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Date : 20060220

Dossier : A-127-05

Référence : 2006 CAF 77

CORAM :       LE JUGE ROTHSTEIN

                        LA JUGE SHARLOW

                        LE JUGE MALONE

ENTRE :

LE CONSEIL NATIONAL DES FEMMES MÉTISSES et SHEILA D. GENAILLE

appelants

(demandeurs)

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

intimé

(défendeur)

Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 14 février 2006.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 20 février 2006.

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                             LA JUGE SHARLOW

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                      LE JUGE ROTHSTEIN

                                                                                                                            LE JUGE MALONE


Date : 20060220

Dossier : A-127-05

Référence : 2006 CAF 77

CORAM :       LE JUGE ROTHSTEIN

                        LA JUGE SHARLOW

                        LE JUGE MALONE

ENTRE :

LE CONSEIL NATIONAL DES FEMMES MÉTISSES et SHEILA D. GENAILLE

appelants

(demandeurs)

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

intimé

(défendeur)

MOTIFS DU JUGEMENT

LA JUGE SHARLOW

[1]                Il s'agit d'un appel d'un jugement de la Cour fédérale (2005 CF 230) qui rejetait avec dépens la contestation des appelants d'une décision du gouvernement fédéral de ne pas permettre au Conseil national des femmes métisses (CNFM) d'être partie à une entente conclue dans le cadre d'un programme créé par Développement des ressources humaines Canada (DRHC). Le dossier fait référence au programme en question sous le nom de « Stratégie postérieure aux Chemins de la réussite » parce qu'il a été mis en oeuvre après la révision, en 1995, du programme précédent « Les chemins de la réussite : stratégie de l'emploi et de la formation des autochtones » . Les deux programmes visent principalement le développement du marché du travail pour les autochtones.

[2]                Le programme « Stratégie postérieure aux Chemins de la réussite » a été mis en oeuvre par trois ententes cadres nationales. Chaque entente cadre nationale a comme signataire une organisation qui, selon DRHC, représente l'un des trois groupes autochtones à l'échelle nationale. Ces trois organisations sont l'Assemblée des premières nations (qui représente les premières nations), l'Inuit Tapirisat of Canada (qui représente les Inuits) et le Ralliement national des Métis (RNM) (qui représente les Métis).

[3]                Chaque entente cadre nationale prévoit la négociation du financement pour le développement du marché du travail avec des organisations locales ou régionales. Pour faciliter les choses, j'utiliserai l'expression « ententes sur les Chemins de la réussite pour les Métis » pour désigner autant l'entente cadre nationale avec le RNM que les ententes connexes avec les organisations locales ou régionales métisses.

[4]                Le CNFM n'est pas un des signataires des ententes sur les Chemins de la réussite pour les Métis, mais ses membres croient qu'il devrait l'être. Elles croient que le refus du gouvernement fédéral de permettre au CNFM de devenir un des signataires des ententes sur les Chemins de la réussite pour les Métis est une violation des droits des femmes métisses protégés par les articles 15 et 28 de la Charte canadienne des droits et libertés. Les articles 15 et 28 de la Charte se lisent comme suit :

15. (1) La loi ne fait acception de personne et s'applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l'âge ou les déficiences mentales ou physiques.

15(1) Every individual is equal before and under the law and has the right to the equal protection and equal benefit of the law without discrimination and, in particular, without discrimination based on race, national or ethnic origin, colour, religion, sex, age or mental or physical disability.

[...]

...

28. Indépendamment des autres dispositions de la présente charte, les droits et libertés qui y sont mentionnés sont garantis également aux personnes des deux sexes.

28. Notwithstanding anything in this Charter, the rights and freedoms referred to in it are guaranteed equally to male and female persons.



[5]                Le CNFM et trois femmes métisses ont déposé une demande de contrôle judiciaire à la Cour fédérale demandant un certain nombre de réparations. Quand l'audition de la demande a eu lieu à la Cour fédérale, il ne restait que deux demandeurs, soient le CNFM et Sheila Genaille. Mme Genaille est une femme métisse qui participe depuis longtemps à des organisations dévouées à la promotion des intérêts des femmes métisses. Elle est présidente du CNFM.

[6]                Les demandeurs voulaient que la Cour leur accorde les réparations suivantes : (1) un jugement déclaratoire disant que la négligence du gouvernement fédéral à inclure le CNFM comme signataire des ententes sur les Chemins de la réussite pour les Métis contrevient aux articles 15 et 28 de la Charte canadienne des droits et libertés; (2) un jugement déclaratoire disant que la négligence du gouvernement fédéral à accorder le même financement pour la création d'emplois et la formation en faveur des femmes métisses, en raison de l'adoption de ces ententes (en vigueur de 1997 à 1999), contrevient aux articles 15 et 28 de la Charte canadienne des droits et libertés; (3) une ordonnance précisant que les ententes sur les Chemins de la réussite pour les Métis doivent être interprétées de telle sorte que le financement, les emplois et la formation dont elles font état soient offerts également aux hommes et aux femmes vivant à l'intérieur ou à l'extérieur des communautés métisses; (4) une ordonnance précisant que les ententes sur les Chemins de la réussite pour les Métis doivent être interprétées de telle sorte que le CNFM soit ajouté comme signataire et qu'il puisse nommer une représentante métisse régionale aux conseils d'administration appelés à s'occuper de ces ententes.

[7]                Les appelants ne pouvaient obtenir les réparations qu'ils demandaient que si les faits nécessaires pour formuler une réclamation fondée sur la Charte étaient prouvés selon la prépondérance des probabilités. Les droits de la Charte qui, selon les demandeurs, n'auraient pas été respectés sont des droits qui ne peuvent être revendiqués que par une personne ou au nom d'une personne. Cependant, la demande était fondée en partie sur le fait que, par le truchement des diverses organisations de femmes métisses qui en sont membres, le CNFM représente toutes les femmes métisses du Canada, ou au moins un grand nombre d'entre elles. Les appelants soutiennent aussi que, si leur demande de contrôle judiciaire est accueillie, le CNFM est capable de garantir que les femmes métisses obtiendront les avantages prévus par les ententes sur les Chemins de la réussite pour les Métis. Les appelants ajoutent que ces avantages sont refusés aux femmes métisses parce que les ententes actuelles ne permettent pas au CNFM de participer aux ententes sur les Chemins de la réussite pour les Métis.

[8]                Compte tenu des réparations demandées, il revenait aux appelants de produire des preuves que les femmes métisses se voient refuser les avantages du programme Les chemins de la réussite dans le cadre des ententes actuelles, et que le CNFM représente suffisamment de femmes métisses pour que les lacunes dans les services offerts aux femmes métisses soient redressées par les réparations demandées. Il s'agit de questions de fait que le juge a dû examiner en fonction de la preuve présentée. Les principes de l'examen en appel empêchent la Cour de mettre en cause les conclusions de fait en l'absence d'une erreur manifeste et dominante. Par conséquent, toute conclusion de fait du juge doit être maintenue si elle s'appuie sur la preuve de façon raisonnable.

[9]                Si je comprends bien les motifs du juge, il a tiré plusieurs conclusions de fait qui, par enchaînement, sont fatales pour la demande des appelants. Il a trouvé insuffisante la preuve selon laquelle les femmes métisses ne sont pas adéquatement représentées par le RNM, ou qu'elles éprouvent des difficultés lorsqu'elles tentent d'avoir recours au programme ou au financement dans le cadre des ententes actuelles. De plus, il n'était pas convaincu, au vu de la preuve présentée, que le CNFM bénéficie d'un appui important de la part des femmes métisses.

[10]            Après un examen attentif du dossier et des arguments de l'avocat des appelants, je suis contrainte de conclure que les conclusions de fait du juge étaient raisonnables, compte tenu de la preuve qui lui avait été présentée. Par conséquent, l'appel ne pourra pas être accueilli.

[11]            La Couronne a demandé les dépens de l'appel. Les appelants ont soutenu qu'ils ne devraient pas être tenus de payer les dépens en la Cour ou en Cour fédérale. Selon la pratique des deux cours, les dépens suivent normalement l'issue de la cause. Il n'y a pas de raison de s'éloigner de cette pratique en l'espèce. Je rejetterais l'appel avec dépens.

                                        

                                                                                                           « K. Sharlow »

JUGE

« Je souscris aux présents motifs

    Marshall Rothstein, JUGE »

« Je souscris aux présents motifs

      B. Malone, JUGE »

Traduction certifiée conforme

Evelyne Swenne, traductrice


COUR D'APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                                             A-127-05

INTITULÉ :                                                                           Le Conseil national des femmes métisses et Sheila D. Genaille c. Le procureur général du Canada

LIEU DE L'AUDIENCE :                                                      Ottawa (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                                                    Le 14 février 2006

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                LA JUGE SHARLOW

Y ONT SOUSCRIT :                                                              LE JUGE ROTHSTEIN

                                                                                                LE JUGE MALONE

DATE DES MOTIFS :                                                          Le 20 février 2006

COMPARUTIONS :

Kathleen A. Lahey

POUR LES APPELANTS

(DEMANDEURS)

Sean Gaudet

POUR L'INTIMÉ

SOLICITORS OF RECORD:

Kathleen A. Lahey

Kingston (Ontario)

POUR LES APPELANTS (DEMANDEURS)

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

POUR L'INTIMÉ

(DÉFENDEUR)

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