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Date : 20090505

Dossier : A-482-08

Référence : 2009 CAF 144

 

CORAM :      LE JUGE LINDEN

                        LE JUGE SEXTON

                        LA JUGE LAYDEN-STEVENSON

 

ENTRE :

PHARMACOMMUNICATIONS HOLDINGS INC.

Appelante

et

 

AVENCIA INTERNATIONAL INC., JASON LEWIS, DONALD LAJOIE

ET GREGORY KOCHIK

Intimés

 

 

 

Audience tenue à Toronto (Ontario), le 5 mai 2009.

Jugement rendu à l’audience à Toronto (Ontario), le 5 mai 2009.

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :                                                         LE JUGE SEXTON

 

 


Date : 20090505

Dossier : A-482-08

Référence : 2009 CAF 144

 

CORAM :      LE JUGE LINDEN

                        LE JUGE SEXTON

                        LA JUGE LAYDEN-STEVENSON

 

ENTRE :

PHARMACOMMUNICATIONS HOLDINGS INC.

Appelante

et

 

AVENCIA INTERNATIONAL INC., JASON LEWIS, DONALD LAJOIE

ET GREGORY KOCHIK

Intimés

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(Prononcés à l’audience à Toronto (Ontario), le 5 mai 2009)

 

LE JUGE SEXTON

 

[1]               Il s’agit d’un appel interjeté par PharmaCommunications Holdings d’une ordonnance par laquelle le juge suppléant Frenette a rejeté la demande de cette dernière visant à obtenir un jugement déclaratoire et une injonction permanente au motif qu’Avencia International s’est livrée à une imitation frauduleuse contraire à la loi (2008 CF 828).

 

[2]               PharmaCommunications Holdings, l’appelante, est constituée en personne morale depuis 1995. Elle affirme qu’elle est propriétaire des marques de commerce non enregistrées « PharmaCommunications » et « Pharmacommunications » depuis qu’elle a été constituée en personne morale et qu’elle les a concédées sous licence à PharmaCommunications Group Inc./Group PharmaCommunications Inc. (GPI), une société liée qui a également été constituée en personne morale en 1995. L’appelante fait également valoir que ces marques de commerce ont été employées par ses sociétés prédécesseures depuis 1982.

 

[3]               Avencia International, la société intimée, a été constituée en personne morale en 2004. Elle a enregistré le nom « Pharmacomm » en décembre 2004 en vertu de la Loi sur les noms commerciaux, L.R.O. 1990, ch. B.17, et elle emploie ce nom pour exploiter son entreprise en Ontario. Chaque partie conteste la nature des activités de l’autre partie, mais, selon nous, la nature précise de chacune d’elles n’est pas pertinente en l’espèce. Il est suffisant de dire que les deux parties fournissent des services à l’industrie pharmaceutique.

 

[4]               L’appelante a présenté une demande devant la Cour fédérale en vue d’obtenir un jugement déclaratoire selon lequel : 1) elle était la propriétaire de la marque de commerce non enregistrée « PharmaCommunications », 2) la société intimée et les personnes intimées se sont livrées à une imitation frauduleuse contraire à la loi au sens de l’alinéa 7b) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C., 1985, ch. T-13 (la Loi), et 3) le nom commercial de la société intimée était similaire à la marque de commerce de l’appelante au point de créer de la confusion. L’appelante a également sollicité une injonction permanente interdisant aux intimés d’employer tout nom commercial ou toute marque de commerce qui est similaire au point de créer de la confusion, plus particulièrement les noms commerciaux « Pharmacomm » et « PharmaComm », et d’autres réparations. Sont également désignés dans la demande trois personnes qui, selon l’appelante, étaient des administrateurs et des dirigeants d’Avencia International, malgré le fait que leur responsabilité personnelle soit contestée.

 

[5]               Le juge des requêtes s’est seulement prononcé sur la question principale qui consistait à savoir si les intimés s’étaient livrés à une imitation frauduleuse contraire à la loi. Après avoir examiné la preuve et les arguments des parties, il a conclu que la demande devait être rejetée parce que l’appelante n’a présenté aucun élément de preuve établissant des dommages actuels ou éventuels, un élément essentiel dans le cadre d’une action en imitation frauduleuse fondée sur la loi. Le juge n’a donc pas examiné si l’appelante avait une marque de commerce valide, si elle avait démontré l’existence d’un achalandage ou si le public avait été induit en erreur au moyen d’une déclaration trompeuse. Il n’était également pas nécessaire d’examiner le critère applicable à une injonction ou la responsabilité des personnes intimées.

 

[6]               La principale question à trancher dans le présent appel est de savoir si le juge des requêtes a appliqué le critère qui commande une demande fondée sur l’alinéa 7b) de la Loi. Plus particulièrement, il s’agit, en l’espèce, de déterminer s’il est nécessaire dans une action en imitation frauduleuse que le demandeur prouve l’existence de dommages actuels ou éventuels attribuables à cette violation présumée de la loi. Il s’agit d’une question de droit contrôlable par la Cour selon la norme de la décision correcte (Housen c. Nikolaisen, 2002 CSC 33, [2002] 2 R.C.S. 235, paragraphe 8). Même si l’appelante a soulevé d’autres questions, la Cour n’a pas à examiner ces autres questions subsidiaires à moins qu’elle ne lui donne gain de cause à l’égard de la présente question.

 

[7]               L’appelante allègue que le juge des requêtes a commis une erreur en appliquant le critère issue de la common law à une action en imitation frauduleuse fondée sur la loi. Dans ses observations, l’appelante affirme que l’alinéa 7b) n’oblige pas le demandeur à prouver l’existence de dommages actuels ou éventuels. Elle reconnaît que la Cour en a décidé autrement dans l’arrêt BMW Canada Inc. c. Nissan Canada Inc., 2007 CAF 255, 380 N.R. 147, paragraphe 30, mais elle allègue que cet arrêt ne devrait pas être suivi.

 

[8]               Toutefois, l’appelante n’a pas démontré que l’arrêt BMW Canada était manifestement erroné. L’alinéa 7b) de la Loi est une codification du délit de passing-off (imitation frauduleuse) de la common law, et il n’existe dorénavant aucune [traduction] « différence importante » entre la loi et la common law (Kelly Gill et R. Scott Joliffe (éd.), Fox on Canadian Law of Trade-Marks and Unfair Competition, 4e éd., feuilles mobiles (Toronto : Thomson Carswell, 2002), §4.1 et §4.2(e)).

 

[9]               Dans l’arrêt Ciba-Geigy c. Apotex Inc., [1992] 3 R.C.S. 120, la Cour suprême a établi, à la page 132, un critère à trois volets qui doit être appliqué lorsqu’il s’agit de prouver une imitation frauduleuse, à savoir : 1) l’existence d’un achalandage, 2) le fait d’induire le public en erreur au moyen d’une déclaration trompeuse, et 3) l’existence de dommages actuels ou éventuels au regard du demandeur. Même si l’arrêt Ciba-Geigy portait sur une action en imitation frauduleuse fondée sur la common law, ce critère a été appliqué par la Cour fédérale dans plusieurs demandes fondées sur la loi (voir par exemple l’arrêt Prince Edward Island Mutual Insurance c. Insurance Co. of Prince Edward Island (1999), 159 F.T.R. 112 (1re inst.), paragraphe 26, conf. par (2000), 9 C.P.R. (4th) 520 (C.A.F.)).

 

[10]           Plus récemment, dans l’arrêt Kirkbi AG c. Ritvik Holdings Inc., 2005 CSC 65, [2005] 3 R.C.S. 302, la Cour suprême a confirmé, au paragraphe 66, l’application du critère à trois volets, y compris l’obligation de prouver des dommages actuels ou possibles (paragraphe 66). Elle a également confirmé que ses principes sous‑tendent désormais à la fois le droit d’origine législative et la common law (paragraphe 63).

 

[11]           L’arrêt BMW Canada de notre Cour est donc compatible avec la jurisprudence de la Cour suprême en matière d’imitation frauduleuse, et nous sommes d’avis qu’il doit être respecté.

 

[12]           Subsidiairement, l’appelante affirme qu’elle n’était pas tenue de présenter une preuve de dommages actuels ou éventuels, et que la Cour peut présumer l’existence de dommages lorsqu’une probabilité raisonnable de confusion a été démontrée. Toutefois, cet argument a également été rejeté aux paragraphes 33 et 35 de l’arrêt BMW Canada. L’appelante n’a donné aucune raison pour expliquer pourquoi l’arrêt BMW Canada ne devrait pas être suivi à cet égard. L’appelante n’a pas non plus contesté la conclusion portant qu’aucune preuve de dommages actuels ou éventuels n’a été présentée. Par conséquent, il est clair que sa demande pour imitation frauduleuse fondée sur la loi ne peut être accueillie. Cela est suffisant pour trancher l’appel.

 

[13]           Nous rejetons donc l’appel, avec dépens en faveur des intimés.

 

    « J. Edgar Sexton »

j.c.a.

 

 

Traduction certifiée conforme

Mélanie Lefebvre, trad. a., LL.B.

 

 


 

COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

DOSSIER :                                                               A-482-08

 

(APPEL D’UNE ORDONNANCE RENDUE LE 2 JUIN 2008 PAR MONSIEUR LE JUGE ORVILLE FRENETTE DE LA COUR FÉDÉRALE, DOSSIER DE LA COUR FÉDÉRALE NO T-2278-06)

 

INTITULÉ :                                                              PHARMACOMMUNICATIONS        HOLDINGS INC. c. AVENCIA                                                                 INTERNATIONAL INC., JASON LEWIS,

                                                                                   DONALD LAJOIE ET GREGORY KOCHIK

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                       Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                      Le 5 mai 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :          (LES JUGES LINDEN, SEXTON ET LAYDEN-STEVENSON)

 

PRONONCÉS À L’AUDIENCE PAR :                  LE JUGE SEXTON

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Bigioni

 

POUR L’APPELANTE

 

 

Me MacKeigan

 

POUR LES INTIMÉS

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Bigioni LLP

Avocats

Markham (Ontario)

 

POUR L’APPELANTE

 

 

Siskinds LLP

Avocats

London (Ontario)

 

POUR LES INTIMÉS

 

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