Décisions de la Cour d'appel fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Cour d’appel fédérale

Federal Court of Appeal


 

Date : 20120503

Dossier : A-200-02

Référence : 2012 CAF 138

 

Présent :         JOHANNE PARENT, Officier taxateur

 

ENTRE :

CHARLOTTE RHÉAUME

appelante

et

 

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

intimé

 

 

 

Taxation écrite décidée sans comparution des parties.

 

Certificat émis à Toronto (Ontario), le 3 mai 2012.

 

 

 

MOTIFS DE LA TAXATION :                                      JOHANNE PARENT, Officier taxateur

 


Cour d’appel fédérale

Federal Court of Appeal


 

Date : 20120503

Dossier : A-200-02

Référence : 2012 CAF 138

 

Présent :         JOHANNE PARENT, Officier taxateur

 

ENTRE :

CHARLOTTE RHÉAUME

appelante

 

et

 

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

intimé

 

 

MOTIFS DE LA TAXATION

JOHANNE PARENT, Officier taxateur

[1]               Le 15 mai 2003, la Cour rejetait l’appel de la décision de l’honorable juge Pelletier rendue le 25 mars 2002, avec dépens. Le 4 juillet 2003, l’intimé produisait au dossier de la Cour son mémoire de frais. Le 16 janvier 2012, la partie intimée faisait parvenir une lettre au greffe de la Cour indiquant : « À la lecture du plumitif du dossier A-200-02 de la Cour fédérale, nous nous apercevons qu’un mémoire de frais a été déposé le 4 juillet 2003 sans n’avoir été taxé ». À la réception de cette lettre, des directives étaient émises et signifiées le 24 janvier 2012 informant les parties que la taxation des frais procéderait par écrit ainsi que des délais impartis pour le dépôt des représentations.

[2]               Le 21 février 2012, la partie appelante faisait parvenir au greffe de la Cour une lettre ainsi que des représentations écrites demandant à ce qu'une directive soit émise en regard de la décision de la Cour dans l'affaire Markevich c Canada (2001 CAF 144) afin que soit annulé le mémoire de frais de la partie intimée en raison de sa prescription. En réponse, la directive jointe fut envoyée aux parties le 24 février 2012 :

 

… Pour des raisons qui sont inconnues, ce mémoire de frais n'aurait pas été traité au moment de son dépôt et ce n'est que sur réception d'une lettre de la partie intimée le 16 janvier 2012 que le dossier fut porté à l'attention d'un officier taxateur.

Comme il fut indiqué au paragraphe 14 de la décision Fournier Pharma Inc. c Canada (2007 CF 433), au paragraphe 19 de la décision Nature's Path Foods Inc. c Country Fresh Enterprises Inc.(2007 CF 116) et à la décision Urbandale Realty Corp. c Canada (2008 CAF 167), il n'existe aucun délai de prescription visant le dépôt ou le traitement d'un mémoire de frais devant les Cours fédérales. Référence est particulièrement faite à la décision dans l'affaire Urbandale où l'officier taxateur a revu la décision Markevitch à la lumière de la taxation des dépens.

En dépit du fait qu'une période de temps substantielle se soit écoulée avant que la partie intimée porte cette situation à l'attention de la Cour, il n'existe aucune prescription dans les Règles des Cours fédérales concernant la taxation des frais.

Conséquemment, la taxation du mémoire de frais de la partie intimée procèdera et à cet effet, l'officier taxateur a indiqué que :

 

(a) comme les représentations soumises par la partie appelante en date du 21 février portaient principalement sur la prescription, elle pourra signifier et déposer toute documentation supplémentaire en réponse au mémoire de frais le ou avant le 16 mars 2012;

(b) la partie intimée pourra signifier et déposer toute documentation en réplique le ou avant le 5 avril 2012.

 

Il est finalement demandé que les parties adressent dans le cadre de leurs représentations l'impact de la présente situation sur l'évaluation de l'article 26 du Tarif B.

 

 

[3]               À la suite à cette directive, aucune représentation écrite ne fut reçue de la part des parties. Conséquemment, je verrai donc à l’analyse du mémoire de frais tenant compte des documents déjà au dossier de la Cour, incluant les représentations de l’appelante en date du 21 février 2012 au sujet de la prescription.

 

[4]               La partie appelante mentionne qu’un délai de huit ans et huit mois s’est écoulé entre le prononcé du jugement et l’envoi du mémoire de frais le 24 janvier 2012 et que de ce fait, elle ne peut valider les frais présentés. Au soutien, elle soumet l’article 39(1) de la Loi sur les Cours fédérales ainsi que l’article 32 de la Loi sur la responsabilité civile de l’État et le contentieux administratif. Elle soutient de plus :

En l’absence d’un article spécifique à la prescription pour la Cour d’appel fédérale, la prescription applicable est donc celle de l’article 2925 du C.c.Q. S’agissant d’un droit personnel dont le délai de prescription n’est pas autrement fixé par la loi, l’action se prescrira par 3 ans après la date du jugement en date du 15 mai 2003. Le délai de prescription pour le recouvrement des dépens expirait le 15 mai 2006 et la dette n’est plus exigible par le Procureur général du Canada.

 

[5]               L’article 39 de la Loi sur les Cours fédérales précise :

 

39. (1) Sauf disposition contraire d’une autre loi,

les règles de droit en matière de prescription qui,

dans une province, régissent les rapports entre

particuliers s’appliquent à toute instance devant la

Cour d’appel fédérale ou la Cour fédérale dont le

fait générateur est survenu dans cette province.

(2) Le délai de prescription est de six ans à

compter du fait générateur lorsque celui-ci

n’est

pas survenu dans une province.

39. (1) Except as expressly provided by any

other Act, the laws relating to prescription and the

limitation of actions in force in a province between

subject and subject apply to any proceedings in the

Federal Court of Appeal or the Federal Court in

respect of any cause of action arising in that

province.

 

(2) A proceeding in the Federal Court of Appeal

or the Federal Court in respect of a cause of action

arising otherwise than in a province shall be taken

within six years after the cause of action arose.

 

[6]               À l’article 32 de la Loi sur la responsabilité civile de l’État et le contentieux administratif, il est indiqué :

32. Sauf disposition contraire de la présente loi ou de toute autre loi fédérale, les règles de droit en matière de prescription qui, dans une province, régissent les rapports entre particuliers s’appliquent lors des poursuites auxquelles l’État est partie pour tout fait générateur survenu dans la province. Lorsque ce dernier survient ailleurs que dans une province, la procédure se prescrit par six ans.

 

32. Except as otherwise provided in this Act or in any other Act of Parliament, the laws relating to prescription and the limitation of actions in force in a province between subject and subject apply to any proceedings by or against the Crown in respect of any cause of action arising in that province, and proceedings by or against the Crown in respect of a cause of action arising otherwise than in a province shall be taken within six years after the cause of action arose.

 

[7]               Tout comme l’appelante, je retiens des deux articles qui précédent, qu’en l’absence de tout autre prescription énoncée dans la Loi ou les Règles des Cours fédérales et considérant que les faits à l’origine de la présente affaire sont survenus dans la province de Québec, que ce sont les règles prévues au Code civil du Québec qui régissent les droits de l’appelante en matière de prescription dans la présente affaire impliquant le Procureur général du Canada.

 

[8]               L’article 2925 du Code civil du Québec, tel que référé par l’appelante dans ses représentations, stipule :

2925. L'action qui tend à faire valoir un droit personnel ou un droit réel mobilier et dont le délai de prescription n'est pas autrement fixé se prescrit par trois ans.

 

2925. An action to enforce a personal right or movable real right is prescribed by three years, if the prescriptive period is not otherwise established.

 

 

[9]               J’observe que la prescription de trois ans prévue à cet article en est une de recours et semble donc inapplicable au mémoire de frais suivant jugement. D’autre part, advenant le cas où l’article 2925 C.c.Q. devait trouver application, la prescription de ce mémoire de frais ne pouvait essentiellement courir avant la date du jugement de la Cour accordant les frais à la partie intimée au mois de mai 2003. Suivant le dépôt du mémoire de frais, la preuve de sa signification, retrouvée au dossier de la Cour, nous indique que la partie appelante fut signifiée par voie d’huissier le 26 juin 2003. Ce dernier fait m’amène donc à conclure que le délai de prescription fut interrompu à cette dernière date.

 

[10]           Par ailleurs je considère que, dans le cas à l’étude, si une prescription du Code civil du Québec devait trouver application, ce serait celle de 10 ans édictée à l’article 2924 C.c.Q. :

2924. Le droit qui résulte d'un jugement se prescrit par 10 ans s'il n'est pas exercé.

 

 

2924. A right resulting from a judgment is prescribed by 10 years if it is not exercised.

[11]           En considération de ce qui précède, la partie appelante ne s’étant pas prévalue du délai supplémentaire offert à la directive émise le 24 février 2012 afin de présenter des représentations additionnelles, je procéderai donc à la taxation du mémoire de frais de la partie intimée en tenant compte des représentations de la partie appelante en date du 21 février 2012 ainsi que de l’affidavit de Lyne Lasalle produit au soutien du mémoire de frais. Dans le cadre des représentations de l’appelante, à l’exception des arguments retrouvés au sujet de certains débours ainsi que ceux intéressant la prescription du mémoire de frais, l’appelante n’a soumis aucun matériel qui aurait pu servir à identifier sa position au chapitre des services à taxer et m’aider dans ma décision à leurs sujets. L'absence de représentations de la part de l’appelante concernant les services à taxer a comme conséquence que le mémoire de frais ne se heurte à aucune opposition et comme le mentionnait mon collègue dans l’affaire Dahl c Canada, 2007 FC 192 au paragraphe 2 :  « … les Règles des Cours fédérales ne prévoient pas qu’un plaideur puisse compter sur le fait qu’un officier taxateur abandonne sa position de neutralité pour devenir le défenseur du plaideur dans la contestation de certains postes d’un mémoire de dépens ». Nonobstant, il est à noter que chaque service réclamé doit cependant être examiné en tenant compte du fait que ne peut être certifié aucun service qui ne correspondrait pas au Tarif ou au jugement de la Cour.

 

[12]           Tenant compte de ce qui précède, j’ai revu tous les services à taxer, et les unités réclamées sous la Colonne III du Tarif B des Règles des Cours fédérales pour la préparation du mémoire des faits et du droit (Article 19), les honoraires d’avocats lors de l’audition (Article 22), les services rendus après jugement (Article 25), la taxation des frais (Article 26) et la préparation de la comparution (Article 27) seront accordées comme demandé.

 

[13]           À la partie II de ses représentations du 21 février, la partie appelante conteste les frais d’huissiers, photocopies et imprimeries arguant qu’elle ne peut valider les pièces ainsi que les frais en raison « de la période de temps tardive à présenter lesdites factures ». À titre d’exemple, la partie appelante indique qu’une facture de St-Joseph Digital Solutions concernant l’impression du cahier d’autorités serait irrecevable, car auraient été remarquées des incohérences dans les dates y mentionnées.

 

[14]           Comme je le mentionnais plus tôt dans le cadre de cette décision, je ne considère pas qu’il y ait prescription pour la taxation du mémoire de frais soumis par la partie intimée et conséquemment, les dépenses raisonnables encourues dans le cadre de cette affaire seront taxées. La justification des débours réclamés au mémoire de frais se retrouve accompagnée des reçus ou factures à l’affidavit de Lyne Lasalle. Le dossier nous révèle que ledit affidavit avec pièces justificatives fut signifié à deux reprises à la partie appelante. Il appartenait donc à cette dernière de voir au contre-interrogatoire de l’affiant ou du moins vérifier avec le dossier de la Cour tout élément réclamant plus de détails c.-à-d. nombre de copies des documents produits, dates de dépôt et signification, etc. Quant à la facture de St-Joseph Digital Solutions, les représentations de l’appelante sont justes. Cependant, compte tenu des informations retrouvées à la facturation ainsi qu’au bon de commande, qui est aussi joint à l’affidavit de madame Lasalle, je suis d’opinion qu’il ne s’agisse que d’une erreur cléricale, n’invalidant pas le document.

 

[15]           En l’absence de tout autre argument au contraire, les montants réclamés sont considérés des dépenses nécessaires à la conduite de cette affaire. Ils sont justifiés, raisonnables et seront donc accordés comme demandé.

 

[16]           Le mémoire de frais de la partie intimée est alloué au montant de 2 590,45 $.

 

   « Johanne Parent »

Officier taxateur

 


 

COUR D'APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    A-200-02             

 

 

INTITULÉ :                                                    CHARLOTTE RHÉAUME c PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

 

TAXATION ÉCRITE DES FRAIS SANS COMPARUTION DES PARTIES

 

 

MOTIFS DE LA TAXATION PAR :              JOHANNE PARENT, Officier taxateur

                                                                          

 

DATE DES MOTIFS :                                     Le 3 mai 2012

 

 

 

OBSERVATIONS ÉCRITES :

 

Charlotte Rhéaume

 

 

POUR L’APPELANTE (SE REPRÉSENTANT ELLE-MÊME)

 

 

Me Diane Pelletier

POUR L’INTIMÉ

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

N/A

 

 

 

POUR L’APPELANTE

(SE REPRÉSENTANT ELLE-MÊME)

 

 

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

POUR L’INTIMÉ

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.