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Date : 20120215

Dossier : A‑398‑10

Référence : 2012 CAF 55

 

CORAM :      LA JUGE SHARLOW

                        LA JUGE DAWSON

                        LA JUGE TRUDEL

 

ENTRE :

PETER LIVADITIS

appelant

et

AGENCE DU REVENU DU CANADA

intimée

 

 

 

 

Audience tenue à Calgary (Alberta), le 15 février 2012

Jugement prononcé à l’audience à Calgary (Alberta), le 15 février 2012

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :                                                         LA JUGE TRUDEL

 


Date : 20120215

Dossier : A‑398‑10

Référence : 2012 CAF 55

 

CORAM :      LA JUGE SHARLOW

                        LA JUGE DAWSON

                        LA JUGE TRUDEL

 

ENTRE :

PETER LIVADITIS

appelant

et

AGENCE DU REVENU DU CANADA

intimée

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(prononcés à l’audience à Calgary (Alberta), le 15 février 2012)

LA JUGE TRUDEL

[1]               M. Livaditis (l’appelant) a, dans le cadre du Programme de divulgation volontaire (PDV), demandé sans succès au ministre du Revenu national (ou à son délégué) l’annulation, pour l’année d’imposition 2006, des pénalités et des intérêts sur le gain en capital qu’il n’avait pas déclaré antérieurement. Sa demande a été refusée au second niveau par le délégué du ministre au motif qu’[traduction] « une mesure d’exécution [avait] déjà été prise relativement à ce compte avant la divulgation » (décision du délégué du ministre, dossier d’appel, à la page 107).

[2]               La Cour fédérale a débouté l’appelant de la demande de contrôle judiciaire qu’il a par la suite présentée (2010 CF 950).

 

[3]               Dans ses motifs, le juge de la Cour fédérale (le juge de première instance) a examiné la décision administrative contestée à la lumière des deux questions suivantes sur lesquelles le délégué du ministre s’était penché (compte rendu de la décision de second niveau PDV, dossier d’appel, à la page 153) :

 

1)                  Y a‑t‑il eu un contact direct entre un employé de l’ARC, ou une autre autorité ou administration, et le contribuable pour une raison reliée à l’inobservation d’une règle (p. ex., déclarations non déposées, vérification, questions de recouvrement) ou est‑ce que le contribuable est probablement au courant de la mesure d’exécution?

 

2)                  Une mesure d’exécution a‑t‑elle été prise contre une personne associée au contribuable ou à un tiers, ou reliée à une de ces personnes, dans un cas où la mesure d’exécution entretient un lien suffisant avec la présente divulgation, et aurait probablement permis de découvrir les renseignements qui font l’objet de la divulgation?

 

 

[4]               Ces questions découlent de la circulaire d’information IC00‑1R2 relative à la PDV et aux Lignes directrices sur la PDV de juin 2008, qui énumèrent les quatre conditions qu’une divulgation doit remplir pour pouvoir être considérée comme une divulgation valide, la première étant qu’elle soit volontaire, c’est‑à‑dire qu’il faut répondre par la négative aux deux questions précitées. La question de savoir si elle était volontaire est la seule question qui se pose en ce qui concerne la divulgation faite par l’appelant.

 

[5]               Quelques faits seulement sont pertinents pour trancher le présent appel. Il suffit de savoir que l’appelant était président de la société LaCaille Fifth Avenue Inc. (LaCaille), une société dont les activités concernaient entre autres la construction d’un nouvel immeuble d’habitation en copropriété (« le complexe Five West »). En 2003, avant que les travaux de construction ne commencent, l’appelant et quatre membres de sa famille se sont personnellement portés acquéreurs de logements en copropriété du complexe Five West. Ils ont revendu à profit leurs logements en copropriété en 2006, avant que les travaux ne soient achevés. L’appelant a réalisé un gain en capital qui n’a pas été déclaré.

 

[6]               Le 26 août 2008, le ministre du Revenu national a demandé à la Cour fédérale une ordonnance ex parte l’autorisant à adresser à LaCaille une « Demande péremptoire concernant la communication de renseignements et la production de document » (la demande péremptoire) en vertu du paragraphe 231.2(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. 1985, ch. 1 (5e suppl.) et du paragraphe 289(1) de la Loi sur la taxe d’accise, L.R.C. 1985, ch. E‑15, relativement à un groupe de personnes dont l’identité n’était pas précisée. La demande péremptoire visait à vérifier si les personnes qui avaient acheté des logements en copropriété du complexe Five West avaient respecté leurs obligations fiscales.

 

[7]               L’ordonnance sollicitée a été prononcée par la Cour fédérale le 4 septembre 2008 (dossier T‑1330‑08, dossier d’appel, à la page 76), mais n’a été signifiée qu’en novembre 2008.

 

[8]               Entre-temps, le 28 octobre 2008, l’appelant a reçu un appel téléphonique d’un représentant de l’Agence du Revenu du Canada (l’ARC). D’après ses souvenirs, la conversation avait été [traduction] « très brève et de nature générale » : le représentant de l’ARC l’appelait pour lui dire que l’ARC voulait organiser une rencontre pour recueillir [traduction] « des renseignements sur les acheteurs de logements en copropriété du complexe Five West » (affidavit de l’appelant, dossier d’appel, à la page 28). Le défendeur aurait pour sa part un souvenir quelque peu différent de la même conversation, mais en fait on peut raisonnablement conclure qu’il en donne simplement une version plus détaillée (compte rendu de la décision de second niveau PDV, dossier d’appel, aux pages 150 et suivantes).

 

[9]               En tout état de cause, la conversation téléphonique échangée entre le représentant de l’ARC et l’appelant a été suivie le 31 octobre d’une divulgation anonyme portant sur l’année d’imposition 2006 par laquelle une personne qui ne s’est pas identifiée et qui a par la suite été identifiée comme étant l’appelant, affirmait ne pas être [TRADUCTION] « au courant d’une vérification, d’une enquête ou d’une autre mesure d’exécution portant expressément sur la décision envisagée au moment de la présente lettre ». L’appelant affirmait donc que la divulgation était volontaire.

 

[10]           Comme nous l’avons déjà précisé, le délégué du ministre n’était pas de cet avis, pas plus que le juge de première instance qui a donné en partie raison au délégué du ministre.

 

[11]           Le délégué du ministre a répondu par l’affirmative aux deux questions susmentionnées. Sur la première, il a estimé que, par suite de la conversation téléphonique du 28 octobre 2008, l’appelant était parfaitement au courant des renseignements réclamés par l’ARC et qu’il savait que ces renseignements [traduction] «  révéleraient que [l’appelant] et les membres de sa famille n’avaient pas déclaré les revenus réalisés lors de la vente des logements en copropriété [du complexe Five West] » (compte rendu de la décision de second niveau PDV, dossier d’appel, à la page 153).

 

[12]           Le juge de première instance a estimé que cette conclusion était déraisonnable parce que le délégué du ministre n’avait pas expliqué pourquoi il préférait la version de la conversation téléphonique du représentant de l’ARC à celle de l’appelant (motifs du juge de première instance, aux paragraphes 29 et 32). Soit dit en tout respect, nous ne partageons pas l’opinion du juge de première instance, et ce, pour les motifs que nous expliquerons plus tard.

 

[13]           Sur la seconde question, le juge de première instance a estimé qu’il était raisonnable de la part du délégué du ministre de considérer que la demande péremptoire constituait une mesure d’exécution, étant donné qu’à cet égard il n’était pas nécessaire que l’appelant soit au courant de l’existence de la mesure d’exécution pour conclure que la divulgation n’était pas volontaire. L’appelant conteste énergiquement cette conclusion. Il n’est cependant pas nécessaire de commenter cette affirmation pour pouvoir trancher le présent appel et nous nous abstenons donc de formuler des observations à ce sujet.

 

[14]           Nous sommes toutes d’avis que la preuve versée au dossier appuyait la conclusion du délégué du ministre au sujet de la connaissance que l’appelant avait, le 28 octobre, de la mesure d’exécution que l’ARC envisageait de prendre relativement aux renseignements divulgués. Il existait un fondement raisonnable qui permettait au délégué du ministre de prendre la décision qu’il a prise et notre Cour n’interviendra pas (Alberta (Information and Privacy Commissioner) c. Alberta Teachers’ Association, 2011 CSC 61).

 

[15]           En conclusion, nous sommes d’accord avec le jugement frappé d’appel. En conséquence, l’appel sera rejeté, le tout avec dépens.

 

 

« Johanne Trudel »

j.c.a.

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Chantal DesRochers, LL.B., D.E.S.S. en trad.

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    A‑398‑10

 

 

INTITULÉ :                                                   PETER LIVADITIS c.
AGENCE DU REVENU DU CANADA

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             Calgary (Alberta)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           Le 15 février 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT

DE LA COUR                                                LES JUGES SHARLOW, DAWSON et TRUDEL

 

PRONONCÉS À L’AUDIENCE PAR :       LA JUGE TRUDEL

 

 

COMPARUTIONS :

 

John Blair

Patrick Lindsay

 

POUR L’APPELANT

 

Wendy Bridges

 

POUR L’INTIMÉE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Borden Ladner Gervais SRL

Calgary (Alberta)

 

POUR L’APPELANT

 

Myles J. Kirvan

Sous‑procureur général du Canada

 

POUR L’INTIMÉE

 

 

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