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     Date: 19990826

     Dossier: ITA-1716-98


     Dans l'affaire de la Loi de l'impôt sur le revenu,

     - et -

     Dans l'affaire d'une cotisation ou des cotisations établies par le ministre du Revenu national en vertu d'une ou plusieurs des lois suivantes: la Loi de l'impôt sur le revenu, le Régime de pensions du Canada et la Loi sur l'assurance-emploi,

CONTRE:

     INTERMODAL CONTAINER TRANSPORT LTÉE

     Débitrice judiciaire

     ET

     GREGORY BEAUCHAMP et

     JEFFREY BEAUCHAMP

     Opposants

     ET

     GAÉTAN LABBÉ

     Mis-en-cause



     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ME RICHARD MORNEAU, PROTONOTAIRE:

[1]      La Cour est saisie en vertu de l'article 597 du Code de procédure civile de requêtes en opposition de la part de deux frères, soit Jeffrey et Gregory Beauchamp, à l'égard de saisies pratiquées par la créancière-saisissante à l'encontre de treize biens meubles consistant pour la plupart en des grues ou en du matériel servant de près dans l'industrie de la location de grues, domaine dans lequel opère la débitrice judiciaire, les opposants ci-avant mentionnés ainsi que l'ensemble des corporations ci-après impliquées.

[2]      Bien que chacun des opposants ait présenté sa propre requête et ce, dans le présent dossier de même que dans le dossier ITA-9734-98, on doit constater que quant au fond, la requête de chaque opposant est la même et ce pour les deux dossiers en litige. Partant, il y a lieu de constituer les présents motifs en fonction de l'opposition de Jeffrey Beauchamp (dorénavant désigné parfois sous le collectif "les ou aux Beauchamp").

[3]      Les présents motifs de même que l'ordonnance les accompagnant seront applicables à l'ensemble des requêtes dans le présent dossier de même que dans le dossier ITA-9734-98.

[4]      Les biens saisis en litige sont les suivants (les biens):

1.      1 camion pick-up Chevrolet immatriculé FN983330 couleur verte;
2.      1 camion Ford 9000, orange NS/ W9OJVHA6973 avec baume immatriculé L86164;
3.      1 grue de modèle Grove, modèle 4080 NS/ R21365, immatriculée FN98335;
4.      1 véhicule GMC Sierra Grande couleur rouge immatriculé FJ52559;
5.      1 pick-up bleu GMC Custom de Luxe immatriculé FN98329;
6.      1 véhicule Pontiac Transport vert immatriculé FM12051, NS/1GMDU06D2RT213152;
7.      1 véhicule de marque Jaguar couleur grise, sans moteur immatriculé FE96635;
8.      1 camion bleu western star bleu, sans moteur avec baume;
9.      1 camion vert avec plateau rotatif, NS/FCIN3012RW33493;
10.      1 camion Ford L9000 avec baume immatriculé L126647;
11.      1 grue de marque Grove modèle 84506, NS/AC1Y5013L N 31125 avec acc.
12.      1 grue Lorain NS/500 /72;
13.      1 grue 40 tonnes, escamotable de fabrication allemande et russe portant immatriculation RK91398.

[5]      Les Beauchamp revendiquent les divers biens en vertu de deux catégories de contrats qui, selon leurs allégations, les constituent propriétaires des biens.

[6]      Bien que l'approche des opposants puisse paraître convaincante au premier regard, la Cour considère ne pouvoir donner raison à ces derniers dans leurs oppositions puisque après analyse, trop d'aspects du dossier sont incohérents ou demeurent sans réponse.

[7]      De plus, les opposants n'ont véritablement fait connaître leur approche dans le présent dossier que très tardivement, soit lors de l'amendement de leurs requêtes ou soit lors et par le biais de la plaidoirie de leur procureure. En effet, les opposants n'ont aucunement saisi la chance lors de la rédaction de leur affidavit au soutien de leurs oppositions pour mentionner, encore moins détailler, que l'on devait juxtaposer à certains des contrats écrits des contrats verbaux par lesquels les vendeurs, soit les Beauchamp, se réservaient la pleine propriété des biens vendus jusqu'à parfait paiement du prix de vente. Pareillement, l'existence de certaines hypothèques (hypothec) touchant les mêmes biens n'a pas du tout été mentionnée par les opposants dans leur requête. Pour l'ensemble des hypothèques, leur présence ne fut justifiée par leur procureure que lors des plaidoiries. Enfin, les prétentions écrites contenues au dossier de requête des opposants ne sont qu'une répétition de ce que les affidavits affirment. Ce n'est donc que lors de l'audition que la Cour et la créancière-saisissante ont pu véritablement apprécier la position en droit des opposants. Cette façon de faire ne respecte pas la lettre et l'esprit des règles.

[8]      D'autre part, et bien que cet élément ne soit pas déterminant en soi, il y a lieu tout de même de noter ici que bon nombre des contrats écrits en litige sont intervenus entre les parties le 9 décembre 1997, soit environ deux mois après que Revenu Québec ait saisi les biens, entre autres, de Service de Grues Intermodal Inc., connue aussi comme Intermodal Crane Service Inc. (dorénavant Crane).

[9]      Afin d'apprécier davantage la situation, il appert opportun, dans un premier temps, de s'arrêter aux contrats par lesquels les Beauchamp auraient vendu à tempérament certains des biens.

I.      Vente à tempérament de biens

[10]      Une première série de contrats implique le bien saisi numéro 9, soit: 1 camion vert avec plateau rotatif, NS/FCIN3012RW33493.

[11]      Ce bien serait la propriété des Beauchamp en raison du raisonnement suivant.

[12]      Il aurait été cédé (assigned) aux Beauchamp par Beau-Co Corporation Inc. (Beau-Co) par contrat écrit le 9 décembre 1997, le tout tel qu'il ressort d'un contrat désigné en preuve comme le contrat D. Beau-Co est une corporation des Bahamas dont les actionnaires et administrateurs sont les Beauchamp ainsi que leur père.

[13]      Suivant les Beauchamp, Beau-Co pouvait ainsi céder ce bien parce qu'elle en serait demeurée propriétaire au terme d'un contrat de vente intervenu le 19 décembre 1995 entre elle en tant que vendeur et Crane en tant qu'acheteur; contrat désigné en preuve comme le contrat D.1.

[14]      Les Beauchamp ont soutenu que ce contrat D.1 devait être vu comme un contrat de vente à tempérament, et ce, en raison d'une entente verbale à cet effet qui aurait existé entre les parties de tout temps et de façon parallèle au contrat écrit D.1. Crane ayant fait défaut à ses paiements en vertu du contrat, elle n'aurait jamais acquis la propriété du bien. La propriété de ce dernier serait donc demeurée celle de Beau-Co qui pouvait alors en décembre 1997 l'assigner aux Beauchamp.

[15]      L'état du droit au Québec tel qu'appliqué aux faits de l'affaire ainsi que l'existence d'une hypothèque décernée par Crane sur le bien et publiée en décembre 1997 m'interdisent de faire droit à l'existence de ce contrat verbal entre les parties par lequel la vente en serait une à tempérament et non une vente parfaite en faveur de Crane dès le 19 décembre 1995.

[16]      La raison selon moi que le contrat D.1 s'intitule "Conditional Sales Contract" est due uniquement au fait qu'il contient en page 3 une clause de non-concurrence entre les parties. D'autre part, la clause qu'il contient au dernier paragraphe de sa page 2 n'est pas une clause de réserve de propriété mais bien uniquement une clause de déchéance du terme en faveur du vendeur. Ce contrat D.1 prévoit enfin dans les termes qui suivent que tout changement ou entente doit être paraphé par écrit:

No change in this Contract shall be binding unless in writing signed by an officer of Seller. No agreement, representation or warranty shall be binding on Seller unless expressly contained herein or in a writing attached hereto duly signed by the Seller. This Contract shall be binding upon the Purchaser, his and their heirs, administrators, successors and assigns.

[17]      Il est particulier de constater que les parties aient prévu par écrit toutes ces clauses mais n'aient pas prévu à un contrat de vente que ce dernier était à tempérament.

[18]      Les faits mentionnés aux trois derniers paragraphes m'indiquent que la reconnaissance d'une entente verbale à l'effet que cette vente n'était pas une vente parfaite mais bien une vente à tempérament irait directement à l'encontre du principe énoncé à l'article 2863 du Code civil du Québec (C.c.Q.). Cet article se lit:


     Art. 2863. Les parties à un acte juridique constaté par un écrit ne peuvent, par témoignage, le contredire ou en changer les termes, à moins qu'il n'y ait un commencement de preuve.

[19]      Je pense que l'on peut appliquer mutatis mutandis à la situation présente l'extrait suivant de la décision de la Cour d'appel du Québec dans l'arrêt Robillard c. Lacaille, (1993) R.D.J. 284, à la page 288:

     Dans un premier temps, il convient de préciser que c'est à bon droit que le juge de première instance écrit que permettre aux appelants de faire la preuve que les écrits P-1 et P-2 ont été consentis sous une condition non écrite, équivaudrait à "changer" les termes de ces écrits.
     Il ne s'agit pas, ici, de compléter des documents manifestement incomplets, de faire préciser ce qui s'en infère implicitement ou de les interpréter. Ce qui est recherché est plutôt une modification substantielle de la portée des écrits P-1 et P-2.

[20]      Je ne crois pas de plus que l'entente verbale ait pour but d'interpréter le contrat D.1 ou de le compléter parce qu'il serait manifestement incomplet. En ce sens, l'article 2864 C.c.Q. est inapplicable. Cet article se lit:

     Art. 2864. La preuve par témoignage est admise lorsqu'il s'agit d'interpréter un écrit, de compléter un écrit manifestement incomplet ou d'attaquer la validité de l'acte juridique qu'il constate.

[21]      On ne dispose pas de plus de commencement de preuve au sens de l'article 2865, qui se lit:

     Art. 2865. Le commencement de preuve peut résulter d'un aveu ou d'un écrit émanant de la partie adverse, de son témoignage ou de la présentation d'un élément matériel, lorsqu'un tel moyen rend vraisemblable le fait allégué.

[22]      Partant, j'accorde peu de poids à la clause suivante contenue au préambule du contrat de cession intervenu entre Beau-Co et les Beauchamp le 9 décembre 1997 (contrat D):

WHEREAS pursuant to the terms of the Contract [D.1], Beau-Co Corporation Limited continues to remain the owner of the Property;

[23]      On notera que cette clause ne fait même pas référence à l'entente verbale alléguée tardivement par les Beauchamp lors du contre-interrogatoire sur affidavit. C'est pourtant ce seul contrat verbal qui peut être visé ici.

[24]      On notera également un autre fait qui va en sens opposé au fait que c'est Beau-Co, et maintenant les Beauchamp, qui seraient propriétaires du bien et non Crane. Ce fait est l'existence d'une hypothèque accordée par Crane au profit des Beauchamp. Cette hypothèque a été publiée le 12 décembre 1997. Elle porte, entre autres, tout comme les contrats D.1 et D, sur le bien identifié plus avant. L'existence de cette hypothèque n'a pas été soulevée par les opposants dans leur requête ou dans leur requête amendée.

[25]      La procureure des Beauchamp a justifié comme suit dans les faits l'existence de cette hypothèque. Selon elle, cette hypothèque aurait été accordée par Crane pour sécuriser, pour garantir les Beauchamp, résidents de l'Ontario, face à l'utilisation de leur grue dans une province autre, soit le Québec.

[26]      En droit, la dynamique applicable à cette hypothèque serait la suivante. En vertu de l'article 2681 alinéa 2, Crane pouvait accorder cette hypothèque. Cet article se lit:

     Art. 2681. L'hypothèque conventionnelle ne peut être consentie que par celui qui a la capacité d'aliéner les biens qu'il y soumet.
     Elle peut être consentie par le débiteur de l'obligation qu'elle garantit ou par un tiers.

[27]      Dans le cadre allégué par les Beauchamp, soit une vente à tempérament, cette hypothèque était accordée par Crane sur le bien d'autrui. Par l'effet de l'article 2670 C.c.Q., cette hypothèque n'aurait grevé le bien en litige que si Crane était devenue propriétaire du bien; ce qui ne s'est jamais produit. L'article 2670 précise:

     Art. 2670. L'hypothèque sur le bien d'autrui ou sur un bien à venir ne grève ce bien qu'à compter du moment où le constituant devient le titulaire du droit hypothéqué.

[28]      Dans le cadre d'une vente à tempérament, la justification de cette hypothèque ne tient tout simplement pas. Il est clair que la garantie recherchée par les Beauchamp n'a jamais existé en pratique puisque l'article 2670 l'en empêchait. Si dans le cadre de cet article Crane était devenue propriétaire, cela aurait signifié que les Beauchamp auraient été entièrement payés. À ce moment, les Beauchamp n'auraient plus eu besoin de garantie, donc d'hypothèque.

[29]      L'existence de cette hypothèque ne se comprend et ne se justifie en pratique et en droit que si l'on considère que le contrat D.1 constituait Crane propriétaire parfait du bien dès le 19 décembre 1995. Crane pouvait alors logiquement accorder une hypothèque sur le même bien en décembre 1997.

[30]      C'est cette dernière conclusion que la Cour adopte. En conséquence, les opposants ne pouvaient s'opposer à la saisie du bien vu que l'on ne peut les considérer comme propriétaires de ce bien. Leur opposition quant à ce bien est donc rejetée.

[31]      Sous le présent inter-titre, un autre contrat viendrait consacrer non pas une vente parfaite mais une vente à tempérament en faveur des Beauchamp. En conséquence, les biens suivants (tels que listés au paragraphe 4, supra) seraient la propriété des Beauchamp et donc soustraits aux saisies à l'étude:

10.      1 camion Ford L9000 avec baume immatriculé L126647;
12.      1 grue Lorain NS/500 /72;
13.      1 grue 40 tonnes, escamotable de fabrication allemande et russe portant immatriculation RK91398;

[32]      Ces biens sont visés premièrement dans un contrat écrit daté du 29 août 1996 par lesquels les Beauchamp vendent ces biens à Les Grues Unies Inc. (Grues Unies). Ce contrat fut identifié en preuve comme le contrat E. Suivant mon analyse de ce contrat, ce dernier dévoile une vente parfaite au moment de sa conclusion. En contre-interrogatoire sur affidavit puis dans leur requête amendée, les Beauchamp ont soutenu que ce contrat devait être vu comme un contrat de vente à tempérament en raison d'une entente verbale à cet effet intervenue de façon parallèle au contrat écrit. Somme toute une approche similaire au contrat D.1.

[33]      Premièrement, ce contrat contient des clauses écrites qui comme sous le contrat D.1 viennent interdire toute entente verbale. Ces clauses se lisent comme suit:

11.      ENTIRE AGREEMENT
11.1      This Agreement constitutes the entire agreement between the parties hereto with respect to the subject matters contained herein provided for and supersedes and replaces any other agreement respecting such matters.
11.2      The Vendor shall not be bound by any verbal undertaking, admission, agreement, representation or warranty to the Purchaser unless expressly contained herein or in a writing attached hereto duly signed by the Vendor.

12.      AMENDMENTS
12.1      This Agreement may not be modified or amended except by instrument in writing signed by each of the parties hereto.


[34]      D'autre part, ce contrat E recèle une clause prévoyant l'octroi d'hypothèques par deux entités, et ce, pour garantir au vendeur, soit les Beauchamp, le paiement du prix de vente qui se trouvait échelonné sur plusieurs paiements dans le temps. La clause numéro 4 du contrat prévoit en effet à son début ce qui suit:

4.      SECURITY
4.1      As security for the payment of the Purchaser Price to the Vendor together with all costs and accessories due thereupon and to guarantee the fulfillment of the Purchasers obligations hereto, the Purchaser hereby agrees to execute a hypothec on the equipment detailed more fully hereinbelow complete with all attachments and accessories

[35]      Le "purchaser" aux fins du contrat est Grues Unies.

[36]      Dans des termes similaires qui suivent, la débitrice judiciaire dans le présent dossier, soit Intermodal Container Transport Limited (Container) accordait également aux Beauchamp une hypothèque pour garantir davantage le paiement du prix de vente par Grues Unies:

4.2      In addition to the foregoing, the parties hereto agree that for further security for the payment of the Purchaser Price to the Vendor together with all costs and accessories due thereupon and to guarantee the fulfillment of the Purchasers obligations hereto, the Guarantor hereby agrees to execute an additional hypothec on the equipment detailed more fully hereinbelow complete with all attachments and accessories

[37]      L'octroi de ces deux hypothèques fut effectivement consacré dans deux hypothèques distinctes qui furent éventuellement publiées suivant le régime applicable au Québec.

[38]      Quant à l'hypothèque accordée par l'acheteur soit Grues Unies, la procureure des opposants a justifiée son existence dans le cadre d'une vente à tempérament dans des termes similaires aux explications fournies quant à l'existence de l'hypothèque sous le contrat D.1. Or donc, en adoptant mutatis mutandis les motifs exprimés aux paragraphes 24 à 30, les opposants ne pouvaient s'opposer à la saisie des biens vu que l'on ne peut les considérer comme propriétaires de ces derniers. C'est Grues Unies qui en est la propriétaire. L'opposition des opposants quant à ces biens est donc rejetée.

[39]      Pour ce qui a trait à l'hypothèque de Container, cette dernière fut accordée sur le bien suivant: 1 grue de marque Grove modèle 84506, NS/AC1Y5013L N 31125 avec acc. (bien no 11).

[40]      Ce bien était donc au moment de l'hypothèque la propriété de Container et les Beauchamp obtenait le statut de créanciers hypothécaires. Ces derniers n'ont toutefois posé aucun des gestes formels requis en droit pour faire valoir leurs droits de créanciers hypothécaires. On ne peut donc les considérer propriétaires de ce bien également. Partant, leur opposition est également rejetée à cet égard.

[41]      Il y a lieu maintenant de regarder les contrats par lesquels les Beauchamp auraient acquis certains biens de Crane et de Container.


II.      Contrats par lesquels les Beauchamp auraient acquis certains biens de Crane et de Container

[42]      Encore ici il y a deux contrats sous seing privé et certaines hypothèques dont on doit expliquer la présence.

[43]      En vertu du contrat B, le 9 décembre 1997, Crane aurait vendu aux Beauchamp les biens suivants, par ailleurs saisis tel que déjà cité au paragraphe 4 ci-avant:

1.      1 camion pick-up Chevrolet immatriculé FN983330 couleur verte;
2.      1 camion Ford 9000, orange NS/ W9OJVHA6973 avec baume immatriculé L86164;
3.      1 grue de modèle Grove, modèle 4080 NS/ R21365, immatriculée FN98335;
4.      1 véhicule GMC Sierra Grande couleur rouge immatriculé FJ52559;
5.      1 pick-up bleu GMC Custom de Luxe immatriculé FN98329;
8.      1 camion bleu western star bleu, sans moteur avec baume.

[44]      Ici les Beauchamp ne soutiennent pas que cette vente est à tempérament. Toutefois, si cette vente a réellement pris place, il est difficile de comprendre alors pourquoi on retrouve publiée le 12 décembre 1997 une hypothèque sur ces biens de Crane en faveur des Beauchamp. Ici dans le cadre d'une vente parfaite le 9 décembre 1997, pourquoi le vendeur aurait-il accordé à l'acheteur une hypothèque? La logique voudrait que ce soit l'inverse! De plus, cette hypothèque se trouverait également ici avoir été accordée sur les biens d'autrui au sens de l'article 2670 C.c.Q. Cette hypothèque ne pouvait avoir de force et d'effets pratiques que si les biens revenaient dans le patrimoine de Crane, possibilité non prévue au contrat. Le but à l'effet que cette hypothèque aurait été accordée pour sécuriser les Beauchamp vu l'utilisation des biens en Ontario par le vendeur nonobstant la vente ne fait donc pas de sens.

[45]      Par ailleurs, il est ressorti de la preuve et des plaidoiries que ce contrat B visait principalement à ramener officiellement deux grues dans le patrimoine des Beauchamp et ce, par suite du fait que les Beauchamp, par corporation tierce interposée (Windsor), auraient payé à Revenu Québec la dette fiscale de Crane. Vu cette dette fiscale, Revenu Québec avait saisi chez Crane lesdites grues.

[46]      Ces grues dans les biens saisis sont les suivantes:

2.      1 camion Ford 9000, orange NS/ W9OJVHA6973 avec baume immatriculé L86164;
3.      1 grue de modèle Grove, modèle 4080 NS/ R21365, immatriculée FN98335;

[47]      Deux paradoxes se posent quant à ces grues.

[48]      Premièrement, ces grues sont visées au contrat D.1 que l'on a revu plus tôt. Suivant l'interprétation donnée par les Beauchamp à D.1, ces grues par suite de ce contrat seraient toujours demeurées la propriété des Beauchamp. Pourquoi alors sous le contrat B, Crane vendrait à nouveau ces grues aux Beauchamp? On a indiqué à la Cour que l'inclusion de ces grues à la fois aux deux contrats était tout simplement une erreur, sans toutefois expliciter en preuve cet aspect.

[49]      Deuxièmement, si ces grues étaient effectivement déjà la propriété des Beauchamp, pourquoi alors les Beauchamp n'ont-ils pas procédé par opposition en revendication à l'encontre de la saisie de Revenu Québec plutôt que d'acheter littéralement des biens qui leur appartenaient déjà? Ce mécanisme de l'opposition est pourtant bien connu des Beauchamp puisqu'utilisé en les présentes. On a indiqué à la Cour que les Beauchamp avaient procédé ainsi puisque cela leur permettait de prendre possession des deux grues mais aussi d'une série d'autres biens. Toutefois, ma compréhension de la preuve prépondérante est à l'effet que les autres biens soustraits à Revenu Québec étaient de peu de valeur et d'utilité et étaient pour certains destinés à la ferraille.

[50]      Voilà exposée la problématique quant au contrat B. Quant au contrat C, son existence se veut un calque de la situation sous le contrat B. Il vise toutefois deux biens distincts, à savoir:

6.      1 véhicule Pontiac Transport vert immatriculé FM12051, NS/1GMDU06D2RT213152;
7.      1 véhicule de marque Jaguar couleur grise, sans moteur immatriculé FE96635.


[51]      Ce dernier contrat soulève également un paradoxe. Sans que cela apparaisse du texte même du contrat, la preuve révèle toutefois que ce contrat de vente par Container intervient pour satisfaire en partie une dette contractée par Grues Unies en vertu du contrat E. Pourquoi cela est-il? La preuve semble muette sur ce point.

[52]      Tous ces paradoxes, ces aspects qui demeurent flous ou sans réponse m'amènent à considérer que quant aux deux contrats B et C, les opposants ne se sont pas déchargés de leur fardeau de preuve. En ce sens, j'épouse la théorie de cause avancée par la créancière saisissante à l'effet qu'elle est en droit en vertu des articles 1451 et 1452 C.c.Q. de s'en remettre plutôt à des actes apparents posés par les parties à la même époque, à savoir l'octroi par Crane et Container d'hypothèques en faveur des Beauchamp. Sous cet angle, les opposants ne doivent être vus que comme des créanciers hypothécaires. Ces derniers n'ont pas accompli les formalités propres à transformer leur statut de créanciers hypothécaires en celui de propriétaires, soit le titre sous lequel ils réclament les biens sous les contrats B et C de même que sous les autres contrats.

[53]      Pour l'ensemble de ces motifs, les oppositions des opposants sont rejetées, le tout avec dépens.


Richard Morneau

     protonotaire

MONTRÉAL (QUÉBEC)

le 26 août 1999

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     NOMS DES AVOCATS ET DES PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER


NO DU DOSSIER DE LA COUR:

INTITULÉ DE LA CAUSE:

ITA-1716-98

Dans l'affaire de la Loi de l'impôt sur le revenu,

- et -

Dans l'affaire d'une cotisation ou des cotisations établies par le ministre du Revenu national en vertu d'une ou plusieurs des lois suivantes: la Loi de l'impôt sur le revenu, le Régime de pensions du Canada et la Loi sur l'assurance-emploi,

CONTRE:

INTERMODAL CONTAINER TRANSPORT LTÉE

     Débitrice judiciaire

ET

GREGORY BEAUCHAMP et JEFFREY BEAUCHAMP

     Opposants

ET

GAÉTAN LABBÉ

     Mis-en-cause


LIEU DE L'AUDIENCE:Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE:les 16 et 17 juin 1999

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE ME RICHARD MORNEAU, PROTONOTAIRE

DATE DES MOTIFS DE L'ORDONNANCE:le 26 août 1999


COMPARUTIONS:


Me Claude Bernard

pour la créancière saisissante

Me Cheryl Morton

Me Brian Mitchell

pour les opposants

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER:


Me Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

pour la créancière saisissante

Mitchell Gattuso

Me Cheryl Morton

Me Brian Mitchell

Montréal (Québec)

pour les opposants

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