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Date : 20070402

Dossier : A-194-06

Référence : 2007 CAF 126

 

CORAM :      LA JUGE SHARLOW

                        LE JUGE MALONE

                        LE JUGE RYER

 

ENTRE :

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

appelant

et

DONALD G. WANNAMAKER

intimé

 

 

 

Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 7 février 2007.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 2 avril 2007.

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                             LA JUGE SHARLOW

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                          LE JUGE MALONE

                                                                                                                                  LE JUGE RYER

 

 


Date : 20070402

Dossier : A-194-06

Référence : 2007 CAF 126

 

CORAM :      LA JUGE SHARLOW

                        LE JUGE MALONE

                        LE  JUGE RYER

 

ENTRE :

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

appelant

et

 

 

DONALD G. WANNAMAKER

intimé

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT 

LA JUGE SHARLOW

[1]               L’intimé Donald G. Wannamaker, maintenant âgé de presque 75 ans, tente d’obtenir une pension d’ancien combattant depuis 1989. Au cours des seize dernières années, sa demande a fait l’objet d’un nombre considérable d’audiences, d’appels et de réexamens. En 2005, le Tribunal des anciens combattants (révision et appel) a rejeté sa demande. Monsieur Wannamaker a demandé à la Cour fédérale et obtenu le contrôle judiciaire de cette décision. La Cour fédérale a renvoyé sa demande de pension pour nouveau réexamen devant un tribunal différemment constitué : Wannamaker c. Canada (Procureur général), 2006 CF 400. La Couronne estime que la Cour fédérale a eu tort d’ordonner un nouveau réexamen et a interjeté appel de la décision. Pour les motifs qui suivent, j’ai conclu que la Couronne doit obtenir gain de cause dans le présent appel.

Dispositions législatives

[2]               La demande de pension de M. Wannamaker est fondée sur l’article 21 de la Loi sur les pensions, L.R.C. 1985, ch. P-6, dont le passage pertinent est ainsi libellé (je souligne) :

21. (1) Pour le service accompli pendant la Première Guerre mondiale ou la Seconde Guerre mondiale, sauf dans la milice active non permanente ou dans l’armée de réserve, le service accompli pendant la guerre de Corée, le service accompli à titre de membre du contingent spécial et le service spécial :

21. (1) In respect of service rendered during World War I, service rendered during World War II other than in the non-permanent active militia or the reserve army, service in the Korean War, service as a member of the special force, and special duty service,

a) des pensions sont, sur demande, accordées aux membres des forces ou à leur égard, conformément aux taux prévus à l’annexe I pour les pensions de base ou supplémentaires, en cas d’invalidité causée par une blessure ou maladie — ou son aggravation — survenue au cours du service militaire ou attribuable à celui-ci;

(a) where a member of the forces suffers disability resulting from an injury or disease or an aggravation thereof that was attributable to or was incurred during such military service, a pension shall, on application, be awarded to or in respect of the member in accordance with the rates for basic and additional pension set out in Schedule I;

[…]

[…]

(2) En ce qui concerne le service militaire accompli dans la milice active non permanente ou dans l’armée de réserve pendant la Seconde Guerre mondiale ou le service militaire en temps de paix :

(2) In respect of military service rendered in the non-permanent active militia or in the reserve army during World War II and in respect of military service in peace time,

 

a) des pensions sont, sur demande, accordées aux membres des forces ou à leur égard, conformément aux taux prévus à l’annexe I pour les pensions de base ou supplémentaires, en cas d’invalidité causée par une blessure ou maladie — ou son aggravation — consécutive ou rattachée directement au service militaire;

(a) where a member of the forces suffers disability resulting from an injury or disease or an aggravation thereof that arose out of or was directly connected with such military service, a pension shall, on application, be awarded to or in respect of the member in accordance with the rates for basic and additional pension set out in Schedule I;

 

[3]               Le Tribunal des anciens combattants (révision et appel) (le Tribunal) est établi par la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel), L.C. 1995, ch. 18. L’article 3 de cette loi est rédigé comme suit :

3. Les dispositions de la présente loi et de toute autre loi fédérale, ainsi que de leurs règlements, qui établissent la compétence du Tribunal ou lui confèrent des pouvoirs et fonctions doivent s’interpréter de façon large, compte tenu des obligations que le peuple et le gouvernement du Canada reconnaissent avoir à l’égard de ceux qui ont si bien servi leur pays et des personnes à leur charge.

3. The provisions of this Act and of any other Act of Parliament or of any regulations made under this or any other Act of Parliament conferring or imposing jurisdiction, powers, duties or functions on the Board shall be liberally construed and interpreted to the end that the recognized obligation of the people and Government of Canada to those who have served their country so well and to their dependants may be fulfilled.

 

[4]               Le rôle du Tribunal, en sa qualité de juge des faits, se fonde sur l’article 39 de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel), qui est rédigé comme suit :

39. Le Tribunal applique, à l’égard du demandeur ou de l’appelant, les règles suivantes en matière de preuve :

39. In all proceedings under this Act, the Board shall

a) il tire des circonstances et des éléments de preuve qui lui sont présentés les conclusions les plus favorables possible à celui-ci;

(a) draw from all the circumstances of the case and all the evidence presented to it every reasonable inference in favour of the applicant or appellant;

b) il accepte tout élément de preuve non contredit que lui présente celui-ci et qui lui semble vraisemblable en l’occurrence;

(b) accept any uncontradicted evidence presented to it by the applicant or appellant that it considers to be credible in the circumstances; and

c) il tranche en sa faveur toute incertitude quant au bien-fondé de la demande.

 

 (c) resolve in favour of the applicant or appellant any doubt, in the weighing of evidence, as to whether the applicant or appellant has established a case.

 

[5]               L’article 39 assure que la preuve au soutien de la demande de pension est examinée sous le jour lui étant le plus favorable possible. Toutefois, l’article 39 ne dispense le demandeur de la charge d’établir par prépondérance de la preuve les faits nécessaires pour ouvrir droit à une pension : Wood c. Canada (Procureur général) (2001), 199 F.T.R. 133 (C.F. 1re inst.), Cundell c. Canada (Procureur général) (2000), 180 F.T.R. 193 (C.F. 1re inst.).

[6]               L’article 39 n’oblige pas non plus le Tribunal à admettre toute la preuve présentée par le demandeur. Le Tribunal n’a pas l’obligation d’accepter des éléments de preuve présentés par le demandeur s’il conclut qu’ils ne sont pas crédibles, et ce, même s’ils ne sont pas contredits. Par contre, il se peut que le Tribunal doive expliquer la raison pour laquelle il conclut que les éléments de preuve ne sont pas crédibles : MacDonald c. Canada (Procureur général) (1999), 164 F.T.R. 42, aux paragraphes 22 et 29. La preuve est crédible si elle est plausible, fiable et logiquement capable d’établir la preuve du fait en question.

La demande de M. Wannamaker

[7]               Monsieur Wannamaker a été membre de l’armée canadienne du 27 septembre 1952 au 28 juin 1970. Il a servi dans la Marine Royale du Canada, en qualité de technicien d’entretien d’aéronef, et dans l’Aviation royale canadienne, en qualité de commis à la tenue des registres. Il soutient que sa maladie discale lombaire est attribuable aux deux blessures au dos qu’il a subies pendant son service militaire. Il n’est pas contesté que M. Wannamaker est maintenant atteint d’une incapacité due à la maladie discale lombaire.

[8]               Monsieur Wannamaker affirme que la première blessure est survenue en 1959 lorsqu’il est tombé sur la glace à son arrivée au travail à la base de l’ARC de Downsview. La disposition applicable relativement à cet événement est l’alinéa 21(2)a) de la Loi sur les pensions. Monsieur Wannamaker soutient que la deuxième blessure est survenue au Congo en 1961 lorsqu’il s’est fait mal au dos en essayant de déplacer une caisse de 400 livres. À l’époque, il était affecté dans une zone de service spéciale, ce qui signifie que la disposition applicable relativement à cet événement est l’alinéa 21(1)a) de la Loi sur les pensions.

[9]               Il n’est pas contesté que M. Wannamaker est tombé en 1959, mais il y a lieu de se demander s’il s’est fait mal au dos cet automne-là. Il y a aussi lieu de se demander si M. Wannamaker s’est blessé au dos en 1961 au Congo.

[10]           Si les deux blessures au dos, ou l’une d’elles, se sont produites comme l’a expliqué M. Wannamaker, il y a lieu de se demander si ces blessures, ou l’une d’elles, ont causé ou contribué à la maladie discale lombaire dont il souffre maintenant. De plus, il y a lieu de se demander si l’automne 1959 était consécutif ou directement rattaché à son service militaire, tel que requis par l’alinéa 21(2)a).

Norme de contrôle judiciaire

[11]           Lorsqu’est porté en appel un jugement tranchant une demande de contrôle judiciaire, notre Cour doit décider si le juge a correctement déterminé et appliqué la norme de contrôle appropriée : Prairie Acid Rain Coalition c. Canada (Ministre des Pêches et Océans), 2006 CAF 31, au paragraphe 14.

[12]           Il est désormais établi, tel que l’a conclu le juge dans cette affaire, que la décision du Tribunal à savoir si une blessure particulière est consécutive au service militaire, une question  mixte de fait et de droit, doit être examinée selon la norme de la décision raisonnable. Il est aussi établi, ainsi que l’a conclu le juge dans cette affaire, qu’une norme de contrôle judiciaire appelant une plus grande retenue, soit la norme de la décision manifestement déraisonnable, s’applique à la décision du Tribunal qui statue sur l’existence du lien de causalité nécessaire entre une blessure particulière et l’invalidité du demandeur : Frye c. Canada (Procureur général), 2005 CAF 264, au paragraphe 12, McTague c. Canada (Procureur général), [2000] 1 C.F. 647 (1re inst.), au paragraphe 48, Matusiuk c. Canada (Procureur général), 2005 CF 198, au paragraphe 35.

[13]           Le présent appel soulève également la question de savoir si le Tribunal a examiné la preuve de la manière requise par l’article 39 de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel). En l’espèce, le juge a reconnu ce problème, mais n’a pas abordé séparément la question de la norme de contrôle applicable. L’application appropriée de l’article 39 suppose une décision sur une question mixte de fait et de droit. Dans la plupart des situations mettant en cause le Tribunal, une question mixte de fait et de droit est examinée selon la norme de la décision raisonnable. Je ne vois aucune raison d’adopter une norme de contrôle différente lorsque se pose la question de savoir si le Tribunal a convenablement apprécié la crédibilité de la preuve ou s’il a correctement donné effet à l’article 39. J’arrive à la conclusion qu’il convient d’examiner ces décisions selon la norme de la décision raisonnable.

[14]           En l’espèce, le juge semble avoir appliqué la norme de la décision correcte dans son examen de la preuve telle que l’a appréciée le Tribunal. Cela ressort implicitement d’un certain nombre de ses énoncés, peut-être le plus clairement au paragraphe 25 de ses motifs (je souligne) :

Je souscris à la décision du Tribunal selon laquelle il existe des éléments de preuve contradictoires au sujet de l’origine de la blessure du demandeur. Je ne souscris toutefois pas aux conclusions de fait du Tribunal au sujet de la capacité de la preuve d’établir l’existence d’un lien de causalité entre la chute du demandeur sur la glace et la blessure au dos qu’aurait causée cette chute. J’estime qu’il existe des éléments de preuve suffisants pour établir que le demandeur éprouvait effectivement un problème de dos pendant qu’il effectuait son service militaire et que ce problème était suffisamment documenté pour montrer, en se fondant sur la prépondérance des probabilités, qu’il découlait de la chute qu’avait faite le demandeur en 1959.

 

 

[15]           Je me vois obligée de conclure que le juge a commis une erreur en appliquant une norme de contrôle judiciaire trop élevée. Pour ce motif, sa décision ne peut pas être maintenue.

[16]           La présente Cour pourrait renvoyer l’affaire à la Cour fédérale pour réexamen ou elle pourrait examiner à nouveau la décision du Tribunal. À mon avis, compte tenu de la durée de ce processus déjà long, il est approprié d’examiner à nouveau l’affaire.

[17]           En l’espèce, la conclusion de fait la plus importante tirée par le Tribunal est que M. Wannamaker n’a pas souffert des blessures au dos qu’il prétend avoir subies en 1959 et en 1961.  Monsieur Wannamaker ne peut pas établir son droit à une pension à moins qu’il y ait une raison permettant à la présente Cour d’intervenir à bon droit. Une telle intervention n’est permise que si, à la lumière de l’article 39, il était déraisonnable pour le Tribunal de conclure qu’il n’y a pas eu de blessures au dos.

La preuve soumise au Tribunal

[18]           D’après ce qu’a dit M. Wannamaker au Tribunal, le 20 mars 1959, il est tombé sur la glace à  Downsview et s’est blessé à la cheville et au dos. Il affirme avoir été amené à l’hôpital, où le personnel médical se souciait davantage de sa cheville que de son dos. On lui a donné des béquilles et des analgésiques ainsi qu’un congé de service de deux jours. Il dit souffrir d’une douleur dorsale depuis cet accident pour lequel on lui avait administré des analgésiques. Il n’a pas toujours cherché à obtenir les soins d’un médecin pour cette douleur. Il lui arrivait souvent de simplement se traiter avec des aspirines. 

[19]           Il existe une déclaration écrite de M. Calver qui a vu M. Wannamaker tomber en 1959. Monsieur Calver dit que M. Wannamaker a été amené à l’hôpital après la chute et est retourné au travail plusieurs jours plus tard en béquilles. M. Calver ne précise pas que M. Wannamaker s’est blessé au dos lors de cette chute. Monsieur Green, un voisin de M. Wannamaker au cours de la période pertinente, indique dans une déclaration écrite qu’il croit que M. Wannamaker s’est blessé au dos et à la jambe à Downsview entre 1957 et 1959 et qu’il se rappelle que M. Wannamaker boitait.

[20]           Selon un résumé des dossiers médicaux militaires, M. Wannamaker n’a signalé aucun problème de dos au cours de ses examens médicaux courants entre 1952 et 1956. En 1957, M. Wannamaker s’est plaint de fièvre et d’une douleur générale, avec une lombalgie. En 1958, les examens courants ne signalaient aucun mal de dos.

[21]           Le dossier concernant la chute de M. Wannamaker survenue le 20 mars 1959 indique seulement la blessure à la cheville. Un nouvel examen médical en 1959 ne fait pas état de son dos.

[22]           Il y a un rapport concernant un claquage du bas du dos le 18 septembre 1959 durant jusqu’au 21 septembre, mais s’améliorant avant le 23 septembre. Puis, le dossier du 29 septembre 1959 relativement aux radiographies du dos n’indique « aucun antécédent de traumatisme ». Le rapport de l’examen radiographique signale une scoliose du rachis lombaire et une spina bifida de la première région sacrée, sans aucune autre anomalie. Il n’y a aucune preuve du lien entre le service militaire de M. Wannamaker et l’existence de scoliose et de spina bifida.

[23]           Il y a un autre rapport signalant une douleur dorsale datant d’avril 1960, aussi avec la note « aucune blessure ». En août 1961, il y a un rapport faisant état d’une douleur et d’une raideur dans le cou et entre les omoplates. Là encore, il n’y a aucune indication d’une blessure au dos.

[24]           Monsieur Wannamaker prétend qu’en 1961, durant son service au Congo, il s’est blessé au dos en déplaçant un lot de bord, une caisse d’environ 400 livres. Monsieur Piuni, qui était en service avec M. Wannamaker au Congo, a déposé une déclaration écrite. Il confirme avoir remarqué que M. Wannamaker semblait éprouver de la douleur et avait de la difficulté à bouger. Il signale que M. Wannamaker lui a dit à l’époque qu’il s’était blessé au dos en déplaçant une caisse. Un autre rapport, déposé par M. Bannister qui était aussi en service au Congo durant la période pertinente, confirme que la caisse était lourde et que M. Wannamaker avait dû la déplacer lui-même.

[25]           Il n’existe aucun dossier médical relativement à la période durant laquelle M. Wannamaker était au Congo en 1961. M. Wannamaker affirme qu’à l’époque il n’y avait pas d’installations médicales à cet endroit.

[26]           Les dossiers médicaux suivants se rapporte à 1966. Un rapport de l’examen radiographique signale la présence de spina bifida. Monsieur Wannamaker a signalé une douleur au bas du dos en juin 1966 après avoir subi une cholécystectomie qui a fait l’objet d’un diagnostic de fibromyosite aigüe (une preuve subséquente suggère qu’il aurait pu s’agir d’un mauvais diagnostic). Il a mentionné une douleur au dos une autre fois en septembre 1967. Un examen médical subi en juin 1970 faisait mention de l’historique de la fibromyosite, mais ne contenait aucune indication de douleur dorsale.  Le dossier médical de la libération de M. Wannamaker indique qu’il n’avait pas de plaintes à ce moment-là.

[27]           M. Wannamaker a déposé de nombreux rapports médicaux dans lesquels divers médecins spécialistes qualifiés sont d’avis, avec divers degrés de certitude, que la maladie discale lombaire de M. Wannamaker est causée par les blessures subies en 1959 lorsqu’il est tombé, et en 1961 lorsqu’il a déplacé la lourde caisse. Toutefois, ces médecins spécialistes n’étaient pas en mesure de savoir si les blessures se sont réellement produites et ont essentiellement cru M. Wannamaker sur parole.

Analyse

[28]           Le Tribunal a tenu compte de la preuve de M. Wannamaker et des avis médicaux actuels par rapport à la preuve médicale plus contemporaine, le tout examiné de façon assez détaillée. Le Tribunal a conclu que les dossiers médicaux ne révèlent aucune blessure dorsale consécutive à la chute de 1959 ni aucune blessure dorsale subie au Congo. Le Tribunal a jugé invraisemblable que M. Wannamaker ait souffert des blessures qu’il prétend avoir subies en 1959 et en 1961 sans qu’il n’y ait aucune indication d’une blessure dorsale durant cette période dans les dossiers médicaux.

[29]           Il est plaidé que le Tribunal a omis d’appliquer l’article 39 de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel). Je n’accepte pas cet argument. Le Tribunal disposait d’une preuve contradictoire quant à savoir si M. Wannamaker a souffert de blessures dorsales en 1959 et en 1961 comme il le prétend. La seule preuve directe provient de M. Wannamaker. Le Tribunal a remarqué que M. Wannamaker a pour la première fois fait valoir son droit près d’une trentaine d’années après les blessures alléguées. Il s’agit d’un facteur qui affaiblit la fiabilité de sa preuve et donc sa crédibilité. La preuve de M. Wannamaker est aussi contredite par les dossiers médicaux contemporains. Par conséquent, il ne s’agit pas d’une situation qui déclenche l’application de l’alinéa 39b), lequel oblige le Tribunal à « accepte[r] tout élément de preuve non contredit » que lui présente le demandeur et qui lui semble « vraisemblable en l’occurrence ». À mon avis,  il n’était pas déraisonnable pour le Tribunal de rejeter la preuve de M. Wannamaker.

[30]           La preuve de M. Wannamaker était étayé par des avis médicaux actuels. Toutefois, le Tribunal a jugé que cette preuve ne permettait pas d’établir que les blessures se sont produites, puisqu’il s’agit d’avis de personnes qui n’étaient pas en mesure de savoir si le compte rendu de M. Wannamaker sur ses blessures était exact. À mon avis, le raisonnement du Tribunal sur ce point n’est pas déraisonnable.

[31]           Il ne s’agit pas non plus, à mes yeux, d’un cas où le Tribunal devait accorder à M. Wannamaker le bénéfice du doute, comme l’exige l’alinéa 39c). La seule preuve d’une blessure provient de M. Wannamaker, soit directement soit indirectement dans les avis médicaux, et le Tribunal a jugé sa preuve peu fiable, pour les motifs mentionnés précédemment.

Conclusion

[32]           Pour ces motifs, j’accueillerais le présent appel, j’annulerais la décision rendue par la Cour fédérale et je rejetterais la demande de M. Wannamaker visant le contrôle judiciaire de la troisième décision sur réexamen du Tribunal.

[33]           Dans son avis d’appel et dans son mémoire des faits et du droit, la Couronne a demandé les dépens, plutôt que les dépens devant la présente Cour et devant la Cour fédérale. Habituellement, les dépens suivent l’issue de la cause, mais ils ne seront pas accordés s’ils ne sont pas demandés. Par conséquent, la Couronne se voit accorder les dépens de l’appel seulement.

 

« K. Sharlow »

Juge

 

« Je souscris aux présents motifs

            B. Malone, juge »

 

« Je souscris aux présents motifs

            C. Michael Ryer, juge »

 

 

Traduction certifiée conforme

 

Mylène Borduas


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                                            A-194-06

 

APPEL DE L’ORDONNANCE DE LA COUR FÉDÉRALE EN DATE DU 30 MARS 2006, DOSSIER Nº T-545-05

 

INTITULÉ :                                                                           Procureur général du Canada c. Donald G. Wannamaker

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                                     Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                                   Le 7 février 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                La juge Sharlow

 

Y ONT SOUSCRIT :                                                             Le juge Malone

                                                                                                Le juge Ryer

 

DATE DES MOTIFS :                                                          Le 2 avril 2007

 

 

COMPARUTIONS :

 

Elizabeth Richards

POUR L’APPELANT

 

Craig Morrison

POUR L’INTIMÉ

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

John H. Sims, c.r.

Procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

 

POUR L’APPELANT

 

Jewitt & Associates

Ottawa (Ontario)

POUR L’INTIMÉ

 

 

 

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