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Date : 20100721

Dossier : A‑388‑09

Référence : 2010 CAF 195

 

CORAM :      LE JUGE LÉTOURNEAU

                        LE JUGE SEXTON

                        LE JUGE EVANS

 

ENTRE :

KEVIN R. AALTO, ROZA ARONOVITCH,

ROGER R. LAFRENIÈRE, MARTHA MILCZYNSKI

RICHARD MORNEAU et MIREILLE TABIB

 

appelants

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

intimé

 

 

 

 

 

 

 

 

Audience tenue à Toronto (Ontario), le 12 mai 2010

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 21 juillet 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

 


Date : 20100721

Dossier : A‑388‑09

Référence : 2010 CAF 195

 

CORAM :      LE JUGE LÉTOURNEAU

                        LE JUGE SEXTON

                        LE JUGE EVANS

 

ENTRE :

KEVIN R. AALTO, ROZA ARONOVITCH,

ROGER R. LAFRENIÈRE, MARTHA MILCZYNSKI

RICHARD MORNEAU et MIREILLE TABIB

 

appelants

et

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

intimé

 

MOTIFS DU JUGEMENT

LA COUR

 

[1]               Il s’agit d’un appel interjeté par les six protonotaires de la Cour fédérale à l’encontre d’une décision rendue par le juge suppléant MacKay (le juge de première instance) le 28 août 2009 (2009 CF 861). Le juge de première instance a rejeté la demande de contrôle judiciaire présentée par les appelants en vue de faire annuler la Réponse du ministre de la Justice au nom du gouvernement canadien (la Réponse), datée du 11 février 2009. Dans cette Réponse, le gouvernement a refusé de mettre en œuvre l’ensemble des recommandations formulées par le conseiller spécial sur la rémunération des protonotaires, l’honorable George W. Adams, c.r., à l’exception de la recommandation visant à étendre leurs congés annuels à six semaines.

 

[2]               Le juge de première instance a jugé raisonnable le motif principal sur lequel repose la Réponse, à savoir la détérioration des finances publiques, étant donné que M. Adams a présenté ses recommandations au gouvernement le 30 mai 2008, ainsi que l’imposition de restrictions salariales à la fonction publique fédérale. Le juge de première instance s’est ensuite penché sur les autres motifs invoqués dans la Réponse pour rejeter des recommandations spécifiques. Il a conclu que ces motifs ne satisfaisaient au critère énoncé par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Bodner c. Alberta, 2005 CSC 44, [2005] 2 R.C.S. 286 (Bodner), pour statuer sur la constitutionnalité du refus du gouvernement de mettre en œuvre les recommandations d’une personne ou d’un organisme indépendant nommé afin de s’assurer que le processus de fixation de la rémunération est conforme à la garantie constitutionnelle de l’indépendance de la magistrature. Néanmoins, bien qu’il ait conclu à la non‑satisfaction des exigences constitutionnelles, le juge de première instance a refusé d’accorder réparation.

 

[3]               L’argument principal invoqué par les appelants dans le cadre du présent appel est que le juge de première instance a commis une erreur en ne rendant pas, à tout le moins, une ordonnance déclarant que les motifs additionnels énoncés dans la Réponse à l’égard des recommandations particulières du conseiller spécial ont porté atteinte à la garantie constitutionnelle de l’indépendance de la magistrature par la sécurité financière. Ils allèguent également que le juge de première instance a appliqué le mauvais critère juridique lorsqu’il a reconnu que la Réponse était raisonnable, dans la mesure où elle était fondée sur la détérioration des finances publiques canadiennes causée par la récession mondiale, ce qui a conduit le gouvernement à déposer des textes de loi visant à limiter la rémunération de la fonction publique fédérale. Selon nous, l’appel ne saurait réussir. Dans l’ensemble, compte tenu de la détérioration des finances publiques, la Réponse du gouvernement aux recommandations satisfait au critère énoncé dans l’arrêt Bodner et est donc constitutionnelle. Comme la Constitution n’a pas été violée, la question de la réparation ne se pose pas.

 

[4]               Étant donné cette conclusion, il est superflu d’examiner les autres motifs invoqués par le gouvernement pour rejeter les recommandations particulières de M. Adams. À notre avis, il ne serait guère utile que la Cour se penche sur ces questions.

 

[5]               Il est actuellement impossible de savoir quand les finances publiques se seront suffisamment améliorées pour convaincre le gouvernement de revoir le régime de rémunération des protonotaires. Les recommandations de M. Adams pourraient alors ne plus être d’actualité et ne présenter guère d’intérêt pour les travaux d’un nouvel examen indépendant. Dans la mesure où les recommandations de M. Adams demeurent pertinentes, les protonotaires pourront s’appuyer sur celles‑ci dans le cadre du nouveau processus et répondre aux objections que le gouvernement a déjà soulevées dans la Réponse faisant l’objet du présent contrôle judiciaire. Si le gouvernement rejette les recommandations émanant du prochain examen indépendant et que les protonotaires présentent une demande de contrôle judiciaire, la Cour pourra alors se pencher sur la légalité de la réponse du gouvernement dans le contexte des nouvelles recommandations et des circonstances qui prévaudront à ce moment‑là.

 

[6]               Il y a deux questions fondamentales qui ne sont pas en litige. Premièrement, le travail des protonotaires fait partie intégrante de l’administration de la justice à la Cour fédérale. Ils s’occupent de la gestion des instances (notamment en aidant les parties à régler leurs différends), statuent sur les requêtes préalables à l’audience et président les procès dont l’enjeu ne dépasse pas 50 000 $. Au fil des ans, leur rôle s’est élargi et la grande qualité de leur travail est incontestable. Les protonotaires libèrent les juges de la Cour fédérale d’une charge considérable et contribuent grandement à la prompte administration de la justice par la Cour.

 

[7]               Deuxièmement, les protonotaires bénéficient de la même garantie constitutionnelle d’indépendance, notamment la sécurité financière, que les autres officiers de justice : les juges des cours supérieures et provinciales et les conseillers‑maîtres. La primauté du droit n’exige rien de moins. Par conséquent, les principes constitutionnels sur lesquels repose le processus de fixation de la rémunération des juges s’appliquent également aux protonotaires, notamment l’obligation de réviser périodiquement leur traitement et autres prestations à la lumière des recommandations émanant d’un processus indépendant.

 

[8]               Les appelants font valoir, et nous souscrivons à leur opinion, que la constitutionnalité du motif principal de la Réponse du gouvernement doit reposer sur le critère énoncé dans l’arrêt Bodner. Dans cet arrêt, la Cour suprême du Canada a statué (au par. 29) que la réponse du gouvernement rejetant des recommandations concernant la rémunération des juges est susceptible de contrôle selon la norme de la « rationalité ». Lorsqu’il applique cette norme, le tribunal saisi du contrôle judiciaire doit faire preuve d’une certaine retenue à l’égard de la position unique du gouvernement en matière de gestion des finances du pays. La Cour a déclaré ce qui suit (au par. 30) :

Le tribunal saisi du contrôle judiciaire n’a pas à décider si la rémunération des juges est suffisante ou adéquate. Il doit plutôt se concentrer sur la réponse du gouvernement et se demander si l’objectif du recours à une commission est atteint. Il s’agit d’un contrôle fondé sur un principe de retenue judiciaire qui reconnaît à la fois la position unique et l’expertise accumulée du gouvernement et sa responsabilité constitutionnelle en matière de gestion des finances de la province. [Non souligné dans l’original.]

 

[9]               La Cour suprême a formulé (au par. 31) un critère en trois volets pour déterminer si une réponse est rationnelle.

(1)               Le gouvernement a‑t‑il justifié par un motif légitime sa décision de s’écarter des recommandations de la commission?

 

(2)               Les motifs invoqués par le gouvernement ont‑ils un fondement factuel raisonnable?

 

(3)               Dans l’ensemble, le mécanisme d’examen par une commission a‑t‑il été respecté et les objectifs du recours à une commission, à savoir préserver l’indépendance de la magistrature et dépolitiser la fixation de la rémunération des juges, ont‑ils été atteints?

 

 

 

(i) Le gouvernement a‑t‑il justifié par un motif légitime sa décision de s’écarter des recommandations de M. Adams?

 

[10]           La première partie de l’arrêt Bodner est celle de « l’examen préalable » : par. 32. En obligeant le gouvernement à justifier par un motif « légitime » sa décision d’écarter les recommandations faites par un organisme indépendant, le premier volet du critère « permet de déceler les décisions concernant la rémunération des juges qui reposent sur des considérations purement politiques, ou les mesures qui ont été édictées pour des motifs discriminatoires » : Renvoi relatif à la rémunération des juges de la Cour provinciale de l’Île‑du‑Prince‑Édouard, [1997] 3 R.C.S. 3, par. 183 (Renvoi relatif aux juges de l’Î.‑P.‑É.). Seules peuvent être justifiées les décisions du gouvernement qui reposent sur des objectifs d’intérêt public, au sens large de cette expression (ibid.), abordent de bonne foi les questions en jeu et démontrent que les recommandations ont été dûment prises en compte. De plus, les motifs doivent « démontrer qu’on a procédé à un examen des fonctions judiciaires et qu’on a l’intention de prendre les mesures qui s’imposent » : Bodner, par. 25.

 

[11]           En l’espèce, la principale considération sur laquelle s’est appuyé le gouvernement pour s’écarter des recommandations de M. Adams était la détérioration de la situation économique mondiale et ses effets sur les finances du gouvernement canadien. Le gouvernement affirme que sa principale préoccupation ne concerne pas les sommes que requerrait une réponse plus favorable aux recommandations visant à améliorer le traitement et les prestations des six protonotaires, lesquels sont actuellement fixés par décret à 69 % du traitement versé aux juges de nomination fédérale. Selon ses dires, il s’agit plutôt du fait que soustraire les protonotaires aux restrictions salariales imposées par la loi à la fonction publique fédérale à la suite de la crise économique de 2008 pourrait donner l’impression que le gouvernement favorise les officiers de justice afin d’en retirer lui‑même un avantage, étant donné qu’il est fréquemment partie à des instances devant la Cour fédérale.

 

[12]           Nous estimons que cela constitue des motifs légitimes justifiant la Réponse et que cela satisfait au premier volet du critère de l’arrêt Bodner. La Réponse n’était dictée ni par des considérations purement politiques ni par des motifs discriminatoires.

 

[13]           Dans le Renvoi relatif aux juges de l’Î.‑P.‑É., la Cour suprême a indiqué (au par. 184) que « les mesures générales touchant la quasi‑totalité des personnes rémunérées sur les fonds publics sont, à première vue, rationnelles ». Elle a ajouté que de telles mesures « [visent] normalement à mettre en œuvre les priorités budgétaires globales du gouvernement et, par conséquent, [visent] généralement à réaliser un objectif plus vaste d’intérêt général ». En outre, la Cour a déclaré ce qui suit (au par. 196) :

Rien ne serait plus dommageable pour la réputation de la magistrature et l’administration de la justice que la perception que les juges ne supportent pas leur part du fardeau en période de difficultés économiques.

 

 

(ii) La Réponse du gouvernement a‑t‑elle un fondement factuel raisonnable?

 

[14]           Le deuxième volet du critère de l’arrêt Bodner exige que le tribunal saisi du contrôle judiciaire détermine « si le rejet ou la modification par le gouvernement des recommandations de la commission reposent sur un fondement factuel raisonnable et suffisant » : par. 33. Le tribunal doit faire preuve de la retenue nécessaire lorsqu’il examine les éléments de preuve à sa disposition pour déterminer si le refus du gouvernement de mettre en œuvre les recommandations repose sur un fondement factuel raisonnable.

 

[15]           En l’espèce, le gouvernement s’est fondé sur deux documents clés : le Budget 2009, lequel décrit la détérioration des conditions économiques au Canada et à l’échelle internationale, et un affidavit produit par Benoit Robidoux, directeur général de la Direction de la politique économique et fiscale du ministère des Finances. Le juge de première instance a reconnu que ces documents constituent une preuve suffisante pour démontrer l’existence de circonstances économiques extraordinaires. D’ailleurs, les appelants concèdent que l’économie s’est détériorée considérablement après le dépôt du Rapport Adams en mai 2008.

 

[16]           Pour justifier sa décision, le gouvernement n’est pas tenu de présenter des éléments de preuve permettant de démontrer l’existence de circonstances exceptionnelles comme on prouve un fait : Bodner, par. 35. Comme la détérioration de l’économie mondiale a beaucoup retenu l’attention des politiciens et des médias, nous estimons que les documents invoqués par le gouvernement établissent un fondement factuel raisonnable pour sa décision et que, par conséquent, le deuxième volet du critère de l’arrêt Bodner est rempli.

 

(iii) En considérant la Réponse dans son ensemble, le processus indépendant a‑t‑il été respecté et ses objectifs ont‑ils été atteints?

 

 

[17]           Le troisième volet du critère de l’arrêt Bodner exige que le tribunal saisi du contrôle judiciaire examine la réponse du gouvernement de façon globale. La Cour doit « évaluer le mécanisme et la réponse dans leur ensemble pour déterminer s’ils démontrent que le gouvernement s’est engagé concrètement dans le recours à une commission et a opposé une réponse rationnelle aux recommandations de la commission » (par. 38). Examiner une réponse « dans son ensemble » consiste à l’évaluer globalement, à reconnaître ses faiblesses ainsi qu’à déterminer si l’objectif général des recommandations a été réalisé malgré les lacunes :

Même s’il peut trouver matière à critiquer certains aspects du mécanisme adopté par le gouvernement, certaines réponses particulières ou l’absence de réponse, le tribunal doit soupeser et apprécier la participation du gouvernement ainsi que sa réponse pour déterminer si, dans son ensemble, la réponse comporte des lacunes inacceptables, même compte tenu du degré de retenue qui s’impose à l’égard de l’avis du gouvernement sur ces questions. L’analyse porte sur l’ensemble du mécanisme et de la réponse. (par. 38)

 

 

[18]           La Cour suprême a souligné l’importance de la souplesse dans le processus de contrôle judiciaire. Bien que la Constitution oblige le gouvernement à justifier sa décision par des motifs légitimes, il y a lieu de faire preuve de retenue à l’égard de sa réponse puisque les recommandations n’ont pas, en fin de compte, un caractère obligatoire (par. 40).

 

[19]           Lorsqu’il a justifié sa décision sur le fondement de la conjoncture économique, le gouvernement, dans sa Réponse, s’est dit sensible au rôle unique joué par la magistrature et à la nécessité de préserver son indépendance par la sécurité financière :

Le gouvernement convient que le traitement des juges – et celui des fonctionnaires judiciaires comme les protonotaires – est subordonné à certaines considérations qui ne s’appliquent pas aux autres personnes payées à même les fonds publics. Tout particulièrement, il importe de veiller à ce que le traitement des juges ne soit pas abaissé sous le « minimum » requis pour protéger leur sécurité financière, y compris une baisse résultant d’une érosion par l’inflation. Ce « minimum » sert à éviter que les juges soient perçus comme étant vulnérables à des pressions politiques exercées par manipulation financière, comme cela se produit dans d’autres pays.

 

Or, comme le traitement des protonotaires est lié à celui des juges des cours supérieures, leur traitement est actuellement protégé contre une telle érosion par l’indexation annuelle prévue par la loi de même que par l’examen quadriennal de la rémunération des juges qui peut recommander les ajustements nécessaires.

 

Le moment est mal choisi pour apporter les améliorations considérables recommandées par le conseiller spécial dans son rapport. En effet, en les soustrayant à des restrictions imposées dans l’ensemble du secteur public, on minerait la perception d’indépendance judiciaire et d’impartialité qu’entretient le public à leur égard, au lieu d’augmenter la confiance du public. [Non souligné dans l’original.]

 

 

 

[20]           Le juge de première instance a critiqué le gouvernement pour avoir omis de répondre aux recommandations spécifiques de M. Adams de manière suffisamment diligente et détaillée. Nous reconnaissons que la Réponse du gouvernement n’est pas aussi exhaustive que l’on pourrait s’attendre, compte tenu de la nature des questions en jeu et du fait que, depuis plus de dix ans, la rémunération des protonotaires n’a fait l’objet d’aucun examen indépendant.

 

[21]           Cependant, le gouvernement a déjà établi que les circonstances dans le cadre desquelles il a examiné les recommandations étaient tout à fait exceptionnelles. Comme la Réponse était rationnelle du fait que le gouvernement a accordé une importance primordiale à la conjoncture économique, il n’était pas, selon nous, déraisonnable pour le gouvernement de ne répondre qu’assez brièvement aux recommandations spécifiques de M. Adams.

 

[22]           Les appelants contestent la Réponse pour trois motifs : le défaut d’évaluer le coût de la mise en œuvre des recommandations rejetées, de confirmer que les restrictions imposées étaient temporaires et de fournir la preuve qu’un régime général était appliqué à la totalité ou à la quasi-totalité des membres de la fonction publique fédérale. Nous ne sommes pas convaincus que ces allégations, qu'elles soient prises individuellement ou collectivement, établissent qu’il n’a pas été satisfait au critère de l’arrêt Bodner.

 

[23]           Premièrement, nous sommes d’avis que la Constitution n’oblige pas le gouvernement à fournir des renseignements détaillés sur le coût pour démontrer que la situation économique l’empêche d’adopter les recommandations de M. Adams. Comme nous l’avons déjà souligné, le gouvernement n’est pas tenu de présenter des éléments de preuve permettant de démontrer l’existence de circonstances exceptionnelles comme on prouve un fait, à condition qu’un fondement factuel raisonnable étaye sa position, ce que nous avons conclu.

 

[24]           Deuxièmement, la Loi sur le contrôle des dépenses, L.C. 2009, ch. 2 (« LCD »), a soustrait environ 100 000 fonctionnaires fédéraux aux restrictions salariales qu’elle a imposées. Cependant, l’existence de ces exemptions n’invalide pas, selon nous, la Réponse du gouvernement. Des sommes ont été versées afin de mettre en œuvre les ententes conclues avant la date limite, fixée par la loi au 8 décembre 2008. Parmi les employés en question, 70 000 étaient visés par le règlement d’une demande d’équité salariale et les autres étaient visés par une entente de restructuration.

 

[25]           Il est regrettable que le gouvernement n’ait pas répondu aux recommandations de M. Adams avant le 11 février 2009, soit cinq jours après le dépôt et la première lecture de la LCD, et plus de deux mois après la date de communication de la Réponse fixée par le décret établissant le processus d’examen. Cependant, ce délai n’a pas pour conséquence, selon nous, de réserver un traitement différent aux protonotaires. Par ailleurs, le paragraphe 13(4) de la Loi les a soustrait en partie à ces restrictions, étant donné que, à l’instar des juges des cours supérieures, ils continuent de bénéficier de rajustements indexés de leur rémunération prévus par la loi.

 

[26]           Troisièmement, en ce qui concerne le caractère temporaire des restrictions, le gouvernement a déjà admis qu’il sera nécessaire de réviser périodiquement la rémunération des protonotaires. La Cour présume que le gouvernement agira de bonne foi et réexaminera ces questions sans tarder et en profondeur lorsque la situation économique s’améliorera.

 


(iv) Conclusions

 

[27]           Dans l’ensemble, compte tenu des circonstances exceptionnelles en l’espèce, la Réponse du gouvernement aux recommandations de M. Adams respecte comme il se doit le processus indépendant et s’assure que ses objectifs ont été atteints.

 

[28]           Nous n’ajouterons qu’une seule chose. Le gouvernement a mis beaucoup trop de temps à établir un processus indépendant pour fixer et réviser la rémunération des protonotaires, et à publier sa Réponse aux recommandations de M. Adams. Le fait que les protonotaires ne soient que six ne justifie pas le peu d’intérêt que semble porter le gouvernement à leur rémunération. Au contraire, nous aurions cru que cela aurait facilité les choses.

 

[29]           Nous nous attendons à ce que le gouvernement place la rémunération des protonotaires très haut sur sa liste des priorités lorsque la situation économique ne nécessitera plus de restrictions salariales aussi draconiennes dans le secteur public. En particulier, il devra examiner sans tarder les dispositions actuelles relatives à leurs prestations de retraite et d’invalidité. Dans son rapport, M. Adams décrit les difficultés qu’elles ont déjà causées à deux anciens protonotaires. Elles donnent une piètre image de la façon dont le Canada traite les personnes chargées de l’administration efficiente et efficace de la justice.


 

[30]           Pour ces motifs, l’appel sera rejeté.

 

 

« Gilles Létourneau »

j.c.a.

 

 

 

 

 

« J. Edgar Sexton »

j.c.a.

 

 

 

 

 

« John M. Evans »

j.c.a.

 

 

Traduction certifiée conforme

Jenny Kourakos, LL.L.

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    A‑388‑09

 

(APPEL D’UNE DÉCISION DU JUGE SUPPLÉANT MACKAY EN DATE DU 28 AOÛT 2009, DOSSIER NO T‑370‑09)

 

INTITULÉ :                                                   KEVIN R. AALTO, ROZA ARONOVITCH, ROGER R. LAFRENIÈRE, MARTHA MILCZYNSKI, RICHARD MORNEAU ET MIREILLE TABIB

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           LE 12 MAI 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT

DE LA COUR :                                              LE JUGE LÉTOURNEAU

                                                                        LE JUGE SEXTON

                                                                        LE JUGE EVANS

 

DATE DES MOTIFS :                                  LE 21 JUILLET 2010

 

 

COMPARUTIONS :

 

Andrew K. Lokan

POUR LES APPELANTS

 

Catherine Beagen Flood

POUR L’INTIMÉ

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Paliare Roland Rosenberg Rothstein LLP

Toronto (Ontario)

 

POUR LES APPELANTS

 

Blake Cassels & Graydon LLP

Toronto (Ontario)

 

POUR L’INTIMÉ

 

 

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