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Date : 20110408

Dossier : A‑151‑11

Référence : 2011 CAF 130

 

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE NADON

 

ENTRE :

ELIZABETH MAY

demanderesse

et

RADIO‑CANADA/CBC, CTV TELEVISION NETWORK LTD., GLOBAL TELEVISION NETWORK INC. et GROUPE TVA INC.

 

défenderesses

 

 

 

 

 

Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 5 avril 2011.

Ordonnance rendue à Ottawa (Ontario), le 5 avril 2011.

Motifs de l'ordonnance rendus à Ottawa (Ontario), le 8 avril 2011.

 

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :                                                                    LE JUGE NADON

 


Date : 20110408

Dossier : A‑151‑11

Référence : 2011 CAF 130

 

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE NADON

 

ENTRE :

ELIZABETH MAY

demanderesse

et

RADIO‑CANADA/CBC, CTV TELEVISION NETWORK LTD., GLOBAL TELEVISION NETWORK INC. et GROUPE TVA INC.

 

défenderesses

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE NADON

[1]               Le mardi 5 avril 2011, j'ai entendu la requête de la demanderesse en vue d'obtenir une instruction accélérée en application du paragraphe 8(1) des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106. À la fin de l'audience, j'ai informé les parties que je rejetterais la requête et que les motifs seraient rendus le vendredi 8 avril 2011. Voici les motifs pour lesquels j'ai conclu que la requête de la demanderesse devrait être rejetée.

 

[2]               La question en litige est de savoir si je devrais accueillir la requête présentée par la demanderesse en vue d'obtenir une instruction accélérée de sa demande de contrôle judiciaire.

[3]               Le 31 mars 2011, Mme Elizabeth May, la demanderesse et actuelle chef du Parti vert, a présenté une demande de contrôle judiciaire du Bulletin d'information de radiodiffusion 2011‑218 (le bulletin) du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (le CRTC). Le bulletin a été publié en vertu de l'article 347 de la Loi électorale du Canada, lequel exige du CRTC qu'il publie, dans les quatre jours du déclenchement d'une élection, un ensemble de lignes directrices sur l'applicabilité de la Loi sur la radiodiffusion et de ses règlements quant à la conduite des radiodiffuseurs à l'occasion d'une élection générale.

 

[4]               Le bulletin renvoie aux lignes directrices de 1995 du CRTC (les lignes directrices) selon lesquelles il n'est plus requis d'inclure tous les chefs de parti dans les débats des chefs, pourvu qu'une couverture équitable de tous les partis soit assurée pendant la campagne électorale, de sorte que le public soit raisonnablement informé sur l'ensemble des enjeux selon différents points de vue.

 

[5]               La demanderesse sollicite deux formes de réparation dans son avis de demande. D'abord, elle sollicite de la Cour la délivrance d'un bref de mandamus en vertu duquel le CRTC serait tenu de publier des critères clairs visant à déterminer quels chefs de parti doivent participer à un débat des chefs, ces critères devant exiger l'inclusion des chefs dont le parti a reçu plus de deux pour cent du vote populaire lors de la dernière élection. Subsidiairement, la demanderesse sollicite la délivrance d'un bref de mandamus qui ordonne aux défenderesses, la Société Radio‑Canada et ses partenaires de diffusion dans le consortium des radiodiffuseurs — soit CTV Television Network Ltd., Global Television Network Inc. et Groupe TVA inc. — de permettre à la demanderesse de participer aux débats des chefs prévus les 12 et 14 avril 2011.

[6]               Au soutien de sa requête, la demanderesse fait valoir que le bulletin excède les pouvoirs du CRTC parce qu'il porte atteinte à son droit de participer de façon efficace au processus électoral juste garanti par l'article 3 de la Charte canadienne des droits et libertés (la Charte).

 

[7]               À mon avis, la requête doit être rejetée, et cela, pour plusieurs raisons.

 

[8]               Premièrement, la demanderesse aurait pu demander réparation plus tôt qu'elle ne l'a fait, soit à peine douze jours avant la tenue du premier débat des chefs. La demanderesse a affirmé à maintes reprises qu'elle n'avait pas eu d'autre choix que de solliciter une réparation urgente, puisque la mesure administrative qui touchait ses droits, soit le bulletin du CRTC, avait eu lieu seulement après le déclenchement des élections, en application de l'article 347 de la Loi électorale du Canada. Selon la demanderesse, si sa demande avait été engagée plus tôt, les défenderesses auraient probablement fait valoir qu'elle était prématurée. Ainsi, si l'audience ne procède pas de façon expéditive, la demande deviendra théorique.

 

[9]               Essentiellement, la demanderesse fait valoir que le bulletin est une décision ou une ordonnance d'un office fédéral au sens du paragraphe 18.1(2) de la Loi sur les Cours fédérales et qu'il est impossible de présenter une demande de contrôle judiciaire contre la décision ou l'ordonnance avant qu'elle ne soit rendue.

 

[10]           À mon humble avis, cet argument est erroné. Même s'il est vrai que les demandes de contrôle judiciaire présentées devant la Cour sollicitent habituellement le contrôle de décisions prises par des organismes fédéraux, il est bien établi par la jurisprudence que le paragraphe 18.1(1) autorise la présentation d'une demande de contrôle judiciaire « par quiconque est directement touché par l'objet de la demande ». Le terme « objet » inclut plus qu'une simple décision ou une ordonnance d'un office fédéral : il s'applique à toute question à l'égard de laquelle il est possible d'obtenir une réparation : Krause c. Canada, [1999] 2 C.F. 476 (C.A.F.), à la page 491. Les politiques d'application courante qui sont illégales ou inconstitutionnelles peuvent être contestées à tout moment au moyen d'une demande de contrôle judiciaire dans laquelle le demandeur sollicite, par exemple, une réparation de la nature d'un jugement déclaratoire : Sweet c. Canada, [1999] A.C.F. no 1539 (QL) (C.A.F.).

 

[11]           En l'espèce, il est fait référence dans le bulletin contesté du CRTC aux lignes directrices qui énoncent la même règle contestée. En fait, la même règle contestée a été appliquée aux débats des chefs dans les élections fédérales depuis 1995. Par conséquent, il s'agit d'une « politique d'application courante » qui aurait pu être contestée par la demanderesse en tout temps, et qui peut encore l'être. En conséquence, la demanderesse n'avait pas à attendre la publication du bulletin pour l'élection générale de 2011 avant de présenter sa demande.

 

[12]           Compte tenu de ce fait, j'estime que l'instance n'est pas « vraiment urgente », mais que la demanderesse souhaite plutôt que la question soit réglée rapidement : Commission canadienne du blé c. Procureur général du Canada, 2007 CF 39, au paragraphe 13. L'absence de l'urgence nécessaire n'incite pas à faire droit à la présente requête.

 

[13]           Deuxièmement, les défenderesses, la demanderesse et le public subiraient tous un grave préjudice si le traitement de la demande était accéléré. Dans la décision Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration c. Dragan, 2003 CAF 139 (Dragan) (ordonnance rendue par le juge Rothstein, alors juge à la Cour d'appel fédérale), la Cour a conclu au paragraphe 13 que le préjudice causé au défendeur est un facteur très pertinent dans la décision d'accélérer l'instruction.

 

[14]           Il ne fait aucun doute que les défenderesses subiraient un préjudice si on devait procéder à une instruction accélérée de la demande. Dans un tel cas, les défenderesses auraient à préparer des moyens fouillés fondés sur la Charte, procéder au contre‑interrogatoire de l'expert de la demanderesse et de tous les autres auteurs d'affidavit et rédiger leur propre rapport d'expert, le tout pour le lundi 11 avril 2011, au plus tard. Ce genre de tâche constituerait, dans les circonstances, un fardeau considérable pour les défenderesses.

 

[15]           En outre, dans la décision Dragan, la Cour a estimé que l'échéancier proposé était « extraordinairement serré » lorsque le demandeur avait sollicité une audition accélérée et le prononcé d'une décision dans un délai de 19 jours. Ce raisonnement s'applique encore mieux en l'espèce en raison de la preuve d'expert relativement détaillée et des arguments fondés sur la Charte qu'il serait nécessaire de présenter ainsi que du fait qu'une audience devrait être tenue et une décision rendue dans six jours au plus tard.

 

[16]           Je crois également que la demanderesse pourrait subir un préjudice du fait de hâter la tenue de l'audience. La Cour suprême du Canada a indiqué qu'« il faut se garder de statuer sur des litiges constitutionnels en l'absence d'un dossier factuel adéquat » : Colombie‑Britannique (Procureur général) c. Christie, 2007 CSC 21, [2007] 1 R.C.S. 873, au paragraphe 28. En l'espèce, compte tenu des arguments fondés sur la Charte indubitablement complexes qui pourraient être invoqués, je ne crois pas qu'il soit possible de produire un dossier factuel (et juridique) adéquat dans un délai de six jours. La demanderesse pourrait subir un préjudice si sa demande, qui soulève des questions d'importance considérable, devait faire l'objet d'une décision rendue rapidement sur la foi d'un dossier insuffisant.

 

[17]           Je crois de plus que le fait d'accélérer la tenue de l'audience porterait atteinte à l'intérêt du public. Dans l'arrêt RJR‑MacDonald Inc. c. Canada, [1994] 1 R.C.S. 311 (RJR‑MacDonald), la Cour suprême a déclaré à l'unanimité, à la page 344, que dans une procédure interlocutoire relevant de la Charte, l'intérêt du public pouvait constituer un motif pour accorder ou refuser le redressement demandé. En l'espèce, la demanderesse prie la Cour de lui accorder la tenue d'une audience accélérée afin d'entendre et de trancher, en moins d'une semaine, l'importante question des droits électoraux garantis par l'article 3 de la Charte, ainsi que d'autres questions délicates concernant la Charte, lesquelles concernent notamment la liberté d'expression et la liberté de la presse. Je ne peux conclure qu'il est dans l'intérêt du public de rendre une décision aussi rapidement sur des questions aussi importantes.

 

[18]           Troisièmement, la demande comporte un vice de forme. La demanderesse est justifiée de soutenir qu'en vertu de l'alinéa 303(1)a) des Règles des Cours fédérales, il n'est pas nécessaire de désigner le CRTC à titre de défendeur dans la présente demande. Le procureur général du Canada aurait cependant dû l'être, car, après tout, comme les intimées l'affirment, l'article premier oblige à l'État de justifier le non‑respect de la Charte. Il n'appartient pas au consortium des diffuseurs de soutenir que le bulletin du CRTC constitue une limite raisonnable prescrite par une règle de droit et dont la justification peut se démontrer dans le cadre d'une société libre et démocratique. Il revient à l'État de faire valoir cet argument.

 

[19]           Ainsi, en dépit de l'absence apparente d'intérêt du ministère de la Justice dans la présente affaire, le procureur général du Canada devrait être désigné à titre de défendeur et l'occasion devrait lui être fournie de produire des éléments de preuve et de présenter des arguments. Le fait que le procureur général ne soit pas désigné à titre de défendeur constitue un autre facteur qui milite en faveur du rejet de la requête.

 

[20]           Quatrièmement, la demande de mandamus se heurte à des obstacles juridiques majeurs. Règle générale, le juge saisi de la requête ne devrait pas procéder à un examen approfondi du bien‑fondé de l'affaire : RJR‑MacDonald Inc., à la page 338. Il existe cependant une exception à cette règle générale lorsque « le résultat de la demande interlocutoire équivaudra en fait au règlement final de l'action » (ibid.).

 

[21]           Cette exception s'applique en partie en l'espèce. La demanderesse indique clairement dans son avis de demande qu'elle sollicite une ordonnance de mandamus, à l'encontre soit du CRTC soit des défenderesses, leur enjoignant de l'inclure dans le débat des chefs pour les élections fédérales de 2011. Dans les deux cas, si aucune décision concernant sa demande n'est rendue avant le 12 avril 2011, la demande deviendra probablement théorique. Évidemment, notre Cour jouit du pouvoir discrétionnaire d'entendre une demande même si elle est devenue théorique : Borowski c. Canada (Procureur général), [1989] 1 R.C.S. 342. Il n'en demeure pas moins que la Cour suprême a déclaré dans l'arrêt RJR‑MacDonald Inc. que le juge saisi d'une requête doit examiner le fond de l'affaire « si le droit que le requérant cherche à protéger est un droit qui ne peut être exercé qu'immédiatement ou pas du tout » : à la page 338. Ce raisonnement s'applique en l'espèce parce que si l'instance n'est pas accélérée, la demanderesse ne pourra pas participer aux débats de 2011.

 

[22]           Je devrais souligner que, lors de l'audition de la requête, les avocats de la demanderesse ont insisté sur le fait que le choix du recours exercé par la demanderesse n'avait peut‑être pas été précis, compte tenu de l'empressement avec lequel la demande avait été présentée. Suivant mon interprétation, cette déclaration signifie que la demanderesse pourrait être disposée à faire valoir les aspects moins urgents de sa demande, notamment son argument voulant que le bulletin porte atteinte à ses droits garantis par l'article 3 de la Charte. Ce volet de sa demande ne deviendra pas théorique à la suite de la présente décision.

 

[23]           Il n'en demeure pas moins qu'en ce qui a trait aux débats des chefs de 2011, le résultat de la présente requête interlocutoire équivaut à une décision définitive sur la demande. Selon l'arrêt RJR‑MacDonald Inc., je devrais examiner le bien‑fondé de la demande.

 

[24]           Fait intéressant, dans l'arrêt RJR‑MacDonald Inc., la Cour cite le jugement Trieger c. Canadian Broadcasting Corp. (1988), 66 R.J.O. (2e) 273, 54 D.L.R. (4th) 143 (H.C. Ont.) (Trieger), pour donner l'exemple d'une situation où le juge des requêtes devrait examiner le fond de la demande ou de l'action dont il est saisi. La décision Trieger concerne une demande d'injonction ou de mandamus présentée en 1988 par le chef du Parti vert enjoignant aux radiodiffuseurs de l'inclure dans le débat des chefs de 1988. Même si la situation de M. Trieger et celle de la demanderesse ne sont pas identiques, elles présentent des analogies.

 

[25]           Lorsqu'il s'est prononcé sur la requête dont il était saisi, le juge Campbell, de la Haute Cour de justice de l'Ontario, a exprimé des doutes sérieux quant aux chances de succès de la demande d'injonction présentée par M. Trieger et, par conséquent, il a rejeté l'ordonnance provisoire sollicitée. Je tiens à mettre en évidence plus particulièrement les remarques du juge Campbell au sujet des chances de succès de la demande d'injonction de M. Trieger, aux pages 281 à 283 (R.J.O.) :

[TRADUCTION]

 

Les requérants soutiennent que la politique de radiodiffusion de même que la non‑application de celle‑ci viole leur liberté d'expression. Il ne ressort nullement du dossier dont je dispose que l'exercice de leur liberté d'expression exige que la Cour force le radiodiffuseur à communiquer leur point de vue au public, ni que le fait de ne pas recevoir, de la part du radiodiffuseur, l'attention à laquelle ce groupe estime, en toute bonne foi, avoir droit porterait atteinte au droit de vote de quelque citoyen. Le prononcé des ordonnances demandées ne favoriserait pas le caractère libre et public du débat politique. Il porterait atteinte au débat libre et public et au débat politique en imposant une certaine forme d'échanges à des participants réticents.

 

[...]

 

[...] En l'espèce, les requérants, dans l'exercice de leurs propres droits constitutionnels, cherchent à entraver le droit du public et des autres chefs politiques de tenir librement des débats sans aucune entrave. Les requérants cherchent à compromettre le droit du public d'entendre le débat à la date prévue et à entraver l'exercice du droit des chefs invités de déterminer avec quelles personnes ils souhaitent débattre ainsi que le moment où ils ont choisi de le faire. Le prononcé de l'ordonnance sollicitée porterait atteinte à la liberté de tenir des débats politiques au pays, nuirait à la tenue des débats dont la date a été librement arrêtée, et qui auront lieu lundi et mardi prochains, et porterait atteinte au droit constitutionnel des médias de déterminer ce qui est digne d'intérêt sans que cette décision ne leur soit imposée par un tribunal.

 

Je n'en dirai pas plus sur le bien‑fondé des arguments d'ordre constitutionnel invoqués par les requérants. Je suis d'avis que ceux‑ci doivent, au procès, surmonter des obstacles juridiques considérables. Au chapitre de la liberté d'expression, le droit d'une personne de s'exprimer n'emporte pas nécessairement celui d'obliger une autre personne à l'écouter ou à transmettre son message au public. Cette mise au point a été faite par le juge en chef Thurlow, de la Cour fédérale, dans New Brunswick Broadcasting Co., Ltd. c. CRTC, [1984] 2 C.F. 410 (C.A.F.) [citation omise]

 

[...]

 

Le doute qui entoure ces questions est assez important pour nécessiter la tenue d'un procès complet en vue de déterminer si le droit à la liberté d'expression entraîne, dans les circonstances de l'espèce, le droit de contraindre les médias à transmettre au public le message de tout un chacun.

 

Il convient de trancher cette question au procès, et non lors d'une requête sommaire présentée avec un court préavis. Il suffit de dire que quelle que soit la décision qui sera rendue sur le fond par un tribunal dans la présente affaire, il est loin d'être clair que les requérants disposent du droit constitutionnel d'imposer ce que bon leur semble aux radiodiffuseurs.

 

Le raisonnement qui précède vaut aussi à l'égard des arguments invoqués par les requérants et qui sont fondés sur la liberté d'association et le droit de vote. Alors que les requérants invoquent ces libertés, l'ordonnance sollicitée modifierait considérablement la liberté d'association dont jouissent ceux à qui un débat serait imposé et porterait atteinte à cette liberté. Cela porterait subsidiairement atteinte au droit des électeurs d'entendre et de voir un débat à la date prévue, qui serait probablement d'un grand intérêt public. Il convient également de souligner les atteintes aux droits et libertés des radiodiffuseurs garantis par la Charte.

 

[...]

 

En conclusion, je doute assez sérieusement du fondement juridique, factuel et constitutionnel de la requête pour estimer qu'il n'existe probablement pas en droit de question sérieuse à trancher, au sens d'avoir suffisamment d'importance pour compromettre le droit des intimées à un procès, pour porter atteinte à leurs droits constitutionnels, et possiblement aux droits constitutionnels de tierces parties. Bien que les questions de politique publique soient des questions importantes, les requérants n'ont pas étayé le fondement juridique de leur requête de façon suffisante pour justifier qu'ils obtiennent la réparation demandée sans la tenue d'un procès, et, de fait, sans que les intimées n'aient eu l'occasion de répondre à la requête présentée contre eux.

 

[26]           À mon avis, les propos du juge Campbell se révèlent tout à fait pertinents pour l'affaire qui nous occupe.

 

[27]           En plus des observations qui précèdent, j'ajouterai que la Cour a récemment confirmé les conditions qui doivent être remplies pour la délivrance d'un bref de mandamus, au paragraphe 32 de l'arrêt Procureur général du Canada c. Arsenault, 2009 CAF 300 (Arsenault), conditions qui avaient été confirmées par la Cour suprême dans l'arrêt Apotex Inc. c. Canada (Procureur général), [1994] 3 R.C.S. 1100. Ces conditions sont assez strictes. En ce qui a trait à la demande d'ordonnance de mandamus présentée par la demanderesse en vue d'enjoindre au CRTC de publier des lignes directrices ayant un contenu précis, je souligne que l'arrêt Arsenault nous enseigne qu'« un mandamus ne peut être accordé pour orienter l'exercice d'un “pouvoir discrétionnaire limité” dans un sens donné » (au paragraphe 32). En ce qui a trait à la demande d'ordonnance de mandamus présentée par la demanderesse en vue d'enjoindre aux radiodiffuseurs de lui permettre de participer aux débats, je souligne que l'arrêt Arsenault exige l'existence d'une « obligation légale d'agir à caractère public » (ibid.). Compte tenu de ces conditions, j'ai de sérieux doutes quant à la possibilité pour la demanderesse d'obtenir la réparation demandée.

 

[28]           Pour tous ces motifs, j'ai rejeté la requête présentée par la demanderesse en vue d'obtenir une instruction accélérée de sa demande.

 

 

« M. Nadon »

j.c.a.

 


COUR D'APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    A‑151‑11

 

INTITULÉ :                                                  ELIZABETH MAY c. RADIO‑CANADA/CBC et al.

 

LIEU DE L'AUDIENCE :                          Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L'AUDIENCE :                         Le 5 avril 2011

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :             Le juge Nadon

 

DATE DES MOTIFS :                                 Le 8 avril 2011

 

 

COMPARUTIONS :

 

Peter Rosenthal

Reni Chang

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Philip Tunley

POUR LES DÉFENDERESSES

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Roach, Schwartz & Associates

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Stockwood LLP

Avocats

Toronto (Ontario)

POUR LES DÉFENDERESSES

 

 

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