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Date : 20061115

Dossier : A-571-05

Référence : 2006 CAF 375

 

CORAM :      LE JUGE LINDEN

                        LE JUGE NOËL

                        LE JUGE EVANS

 

ENTRE :

DIANNE MARIE KENT

demanderesse

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

défendeur

 

 

 

Audience tenue à Halifax (Nouvelle-Écosse), le 15 novembre 2006.

Jugement rendu à l’audience à Halifax (Nouvelle-Écosse), le 15 novembre 2006.

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :                                                    LE JUGE EVANS

 

 


Date : 20061115

Dossier : A-571-05

Référence : 2006 CAF 375

 

CORAM :      LE JUGE LINDEN

                        LE JUGE NOËL

                        LE JUGE EVANS

 

ENTRE :

DIANNE MARIE KENT

demanderesse

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

(Prononcés à l’audience à Halifax (Nouvelle-Écosse), le 15 novembre 2006.)

 

 

LE JUGE EVANS

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire, présentée par Dianne Marie Kent, visant à faire annuler la décision de la Commission d’appel des pensions (la Commission), rendue le 12 octobre 2005, qui accueillait un appel du ministre du Développement social et refusait à Mme Kent des prestations d’invalidité. La Commission a conclu que Mme Kent n’avait pas présenté une preuve démontrant suffisamment qu’en date du 31 décembre 1997, ou avant (sa période minimale d’admissibilité), elle souffrait d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée, aux termes de l’alinéa 42(2)a) du Régime de pensions du Canada, L.R.C. 1985, ch. C-8.

 

[2]               Nous ne sommes pas convaincus que la Commission ait commis une erreur susceptible de révision en tirant cette conclusion. En particulier, on ne saurait affirmer qu’en fonction de la preuve qui lui a été présentée, la Commission a fondé sa décision sur une conclusion de fait manifestement déraisonnable. Dans un même ordre d’idées, la conclusion de la Commission selon laquelle Mme Kent n’avait pas présenté une preuve démontrant suffisamment qu’elle souffrait d’une invalidité aux termes du Régime, n’était pas manifestement déraisonnable.

 

[3]               Mme Kent a aussi allégué dans son témoignage qu’elle n’avait pas bénéficié d’une audience équitable devant la Commission parce que, selon elle, les membres de la Commission avaient manqué de respect à son égard. Cependant, elle n’a pas mentionné cette allégation d’un manquement à l’équité procédurale dans son avis de demande de contrôle judiciaire, ni dans son mémoire des faits et du droit. Il est trop tard, lors de l’audition de la demande de contrôle judiciaire, pour soulever cette allégation pour la première fois.

 

[4]               La demande de Mme Kent de prestations d’invalidité remonte à loin. Elle a d’abord présenté une demande au ministre en 1995. Elle avait cessé de travailler comme infirmière en 1994. En janvier 1996, un tribunal de révision a rejeté l’appel que Mme Kent avait interjeté de la décision défavorable du ministre au sujet de sa demande de prestations, au motif qu’elle n’avait pas présenté une preuve attestant suffisamment que son état de santé était « grave ». La Commission a rejeté la demande d’autorisation de Mme Kent d’interjeter appel de la décision du tribunal.

 

[5]               En mai 2002, Mme Kent a présenté au tribunal une demande de réexamen de la décision en vertu du paragraphe 84(2) du Régime. Le tribunal a changé sa décision au motif qu’on lui avait présenté de nouveaux faits médicaux et, le 22 août 2002, il a conclu que Mme Kent avait droit à des prestations d’invalidité. La Commission a autorisé le ministre à interjeter appel de cette décision.

 

[6]               Le 28 octobre 2003, la Commission a accueilli l’appel sans examiner le bien-fondé de la décision du tribunal. Elle a conclu que le tribunal avait commis une erreur quand il avait conclu que les preuves supplémentaires qui lui avaient été présentées constituaient des « faits nouveaux » au sens du paragraphe 84(2) du Régime. Par exception au principe que les décisions à caractère juridictionnel prises en vertu du Régime sont définitives et ont l’autorité de la chose jugée, un décideur peut réexaminer, en vertu du paragraphe 84(2), la décision qu’il a rendue s’il y a des « faits nouveaux » aux termes du Régime.

 

[7]               À la suite d’une demande de contrôle judiciaire présenté à la Cour, la décision de la Commission a été annulée : Kent c. Canada (Procureur général) (2004), 248 D.L.R. (4th) 12, 2004 CAF 420. La Cour a conclu que, dans le cadre d’un appel d’une décision de réexamen du tribunal, la Commission ne pouvait pas rejeter la décision du tribunal simplement parce qu’elle ne souscrivait pas à la conclusion du tribunal selon laquelle des « faits nouveaux » lui permettaient de réexaminer sa décision. En fait, la Commission doit effectuer un examen de novo du bien-fondé de l’appel, en fonction de toute la preuve, y compris les faits que le tribunal a acceptés comme « faits nouveaux ». La Cour a renvoyé l’affaire devant une nouvelle formation de la Commission pour qu’elle la réexamine sur cette base : voir paragraphe 37.

 

[8]               Nous sommes convaincus qu’en l’espèce, la Commission a respecté la directive de la Cour et a tranché l’appel de Mme Kent sur le fond. Ainsi, la Commission a affirmé (au paragraphe 41 de ses motifs) :

Aucun « nouveau fait » n’a été présenté à la présente Commission et donc, la compétence de celle-ci, tel que prévu par le paragraphe 83(11) de la Loi, consiste à examiner la décision du tribunal de révision du 22 août 2002, en intégrant les « faits nouveaux » tel que constaté par celui‑ci [le tribunal], ainsi que l’ensemble des circonstances, et à tirer sa propre conclusion quant au fait que l’intimée était invalide au sens de la Loi avant décembre 1997.

 

 

[9]               Immédiatement avant que les motifs du jugement soient prononcés, l’avocate du ministre a demandé à la Cour de réexaminer le principe énoncé dans l’arrêt Kent, précité, et dans d’autres décisions. Selon ce principe, si elle n’en examine pas le bien-fondé, la Commission ne peut pas trancher un appel d’une décision de réexamen du tribunal au seul motif que le tribunal a commis une erreur en concluant que la preuve supplémentaire qui lui a été présentée constituait des « faits nouveaux » et lui donnait la compétence de réexaminer sa première décision.

 

[10]           Nous refusons de nous engager sur cette voie. L’avocate du ministre n’a présenté aucun motif dans son mémoire des faits et du droit à l’appui de son observation. Outre son commentaire selon lequel l’effet de l’arrêt Kent et d’autres décisions semblables est de retarder la prise d’une décision définitive au sujet d’une demande de prestations, l’avocate du ministre n’a pas cherché à expliquer pourquoi la Cour devrait déroger au principe énoncé dans l’arrêt Miller c. Canada (Procureur général) (2002), 220 D.L.R. (4th) 149, 2002 CAF 370, selon lequel la Cour ne s’écarte normalement pas de ses arrêts précédents.

 

[11]           Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire de Mme Kent sera rejetée. Comme les dépens n'ont pas été demandés, il n'y aura aucune adjudication en ce sens.

 

 

« John M. Evans »

Juge

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Evelyne Swenne, traductrice


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                                            A-571-05

 

 

INTITULÉ :                                                                           Dianne Marie Kent c. Le procureur général du Canada

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                                     Halifax (Nouvelle-Écosse)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                                   Le 15 novembre 2006

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :                       Le juge Linden

                                                                                                Le juge Noël

                                                                                                Le juge Evans

 

PRONONCÉS À L’AUDIENCE :                                        Le juge Evans

 

 

COMPARUTIONS :

 

Dianne Marie Kent

POUR LA DEMANDERESSE

 

Tania Nolet

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Pour son propre compte

POUR LA DEMANDERESSE

 

John H. Sims, c.r.

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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