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Cour d’appel fédérale

 

Federal Court of Appeal

Date : 20110706

Dossier : A-285-10

Référence : 2011 CAF 221

 

CORAM :      LE JUGE NADON

                        LE JUGE EVANS

                        LA JUGE LAYDEN-STEVENSON

 

Entre :

LA BANQUE TORONTO-DOMINION

appelante

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

 

 

 

Audience tenue à Toronto (Ontario), le 16 juin 2011

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 6 juillet 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                  LE JUGE EVANS

Y ONT SOUSCRIT :                                                             LE JUGE NADON

                                                                                                LA JUGE LAYDEN-STEVENSON

 

 

 

 


Cour d’appel fédérale

 

Federal Court of Appeal

Date : 20110706

Dossier : A-285-10

Référence : 2011 CAF 221

 

CORAM :      LE JUGE NADON

                        LE JUGE EVANS

                        LA JUGE LAYDEN-STEVENSON

 

Entre :

LA BANQUE TORONTO-DOMINION

appelante

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

 

MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE EVANS

Introduction

[1]               La Banque Toronto-Dominion (TD) interjette appel d’une décision (2010 CCI 275) du juge Litttle de la Cour canadienne de l’impôt (le juge) rejetant l’appel qu’elle avait formé contre une nouvelle cotisation fiscale établie à l’égard de l’année d’imposition 1989. Le contentieux porte sur une perte en capital nette de plus de 48 millions de dollars réalisée lors de la disposition d’actions détenues par TD dans Oxford Holdings Ltd., dont le ministre du Revenu national a refusé la déduction. Pour éviter d’inutiles complexités, Oxford Holdings Ltd. et la personne morale qui l’a précédée seront collectivement appelées Oxford.

[2]               Le juge a statué que l’ancien paragraphe 55(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. 1985 (5e suppl.), ch. 1 (la Loi), s’appliquait à la disposition, de sorte que TD ne pouvait déduire la perte parce que les circonstances dans lesquelles elle s’est produite « permettent de croire raisonnablement que le contribuable a disposé d’un bien de façon à artificiellement ou indûment [...] occasionner une perte résultant de la disposition ».

 

[3]               Le paragraphe 55(1) a été abrogé par le paragraphe 33(1) des L.C. 1988, ch. 55, le 13 septembre 1988. Une disposition transitoire, le paragraphe 33(4)a), énonçait toutefois que le paragraphe 55(1) continuait de s’appliquer à une opération conclue entre la date de l’abrogation et la fin de l’année, si cette opération faisait partie d’une « série d’opérations » ayant commencé avant le 13 septembre 1988 et s’étant terminée au plus tard le 31 décembre 1988. TD a disposé de ses actions dans Oxford le 1er décembre 1988, pendant la période transitoire. En conséquence, le paragraphe 55(1) s’appliquerait à la disposition des actions uniquement si celle‑ci s’inscrivait dans une « série d’opérations » ayant commencé avant le 13 septembre.

 

[4]               Le juge a statué que les mots « série d’opérations » employés dans la disposition transitoire n’ont pas le sens de série prédéterminée d’opérations, issu de la common law, qu’ils ont dans les autres dispositions anti‑évitement de la Loi, notamment l’article 245 énonçant la règle générale anti‑évitement (RGAÉ), lui aussi été édicté par L.C. 1988, ch. 55. Il a considéré que le mot « série », dans la disposition transitoire, était employé dans son sens ordinaire, de sorte qu’il n’était pas nécessaire que la disposition des actions réalisée par TD fasse partie d’une série prédéterminée d’opérations pour que le paragraphe 55(1) lui soit applicable.

 

[5]               Le juge a conclu que la disposition s’inscrivait dans une série d’opérations au sens ordinaire du mot « série ». Les autres opérations de la série étaient celles qui étaient décrites dans une politique en matière de distribution de dividendes établie en 1982, que TD et les autres actionnaires d’Oxford avaient acceptée : le versement de dividendes par Oxford, la création d’actions de catégories D et E et le réinvestissement dans Oxford de la majeure partie des dividendes au moyen de l’acquisition de ces actions. En grande partie parce qu’il estimait que le prix des actions de catégorie E était gonflé, le juge a considéré que la perte afférente à la disposition était artificielle et qu’en conséquence le paragraphe 55(1) empêchait TD de la déduire.

 

[6]               L’appel soulève trois questions de fond. Premièrement, le juge a‑t‑il commis une erreur de droit en considérant que les mots « série d’opérations » de la disposition transitoire n’exigeaient pas que les opérations aient été prédéterminées? Deuxièmement, s’il y a eu erreur de droit, la « série d’opérations » se terminant par la disposition par TD de ses actions dans Oxford était‑elle prédéterminée? Troisièmement, si le paragraphe 55(1) ne s’applique pas, le paragraphe 112(3), établissant la règle de la minimisation des pertes, a-t-il pour effet de réduire la perte déductible afférente à la disposition des actions de catégorie E du montant des dividendes reçus par TD à l’égard de ses autres actions dans Oxford?

 

[7]               TD soulève également un point d’ordre procédural. Elle soutient qu’il y a lieu d’accueillir l’appel parce que le juge a manqué à l’obligation d’équité procédurale en permettant au ministre de soumettre, après l’audition de l’appel, des observations écrites dans lesquelles il invoquait à l’appui de la nouvelle cotisation des motifs qui n’avaient pas été présentés au cours de l’audition ou qui contredisaient la position jusqu’alors défendue par la Couronne devant la Cour de l’impôt.

 

[8]               Je suis d’avis qu’il faut que la « série d’opérations » soit prédéterminée pour que la disposition transitoire s’applique, et il appert des faits et témoignages non contestés qui ont été présentés à la Cour de l’impôt que la disposition des actions n’était pas prédéterminée au sens où l’entend la jurisprudence. Je souscris par contre à la conclusion du juge selon laquelle le paragraphe 112(3) est inapplicable. Cette disposition n’empêche le ministre de réduire le montant de la perte afférente à la disposition d’actions déduite par le contribuable du montant des dividendes reçus par celui‑ci que lorsque les actions ayant donné lieu au versement des dividendes sont de la même catégorie que les actions dont il a été disposé.

 

[9]               Enfin, puisque TD a eu toute possibilité de répondre aux observations écrites faites par le ministre après la fin de l’audition, la décision du juge d’accepter ces observations ne procédait pas d’un exercice de son pouvoir discrétionnaire contrevenant à l’équité procédurale.

 

[10]           Par conséquent, j’accueillerais l’appel de TD.

 

Les faits

[11]           L’appel devant la Cour de l’impôt a été instruit en fonction d’un long exposé conjoint des faits, que le juge a reproduit dans ses motifs. Le bref résumé qui suit suffira pour les besoins de la présente instance.

 

[12]           Pendant de nombreuses années, TD a investi dans Oxford, une importante société immobilière florissante cotée en bourse. TD a acheté des actions privilégiées de la série A d’Oxford en 1976 et 1979, et des actions ordinaires en 1978.

 

[13]           En 1979, Donald Love, président d’Oxford et de son conseil d’administration, ainsi que des membres de sa famille ont réalisé diverses opérations, directement et par l’entremise de sociétés dont ils étaient propriétaires (collectivement le Groupe Love), afin de privatiser Oxford. TD a accepté de participer à la privatisation.

 

[14]           Après la constitution d’une société de portefeuille, l’acquisition des actions émises et en circulation d’Oxford et une fusion, la privatisation de la nouvelle personne morale a été parachevée en 1980. TD détenait alors 40 % des actions d’Oxford, dont des actions ordinaires avec droit de vote et, en raison des limites fixées par la loi au pourcentage d’actions avec droit de vote qu’une banque à charte est autorisée à détenir dans une société, des actions convertibles sans droit de vote de catégories A et B. Le Groupe Love possédait le 60 % restant des actions. Deux des cinq – et plus tard six – administrateurs étaient des employés de TD.

 

[15]           En application d’une politique de distribution de dividendes proposée par TD et conçue par Robert Teskey, un avocat en droit commercial du cabinet représentant Oxford qui siégeait également au conseil d’administration de la société, Oxford a déclaré et versé des dividendes pour toutes ses actions, de 1982 à 1988. À titre de propriétaire de 40 % des actions d’Oxford, TD a reçu des dividendes libres d’impôt totalisant 79,4 millions de dollars pendant cette période.

 

[16]           Afin de maintenir le capital‑actions d’Oxford, TD et le Groupe Love ont réinvesti la majeure partie des dividendes versés en souscrivant des actions des catégories d’actions sans droit de vote nouvellement créées : les actions des catégories E pour TD et D pour le Groupe Love. Le conseil d’administration d’Oxford a établi le prix de souscription de ces actions à 300 $ l’action. Contrairement aux autres actions d’Oxford, celles‑ci avaient une valeur nominale. Comme cette valeur nominale était de 1 $ seulement, le prix de souscription a permis à Oxford de se constituer un substantiel compte de surplus d’apport sur lequel elle pouvait s’acquitter de ses obligations. TD a réinvesti en actions de catégorie E plus de 90 % des dividendes qu’il a reçus entre 1982 et 1988.

 

[17]           Les dividendes déclarés en décembre 1985 et mai 1988 ont été pris sur le compte de surplus d’apport d’Oxford; les dividendes déclarés aux sept autres dates entre juillet 1982 et mai 1985 ont été pris sur les bénéfices d’exploitation. Suivant le choix d’Oxford, les dividendes se rapportant aux actions ordinaires et aux actions de catégorie D étaient des dividendes en capital, de même que la totalité des dividendes versés en mai 1985.

 

[18]           Lors de la disposition réalisée le 1er décembre 1988, toutes les actions de TD, sauf les actions de catégorie E, ont été rachetées au prix unitaire de 46,809 $, pour un prix global de plus de 30,4 millions de dollars en espèces. Le Groupe Love a acquis les actions de catégorie E détenues par TD au même prix unitaire de 46,809 $, pour un prix global de plus de 11,3 millions de dollars en espèces. Après la disposition, TD a acquis des actions d’une société affiliée d’Oxford pour une contrepartie de près de 38,5 millions de dollars en espèces.

 

Questions en litige et analyse

[19]           Il n’est pas nécessaire de procéder à une analyse relative à la norme de contrôle applicable à l’égard de la question d’équité procédurale. La seule question qui se pose est celle de savoir si, dans les circonstances, la décision du juge d’autoriser la Couronne à déposer un mémoire des faits et du droit après l’audience constituait un exercice inéquitable de son pouvoir discrétionnaire parce qu’elle privait TD d’une possibilité effective de présenter ses arguments et de répondre à ceux qui étaient invoqués contre elle.

 

[20]           La norme de révision applicable aux questions de droit, y compris les questions d’interprétation des lois, est celle de la décision correcte. La présente espèce soulève deux questions de droit concernant respectivement le sens des mots « série d’opérations » dans la disposition transitoire et l’applicabilité du paragraphe 112(3) de la Loi à une déduction pour perte afférente à la disposition d’actions autres que celles qui ont donné lieu au versement de dividendes. 

 

 

Question 1 :    Le juge a-t-il manqué à l’obligation d’équité lorsqu’il a permis au ministre de déposer un mémoire des faits et du droit après la fin de l’audience?

 

[21]           Comme cela se produit souvent devant la Cour de l’impôt, les parties n’ont pas déposé de mémoire des faits et du droit avant le début de l’instruction de l’appel. Au quatrième des cinq jours d’audience prévus devant la Cour de l’impôt, toutefois, TD a déposé de longues observations appuyées de pièces, à laquelle la Couronne a estimé prudent de répondre. Deux jours ouvrables après la fin de l’audience, mais avant que le juge ne rende jugement, les avocats de la Couronne ont donc écrit à la Cour pour obtenir la permission de soumettre un mémoire des faits et du droit en réponse aux observations écrites de TD, laquelle s’est opposée à cette demande.

 

[22]           Dans les motifs de son ordonnance faisant droit à la demande de la Couronne, en date du 2 novembre 2009 (2009 CCI 564), le juge a signalé que, sous réserve de quelques restrictions qui ne s’appliquaient pas en l’espèce, le paragraphe 152(9) de la Loi permet au ministre d’avancer un nouvel argument à l’appui d’une cotisation après l’expiration de la « période normale de nouvelle cotisation ».

 

152. (9) Le ministre peut avancer un nouvel argument à l’appui d’une cotisation après l’expiration de la période normale de nouvelle cotisation, sauf si, sur appel interjeté en vertu de la présente loi :

a) d’une part, il existe des éléments de

preuve que le contribuable n’est plus en mesure de produire sans l’autorisation du tribunal;

b) d’autre part, il ne convient pas que le tribunal ordonne la production des éléments de preuve dans les circonstances.

 

152. (9) The Minister may advance an alternative argument in support of an assessment at any time after the normal reassessment period unless, on an appeal under this Act

 

(a) there is relevant evidence that the taxpayer is no longer able to adduce without the leave of the court; and

 

(b) it is not appropriate in the circumstances for the court to order that the evidence be adduced.

 

 

[23]           Le juge a également fait mention de la règle 138 des Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure générale), DORS/90-688a, laquelle est ainsi conçue :

138. (1) Le juge peut rouvrir l’audience avant que le jugement n’ait été prononcé aux fins et aux conditions qui sont appropriées.

 

138. (1) The judge may reopen a hearing before judgment has been pronounced for such purposes and upon such terms as are just.

 

[24]           Le juge ne savait pas alors quelles observations la Couronne voulait présenter. Il a néanmoins exercé le large pouvoir discrétionnaire que lui confère la règle 138(1) et fait droit à la demande en raison de la complexité de l’affaire. Il a permis à TD de déposer une réponse écrite dans les 15 jours de la date de réception des observations écrites et il a ordonné à la Couronne de verser 10 000 $ de dépens à TD.

 

[25]           Le principal argument avancé par la Couronne dans ses observations écrites était que le paragraphe 112(3) s’appliquait à la disposition des actions de la catégorie E et réduisait à zéro la perte sur disposition. Auparavant, la Couronne avait invoqué cette disposition simplement pour donner plus de force à son argument fondé sur le paragraphe 55(1), non pour justifier de façon indépendante la nouvelle cotisation.

 

[26]           La Couronne a également soutenu que pour qu’une opération fasse partie d’une série d’opérations au sens de l’alinéa 33(4)a) la disposition transitoire régissant l’application du paragraphe 55(1) aux faits de la présente espèce la prédétermination n’était pas nécessaire. La Cour de l’impôt paraît avoir instruit l’appel en tenant pour acquis que la prédétermination était nécessaire pour que le paragraphe 55(1) s’applique à la disposition des actions de TD en tant que partie d’une « série d’opérations ». Toutefois, même si la Couronne avait déjà reconnu qu’il devait y avoir prédétermination, elle n’était pas liée par une concession portant sur une question de droit.

 

[27]           Devant notre Cour, TD a soutenu que le juge avait manqué à l’équité en permettant à la Couronne d’avancer des arguments différents de ceux qu’elle avait invoqués devant la Cour de l’impôt, tant lors des interrogatoires préalables que pendant l’audience elle‑même.

 

[28]           Il ressort clairement du paragraphe 152(9) de la Loi que le pouvoir discrétionnaire du ministre d’avancer un nouvel argument à l’appui d’une cotisation est large. Le pouvoir discrétionnaire d’un juge de la Cour de l’impôt de rouvrir l’instruction avant le prononcé du jugement en application de la règle 138 des Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure générale) l’est tout autant. Selon moi, en exerçant son pouvoir discrétionnaire de permettre à la Couronne de présenter des observations écrites une fois l’audience terminée, le juge n’a pas privé TD de son droit à l’équité procédurale.

 

[29]           Le juge a permis à TD de déposer une réponse écrite aux observations de la Couronne, laquelle ne nécessitait pas d’autre preuve. Les avocats de TD n’ont pas demandé d’autres interrogatoires préalables lorsqu’ils ont reçu signification des observations écrites de la Couronne. La décision du juge n’a donc pas privé TD de la possibilité de participer à l’instance devant la Cour de l’impôt. TD a pu présenter ses propres arguments devant la cour et répondre à ceux de la Couronne. Dans ces circonstances, la question de savoir si la Couronne a défendu, dans ses observations écrites, une position juridique différente de celle qu’elle avait formulée plus tôt au cours de l’instance est sans rapport avec l’équité de la procédure.

 

[30]           Il est cependant aisé de comprendre l’irritation des avocats de TD lorsqu’ils ont reçu avis de la demande de la Couronne, en particulier parce que la Couronne avait déjà, entre la nouvelle cotisation et l’instruction de l’appel, modifié les motifs fondant son action. Toutefois, en adjugeant à TD des dépens substantiels, le juge se trouvait à reconnaître de façon appropriée les inconvénients et le surcroît de dépenses que la conduite de la Couronne lui occasionnait.

 

 

Question 2 :    Les mots « série d’opérations » de la disposition transitoire, l’alinéa 33(4)a), exigent‑ils que les opérations soient prédéterminées?

 

(i) Régime législatif

[31]           L’ancien paragraphe 55(1) de la Loi était ainsi conçu : 

55. (1) Aux fins de la présente sous‑section, lorsque les circonstances dans lesquelles ont été effectuées une ou plusieurs opérations de vente ou d’échange, ou autres transactions de quelque nature que ce soit, permettent de croire raisonnablement que le contribuable a disposé d’un bien de façon à artificiellement ou indûment

[…]

b) occasionner une perte résultant de la disposition, ou

c) augmenter le montant de sa perte résultant de la disposition,

le gain ou la perte du contribuable, selon le cas, résultant de la disposition du bien, est calculée comme si une telle réduction, perte ou augmentation, selon le cas, ne s’était pas produite.

55. (1) For the purposes of this subdivision, where the result of one or more sales, exchanges, declarations of trust, or other transactions of any kind whatever is that a taxpayer has disposed of property under circumstances such that he may reasonably be considered to have artificially or unduly

(b) created a loss from the disposition, or

(c) increased the amount of his loss from the disposition,

the taxpayer’s gain or loss, as the case may be, from the disposition of the property shall be computed as if such reduction, creation or increase, as the case may be, had not occurred.

 

[32]           Le paragraphe 55(1) a été abrogé par le paragraphe 33(1) de L.C. 1988, ch. 55, et il a cessé de s’appliquer à l’égard de la plupart des opérations postérieures au 13 septembre 1988, date de la sanction royale. Toutefois, par effet de l’alinéa 33(4)a), le paragraphe 55(1) a continué de s’appliquer jusqu’à la fin de l’année aux opérations postérieures au 13 septembre qui faisaient partie d’une série d’opérations ayant débuté avant cette date.

33. (4) Le paragraphe (1) s’applique aux opérations conclues à la date de sanction de la présente loi ou après cette date, à l’exclusion :

a) de celles qui font partie d’une série d’opérations – abstraction faite du paragraphe 248(10) de la même loi – commençant avant cette date et terminée avant 1989; …

33. (4) Subsection (1) is applicable with respect to transactions entered into on or after the day on which this Act is assented to other than

(a) transactions that are part of a series of transactions, determined without reference to subsection 248(10) of the said Act, commencing before the day on which this Act is assented to and completed before 1989; …

 

[33]           Bien que l’article 33 n’ait pas défini « série d’opérations », l’alinéa 33(4)a) portait que l’appartenance à une série d’opérations s’apprécie sans égard au paragraphe 248(10) de la Loi, lequel a été édicté par L.C. 1986, ch. 55. Le paragraphe 248(10) élargit le sens qu’ont les mots « série d’opérations » en common law, c’est‑à‑dire celui d’une série d’opérations prédéterminées, en portant que la série est réputée inclure les opérations liées terminées en vue de réaliser la série, même si elles ne sont pas elles‑mêmes prédéterminées : Canada Trustco Mortgage Co. c. Canada, 2005 CSC 54, [2005] 2 R.C.S. 601, par. 25 et 26 (Canada Trustco).

248. (10) Pour l’application de la présente loi, une série d’opérations ou d’événements, lorsqu’il y est renvoyé, est réputée comprendre les opérations et événements liés terminés en vue de réaliser la série.

248. (10) For the purposes of this Act, where there is a reference to a series of transactions or events, the series shall be deemed to include any related transactions or events completed in contemplation of the series.

 

(ii) Application du régime législatif aux faits

[34]           À moins que la disposition par TD de ses actions dans Oxford n’ait fait partie d’une « série d’opérations » ayant débuté avant le 13 septembre 1988, le paragraphe 55(1) ne s’y applique pas parce qu’elle a eu lieu le 1er décembre 1988, après l’entrée en vigueur de l’abrogation de cette disposition. Toutefois, si la disposition s’inscrivait dans une « série d’opérations », la série comprendrait les opérations antérieures au 13 septembre : le paiement de dividendes par Oxford, la création des actions de catégorie E et le réinvestissement par TD de la plupart des dividendes reçus par l’acquisition des actions de catégorie E d’Oxford.

 

(iii) Décision de la Cour de l’impôt

[35]           Dans les observations écrites qu’elle a présentées à la Cour, la Couronne a avancé l’argument que, bien que l’interprétation jurisprudentielle des mots « série d’opérations » figurant à l’article 245 et dans d’autres dispositions de la Loi leur confère le sens de série « prédéterminée », c’est dans leur sens ordinaire qu’ils doivent s’entendre dans la disposition transitoire.

 

[36]           Après avoir brièvement exposé les arguments des parties sur ce point, le juge a indiqué (au par. 33) :

J’ai conclu qu’il faut interpréter le mot « série » selon son sens ordinaire; il n’est donc pas nécessaire de décider s’il existait un élément de détermination d’avance.

 

Ayant sans doute estimé que les diverses opérations se rapportant aux actions de TD dans Oxford constituaient une « série » au sens « ordinaire » du terme, le juge a conclu que la perte afférente à la disposition de décembre 1988 déduite par TD avait été « indûment » occasionnée, en grande partie parce que, selon lui, le prix de 300 $ l’action de catégorie E était « gonflé » (par. 41 et 42). Il a donc statué que le paragraphe 55(1) permettait au ministre de refuser la perte déduite par TD à l’égard de la disposition des actions de catégorie E, et il a maintenu la cotisation.

 

(iv) Interprétation de la disposition transitoire

[37]           J’estime, en toute déférence, que les mots « série d’opérations », à l’alinéa 33(4)a) de la disposition transitoire, ont le même sens que dans les dispositions anti‑évitement de la Loi, y compris l’article 245. Par conséquent, pour que le paragraphe 55(1) s’applique à la disposition des actions de TD dans Oxford survenue le 1er décembre 1988, celle‑ci doit faire partie d’une série prédéterminée d’opérations ayant commencé avant le 13 septembre 1988.

 

[38]           Je pars de la présomption générale applicable en matière d’interprétation des lois selon laquelle le législateur est réputé avoir voulu qu’un mot ou une phrase aient le même sens dans tout le texte de loi où ils sont employés et que les lois portant sur un même sujet sont réputées s’appliquer de façon harmonieuse : Ruth Sullivan, Sullivan on the Construction of Statutes, 5th ed. (Markham, Ontario : LexisNexis Canada Inc., 2008), 215-23, 416-19. J’ajouterais que, contrairement au juge, je considère que la question porte non pas sur le sens du simple mot « série », mais sur celui de l’expression « série d’opérations », laquelle est devenue un terme technique juridique dans le contexte des dispositions anti‑évitement.

 

[39]           Cette expression, toutefois, est employée dans une disposition transitoire. Mon collègue le juge Noël, alors juge à la Section de première instance de la Cour fédérale, a examiné l’interprétation de telles disposions dans Canada c. Trade Investments Shopping Centre Ltd. (1993), 93 D.T.C. 5382 (C.F.), confirmé par (1996), 96 D.T.C. 6570 (C.A.F.) (Trade Investments). Il a écrit (à la p. 5387) :

… lorsqu’une question d’interprétation se soulève quant au champ d’application d’une mesure transitoire, elle doit trouver sa réponse à la lumière de la disposition de droit substantif qu’elle accompagne et de la situation précise à laquelle le législateur voulait apporter un palliatif en la mettant en vigueur.

 

[40]           En confirmant la décision rendue dans Trade Investments, le juge Décary, rendant jugement pour la Cour, a qualifié d’« impeccable » le raisonnement suivi par le juge Noël dans l’interprétation de la disposition transitoire (p. 6571). Voir également l’arrêt Medovarski c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CSC 51, [2005] 2 R.C.S. 539, aux paragraphes 14 à 17, approuvant lui aussi le raisonnement. 

 

[41]           Appliquant ce raisonnement à l’espèce, les avocats de la Couronne ont soutenu que le contexte substantiel de la Loi indique que les mots « série d’opérations », au paragraphe 33(4)a), ne s’entendaient pas d’une série prédéterminée.

 

[42]           Premièrement, le paragraphe 55(1), dont la disposition transitoire prolonge l’application, ne renferme pas les mots « série d’opérations ». Il avait pour objet d’empêcher un contribuable de déduire une perte sur disposition lorsqu’il existait des motifs raisonnables de penser que la perte avait été indûment ou artificiellement créée ou augmentée. Par contre, la DGAÉ, dont l’introduction a coïncidé avec l’abrogation du paragraphe 55(1), est une disposition plus complexe, conçue pour rééquilibrer deux objets d’intérêt public, à savoir la prévention de l’évitement fiscal abusif et l’assurance d’une certaine prévisibilité pour les contribuables. Il ne faudrait pas présumer que le législateur a voulu limiter la portée du paragraphe 55(1) pendant la période transitoire en transplantant le sens qu’ont les mots « série d’opérations » en common law dans le régime très différent établi par le paragraphe 55(1).

 

[43]           Deuxièmement, la disposition transitoire n’est qu’un mécanisme de « classement » servant à départager les opérations selon qu’elles relèvent de l’ancien paragraphe 55(1) ou du nouvel article 245. Une disposition réalisée entre le 13 septembre 1988 et la fin de l’année est donc régie par l’un ou l’autre des régimes. À l’opposé, l’argument de TD suppose, selon les avocats de la Couronne, l’existence d’un troisième régime, hybride, ne s’appliquant que pendant la période de trois mois et demi entre le 13 septembre et le 31 décembre 1988, un régime constitué de l’ancien paragraphe 55(1) complété par l’exigence d’une série prédéterminée d’opérations, mais sans l’élargissement de sens précisé au paragraphe 248(10). Il n’est pas plausible, à son avis, que le législateur ait eu cette intention.

 

[44]           Toute solide que soit cette argumentation, je ne saurais la retenir.

 

[45]           D’abord, suivant l’alinéa 33(4)a) l’appartenance d’une opération postérieure au 13 septembre à une série d’opérations commencée avant cette date est déterminée « abstraction faite du paragraphe 248(10) », qui est la disposition élargissant le sens de « série d’opérations » en common law pour y inclure les opérations liées terminées en vue de réaliser la série, même si elles ne sont pas elles‑mêmes prédéterminées. Si, comme le prétend la Couronne, les mots « série d’opérations », à l’alinéa 33(4)a), s’entendent simplement d’opérations consécutives et liées mais non nécessairement prédéterminées, il aurait été inutile d’énoncer que le paragraphe 248(10) ne s’applique pas : de telles opérations font déjà partie de la série suivant le sens ordinaire de « série d’opérations ».

 

[46]           Écarter l’application du paragraphe 248(10) – lequel vise à englober des opérations qui seraient autrement exclues, suivant le sens de « série d’opérations » en common law, du fait qu’elles ne sont pas prédéterminées – n’aurait de sens que s’il fallait que la série d’opérations soit prédéterminée. À mon avis, l’exclusion du paragraphe 248(10) prévue par la disposition transitoire constitue une indication positive que les mots « série d’opérations » sont employés à l’alinéa 33(4)a) suivant le sens qu’ils ont en common law.

 

[47]           Ensuite, une disposition législative ne s’applique pas, en temps normal, après son abrogation. On pourrait logiquement considérer que le paragraphe 33(4) vise à établir un équilibre entre la lutte à l’évitement et la prévisibilité pour le contribuable en appliquant le paragraphe 55(1) après la date de son abrogation aux seules dispositions faisant partie intégrante d’une manœuvre planifiée d’avance commencée avant l’abrogation. Continuer à l’appliquer à une disposition postérieure à l’abrogation faisant partie d’une série d’opérations consécutives mais non prédéterminées serait en prolonger indûment la vie après l’abrogation et tromperait les attentes des contribuables.

 

[48]           Enfin, il entre toujours une part d’arbitraire dans l’établissement de la ligne de démarcation entre la fin d’un régime législatif et le début d’un autre. Je ne partage pas l’opinion de la Couronne voulant qu’il serait absurde de penser que le législateur aurait créé un régime anti‑évitement distinct pour la période de trois mois et demi suivant l’abrogation du paragraphe 55(1).

 

 

Question 3 :    La disposition faite par TD de ses actions de catégorie E dans Oxford faisait‑elle partie d’une « série d’opérations » prédéterminées?

 

[49]           Dans OSFC Holdings Ltd. c. Canada, 2001 CAF 260, [2002] 2 C.F. 288, le juge Rothstein (alors juge de notre Cour) a donné la définition suivante des mots « série d’opérations » employés à l’alinéa 245(3)b) et au paragraphe 248(10) de la Loi, au paragraphe 24 des motifs qu’il a rédigés pour la majorité de la Cour :

Ainsi, pour qu’il y ait une série d’opérations, chaque opération dans la série doit être déterminée d’avance pour produire un résultat final. Par détermination d’avance, on veut dire que lorsque la première opération de la série est réalisée, tous les éléments essentiels de l’opération ultérieure ou des opérations ultérieures sont déterminés par les personnes qui ont la ferme intention et la capacité de les réaliser. C’est-à-dire qu’il n’existe aucune probabilité pratique que l’opération ultérieure ou les opérations ultérieures ne se réaliseront pas.

 

La Cour suprême a approuvé ce raisonnement au paragraphe 25 de Canada Trustco.

 

[50]           Parce qu’en l’espèce, le juge a statué que les mots « série d’opérations » dans la disposition transitoire n’avaient pas le même sens que dans les dispositions de fond de la Loi, il n’avait pas à déterminer si la disposition de ses actions d’Oxford par TD en 1988 faisait partie d’une série d’opérations au sens de la common law.

 

[51]           L’appréciation de l’appartenance de la disposition à une « série d’opérations » au sens de la common law est une question mixte de fait et de droit. Notre Cour peut toutefois, malgré l’absence de conclusion du juge sur cette question, tirer elle‑même les conclusions nécessaires et éviter d’imposer aux parties les dépenses et les délais qu’occasionnerait le renvoi de l’affaire devant la Cour de l’impôt : Baker Petrolite Corp. c. Canwell Enviro-Industries Ltd., 2002 CAF 158, [2003] 1 C.F. 49, par. 81-83. J’estime que la Cour est en mesure de formuler les conclusions pertinentes parce que la preuve est en grande partie documentaire et non contestée et que le témoignage n’a pas été contredit. La Cour peut trancher la question de savoir si la disposition faisait partie d’une série prédéterminée d’opérations en tirant les inférences nécessaires du dossier dont disposait la Cour de l’impôt.

 

[52]           La disposition des actions par TD doit être la transaction finale de toute série possible d’opérations assujettissant la perte sur disposition à l’application du paragraphe 55(1). Les transactions antérieures de la série aurait compris également le réinvestissement de la plus grande partie des dividendes au moyen de l’acquisition d’actions de catégorie E, l’émission des actions de catégorie E et le paiement de dividendes par Oxford.

 

[53]           Aucun élément de preuve au dossier n’établit que lorsque les premiers dividendes ont été payés, « tous les éléments essentiels » de l’éventuelle disposition des actions, tels le moment où elle aurait lieu, le prix d’achat et l’identité de l’acquéreur, étaient déterminés. Il ressort même de la preuve que TD a décidé de vendre ce qui avait constitué un investissement profitable dans Oxford peu de temps seulement avant la réalisation de la disposition. Le fait que TD ait pu au bout du compte avoir l’intention de vendre ses actions dans Oxford, comme n’importe quel autre de ses investissements, est insuffisant pour faire de la disposition de 1988 une opération prédéterminée.

 

[54]           La preuve indique aussi que chacune des autres opérations envisagées suivant la politique de distribution des dividendes, incluant potentiellement la série, poursuivait des fins commerciales indépendantes. Ainsi, des dividendes substantiels ont été versés parce que TD voulait que sa quote‑part des bénéfices d’Oxford se reflète dans ses états financiers, Oxford avait besoin que les dividendes soient réinvestis afin de maintenir son capital‑actions et les actions à valeur nominale de catégories D et E ont été créées pour accroître le compte de surplus d’apport sur lequel elle s’acquittait de ses obligations. Cette preuve n’a pas été contredite. Aucun élément de preuve n’établissait que les opérations s’inscrivaient dans un stratagème d’évitement fiscal visant à créer pour TD une perte afférente à la disposition de ses actions de catégorie E.

 

[55]           Compte tenu de la preuve dont disposait la Cour de l’impôt, je conclus que la disposition par TD de ses actions de catégorie E dans Oxford, en décembre 1988, ne faisait pas partie d’une série d’opérations au sens de la disposition transitoire et, par conséquent, qu’elle n’était pas visée par le paragraphe 55(1).

 

Question 4 :    Le paragraphe 112(3) s’applique‑t‑il à la perte afférente à la disposition des actions déduite par TD?

 

[56]           Le passage pertinent du paragraphe 112(3) de la Loi, en l’espèce, est ainsi conçu :

112. (3) Lorsqu’une corporation possède une action qui est un bien en immobilisations et reçoit un dividende imposable, un dividende en capital ou un dividende en capital d’assurance-vie à l’égard de cette action, le montant de toute perte de la corporation découlant d’opérations relatives à l’action sur laquelle le dividende a été reçu est réputé être,

[…]

 

112. (3) Where a corporation owns a share that is a capital property and receives a taxable dividend, a capital dividend or a life insurance capital dividend in respect of that share, the amount of any loss of the corporation arising from transactions with reference to the share on which the dividend was received shall, 

 

[57]           La Couronne a soutenu que, si le paragraphe 55(1) ne s’applique pas, le paragraphe 112(3) a tout de même pour effet d’empêcher TD de déduire une perte afférente à la disposition des actions de catégorie E parce qu’elle a touché des dividendes à l’égard de ses actions ordinaires et de ses actions de catégories A et B, lesquelles sont pratiquement identiques aux actions de catégorie E. La Couronne a également invoqué le paragraphe 33(2) de la Loi d’interprétation actuelle, L.R.C. 1985, ch. I‑21, à l’appui de son argument que le mot « action » au paragraphe 112(3) inclut le pluriel « actions ».  

 

[58]           Le juge de la Cour de l’impôt a écarté cet argument (au paragraphe 25) :

Selon moi, le paragraphe 112(3) ne s’applique pas de la façon préconisée par [la Couronne] étant donné que la perte créée ne peut pas être imputée à une catégorie différente d’actions, et ce, peu importe jusqu’à quel point les attributs des actions sont similaires.

 

 

[59]           Je souscris à cette conclusion. Le texte du paragraphe 112(3) pourrait difficilement être plus clair. Les dividendes doivent avoir été reçus, et toute perte correspondante doit se rapporter à la même action ou aux mêmes actions. La disposition concernait les actions de catégorie E. Il ne s’agissait pas des mêmes actions que les actions à valeur nominale ou les actions de catégories A ou B à l’égard desquelles TD avait touché des dividendes. Les attributs des différentes catégories d’actions différaient effectivement puisque les actions de catégorie E étaient des actions à valeur nominale et, contrairement aux actions ordinaires d’Oxford détenues par TD, sans droit de vote.

 

[60]           Selon la Couronne, TD n’a pu déduire une perte sur disposition que parce que la structure du capital‑actions d’Oxford avait été manipulée, et elle s’est ainsi soustraite aux principes sous‑tendant les dispositions relatives à la minimisation des pertes énoncées au paragraphe 112(3). Cet argument fait essentiellement valoir qu’il faut interpréter le paragraphe 112(3) de façon à appliquer le montant de dividendes reçus à l’égard d’actions en réduction de pertes en capital subies par suite de la disposition d’actions substantiellement similaires de la même société. Selon les avocats de la Couronne, cette interprétation correspond aux fins visées par le paragraphe 112(3) : empêcher les pertes de valeur opérées par le versement de dividendes libres d’impôt puisés dans le capital d’apport et par la création correspondante d’une perte en capital. Selon lui, le législateur n’a pu avoir l’intention de permettre aux contribuables de se soustraire à l’application du paragraphe 112(3) en créant de nouvelles catégories d’actions pratiquement identiques à celles qui ont donné lieu au versement de dividendes.

 

[61]           Je ne suis pas de cet avis. Les dispositions de lois fiscales s’interprètent, comme celles de toute autre loi, en fonction de leur texte, de leur contexte et de leur objet. Le passage suivant (au paragraphe 11) de Canada Trustco est toutefois pertinent ici :

… le caractère détaillé et précis de nombreuses dispositions fiscales a souvent incité à mettre l’accent sur l’interprétation textuelle. Lorsque le législateur précise les conditions à remplir pour obtenir un résultat donné, on peut raisonnablement supposer qu’il a voulu que le contribuable s’appuie sur ces dispositions pour obtenir le résultat qu’elles prescrivent.

 

Voir aussi Placer Dome Canada Ltd. c. Ontario (Minister of Finance), 2006 CSC 20, [2006] 1 R.C.S. 715, aux paragraphes 21-24. Selon moi, la spécificité du libellé du paragraphe 112(3) est telle que ce que la Couronne nous présente comme l’interprétation juste de la disposition constitue plus exactement une proposition de modification.

 

Conclusions

[62]           Pour ces motifs, j’accueillerais l’appel avec dépens devant notre Cour et devant les juridictions inférieures, j’annulerais le jugement de la Cour canadienne de l’impôt et, rendant le jugement qu’elle aurait dû rendre, j’accueillerais l’appel interjeté par TD contre la nouvelle cotisation établie par le ministre et je renverrais l’affaire au ministre pour qu’il établisse une nouvelle cotisation en conformité avec les présents motifs.

 

 

« John M. Evans »

j.c.a.

 

 

« Je suis d’accord.

            M. Nadon j.c.a. »

 

« Je suis d’accord.

            Carolyn Layden-Stevenson j.c.a. »

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Ghislaine Poitras, LL.L., Trad. a.

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

Dossier :                                                                A-285-10

 

APPEL D’UN JUGEMENT RENDU LE 3 JUIN 2010 PAR LE JUGE LITTLE, DE LA COUR CANADIENNE DE L’IMPÔT, DANS LE DOSSIER No 2006-2996(TI)G

 

INTITULÉ :                                                               LA BANQUE TORONTO‑DOMINION c.

                                                                                     SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                       Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                      Le 16 juin 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                    LE JUGE EVANS

 

Y ONT SOUSCRIT :                                                LE JUGE NADON

                                                                                     LA JUGE LAYDEN-STEVENSON

 

 

DATE DES MOTIFS :                                              Le 6 juillet 2011

 

 

Comparutions :

 

Al Meghji

Pooja Samtani

Pour l’appelante

 

 

Donald G. Gibson

Pascal Tétrault

POUR L’INTIMÉE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Osler, Hoskin & Harcourt s.r.l.

Toronto (Ontario)

Pour l’appelante

 

 

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

POUR L’INTIMÉE

 

 

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