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Cour d'appel fédérale

Federal Court of Appeal

Date : 20080625

Dossier : A‑467‑07

Référence : 2008 CAF 223

 

CORAM :      LE JUGE NOËL

                        LE JUGE BLAIS

                        LE JUGE EVANS

 

ENTRE :

SUNIL HANDA

appelant

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

intimé

 

 

 

Audience tenue à Edmonton (Alberta), le 23 juin 2008.

Jugement rendu à Calgary (Alberta), le 25 juin 2008.

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :                                                         LE JUGE EVANS

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                              LE JUGE NOËL

                                                                                                                                LE JUGE BLAIS

 


Cour d'appel fédérale

Federal Court of Appeal

Date : 20080625

Dossier : A‑467‑07

Référence : 2008 CAF 223

 

CORAM :      LE JUGE NOËL

                        LE JUGE BLAIS

                        LE JUGE EVANS

 

ENTRE :

SUNIL HANDA

appelant

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

Intimé

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

 

LE JUGE EVANS

[1]               Il s'agit d'un appel interjeté par M. Sunil Handa contre une décision de la Cour fédérale (2007 CF 924) par laquelle le juge Harrington a rejeté sa demande de contrôle judiciaire d'une décision rendue par un membre désigné de la Commission d'appel des pensions (la CAP) le 20 décembre 2006. Par cette décision, la CAP avait refusé de proroger le délai dont disposait M. Handa pour demander l'autorisation d'interjeter appel d'une décision du tribunal de révision ayant confirmé le rejet par le ministre de la demande de prestations d'invalidité de longue durée présentée par M. Handa en vertu du Régime de pensions du Canada, L.R.C. 1985, ch. C-8 (le RPC).

[2]               Le tribunal de révision a conclu sur le fondement des écritures et pièces produites devant lui que M. Handa n'avait pas établi que son invalidité était « grave » et « prolongée » au sens du paragraphe 42(2) du RPC.

 

[3]               Qui souhaite interjeter appel d'une décision du tribunal de révision devant la CAP doit demander l'autorisation de le faire soit dans les 90 jours suivant la date où lui est communiquée cette décision, soit dans un délai plus long qu'autorise le président ou le vice-président de la CAP, ou un membre de cette dernière désigné par eux, comme il est prévu au paragraphe 83(1) du RPC. Or, il s'est écoulé plus de quatre ans entre le moment où la décision du tribunal de révision a été communiquée à M. Handa (janvier 2001) et le dépôt par le représentant de celui‑ci de la demande d'autorisation d'interjeter appel (avril 2005).

 

[4]               Dans son examen de la demande de prorogation de délai présentée par M. Handa en septembre 2006, le membre désigné a appliqué les principes formulés dans Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Gattallero, 2005 CF 883, qui règlent l'exercice par la CAP du pouvoir discrétionnaire que lui confère le paragraphe 83(1).

 

[5]               Les écritures et pièces produites devant lui n'ont pas convaincu le membre désigné que M. Handa ait manifesté l'intention constante de poursuivre l'appel ni qu'il y ait eu une explication raisonnable de son considérable retard. En outre, le membre désigné a conclu que l'octroi de l'autorisation d'interjeter appel porterait préjudice au ministre, étant donné la difficulté de préparer un appel après si longtemps et le fait que [TRADUCTION] « les témoins, ayant un souvenir moins net des événements, ne pourraient en rendre compte avec l'exactitude souhaitable ».

 

[6]               En conséquence, la demande de prorogation de M. Handa a été rejetée.

 

[7]               La seule question en litige devant le juge Harrington était le point de savoir si le membre désigné avait commis une erreur susceptible de révision dans l'exercice du large pouvoir discrétionnaire que confère à la CAP le paragraphe 83(1) lorsqu'il s'agit de décider s'il y a lieu d'autoriser la formation d'un recours contre une décision du tribunal de révision en dehors du délai normal de 90 jours. À l'issue d'une analyse pragmatique et fonctionnelle, le juge des demandes a conclu que la norme de contrôle applicable était celle de la décision manifestement déraisonnable. Un examen attentif de la décision motivée du membre désigné ne lui a permis d'y discerner aucune erreur donnant lieu à révision. Qui plus est, il a conclu que cette décision résisterait aussi à l'examen assez poussé que commande la norme de la décision raisonnable simpliciter.

 

[8]               Le juge Harrington a même pris en considération une nouvelle explication du fait que M. Handa n'avait pas interjeté appel dans le délai normal, explication que l'appelant n'avait pas invoquée devant le membre désigné et qui, en toute rigueur, n'était pas admissible dans le cadre de la demande de contrôle judiciaire. M. Handa avait présenté en janvier 2001 une première demande d'autorisation d'interjeter appel, que la CAP avait rejetée par lettre en date du 3 mai 2001 au motif qu'il n'y était pas formulé de moyens d'appel. Dans les observations écrites présentées au membre désigné, le représentant de M. Handa a expliqué que celui‑ci n'avait pas répondu à cette lettre parce qu'il ne comprenait pas le sens du terme « moyens » (grounds).

[9]               Cependant, devant le juge Harrington, M. Handa a déclaré que l'explication de son représentant était erronée et que la raison pour laquelle il n'avait pas présenté à l'époque une autre demande d'autorisation d'interjeter appel était qu'il n'avait pas reçu les lettres de la CAP, malgré le fait qu'elles portaient la bonne adresse. Le juge Harrington a conclu que cette nouvelle allégation n'aidait pas M. Handa parce qu'elle ne constituait pas une explication raisonnable d'un retard de plus de quatre ans.

 

[10]           Après que le juge Harrington eut rendu sa décision, la Cour suprême du Canada a affiné l'analyse des normes de contrôle judiciaire dans l'arrêt Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9. Il est à noter aux fins de l'examen de la présente espèce qu'elle a ainsi fondu les deux normes de raisonnabilité en une seule, soit la norme de la « décision raisonnable » (au paragraphe 45), et posé (au paragraphe 53) que celle‑ci est en principe la norme applicable au contrôle judiciaire de l'exercice par un décideur administratif du pouvoir discrétionnaire que lui confère une loi. La Cour suprême (au paragraphe 47) prescrit à la cour de révision qui applique cette norme déférente du caractère raisonnable de se demander si la décision examinée est raisonnable compte tenu de l'ensemble des possibilités acceptables que la législation ouvre au décideur, de la décision elle-même et de sa justification.

 

[11]           L'examen de la décision du membre désigné en fonction de ces principes m'amène à la même conclusion que celle du juge Harrington. La CAP dispose d'une grande marge d'appréciation, étant donné qu'aucune des dispositions applicables ne limite expressément l'étendue du pouvoir discrétionnaire de prorogation qui lui est délégué. Le membre désigné expose clairement dans les motifs de sa décision les raisons qui l'ont amené à refuser la prorogation demandée, compte tenu des critères formulés dans la jurisprudence, ainsi que des écritures et pièces produites devant lui. Bref, le processus décisionnel en cause remplit les conditions de la « justification », de la « transparence » et de l'« intelligibilité » (Dunsmuir, précité, au paragraphe 47), de sorte que la décision ne peut être dite déraisonnable.

 

[12]           De même, le résultat de cette décision, c'est‑à‑dire le refus par le membre désigné de proroger le délai, n'est pas en soi déraisonnable.

 

[13]           Pour ces motifs, je rejetterais l'appel. L'intimé ayant renoncé à l'audience à demander des dépens, je n'en adjugerais pas. 

                                   

« John M. Evans »

j.c.a.

 

« Je suis d'accord

          Marc Noël, j.c.a. »

 

« Je suis d'accord

          Pierre Blais, j.c.a. »

 

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.

 


COUR D'APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                                A‑467‑07

 

APPEL D'UN JUGEMENT DE MONSIEUR LE JUGE HARRINGTON EN DATE DU 17 SEPTEMBRE 2007, DOSSIER NO T‑255‑07

 

INTITULÉ :                                                         SUNIL HANDA

                                                                              c.

                                                                              LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L'AUDIENCE :                                   Edmonton (Alberta)

 

DATE DE L'AUDIENCE :                                 Le 23 juin 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :     LE JUGE EVANS

 

Y ONT SOUSCRIT :                                           LE JUGE NOËL

                                                                              LE JUGE BLAIS  

 

DATE DES MOTIFS :                                        Le 25 juin 2008

 

 

COMPARUTIONS :

 

Sunil Handa

POUR SON PROPRE COMPTE

 

Marcus Davies

POUR L'INTIMÉ

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

POUR L'INTIMÉ

 

 

 

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