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Date : 20120124

Dossier : A-239-11

Référence : 2012 CAF 26

 

CORAM :      LE JUGE NOËL

                        LA JUGE DAWSON

                        LA JUGE TRUDEL

 

ENTRE :

Michael Aaron SPIDEL

appelant

et

 

CANADA (PROCUREUR GÉNÉRAL)

intimé

 

 

 

Audience tenue à Vancouver (Colombie-Britannique), le 18 janvier 2012

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 24 janvier 2012

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                              LA JUGE DAWSON

 

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                                LE JUGE NOËL

                                                                                                                             LA JUGE TRUDEL

 



Date : 20120124

Dossier : A-239-11

Référence : 2012 CAF 26

 

CORAM :      LE JUGE NOËL

                        LA JUGE DAWSON

                        LA JUGE TRUDEL

 

ENTRE :

Michael Aaron SPIDEL

appelant

et

 

CANADA (PROCUREUR GÉNÉRAL)

intimé

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

LA JUGE DAWSON

 

[1]               La Cour est saisie de l’appel d’une décision de la Cour fédérale (2011 CF 601, [2011] A.C.F. no 804) rejetant la demande de contrôle judiciaire présentée par l’appelant en l’espèce, M. Spidel, à l’égard du rejet de son grief au troisième palier visant l’établissement de Ferndale (l’établissement).

 

[2]               Les faits pertinents sont exposés dans les motifs du juge, et ils ne sont pas contestés. À l’audition de l’appel, l’appelant a indiqué que son grief au premier palie, lequel portait sur une question qui a été réglée depuis, a [traduction] « changé de trajectoire » au deuxième palier. L’appelant a alors allégué que des modifications apportées à la politique de l’établissement sur l’utilisation autorisée de caméras, dont l’application avait commencé pendant l’examen du grief au premier palier, enfreignaient le principe des mesures « le moins restrictives possible » établi à l’alinéa 4d) de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, L.C. 1992, ch. 20. L’appelant a expliqué que c’est là [traduction] « l’objet du grief».

 

[3]               Les questions qui continuent de se poser en appel sont donc les suivantes :

 

1.         Le juge a‑t‑il conclu à tort qu’il incombait à l’appelant d’établir que les modifications touchant l’utilisation autorisée de caméras (consignées dans l’ordre permanent 764.1 et dans la description de travail du photographe des détenus) n’étaient pas « le moins restrictives possible »?

2.         Le juge a-t-il commis une erreur en radiant des passages de l’affidavit de l’appelant et des pièces jointes?

3.         Le juge a-t-il refusé à tort que l’appelant invoque un motif de contrôle judiciaire non formulé dans son avis de demande?

4.         Le juge a-t-il commis une erreur en n’appliquant pas les règles 75 et 312 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, au bénéfice de l’appelant de façon à lui permettre de modifier son avis de demande ou de compléter son dossier?

5.         Le juge a-t-il erré dans son appréciation de l’équité de la procédure appliquée à l’appelant lors de l’examen du grief au premier palier?

 

[4]               S’agissant de la première question, j’estime qu’il n’a pas été établi que le juge a commis une erreur dans l’attribution du fardeau de la preuve. L’appelant reconnaît que le directeur était habilité à apporter les modifications. La question de savoir si les mesures mises en œuvre étaient le moins restrictives possible est une question de droit ou une question mixte de fait et de droit. Il incombait à l’appelant d’établir prima facie que des mesures moins restrictives pouvaient être prises, et ce dernier n’a présenté aucun élément de preuve à cet égard.

 

[5]               L’appelant soutient aussi que l’intimé devrait justifier les modifications au moyen d’une analyse de type Oakes relative à la Charte. Toutefois, en supposant qu’une telle analyse fût requise en l’espèce, il faut quand même établir l’existence d’une violation de la Charte pour que le gouvernement soit tenu de justifier des restrictions à un droit garanti par ce texte. Or, l’appelant n’a pas démontré de telle violation.

 

[6]               Pour ce qui est de la deuxième question, il faut préciser que, dans le cadre d’un contrôle judiciaire, la Cour fédérale examine uniquement la preuve documentaire dont disposait le décideur. La présentation d’éléments de preuve supplémentaires n’est admise que dans des circonstances exceptionnelles. Le processus de grief diffère à cet égard, puisque l’auteur du grief a droit à un examen de novo à chaque palier. Je suis d’avis que l’appelant n’a pas démontré que le juge a commis une erreur dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire de radier des passages de l’affidavit de l’appelant et des pièces jointes.

 

[7]               Qui plus est, l’appelant ayant choisi de présenter son appel sur la seule base du dossier certifié du tribunal, les documents radiés par le juge ne sont pas déterminants.

 

[8]               Les troisième et quatrième questions se prêtent à un examen conjoint parce que, même si le juge avait autorisé l’appelant à modifier son avis de demande et à invoquer le principe des mesures le moins restrictive possible, il n’y avait aucun élément de preuve établissant que les mesures n’étaient pas le moins restrictives possible, sans compter que l’appelant n’a pas indiqué que de tels éléments de preuve auraient pu être présentés si le juge l’avait autorisé à étoffer son dossier. En l’absence de preuve qu’il était possible de recourir à des mesures moins restrictives, l’argument de l’appelant était voué à l’échec.

 

[9]               Pour ce qui est de la dernière question, le manquement allégué aux principes de justice naturelle lors du premier palier du grief ne porte pas à conséquence parce qu’en supposant même que le processus menant à la décision n’ait pas été équitable, il a quand même mené à la restitution de certaines photographies. C’était là ce qu’il demandait. En outre, comme l’appelant l’a exposé clairement à l’audience, la question de la restitution des photos s’est transformée pour viser la politique prétendument illégale qui a été adoptée entre-temps.

 

[10]           Par souci d’exhaustivité, je signalerais que l’appelant a continué à contester le résultat du grief au premier palier. En effet, après la restitution des photos, le grief a été classé [traduction] « aucune autre mesure requise ». Selon l’appelant, le grief avait été accueilli.

 

[11]           Toutefois, comme l’a indiqué la réponse au grief de deuxième palier, les lignes directrices en vigueur à l’établissement interdisaient la prise de photos pouvant compromettre la sécurité d’une personne ou du pénitencier. Les photos de « matériel de bureau / classeur » étaient interdites. Dans son grief au troisième palier, l’appelant n’a pas contesté l’existence de ces lignes directrices.

 

[12]           Aux termes du Manuel sur le règlement des plaintes et des griefs des délinquants qui était alors en vigueur, devait être classé comme accueilli le grief qui était justifié du fait que le traitement appliqué au délinquant ou la procédure suivie était injuste, arbitraire ou contraire aux politiques. Puisque les photos en cause représentaient des dossiers ou des classeurs (donc interdites prima facie) et qu’elles ont été remises à l’appelant après l’évaluation du risque pour la sécurité, il n’était pas déraisonnable de classer le grief comme ne requérant aucune autre mesure.

 

 

 

 

 

 

[13]           Pour ces motifs, je rejetterais l’appel avec dépens.

 

 

« Eleanor R. Dawson »

j.c.a.

 

« Je suis d’accord.

            Marc Noël j.c.a. »

 

« Je suis d’accord.

            Johanne Trudel j.c.a. »

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Ghislaine Poitras, LL.L., Trad. a.

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

Dossier :                                                        A-239-11

 

INTITULÉ :                                                       Michael Aaron SPIDEL

                                                                            c. CANADA (PROCUREUR GÉNÉRAL)

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                Vancouver (Colombie-Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                               Le 18 janvier 2012

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                            La juge Dawson

 

Y ONT SOUSCRIT :                                        Le juge Noël

                                                                            La juge Trudel

 

DATE DES MOTIFS :                                     Le 24 janvier 2012

 

 

COMPARUTIONS :

 

Michael Aaron Spidel

Pour son propre compte

 

POUR L’APPELANT

 

Liliane Bantowakis

POUR L’INTIMÉ

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

S/O

 

 

POUR L’APPELANT

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

POUR L’INTIMÉ

 

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