Date : 20071016
ENTRE :
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
et
Audience tenue à Toronto (Ontario), le 4 octobre 2007
Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 16 octobre 2007
MOTIFS DU JUGEMENT : LA JUGE SHARLOW
Y ONT SOUSCRIT : LE JUGE NADON
LE JUGE SEXTON
Date: 20071016
Dossier : A-535-06
Référence : 2007 CAF 323
CORAM : LE JUGE NADON
LE JUGE SEXTON
LA JUGE SHARLOW
ENTRE :
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
appelant
et
AJIT S. LIDDAR
intimé
MOTIFS DU JUGEMENT
[1] L’intimé, Ajit S. Liddar, détient des intérêts dans une société, The Travel People Inc., qui exerce ses activités sous la raison sociale Imagine Holidays, à Oakville. Le ministre a calculé la dette fiscale de la société au titre de la taxe sur les produits et services (TPS), en application de la Loi sur la taxe d’accise, L.R.C. 1985, ch. E-15, y compris les intérêts et les pénalités, pour un total approximatif de 4 500 $. M. Liddar, invoquant plusieurs circonstances à la source de difficultés financières pour sa société, a prié le ministre de renoncer aux intérêts et pénalités, en application de l’article 281.1 de la Loi sur la taxe d’accise. M. Liddar s’est acquitté personnellement de l’intégralité de la dette fiscale ainsi établie de la société parce que des représentants du ministre lui avaient dit que le ministre renoncerait aux intérêts et aux pénalités s’il payait la somme due. Fort de cette garantie, M. Liddar s’attendait à un remboursement des intérêts et pénalités. Cependant, le ministre a refusé d’accorder à M. Liddar la renonciation qu’il espérait.
[2] M. Liddar a déposé, en vertu du paragraphe 18.1(1) de la Loi sur les Cours fédérales, une demande de contrôle judiciaire à l’encontre de la décision du ministre. Un juge de la Cour fédérale a fait droit à la demande en se fondant sur le témoignage non contredit de M. Liddar selon lequel on l’avait assuré que les intérêts et pénalités seraient annulés s’il s’acquittait des obligations de la société. Le jugement ordonne au ministre de rembourser à M. Liddar le montant des intérêts et pénalités, avec intérêts (2006 CF 1303), et accorde également à M. Liddar une somme de 500 $ représentant ses débours.
[3] Le ministre a fait appel du jugement. L’unique moyen qu’il invoque pour en appeler est que le paragraphe 18.1(3) de la Loi sur les Cours fédérales ne donne pas à la Cour fédérale le pouvoir d’ordonner au ministre le remboursement des intérêts et pénalités qui ont été payés en vertu de la Loi sur la taxe d’accise.
[4] Le ministre ne conteste pas la conclusion du juge sur la raison qu’avait M. Liddar d’effectuer le paiement. Il ne conteste pas non plus la conclusion factuelle du juge selon laquelle M. Liddar avait reçu la garantie qu’il dit avoir reçue. Il serait d’ailleurs difficile d’admettre une telle contestation puisque le dossier n’atteste nulle part que le ministre dément qu’une telle garantie fut donnée ou prétend qu’elle n’était pas autorisée. La seule preuve du ministre qui porte sur cet aspect est une note figurant dans le rapport de l’« examinateur des dispositions en matière d’équité », note où l’examinateur écrit que c’était là « probablement un malentendu lié à un redressement éventuel ».
[5] D’après le dossier que la Cour a devant elle, il n’est pas possible de trouver une erreur quelconque dans la décision du juge de faire droit à la demande de contrôle judiciaire déposée par M. Liddar. Il s’ensuit que le juge était fondé à annuler la décision du ministre de refuser une renonciation aux intérêts et pénalités. La question est de savoir s’il aurait simplement dû renvoyer l’affaire au ministre pour réexamen de la demande de M. Liddar, peut-être avec des instructions, ou s’il a commis une erreur de droit en allant plus loin et en ordonnant le remboursement.
[6] La réponse dépend de la manière dont on interprète le paragraphe 18.1(3) de la Loi sur les Cours fédérales, ainsi rédigé :
(3) Sur présentation d'une demande de contrôle judiciaire, la Cour fédérale peut :
a) ordonner à l’office fédéral en cause d’accomplir tout acte qu’il a illégalement omis ou refusé d’accomplir ou dont il a retardé l’exécution de manière déraisonnable;
b) déclarer nul ou illégal, ou annuler, ou infirmer et renvoyer pour jugement conformément aux instructions qu’elle estime appropriées, ou prohiber ou encore restreindre toute décision, ordonnance, procédure ou tout autre acte de l’office fédéral.
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(3) On an application for judicial review, the Federal Court may
( a) order a federal board, commission or other tribunal to do any act or thing it has unlawfully failed or refused to do or has unreasonably delayed in doing; or
( b) declare invalid or unlawful, or quash, set aside or set aside and refer back for determination in accordance with such directions as it considers to be appropriate, prohibit or restrain, a decision, order, act or proceeding of a federal board, commission or other tribunal.
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[7] L’alinéa 18.1(3)a) donne à la Cour fédérale le pouvoir de rendre une ordonnance de la nature d’un mandamus. Essentiellement, c’est l’ordonnance que le juge a rendue lorsqu’il a enjoint au ministre de rembourser les intérêts et pénalités à M. Liddar. La difficulté est que les circonstances de la présente affaire ne justifient pas une telle ordonnance parce qu’il n’a pas été établi que les conditions d’un remboursement selon la Loi sur la taxe d’accise étaient réunies.
[8] Les dispositions de la Loi sur la taxe d’accise qui concernent le calcul des sommes à payer et la procédure de remboursement (section V de la partie IX de la Loi sur la taxe d’accise) envisagent plusieurs éventualités. Elles n’envisagent pas le remboursement des intérêts ou pénalités payés par une personne au nom d’une autre (lorsque celle qui effectue le paiement n’était pas elle‑même tenue de payer la somme en question). Au vu des circonstances de la présente affaire, les intérêts et pénalités que la société était légalement tenue de payer ne pouvaient être remboursés qu’à la société après renonciation du ministre, même si c’est M. Liddar qui les avait payés. Il appartiendrait alors à M. Liddar de s’adresser à la société pour obtenir le remboursement des sommes payées par lui au nom de la société. Pour ce motif, je partage l’avis du ministre selon lequel devrait être annulée la portion du jugement enjoignant au ministre de rembourser la somme à M. Liddar.
[9] Le redressement auquel avait droit, et a droit, M. Liddar doit entrer dans le champ de l’alinéa 18.1(3)b) de la Loi sur les Cours fédérales. Comme je l’ai dit plus haut, il ne fait aucun doute que la décision du ministre aurait dû être annulée, et la demande de remboursement des intérêts et pénalités, renvoyée au ministre pour réexamen. Reste la question de savoir si des instructions auraient dû être données selon ce qu’autorise l’alinéa 18.1(3)b) et, dans l’affirmative, ce qu’auraient dû être les instructions en cause.
[10] À ce propos, le ministre a demandé l’autorisation de déterminer si une promesse avait été faite à M. Liddar qu’il serait renoncé aux intérêts et pénalités imposés à la société. Cependant, le ministre a déjà eu l’occasion de présenter toutes les preuves possibles de nature à contredire sur ce point le témoignage de M. Liddar, un point que le juge a décidé de manière concluante en faveur de M. Liddar. Il est maintenant trop tard pour que le ministre tente de réexaminer cet élément. L’avocate du ministre a admis à l’audience que, au vu de ces faits, la seule réponse possible du ministre à la demande de M. Liddar pour une renonciation aux intérêts et pénalités est d’accorder la renonciation.
[11] Pour ces motifs, j’accueillerais l’appel en partie. J’annulerais la portion du jugement de la Cour fédérale où il est ordonné au ministre de rembourser M. Liddar, et j’ordonnerais plutôt que la décision du ministre soit annulée et que la demande de renonciation présentée par M. Liddar soit renvoyée au ministre pour réexamen, étant entendu que, si M. Liddar s’est acquitté de l’obligation de la société de payer la taxe, les intérêts et les pénalités, c’est parce que les représentants du ministre l’avaient assuré que, en s’acquittant ainsi de l’obligation de la société, il obtiendrait une renonciation aux intérêts et pénalités.
[12] Je ne modifierais pas la décision du juge d’accorder à M. Liddar la somme de 500 $ au titre de ses débours. J’accorderais à M. Liddar une somme complémentaire de 500 $ représentant les débours estimatifs supportés par lui dans l’appel.
« Je souscris aux présents motifs
M. Nadon, j.c.a. »
« Je souscris aux présents motifs
J. Edgar Sexton, j.c.a. »
Traduction certifiée conforme
Michèle Ledecq, B. trad.
COUR D’APPEL FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : A-535-06
(APPEL INTERJETÉ D’UN JUGEMENT DU JUGE HUGHES, EN DATE DU 27 OCTOBRE 2006, N° DU GREFFE : T-264-06)
INTITULÉ : LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
c.
AJIT S. LIDDAR
DATE DE L’AUDIENCE: LE 4 OCTOBRE 2007
MOTIFS DU JUGEMENT : LA JUGE SHARLOW
Y ONT SOUSCRIT : LE JUGE NADON
LE JUGE SEXTON
DATE DES MOTIFS : LE 16 OCTOBRE 2007
COMPARUTIONS :
POUR L’APPELANT
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POUR L’INTIMÉ
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Sous-procureur général du Canada Ottawa (Ontario)
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POUR L’APPELANT
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Mississauga (Ontario) |
POUR L’INTIMÉ |