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                                                                                                                        Date : 20081126

 

Dossier : A-146-08

Référence : 2008 CAF 366

 

CORAM :      LE JUGE LINDEN

                        LE JUGE RYER

                        LA JUGE TRUDEL

 

ENTRE :

DEBORAH LITKE

demanderesse

et

LE MINISTRE DES RESSOURCES HUMAINES ET

 DU DÉVELOPPEMENT SOCIAL CANADA

défendeur

 

 

 

Audience tenue à Edmonton (Alberta), le 25 novembre 2008.

Jugement rendu à Edmonton (Alberta), le 26 novembre 2008.

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :                                                        LE JUGE LINDEN

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                         LE JUGE RYER

                                                                                                                            LA JUGE TRUDEL

 


Date : 20081126

Dossier : A-146-08

Référence : 2008 CAF 366

 

CORAM :      LE JUGE LINDEN

                        LE JUGE RYER

                        LA JUGE TRUDEL

 

ENTRE :

DEBORAH LITKE

demanderesse

et

LE MINISTRE DES RESSOURCES HUMAINES ET

 DU DÉVELOPPEMENT SOCIAL CANADA

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

 

LE JUGE LINDEN

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision de la Commission d’appel des pensions (la CAP) selon laquelle la demanderesse n’avait pas le droit d’obtenir une pension d’invalidité en vertu du Régime de pensions du Canada. La Commission a conclu que Mme Litke n’était pas atteinte d’une invalidité « grave et prolongée » au sens du Régime.

 

[2]               De 1992 à 2003, Mme Litke a travaillé a son propre compte comme représentante commerciale et acheteuse. Elle a arrêté de travailler le 1er janvier 2003, en raison de plusieurs problèmes de santé, notamment des douleurs à la jambe, de la fatigue, des migraines et des symptômes gynécologiques. À l’automne 2003, après avoir arrêté de travailler, la demanderesse a découvert une bosse dans sa jambe, où l’on a par la suite diagnostiqué un cancer. Heureusement, son traitement anticancéreux a été couronné de succès. Toutefois, la demanderesse soutient qu’elle continue de souffrir de problèmes de la thyroïde, de détresse psychologique et de symptômes gynécologiques.

 

[3]               En 2004, Mme Litke a présenté une demande en vue d’obtenir une pension d’invalidité. Sa demande a été rejetée par le ministre et cette décision a été confirmée après nouvel examen. La Commission de révision et la CAP ont rejeté également les appels interjetés par la demanderesse. Par la présente demande, elle sollicite le contrôle judiciaire de la décision de la CAP pour deux motifs : la Commission a commis une erreur en concluant que son état n’était pas « grave » car elle n’a pas examiné tous les éléments de preuve, et, en outre, elle a commis une erreur en concluant qu’une invalidité n’est pas « prolongée » à moins qu’elle ne soit permanente. 

 

[4]               Il est bien établi que la norme de contrôle applicable à l’égard d’une évaluation de

l’invalidité par la CAP est celle de la nouvelle norme de la décision raisonnable énoncée par la Cour suprême dans l’arrêt Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9 (voir Canada (Procureur général) c. Ryall, 2008 CAF 164, aux par. 10-11; Janzen c. Canada (Procureur général), 2008 CAF 150, au par. 5). Il n’est pas nécessaire de se livrer à une analyse exhaustive lorsque la norme de contrôle applicable a été établie par la jurisprudence (l’arrêt Dunsmuir au par. 57).

 

[5]               Pour recevoir une pension d’invalidité au sens du Régime, la demanderesse doit répondre à deux conditions : elle doit être atteinte d’une invalidité « grave et prolongée » et doit avoir versé des cotisations au Régime pendant au moins la période minimale d’admissibilité (PMA). Une invalidité n’est « grave » au sens du Régime que si elle rend la personne « régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice ». Une invalidité n’est « prolongée » que si elle est déclarée « devoir vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou devoir entraîner vraisemblablement le décès » (voir sous-alinéa 42(2)a)(ii) du R.P.C.) Il n’est pas nécessaire qu’une invalidité soit permanente.

 

[6]               Les parties ont convenu que la PMA de Mme Litke s’étendait jusqu’au 31 décembre 2002. La demanderesse soutient qu’à la lumière des modifications au Régime entrées en vigueur en mars 2008 (L.C. 2007, ch.11, art. 2, art. 36), sa PMA devrait s’étendre jusqu’en décembre 2003. Toutefois, il est énoncé que les modifications s’appliqueraient uniquement aux demandes de pension présentées à une date ultérieure à la date de leur entrée en vigueur, de sorte qu’elles ne changent pas la PMA de Mme Litke. Celle-ci avait par conséquent l’obligation d’établir devant la CAP qu’elle souffrait d'une invalidité physique ou mentale grave et prolongée le ou avant le 31 décembre 2002.

 

[7]               La demanderesse soutient que la décision de la Commission était déraisonnable car cette dernière n’a pas mentionné dans ses motifs certains éléments de preuve appuyant sa demande.  Bien qu’une décision soit déraisonnable si la Commission ne tient pas compte d’éléments de preuve pertinents (Gould c. Procureur général du Canada, 2004 CAF 246), il est clair que celle-ci n’est pas tenue de mentionner dans sa décision ni d’analyser chaque élément de preuve dont elle est saisie. (Dossa c. Canada (Commission d’appel des pensions), 2005 CAF 387). Examinant le dossier dans son ensemble, notre Cour conclut que la Commission n’a pas commis de faute à cet égard, puisqu’elle a procédé à un examen complet et sérieux des éléments dont elle disposait. Il n’appartient pas à notre Cour d’apprécier à nouveau la preuve.

 

[8]               De plus, la Commission a conclu que l’invalidité de Mme Litke n’était pas « prolongée » étant donnée qu’elle était clairement d’une durée définie. La preuve soumise à la Commission indiquait que Mme Litke était en mesure de recommencer à travailler après avoir subi son traitement anticancéreux, malgré ses autres problèmes de santé. La demanderesse ne semble pas contester cette conclusion, mais prétend plutôt que la pension d’invalidité devrait être accordée dans les cas d’invalidité temporaire. À cet égard, elle demande à la Cour de revenir sur la décision qu’elle a rendue dans Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Henderson, 2005 CAF 309, où le juge Evans a déclaré que l’objet du Régime est de rendre admissibles à une pension ceux qui sont, pour cause d'invalidité, incapables de travailler pour une longue période, « et non de dépanner des réclamants au cours d'une période temporaire où des ennuis médicaux les empêchent de travailler » (au par. 11).

 

[9]               En l’espèce, il n’y a aucune circonstance qui justifierait la Cour d’infirmer son propre précédent. L’utilisation du terme « indéfinie » au sous-alinéa 42(2)a)(ii) du Régime établit clairement que le législateur n’avait pas l’intention de rendre les pensions d’invalidité accessibles en cas d’invalidité temporaire. Le fait qu’un Comité permanent de la Chambre des communes a recommandé des modifications à cette règle n’a pas grande importance, sauf évidemment si ses recommandations sont adoptées. De la même façon, un guide de médicine distribué par le ministère n’a guère de poids lorsqu’il s’agit de compenser le libellé de la loi et la jurisprudence de la Cour.

 

[10]            Malgré la compassion de la Cour pour le sort de la demanderesse, le changement à la loi qu’elle demande doit venir du législateur, et non pas de notre Cour.

 

[11]           Pour les motifs qui précèdent, la demande est rejetée, sans frais. 

 

 

                                                                                                      « A.M. Linden »

                                                                                          _____________________________

                                                                                                              Juge

 

 

« Je souscris.

            C. Michael Ryer, Juge »

 

« Je souscris.

            Johanne Trudel, Juge » 

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Semra Denise Omer

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                                            A-146-08

 

(DEMANDE DE CONTRÔLE JUDICIAIRE À L’ENCONTRE D’UNE DÉCISION DE LA COMMISSSION D’APPEL DES PENSIONS EN DATE DU 20 FÉVRIER 2008 DANS LE DOSSIER C.A.P. N° 23978)

 

INTITULÉ :                                                                           DEBORAH LITKE c.

                                                                                                LE MINISTRE DES RESSOURCES HUMAINES ET DU DÉVELOPPEMENT SOCIAL CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                                     EDMONTON (ALBERTA)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                                   LE 25 NOVEMBRE 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                LE JUGE LINDEN

 

Y ONT SOUSCRIT :                                                             LES JUGES RYER ET TRUDEL

                                                                                               

DATE DES MOTIFS :                                                          LE 26 NOVEMBRE 2008      

 

 

COMPARUTIONS :

 

Deborah Litke

 

John Wodak

POUR SON PROPRE COMPTE

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Tania Nolet

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

S/O

POUR LA DEMANDERESE

 

John H. Sims, c.r., 

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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