Qui plus est, le juge-arbitre a commis une erreur en réduisant la pénalité dans des circonstances où il n'était pas en mesure de démontrer que la Commission n'avait pas tenu compte de facteurs pertinents ou qu'elle avait tenu compte de facteurs non pertinents (voir, par exemple, l'arrêt Procureur général du Canada c. Purcell (1995), A-694-94 (C.A.F.)).

[11]            Le juge-arbitre a également commis une erreur dans son interprétation de l'article 7.1 de la Loi lorsqu'il a modifié l'avis de violation. Les paragraphes 7.1(5) et 7.1(6) de la Loi prévoient que si la valeur de la violation (le montant du trop-payé) est supérieure à 1 000 $ mais inférieure à 5 000 $, il s'agit d'une violation grave. Comme en l'espèce le trop-payé s'élève à 4 455 $, le juge-arbitre a outrepassé sa compétence en ramenant de « grave » à « mineure » la gravité de la violation constatée dans l'avis.


[12]            Pour ces motifs, j'accueillerais la demande de contrôle judiciaire, j'infirmerais la décision du juge-arbitre et je renverrais l'affaire au juge-arbitre en chef ou à un juge-arbitre désigné par lui pour qu'il rende une nouvelle décision en tenant pour acquis que l'appel interjeté par la prestataire de la décision du conseil arbitral doit être rejeté. Bien que des dépens soient réclamés, je suis enclin à n'en adjuger aucun étant donné que la prestataire n'a contesté aucun des moyens invoqués par le procureur général au soutien de sa demande.

                     « Marc Noël »                              

Juge

« Je souscris aux présents motifs. »

Marshall Rothstein, juge

« Je souscris aux présents motifs. »

B. Malone, juge

Traduction certifiée conforme

Linda Brisebois, LL.B.


                                                                             

                                                    COUR D'APPEL FÉDÉRALE

                                             AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                                            A-396-04

INTITULÉ:                                                                             PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA c. ROSELYN S. LINGAM

                                                                             

LIEU DE L'AUDIENCE :                                                     OTTAWA (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                                                   LE 3 MAI 2005

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                 LE JUGE NOËL

Y ONT SOUSCRIT :                                                             LE JUGE ROTHSTEIN

LE JUGE MALONE

DATE DES MOTIFS :                                                          LE 6 MAI 2005

COMPARUTIONS:

Lynn Marchildon                                             POUR LE DEMANDEUR

Roselyn S. Lingham                                       POUR LA DÉFENDERESSE

(pour son propre compte)

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada                         POUR LE DEMANDEUR

Roselyn S. Lingham

(pour son propre compte)                            POUR LA DÉFENDERESSE


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