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Date : 20040623

Dossiers : A-317-03

A-337-03

Référence : 2004 CAF 244

CORAM :       LE JUGE LINDEN

LE JUGE ROTHSTEIN

LE JUGE SEXTON

ENTRE :

                                                          MOHAMMED HARKAT

appelant

                                                                                                                                                           

                                                                             et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL DU CANADA

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

intimés

Audience tenue à Toronto (Ontario), le 22 juin 2004

Jugement rendu à l'audience, à Toronto (Ontario), le 22 juin 2004

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                            LE JUGE SEXTON


Date : 20040623

Dossiers : A-317-03

A-337-03

Référence : 2004 CAF 244

CORAM :       LE JUGE LINDEN

LE JUGE ROTHSTEIN

LE JUGE SEXTON

ENTRE :

                                                          MOHAMMED HARKAT

appelant

                                                                                                                                                           

                                                                             et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL DU CANADA

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

intimés

                                                       MOTIFS DU JUGEMENT

(Prononcés à l'audience, à Toronto (Ontario), le 22 juin 2004)

LE JUGE SEXTON


[1]                Monsieur Harkat, l'appelant, interjette appel contre deux ordonnances distinctes que la juge désignée a rendues dans le cours de son examen en vue de déterminer le caractère raisonnable du certificat de sécurité délivré contre l'appelant le 10 décembre 2002, selon lequel il est interdit de territoire au Canada pour des raisons de sécurité au motif qu'il a été l'auteur d'actes terroristes ou qu'il appartient à une organisation qui a été l'auteur d'actes terroristes. Au moment où le certificat a été délivré, l'appelant était un étranger qui avait obtenu le statut de réfugié au sens de la Convention le 24 février 1997.

[2]                À la suite de la délivrance du certificat, l'appelant a déposé une requête pour obtenir, en vertu du paragraphe 79(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR), la suspension de l'audience devant vérifier le caractère raisonnable du certificat et déposer la demande de protection visée au paragraphe 112(1). Dans la première ordonnance contestée en appel, la juge désignée a refusé de suspendre la procédure de vérification du caractère raisonnable du certificat de sécurité, au motif que l'appelant n'avait pas le droit de demander la protection visée au paragraphe 112(1) parce qu'il avait obtenu le statut de réfugié au sens de la Convention et que, par conséquent, il jouissait déjà du statut de personne à protéger en vertu du paragraphe 95(2) de la LIPR.

[3]                Selon nous, la juge désignée a eu raison. Le paragraphe 112(1) prévoit expressément que la personne se trouvant au Canada « et qui n'est pas visée au paragraphe 115(1) » peut demander la protection au ministre si elle est visée par une mesure de renvoi ou nommée dans un certificat de sécurité. Quant au paragraphe 115(1), il vise la « personne protégée » . Vu les termes clairs de la LIPR, étant donné que l'appelant était déjà une personne protégée, il ne pouvait pas présenter la demande de protection prévue par le paragraphe 112(1) et, en fait, il n'avait aucun avantage à présenter cette demande.


[4]                L'appelant a présenté une autre requête à la juge désignée lui demandant de forcer un employé du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) à témoigner à l'audience au sujet du résumé de la preuve qui lui avait été fourni conformément à l'alinéa 78h) de la LIPR. La juge désignée a refusé de forcer un employé du SCRS de témoigner quant aux éléments de contenu du résumé. Elle a plutôt établi un processus par lequel l'appelant pourrait signifier et déposer des questions dans le but d'obtenir des clarifications sur les faits et les questions exposés dans le résumé.

[5]                L'avocat qui représente actuellement l'appelant ne chercher pas à faire forcer le témoin du SCRS à un interrogatoire et il a affirmé qu'il respecterait le processus établi par la juge désignée.

[6]                L'avocat qui représentait l'appelant précédemment avait en outre allégué que les avocats des ministres avaient commis un abus de procédure en lui envoyant une lettre le menaçant de poursuivre au criminel, s'il témoignait, un ancien employé du SCRS qu'il se proposait de faire témoigner. La juge désignée a conclu que la lettre envoyée par les avocats des ministres à l'avocat de l'appelant ne constituait pas une menace abusive de poursuites au criminel qui justifierait l'annulation du certificat. Dans leur lettre, les avocats des ministres informaient simplement l'avocat de l'appelant que le témoignage de l'ancien employé du SCRS pourrait violer l'obligation de garder le secret que lui impose la Loi sur la protection de l'information, L.R.C. 1985, ch. O-5, et ses modifications.


[7]                En ce qui a trait à l'allégation d'abus de procédure, l'avocat actuel de l'appelant n'a présenté aucune observation quant à savoir si la lettre constituait réellement une menace, mais il a laissé cette question à la discrétion de la Cour.

[8]                Nous sommes d'accord avec la juge désignée que la lettre ne constituait pas une menace équivalant à abus de procédure. L'ancien employé du SCRS a confirmé lors du contre-interrogatoire qu'il n'était pas au courant des dispositions de la Loi sur la protection de l'information avant que l'avocat de l'appelant lui ait parlé de la lettre. Selon nous, il était tout à fait raisonnable pour les avocats des ministres d'envoyer cette lettre dans le but d'être sûrs que tant l'avocat de l'appelant que l'ancien employé du SCRS étaient au courant des obligations qu'imposait la Loi sur la protection de l'information. En outre, nous estimons révélateur le fait que les avocats des ministres aient envoyé la lettre à l'avocat de l'appelant plutôt que directement à la personne qu'on voulait faire témoigner et qu'ils aient aussi envoyé une copie à la cour. Par conséquent, nous n'interprétons pas la lettre comme étant une menace de poursuite inappropriée.

[9]                Nous savons que l'avocat actuel de l'appelant a comparu dans des circonstances difficiles et nous le félicitons pour les observations raisonnables qu'il a présentées à la Cour.

[10]            Les appels devraient être rejetés.

« J. E. Sexton »

                                                                                                                                                     Juge                                 

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes


                                                     COUR D'APPEL FÉDÉRALE

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIERS :                                      A-317-03

A-337-03

INTITULÉ :                                       MOHAMMED HARKAT

c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL DU CANADA

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

LIEU DE L'AUDIENCE :                TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :               LE 22 JUIN 2004

MOTIFS DU JUGEMENT

DE LA COUR                                  (LES JUGES LINDEN, ROTHSTEIN ET SEXTON)

PRONONCÉS À L'AUDIENCE

PAR :                                                LE JUGE SEXTON

COMPARUTIONS :

Paul D. Copeland                                                                      POUR L'APPELANT

Donald MacIntosh

John Loncar                                                                             POUR LES INTIMÉS

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Copeland, Duncan

Avocats

Toronto (Ontario)                                                                     POUR L'APPELANT

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada                                           POUR LES INTIMÉS



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