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Date : 20000131


Dossier : A-237-98



OTTAWA (ONTARIO), LE 31 JANVIER 2000


CORAM :      LE JUGE EN CHEF

         LE JUGE ROBERTSON

         LE JUGE SEXTON


ENTRE :


GUERINO MOLINARO


appelant



et



SA MAJESTÉ LA REINE


intimée



JUGEMENT


     L"appel est rejeté avec dépens



J. Richard

Juge en chef


Traduction certifiée conforme


Bernard Olivier






Date : 20000131


Dossier : A-237-98


CORAM :      LE JUGE EN CHEF

         LE JUGE ROBERTSON

         LE JUGE SEXTON

ENTRE :


GUERINO MOLINARO


demandeur

et



SA MAJESTÉ LA REINE


intimée



Audience tenue à Toronto (Ontario), le mercredi 26 janvier 2000


Jugement prononcé à Ottawa (Ontario), le lundi 31 janvier 2000


MOTIFS DU JUGEMENT PAR :      LE JUGE SEXTON

Y ONT SOUSCRIT :      LE JUGE EN CHEF

LE JUGE ROBERTSON





Date : 20000131


Dossier : A-237-98


CORAM :      LE JUGE EN CHEF

         LE JUGE ROBERTSON

         LE JUGE SEXTON

ENTRE :


GUERINO MOLINARO


demandeur

et



SA MAJESTÉ LA REINE


intimée


     MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE SEXTON

[1]      Par l"entremise de la société de portefeuille Bluevest Holdings Limited, le contribuable appelant était propriétaire d"une société de fabrication de pizzas du nom de Canadian Pizza Crust Company Limited (Pizza Crust). Catelli Inc. est en affaires dans le même secteur et elle a convenu d"acheter Pizza Crust.

[2]      La lettre d"intention portait que le contribuable vendait Pizza Crust à Catelli pour la somme de 10 millions de dollars. En vertu de la lettre d"intention, Catelli convenait de conserver le contribuable comme employé pendant au moins trois ans après la signature à un salaire d"à peu près 1,8 millions de dollars. Par la suite, les parties ont signé une convention d"achat des actions par laquelle Catelli convenait de payer approximativement 6,3 millions de dollars à Bluevest en l"échange de ses actions dans Pizza Crust. Catelli s"engageait aussi dans cette convention à signer un contrat de travail avec le contribuable, prévoyant que ce dernier serait payé à peu près 1,8 million de dollars sur une période de trois ans. Ce contrat de travail a été signé et il portait que le contribuable aurait droit à la somme de 1,8 million de dollars s"il travaillait de façon continue pour Catelli pendant trois ans. Quoiqu"il arrive, il aurait toujours droit à la somme de 1,5 million de dollars, même en cas de décès ou si Catelli mettait fin à son contrat de travail pour une " raison valable ". Le contribuable devait travailler réellement pour Catelli afin d"obtenir les 300 000 $ restants. Le contrat de travail prévoyait qu"il recevrait 100 000 $ par an pour ses services. Le contrat de travail porte que :

         [traduction]

         La totalité des accords, ententes et arrangements antérieurs, écrits ou verbaux, conclus entre les parties aux présentes ou en leur nom, concernant l"engagement du cadre de direction par Catelli ou par la société sont par la présente annulés, résiliés ou remplacés...

[3]      L"affaire été conclue et le contribuable n"a pas travaillé pendant trois ans pour Catelli. Il a reçu 1,6 million de dollars de Catelli en vertu du contrat de travail.

[4]      Revenu Canada a décidé d"inclure tous les 1,6 million de dollars dans le revenu du contribuable. Ce dernier a fait objection, soutenant que sur ce total la somme de 1,5 million de dollars devait être considérée comme une rentrée de capital, représentant le produit de disposition de son intérêt dans l"affaire.

[5]      Le juge de la Cour de l"impôt a donné raison à Revenu Canada. Il a conclu que les parties avaient négocié le contrat de travail avec soin, et que le contribuable ne pouvait pas répudier le rapport juridique existant à sa convenance.

[6]      Le contribuable a porté la décision en appel à cette Cour, soutenant que la somme de 1,5 million de dollars représentait le produit de disposition de son intérêt dans Pizza Crust et non un revenu d"emploi. Il soutient que le contrat de travail est en fait un billet à ordre lui garantissant le paiement. Le contribuable a aussi soutenu que son appel devrait être accueilli par suite d"une crainte raisonnable de partialité de la part du juge de la Cour de l"impôt.

[7]      À notre avis, les conclusions du juge d"instance ne contiennent aucune erreur manifeste ou importante. Le juge a entendu les témoins et pris connaissance des documents en cause.

[8]      L"argument du contribuable que le paiement de 1,5 million de dollars est une rentrée en capital ne tient pas compte du fait que Catelli ne lui devrait rien à ce titre. Catelli a acheté les actions de Pizza Crust de Bluevest. C"est Bluevest qui avait droit d"être payée pour les actions de Pizza Crust.

[9]      Nonobstant ce fait, le contribuable soutient qu"on devrait retenir la primauté du fond du contrat de travail sur sa forme, puisqu"il s"agissait pour l"essentiel du paiement d"une partie du produit de la disposition de son intérêt dans Pizza Crust. En plus du problème déjà soulevé au sujet de cette allégation, le contribuable fait face à la position qui veut que le fond du contrat de travail est justement d"être un contrat de travail. On y trouve la terminologie habituellement employée dans les contrats de travail. C"est un document assez long et il a été négocié sérieusement entre les avocats et les comptables représentant le contribuable. En l"instance, fond et forme semblent être la même chose.

[10]      Par le passé, la présente Cour a insisté sur l"importance de la forme dans les questions fiscales. Le juge d"appel Linden, parlant au nom de la Cour, a déclaré dans La Reine c. Friedberg, 92 DTC 6031 :

En droit fiscal, la forme a de l"importance. Une simple intention subjective, en l"espèce comme dans d"autres instances en matière fiscale, ne suffit pas en soi à modifier la caractérisation d"une opération aux fins de l"impôt. Lorsqu"un contribuable prend certaines dispositions formelles à l"égard de ses affaires, il peut s"ensuivre d"importants avantages fiscaux, quand bien même ces dispositions seraient prises principalement dans le but d"éviter des impôts (voir La Reine c. Irving Oil 91 DTC 5106, le juge Mahoney, J.C.A.). Toutefois, si un contribuable omet de prendre les mesures formelles appropriées, peut-être que des impôts devront être payés. S"il n"en était pas ainsi, Revenu Canada et les tribunaux se livreraient à des exercices interminables pour établir les intentions véritables derrière certaines opérations. Les contribuables et la Couronne chercheraient à restructurer des opérations après coup afin de profiter de la législation fiscale ou d"amener les contribuables à payer des impôts qu"ils pourraient autrement ne pas avoir à payer. Bien que la preuve de l"intention puisse parfois aider les tribunaux à clarifier des marchés, elle est rarement déterminante. En résumé, la preuve d"une intention subjective ne peut servir à " rectifier " des documents qui s"orientent clairement vers une direction précise.

[11]      Tous les contribuables ont le droit d"arranger leurs affaires de manière à minimiser l"impact fiscal, mais ils ne peuvent pas balayer du revers de la main un contrat signé au motif qu"une entente différente aurait été plus avantageuse. En l"instance, le contribuable ne peut échapper aux conséquences de la signature qu"il a apposée au contrat de travail. On y précise qu"il doit recevoir un salaire, et c"est ce qu"il a reçu. Il doit donc payer l"impôt sur ce salaire.

[12]      En se fondant sur certains commentaires du juge de la Cour de l"impôt, le contribuable soutient qu"il y a eu partialité. Bien qu"assez hauts en couleur, les commentaires en cause trouvent leur source dans le fait que le juge de la Cour de l"impôt s"est inquiété de la possibilité que le contribuable doive payer deux fois l"impôt sur la même somme. Selon moi, le fait que le juge de la Cour de l"impôt se soit inquiété sérieusement de l"intérêt du contribuable vient clairement à l"encontre de toute suggestion de partialité. Je suis d"avis qu"une personne bien renseignée, qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique, ne pourrait raisonnable croire que le juge de la Cour de l"impôt était partial.

[13]      L"appel est rejeté avec dépens.


J. Edgar Sexton

JCA.

Je souscris aux présents motifs :

J. Richard, juge en chef

Je souscris aux présents motifs :

J.T. Robertson, JCA


Traduction certifiée conforme


Bernard Olivier

COUR D"APPEL FÉDÉRALE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :              A-237-98

INTITULÉ DE LA CAUSE :      Guerino Molinaro c. Sa Majesté la Reine

    

LIEU DE L'AUDIENCE :          Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :          le 26 janvier 2000

MOTIFS DE JUGEMENT DU :              juge Sexton

Y ONT SOUSCRIT :                  le juge en chef

                             le juge Robertson

EN DATE DU :                      31 janvier 2000


ONT COMPARU

M. Geoffrey B. Shaw

M. Ian Blue

                             POUR L"APPELANT

Mme Kathryn Philpott

Mme Elizabeth Chasson

                             POUR L"INTIMÉE



AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

Cassels Brock & Blackwell

Toronto (Ontario)

                             POUR L"APPELANT

M. Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

                             POUR L"INTIMÉE

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