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Federal Court of Appeal |
ENTRE :
LA PREMIÈRE NATION DENESULINE DE FOND DU LAC,
LA PREMIÈRE NATION DENESULINE DE BLACK LAKE,
LA PREMIÈRE NATION DENESULINE DE HATCHET LAKE et
LES
COLLECTIVITÉS PROVINCIALES AUTOCHTONES
(HORS PREMIÈRES NATIONS)
DE CAMSELL PORTAGE, URANIUM CITY, STONY RAPIDS et
WOLLASTON LAKE
(désignées « Athabasca Regional Government »)
et
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA et
AREVA RESOURCES CANADA INC.
et
LA COMMISSION CANADIENNE DE SÛRETÉ NUCLÉAIRE et
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DE LA SASKATCHEWAN
intervenants
Audience tenue à Saskatoon (Saskatchewan), le 5 mars 2012.
Jugement rendu à l’audience à Saskatoon (Saskatchewan), le 5 mars 2012.
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR : LE JUGE EVANS
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Federal Court of Appeal |
Date : 20120305
Dossier : A-402-10
Référence : 2012 CAF 73
CORAM : LE JUGE EN CHEF BLAIS
LE JUGE EVANS
LA JUGE LAYDEN-STEVENSON
ENTRE :
LA PREMIÈRE NATION DENESULINE DE FOND DU LAC,
LA PREMIÈRE NATION DENESULINE DE BLACK LAKE,
LA PREMIÈRE NATION DENESULINE DE HATCHET LAKE et
LES
COLLECTIVITÉS PROVINCIALES AUTOCHTONES
(HORS PREMIÈRES NATIONS)
DE CAMSELL PORTAGE, URANIUM CITY, STONY RAPIDS et
WOLLASTON LAKE
(désignées « Athabasca Regional Government »)
appelantes
et
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA et
AREVA RESOURCES CANADA INC.
intimés
et
LA COMMISSION CANADIENNE DE SÛRETÉ NUCLÉAIRE et
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DE LA SASKATCHEWAN
intervenants
MOTIFS DU JUGEMENT
(Prononcés à l’audience à Saskatoon (Saskatchewan), le 5 mars 2012)
[1] La Cour est saisie d’un appel que la Première Nation de Fond du Lac et autres (les appelantes) ont interjeté à l’encontre de la décision du 22 septembre 2010 de la Cour fédérale publiée sous la référence 2010 CF 948. Dans cette décision, le juge Russell (le juge) a rejeté la demande de contrôle judiciaire présentée par les appelantes en vue de faire annuler une décision de la Commission canadienne de sûreté nucléaire (la Commission) datée du 30 juin 2009.
[2] Dans la décision en cause, la Commission a renouvelé pour une période de huit ans le permis d’exploitation de la mine et de l’usine de concentration d’uranium qui avait été délivré dix ans auparavant à AREVA Resources Canada Inc. (AREVA), intimée dans le présent appel. Le permis avait été délivré pour l’établissement de McClean Lake situé dans le bassin de l’Athabasca au nord de la Saskatchewan. La Commission a également révoqué le permis de préparation du site de la mine d’uranium de Midwest et incorporé les activités de surveillance et d’entretien de ce site au permis délivré pour McClean Lake. AREVA est propriétaire du site de Midwest, qui se trouve à environ 15 kilomètres du site de McClean Lake.
[3] Comme principal moyen d’appel, les appelantes avancent que la Commission a commis une erreur de droit dans sa décision parce qu’elle a été prise en violation de leur droit constitutionnel d’être consultées avant la prise par la Couronne fédérale de toute mesure attentatoire à un droit ancestral ou issu d’un traité qui est protégé par l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.
[4] Les appelantes allèguent également que le juge leur a refusé la possibilité de présenter des observations avant de décider de ne pas se récuser malgré le fait que son fils était stagiaire au cabinet représentant AREVA. Le juge a fait état de cette situation dès le début de l’instruction et il a informé les parties qu’il en avait discuté avec le juge en chef qui croyait comme lui que la récusation n’était pas justifiée.
[5] Nous sommes tous d’avis que le juge a agi tout à fait correctement en décidant de ne pas se récuser. Il n’est pas nécessaire que les juges entendent les observations des parties avant de décider de se récuser ou non sur la foi des faits qu’ils ont eux‑mêmes dévoilés. La partie insatisfaite a un droit d’appel devant notre Cour pour cause de partialité. Toutefois, dans un appel interjeté au motif que les faits en l’espèce constituaient une crainte raisonnable de partialité, les appelantes auraient été déboutées en raison de l’absence de fondement. Quoi qu’il en soit, les appelantes n’ont pas soulevé la question de la partialité à la première occasion; elles ne peuvent repousser leur contestation fondée sur la partialité jusqu’à ce qu’elles connaissent l’issue de leur demande de contrôle judiciaire.
[6] Nous ne sommes pas non plus convaincus que le juge a commis une erreur qui justifierait l’intervention de la Cour parce qu’il a conclu que les appelantes n’avaient pas établi que l’une d’elles, dont les trois Premières Nations appelantes, avait le droit d’être consultée sur les faits de la présente affaire avant que la Commission ne renouvelle le permis d’AREVA en vertu de la Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires, L.C. 1997, ch. 9, et ne révoque le permis du site de Midwest pour incorporer les activités s’y rapportant au permis délivré à AREVA.
[7] L’appel peut être tranché relativement à certains moyens seulement. Premièrement, nous reconnaissons que, avant d’exercer ses pouvoirs rattachés aux permis, la Commission avait implicitement compétence pour déterminer si les appelantes détenaient le droit ancestral d’être consultées relativement au renouvellement du permis et, le cas échéant, si ce droit avait été respecté. Il n’y a pas lieu de conclure que le législateur a autorisé la Commission à renouveler le permis d’AREVA si le droit constitutionnel des Premières Nations d’être consultées n’a pas été respecté. Les appelantes sont d’accord sur ce premier point.
[8] Deuxièmement, nous souscrivons à la conclusion du juge selon laquelle les appelantes n’ont pas démontré que les faits de la présente affaire faisaient naître une obligation de consultation parce qu’elles n’ont pas établi d’atteinte potentielle à un droit ancestral ou issu d’un traité qui pourrait être attribuable à la décision de la Commission de renouveler le permis d’AREVA.
[9] Certes, les Premières Nations appelantes détiennent des droits issus de traités qui leur permettent de chasser et de pêcher pour se nourrir dans une région où se trouvent les sites de McClean Lake et de Midwest. Toutefois, elles n’ont présenté aucune preuve démontrant qu’il pourrait être porté atteinte à ces droits issus de traités d’une manière non négligeable par le renouvellement du permis.
[10] Il importe de souligner que, au moment du renouvellement du permis de McClean Lake, AREVA procédait à des activités d’extraction sur ce site, en vertu d’un permis qui lui avait été accordé dix ans auparavant, et s’était conformée aux exigences de ce permis, y compris celles liées à la protection de l’environnement. Ni le renouvellement du permis, ni la révocation du permis de Midwest et son incorporation au permis de McClean Lake n’ont eu pour effet d’élargir les activités autorisées. Il n’est que pure conjecture de la part des appelantes d’alléguer que la poursuite des activités minières dans le cadre du permis renouvelé pour huit autres années, avec réexamen après quatre ans, pourrait entraîner la contamination de la faune de sorte qu’il serait porté atteinte aux droits de chasse et de pêche des Premières Nations appelantes qui sont visés dans des traités.
[11] Si nous avons bien compris son argument, l’avocat croit que l’obligation constitutionnelle de consultation est déclenchée par un droit existant ancestral ou issu d’un traité dont la Couronne avait connaissance de fait et de droit et que cette obligation commande qu’une enquête soit faite pour déterminer si la mesure proposée pourrait porter atteinte à ce droit.
[12] À notre avis, ce n’est pas ce que prévoit la règle de droit. L’obligation de consultation prend naissance seulement s’il est démontré qu’il existe une possibilité que la mesure proposée pourrait porter atteinte à un droit ancestral ou issu d’un traité. La Commission a jugé que cette possibilité n’avait pas été établie en l’espèce et, tout comme le juge Russell, nous croyons qu’il n’y a aucune erreur dans cette conclusion. La brève discussion entre les membres de la Commission et les témoins au cours de l’audience devant la Commission dont l’avocat a fait état ne constitue pas une preuve d’atteinte potentielle qui déclenche une obligation de consultation.
[13] Puisque les appelantes n’ont pas démontré, malgré l’application d’un critère peu rigoureux, qu’une obligation de consultation était déclenchée par une atteinte potentielle établie, de façon cumulative ou autre, à un droit ancestral ou issu d’un traité, il n’est pas nécessaire de nous prononcer sur les autres questions que le juge a tranchées et nous refusons de le faire.
[14] Pour ces motifs, l’appel sera rejeté avec dépens en faveur des intimés.
Traduction certifiée conforme
Linda Brisebois, LL.B.
COUR D’APPEL FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : A-402-10
INTITULÉ : Première Nation Denesuline de Fond du Lac et autres c. Procureur général du Canada et autres et Commission canadienne de sûreté nucléaire et autres
LIEU DE L’AUDIENCE : Saskatoon (Saskatchewan)
DATE DE L’AUDIENCE : Le 5 mars 2012
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR : LE JUGE EN CHEF BLAIS
LE JUGE EVANS
LA JUGE LAYDEN-STEVENSON
PRONONCÉS À L’AUDIENCE PAR : LE JUGE EVANS
COMPARUTIONS :
POUR LES APPELANTES
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Vanessa Monar Enweani
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POUR L’INTIMÉ LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
POUR L’INTIMÉE AREVA RESOURCES CANADA INC.
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Michael A. James
R. James Fyfe |
POUR L’INTERVENANTE LA COMMISSION CANADIENNE DE SÛRETÉ NUCLÉAIRE
POUR L’INTERVENANT |
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Saskatoon (Saskatchewan) |
POUR LES APPELANTES
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Sous‑procureur général du Canada
MacPherson Leslie & Tyerman LLP Saskatoon (Saskatchwan) |
POUR L’INTIMÉ LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
POUR L’INTIMÉE AREVA RESOURCES CANADA INC.
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Commission canadienne de sûreté nucléaire Ottawa (Ontario)
Représentant du procureur général Regina (Saskatchewan) |
POUR L’INTERVENANTE LA COMMISSION CANADIENNE DE SÛRETÉ NUCLÉAIRE
POUR L’INTERVENANT LE PROCUREUR GÉNÉRAL DE LA SASKATCHEWAN |