A-252-05
ENTRE :
et
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
Audience tenue à Montréal (Québec), le 15 mars 2006.
Jugement rendu à l'audience à Montréal (Québec), le 15 mars 2006.
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR : LE JUGE LÉTOURNEAU
Date : 20060315
Dossiers : A-251-05
A-252-05
Référence : 2006 CAF 111
CORAM : LA JUGE DESJARDINS
LE JUGE LÉTOURNEAU
LE JUGE NOËL
ENTRE :
DANIEL ROUSSEAU
Demandeur
et
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
Défendeur
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR
(Prononcés à l'audience à Montréal (Québec), le 15 mars 2006)
[1] Dans les dossiers A-251-05 et A-252-05, le demandeur s'attaque aux deux décisions rendues par le juge-arbitre, décisions par lesquelles il annulait celles du conseil arbitral réduisant le quantum des pénalités et il rétablissait les montants fixés par la Commission de l'assurance-emploi (Commission).
[2] Il appert dans le dossier A-251-05 que la Commission a réduit la pénalité de 9 910 $ à une somme de 1 800 $. Dans le dossier A-252-05, de 1 239 $ qu'il était, le montant de la pénalité fut ramené par la Commission à 206 $.
[3] En fixant le montant des pénalités dans les deux dossiers, la Commission a tenu compte, entre autres facteurs aggravants et atténuants, du fait que le demandeur avait fait plusieurs fausses déclarations, qu'il s'était livré à de la récidive justifiant le second avis d'une violation sérieuse de la Loi sur l'assurance-emploi, L.C. 1996, ch. 23 (Loi), que le demandeur était aux prises avec un problème de consommation de substances toxiques et, enfin, que les fausses déclarations avaient été faites par le demandeur pour payer ses dettes reliées à la consommation abusive de ces substances.
[4] Le demandeur soulève deux motifs d'intervention à l'encontre de la décision du juge-arbitre. Les motifs sont valables dans les deux dossiers.
[5] Premièrement, il allègue qu'en fixant le montant des pénalités, la Commission a omis de prendre en considération le fait qu'il avait cessé de prendre de la drogue depuis juillet 1997.
[6] Cette information est contenue dans la déclaration statutaire que le demandeur a faite à la Commission. Elle se retrouvait donc dans le dossier que la Commission a évalué pour fins de détermination du montant des pénalités. Quoique la Commission n'ait pas expressément référé à ce facteur dans la mention non exhaustive des éléments qu'elle a considérés, on ne saurait, en l'absence d'une preuve à cet effet, prétendre que ce facteur n'a pas été pris en compte.
[7] D'ailleurs, dans le dossier A-251-05, le conseil arbitral reconnaît explicitement « que la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire selon les documents au dossier et qu'elle a tenu compte des circonstances atténuantes » . Le même constat et la même conclusion valent pour le dossier A-252-05.
[8] Comme deuxième motif, le demandeur soutient que le conseil arbitral était fondé d'intervenir et de réviser la décision de la Commission suite au fait suivant survenu après la fixation du montant des pénalités.
[9] Le demandeur a initialement fait une cession de ses biens, ce qui a entraîné une suspension des procédures de recouvrement du trop-payé.
[10] Il s'est par la suite ravisé et il a annulé sa déclaration de cession de biens avec pour conséquence l'annulation des règlements des dossiers qui en découlaient. Le demandeur a décidé d'assumer le paiement de ses dettes. Il soumet qu'il s'agit d'un facteur pertinent qui justifiait le conseil arbitral d'intervenir pour réduire encore plus les pénalités que ne l'avait fait la Commission.
[11] Avec respect, sans minimiser le caractère louable de la décision prise par le demandeur et des efforts entrepris par ce dernier pour assumer ses responsabilités, nous ne croyons pas qu'il s'agit d'un facteur pertinent permettant de modifier après le fait le montant des pénalités imposées. Si les difficultés financières ou la capacité de payer d'un prestataire sont des facteurs à prendre en considération dans la fixation du montant d'une pénalité (voir par exemple Canada (Attorney General) v. Deen (2003), 312 N.R. 299, à la page 304; Canada (Attorney General) v. Schembri (2003), 313 N.R. 336, à la page 340), il en va autrement de son bon vouloir à l'acquitter.
[12] Quoiqu'il en soit, dans les deux dossiers, le conseil arbitral, après avoir reconnu les efforts faits par le demandeur pour rembourser ses dettes au lieu de faire faillite, est intervenu en invoquant « qu'un principe de justice naturelle doit s'appliquer dans ce cas-ci » . La référence à un principe de justice naturelle s'est faite sans précision quant à l'identification, à la teneur et aux paramètres de ce principe.
[13] À notre avis, le juge-arbitre a eu raison de conclure que le conseil arbitral est intervenu arbitrairement et sans justification pour substituer son opinion à celle de la Commission.
[14] Nous sommes d'avis qu'en réduisant substantiellement le montant des pénalités comme elle l'a fait, la Commission a exercé judiciairement sa discrétion. Elle a fait preuve de compréhension et de compassion, mais elle se devait également de ne pas miner l'effet dissuasif, spécifique et général, voulu par le législateur : sur l'aspect dissuasif, voir les arrêts Deen et Schembri, précités.
[15] Pour ces motifs, les demandes de contrôle judiciaire dans les dossiers A-251-05 et A-252-05 seront rejetées mais avec un seul jeu de dépens. Toutefois, le défendeur aura droit à ses débours dans chacun des dossiers.
[16] Copie des présents motifs sera déposée dans le dossier A-252-05 au soutien du jugement rendu.
COUR D'APPEL FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIERS : A-251-05 et A-252-05
INTITULÉ : Daniel Rousseau c. Le Procureur général du
Canada
LIEU DE L'AUDIENCE : Montréal (Québec)
DATE DE L'AUDIENCE : Le 15 mars 2006
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR : LA JUGE DESJARDINS
LE JUGE LÉTOURNEAU
LE JUGE NOËL
PRONONCÉS ÀL'AUDIENCE : LE JUGE LÉTOURNEAU
COMPARUTIONS:
POUR LE DEMANDEUR
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POUR LE DÉFENDEUR
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:
Montréal (Québec)
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POUR LE DEMANDEUR
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Sous-procureur général du Canada Montréal (Québec)
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POUR LE DÉFENDEUR
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