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Cour d’appel

fédérale

 

Federal Court of Appeal

Date : 20120530

Dossier : A‑493‑10

Référence : 2012 CAF 160

 

CORAM :      LE JUGE EVANS

                        LA JUGE SHARLOW                   

                        LA JUGE LAYDEN‑STEVENSON

 

ENTRE :

SA MAJESTÉ LA REINE

appelante

et

 

COSTCO WHOLESALE CANADA LTD.

intimée

 

 

 

Audience tenue à Toronto (Ontario), le 23 janvier 2012

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 30 mai 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                        LA JUGE SHARLOW           

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                          LE JUGE EVANS

                                                                                                 LA JUGE LAYDEN‑STEVENSON

 


Cour d’appel

fédérale

 

Federal Court of Appeal

Date : 20120530

Dossier : A‑493‑10

Référence : 2012 CAF 160

 

CORAM :      LE JUGE EVANS

                        LA JUGE SHARLOW                   

                        LA JUGE LAYDEN‑STEVENSON

 

ENTRE :

SA MAJESTÉ LA REINE

appelante

et

 

COSTCO WHOLESALE CANADA LTD.

intimée

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

LA JUGE SHARLOW

[1]               L’Agence du revenu du Canada a établi à l’intention de l’intimée, Costco Wholesale Canada Ltd. (Costco), des cotisations lui prescrivant de payer la taxe sur les produits et services (TPS) afférente aux sommes qu’elle avait reçues de la Banque Amex du Canada (Amex) entre le 3 septembre 2001 et le 29 août 2004. Costco a contesté ces cotisations devant la Cour canadienne de l’impôt, qui a fait droit à son appel et les a annulées au motif que les paiements en question ne constituaient pas la contrepartie d’une fourniture taxable, mais une réduction ou un remboursement partiel de frais à payer par Costco à Amex pour une fourniture exonérée (2009 CCI 134). La Couronne a appelé de cette décision devant notre Cour, qui a ordonné la tenue d’une nouvelle audience (2010 CAF 9). Après cette nouvelle audience, le juge de la CCI a confirmé sa première décision et prononcé un jugement en conséquence (2010 CCI 609). La Couronne interjette de nouveau appel devant notre Cour. Pour les motifs dont l’exposé suit, j’ai conclu que ce second appel de la Couronne devrait être rejeté.

 

Les textes législatifs pertinents

[2]               Le paiement de la TPS est prescrit par la partie IX de la Loi sur la taxe d’accise, L.R.C. 1985, ch. E‑15. La disposition d’assujettissement est le paragraphe 165(1), dont voici le texte :

165. (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente partie, l’acquéreur d’une fourniture taxable effectuée au Canada est tenu de payer à Sa Majesté du chef du Canada une taxe calculée au taux de 5 % sur la valeur de la contrepartie de la fourniture.

165. (1) Subject to this Part, every recipient of a taxable supply made in Canada shall pay to Her Majesty in right of Canada tax in respect of the supply calculated at the rate of 5% on the value of the consideration for the supply.

 

Le taux de la TPS était de 7 % pendant la période pertinente pour la présente espèce. Ce taux ne donne lieu à aucune controverse en l’espèce.

 

[3]               Le paragraphe 165(1) de la Loi sur la taxe d’accise comprend plusieurs termes définis à son paragraphe 123(1), et les définitions de ces termes emploient d’autres termes définis dans la même loi : « acquéreur », « contrepartie », « fourniture », « fourniture taxable », « fourniture exonérée », « bien », « service », « activité commerciale », « entreprise » et « service financier ».

[4]               Cependant, il n’est pas nécessaire d’examiner en détail ces définitions de la Loi sur la taxe d’accise. Il n’est pas controversé entre les parties que la personne qui verse une contrepartie pour une fourniture taxable faite dans le cadre d’une activité commerciale est tenue de payer une TPS calculée au taux de 5 % (le taux applicable était auparavant de 7 %) de la valeur de cette contrepartie. En l’espèce, le terme « contrepartie » doit s’entendre de tout ce qui est contrepartie en droit contractuel, et l’expression « fourniture taxable » doit s’entendre de toute fourniture sauf celle d’un « service financier », selon la définition que donne de cette dernière expression le paragraphe 123(1) de la Loi sur la taxe d’accise (définition qui fera plus loin l’objet d’un examen détaillé).

 

[5]               S’il est vrai que le paragraphe 165(1) assujettit à la TPS l’acquéreur d’une fourniture taxable (la personne qui paie la contrepartie), la personne qui reçoit la contrepartie (le fournisseur) a en général l’obligation légale d’exiger la TPS applicable dudit acquéreur, de la percevoir et de la verser au fisc. Le fournisseur qui manque à cette obligation peut être tenu pour redevable de la TPS impayée et faire l’objet d’une cotisation en conséquence. Le présent appel concerne une cotisation de TPS de cette nature. La Couronne soutient qu’Amex a payé à Costco la contrepartie d’une fourniture taxable, et que Cosco a omis d’exiger, de percevoir et de verser la TPS y afférente.

 

Faits et procédures

a) Les accords contractuels liant Costco et Amex

[6]               Pour comprendre le fondement des nouvelles cotisations ici contestées, il faut examiner deux contrats passés simultanément par Amex et Costco en novembre 1999. Bien que ces deux contrats soient distincts au sens où chacun faisait l’objet d’un document distinct, le juge de la CCI a conclu qu’ils constituaient une seule transaction. Cette conclusion découle des preuves et n’a pas été attaquée.

 

[7]               L’un de ces contrats s’intitulait [TRADUCTION] « Convention d’acceptation de la carte American ExpressMD » (la convention de marchand). Par cette convention, Amex autorisait Costco à accepter les cartes de crédit Amex de ses clients et Costco s’engageait à payer des frais à Amex en contrepartie de ce droit (l’escompte d’Amex). Il n’est pas controversé entre les parties que la convention de marchand était rédigée en la même forme que tous les contrats de cette nature passés par Amex avec les marchands autorisés à accepter ses cartes de crédit.

 

[8]               Les seules stipulations de la convention de marchand qui sont pertinentes en l’espèce sont celles qui se rapportent à l’escompte d’Amex. Elles sont rédigées comme suit :

[TRADUCTION]

Nous [Amex] vous [Costco] verserons, en dollars canadiens, le montant nominal des dépenses que vous soumettez, moins : 1) l’escompte; 2) tout montant que vous nous devez; 3) tout crédit que vous avez accordé. Nous vous enverrons un paiement conformément au programme de paiement que vous choisissez [...]

Taux d’escompte

L’escompte est le montant que nous exigeons pour l’acceptation de la carte. Le taux d’escompte est de [X] % et s’applique à toutes les dépenses portées sur des cartes. L’escompte sera déduit de nos paiements.

 

 

 

[9]               Comme ces clauses l’indiquent, le montant de l’escompte d’Amex était un pourcentage des ventes de Costco réglées par toute carte de crédit Amex (les ventes par carte Amex). Le taux applicable est ici remplacé par un X parce que les parties à la présente instance ont convenu qu’il resterait confidentiel.

 

[10]           Le second contrat liant Amex et Costco s’intitulait [TRADUCTION] « Convention concernant le programme de carte jumelée American Express-Costco » (la convention de comarquage). Par cette convention, Costco et Amex s’engageaient à émettre des cartes portant chacune leurs deux noms de marque. La carte Costco/Amex devait remplir à la fois la fonction de carte de membre de Costco et celle de carte de crédit Amex. Le titulaire d’une telle carte avait le droit de l’utiliser pour tout achat chez Costco ou chez tout autre marchand autorisé à accepter les cartes de crédit Amex.

 

[11]           L’article III de la convention de comarquage, intitulé [TRADUCTION] « Indemnité à verser à Costco », comprenait quatre dispositions par lesquelles Amex s’engageait à payer des sommes à Costco : les alinéas 3.01a), 3.01b) et 3.01c), et le paragraphe 3.02.

 

[12]           Les cotisations contestées en l’espèce ne soumettaient à la TPS que les paiements effectués au titre de l’alinéa 3.01a) de la convention de comarquage, libellé comme suit (c’est moi qui souligne) :

[TRADUCTION]

[3.01] a) Dans les trente (30) jours qui suivent la fin de chaque trimestre civil au cours de la durée de la présente entente, Costco reçoit un montant correspondant à [Y] % du volume net des dépenses soumises au cours de ce trimestre. Toutefois, pour la période prenant fin le 31 janvier 2000, le montant versé à Costco correspond à ___ % (plutôt qu’à [Y] %) du volume net des dépenses soumises au cours de cette période. Si, le 8 avril 2000, Costco n’a pas satisfait aux exigences applicables aux systèmes d’information permettant l’émission de cartes jumelées pour consommateurs, pour la période commençant le 8 avril 2000 et tant que Costco ne satisfait pas à ces exigences, le montant versé à Costco correspond à ___ % (plutôt qu’à [Y] %) du volume net des dépenses au cours de cette période. (Il est entendu que, pour effectuer un paiement promptement, Amex peut être tenue d’utiliser le volume net annuel approximatif des dépenses soumises, de sorte que des rajustements devront peut-être être effectués au cours d’un trimestre civil futur.)

 

 

[13]           Le montant de chaque paiement prévu à l’alinéa 3.01(a) était un pourcentage déterminé des ventes par carte Amex effectuées au cours d’un trimestre calendaire. Le taux applicable est remplacé par un Y, ici encore parce que les parties à la présente instance ont convenu qu’il resterait confidentiel.

 

[14]           La base de calcul de l’escompte d’Amex et des paiements prévus à l’alinéa 3.01a) était la même : un pourcentage des ventes par carte Amex. La seule différence était que l’escompte d’Amex était payé dans les jours qui suivaient la communication par Costco de chaque état des transactions sur carte Amex, tandis que les paiements prévus à l’alinéa 3.01a) étaient trimestriels. Il n’est pas controversé entre les parties que le taux X était supérieur au taux Y. Par conséquent, abstraction faite des différences chronologiques, Amex recevait de Costco des rentrées nettes d’un montant de X moins Y, multiplié par le chiffre des ventes par carte Amex.

 

[15]           Comme on l’a vu plus haut, trois autres clauses de la convention de comarquage obligeaient Amex à faire des paiements à Costco. L’une d’elles était l’alinéa 3.01b), ainsi libellé (c’est moi qui souligne) :

[TRADUCTION]

[3.01] b) En échange des efforts de commercialisation déployés par Costco en vertu de l’alinéa 2.02a), Costco reçoit, pour chaque période de 12 mois commençant à la date de l’émission de la première carte jumelée, le montant fixé dans les tableaux ci‑dessous pour chaque compte de carte jumelée pour consommateurs et pour chaque compte de carte jumelée pour petites entreprises acquis au cours de cette période de douze mois. Tous les paiements comprennent les taxes applicables. Aux fins du présent alinéa b), « acquis » veut dire qu’un compte de carte jumelée a été approuvé, qu’une carte de base est émise par Amex, et que la carte de base n’est pas annulée avant la fin du trimestre civil au cours duquel elle est approuvée. Le nombre de comptes acquis est déterminé pour chaque période de 12 mois, indépendamment des tableaux ci‑dessous, comme si, au début de chaque période de 12 mois, il n’y avait pas de comptes acquis, c’est‑à‑dire que les comptes ne s’accumulent pas d’une période de 12 mois à l’autre. Les paiements prévus au présent alinéa b) sont effectués dans les trente (30) jours qui suivent la fin de chaque trimestre civil au cours d’une période de 12 mois donnée.

 

 

[16]           Les parties appellent [TRADUCTION] « primes » les paiements prévus à l’alinéa 3.01b) de la convention de comarquage parce que le montant de chacun d’eux était fonction du nombre des cartes Costco/Amex émises au cours d’une période déterminée. Cet alinéa stipule que les paiements prévus sont la contrepartie des efforts de commercialisation déployés par Costco au titre de l’alinéa 2.02a) de la même convention.

 

[17]           Cependant, la convention de comarquage fixait à Costco d’autres obligations que celles prévues à son alinéa 2.02a). La principale de ces autres obligations, stipulée au paragraphe 2.11, était l’« exclusivité », c’est‑à‑dire l’obligation de ne pas accepter d’autres cartes de crédit que celles d’Amex.

 

[18]           Amex était également tenue de faire des paiements à Costco au titre de l’alinéa 3.01c) et du paragraphe 3.02 de la convention de comarquage. Ces paiements se rapportaient respectivement à l’utilisation de la carte Costco/Amex et aux nouvelles adhésions. Il n’a pas été fait de paiements au titre de l’alinéa 3.01c) ni du paragraphe 3.02 au cours de la période pertinente pour le présent appel, et les parties conviennent que la Cour n’a pas à tenir compte des paiements de cette nature aux fins de celui‑ci.

 

b) Les conséquences relatives à la TPS des accords contractuels

[19]           Il n’est pas controversé entre les parties que, en autorisant Costco à accepter les cartes de crédit Amex par la convention de marchand, Amex fournissait un « service financier » au sens du paragraphe 123(1) de la Loi sur la taxe d’accise, et que la fourniture d’un tel service était exonérée et donc non taxable.

 

[20]           Il n’est pas contesté non plus que l’escompte d’Amex était la contrepartie payée par Costco pour ce service financier et que, par conséquent, celle‑ci n’était pas tenue au paiement de TPS sur cet escompte. Bien que le dossier ne soit pas explicite sur ce point, je suppose que le service fourni par Amex entrait dans les prévisions de l’un ou de plusieurs des alinéas g), i) et l) de la définition de « service financier ». Au cours de la période pertinente pour la présente espèce, ces alinéas étaient libellés comme suit :

« service financier »

“financial service” means

 

[...]

g) l’octroi d’une avance ou de crédit ou le prêt d’argent;

(g) the making of any advance, the granting of any credit or the lending of money,

[...]

i) un service rendu en conformité avec les modalités d’une convention portant sur le paiement de montants visés par une pièce justificative de carte de crédit ou de paiement;

(i) any service provided pursuant to the terms and conditions of any agreement relating to payments of amounts for which a credit card voucher or charge card voucher has been issued,

[...]

l) le fait de consentir à effectuer, ou de prendre les mesures en vue d’effectuer, un service qui, à la fois est visé à l’un des alinéas a) à i).

(l) the agreeing to provide, or the arranging for, a service that is referred to in any of paragraphs (a) to (i).

 

 

[21]           Comme on l’a vu plus haut, les cotisations ici contestées soumettaient à la TPS les paiements faits par Amex à Costco au titre de l’alinéa 3.01a) de la convention de comarquage. Pour établir si les paiements prévus à l’alinéa 3.01a) étaient soumis à la TPS, comme la Couronne le soutient, il faut rechercher l’objet de ces paiements ou, plus précisément, en contrepartie de quoi (le cas échéant) ils ont été faits. En effet, lesdits paiements n’étaient soumis à la TPS que s’ils formaient la contrepartie d’une fourniture taxable de Costco.

 

[22]           Pour rechercher l’objet des paiements prévus à l’alinéa 3.01a), il faut interpréter la convention de comarquage et la convention de marchand. Or, le problème est qu’aucune clause de l’une ou de l’autre ne précise cet objet. Costco et la Couronne proposent à cet égard des interprétations différentes.

 

i) La position de Costco sur l’objet des paiements prévus à l’alinéa 3.01a)

[23]           Costco fait valoir que l’escompte réel d’Amex – ce qu’elle a réellement payé à Amex en contrepartie d’une fourniture exonérée – n’était pas X % des ventes par carte Amex, mais (X‑Y) % de ces ventes. Costco fonde sa thèse sur l’objectif opérationnel de la convention de marchand et de la convention de comarquage (lues de concert), et invoque le fait que l’escompte d’Amex et les paiements prévus à l’alinéa 3.01a) se calculaient sur la même base, soit un pourcentage des ventes par carte Amex.

 

[24]           Plus précisément, Costco soutient que, suivant les règles d’interprétation des contrats, les paiements prévus à l’alinéa 3.01a) constituaient une réduction ou un remboursement partiel de l’escompte d’Amex, et non la contrepartie d’une quelconque fourniture faite par Costco au titre de la convention de comarquage. Il s’ensuit, selon Costco, que ces paiements ne sont pas soumis à la TPS et que les cotisations attaquées ne peuvent être maintenues.

 

ii) La position de la Couronne sur l’objet des paiements prévus à l’alinéa 3.01a)

[25]           La Couronne soutient d’abord que toutes les obligations que la convention de comarquage fixait à Costco étaient des fournitures faites par celle‑ci à Amex, et que toutes les obligations de paiement que cette convention fixait à Amex étaient des contreparties de ces fournitures. Comme la convention de comarquage ne spécifiait pas l’objet des paiements prévus à son alinéa 3.01a), il faut interpréter celle‑ci pour déterminer cet objet, puis établir si ces paiements formaient la contrepartie d’une fourniture taxable ou d’une fourniture exonérée (plus précisément, d’un service financier). S’il s’agissait d’un service financier, la fourniture était exonérée, c’est‑à‑dire n’était pas soumise à la TPS. Dans le cas contraire, la fourniture était soumise à la TPS, et les cotisations attaquées sont justifiées.

 

[26]           La Couronne prend en considération dans son analyse les dispositions de paiement autres que l’alinéa 3.01a), notamment l’alinéa 3.01b) (reproduit plus haut). Ce dernier alinéa stipule expressément que les paiements y prévus forment la contrepartie des efforts de commercialisation déployés par Costco au titre de l’alinéa 2.02a) de la convention de comarquage. On peut en déduire que les paiements prévus à l’alinéa 3.01a) devaient être la contrepartie de quelque chose d’autre que les obligations de commercialisation fixées à Costco par l’alinéa 2.02a).

 

[27]           La Couronne soutient que, comme la convention de comarquage fixait à Costco des obligations substantielles qui n’entraient pas dans les prévisions de l’alinéa 2.02a), notamment l’obligation d’exclusivité stipulée au paragraphe 2.11, il faut en conclure que les paiements prévus à l’alinéa 3.01a) formaient la contrepartie de ces autres obligations.

 

c) Les appels portés devant la CCI

[28]           Après la première audience de la Cour de l’impôt, le juge de celle‑ci a retenu la thèse de Costco et fait droit à son appel. Il a ensuite recherché, au cas où il aurait fait erreur sur le point principal et où les paiements prévus à l’alinéa 3.01a) constitueraient la contrepartie d’une fourniture de Costco, si cette fourniture était taxable ou exonérée. Il a conclu, pour les motifs résumés plus loin, que si ces paiements formaient la contrepartie d’une fourniture de Costco, l’objet de cette fourniture était un service financier au sens de l’alinéa i) de la définition de l’expression « service financier » que donne le paragraphe 123(1) de la Loi sur la taxe d’accise, et que ladite fourniture était par conséquent exonérée.

 

[29]           La Couronne s’est adressée à notre Cour, qui a conclu que le juge de la CCI n’avait pas pris en considération la définition du terme « bien » formulée dans la Loi sur la taxe d’accise. Au motif de cette omission, notre Cour a accueilli l’appel et renvoyé l’affaire devant le juge de la CCI « pour qu’il rende une nouvelle décision en tenant compte de la définition de "bien" au regard de la preuve existante ou de tout autre élément qu’il pourrait décider d’admettre en preuve » (2010 CAF 9, paragraphe 10).

 

[30]           À la nouvelle audience, le juge de la CCI a pris en considération la définition du terme « bien » figurant dans la Loi sur la taxe d’accise, comme il lui avait été ordonné, ainsi que la définition que donne la même loi du terme « service », cette dernière définition ayant aussi été invoquée. Il a pris acte qu’il n’était par controversé entre les parties que les droits d’exclusivité étaient visés par la définition de « bien » figurant au paragraphe 123(1) de ladite loi et il a assez longuement analysé ce concept.

 

[31]           Après examen détaillé des deux conventions et des preuves supplémentaires, il a conclu que, même dans l’hypothèse où était correcte la thèse de la Couronne portant que le paragraphe 2.11 de la convention de comarquage (la disposition d’exclusivité) stipulait une fourniture taxable d’Amex à Costco, il n’était pas fondé à conclure que les paiements prévus à l’alinéa 3.01a) constituaient la contrepartie de cette fourniture. Par conséquent, on ne l’avait pas convaincu que ces paiements étaient autre chose qu’une réduction ou un remboursement partiel de l’escompte d’Amex, comme il l’avait conclu après la première audience.

 

[32]           Le juge de la CCI a aussi examiné la possibilité que les paiements prévus à l’alinéa 3.01a) puissent être considérés comme étant en partie une réduction ou un remboursement partiel de l’escompte d’Amex, et pour une autre part la contrepartie d’une fourniture faite par Amex au titre de la convention de comarquage. Cependant, a‑t‑il conclu, comme il ne disposait pas de preuves sur ce point, toute ventilation de cette nature aurait été pure conjecture. Il a donc confirmé la décision antérieure par laquelle il avait accueilli l’appel de Costco et avait annulé les cotisations. La Couronne attaque maintenant cette seconde décision par un deuxième appel devant notre Cour.

 

Norme de contrôle

[33]           Dans le présent appel, la norme de contrôle est celle de la décision correcte pour ce qui concerne les questions de droit. Quant aux conclusions mixtes de fait et de droit, elles doivent être confirmés, sauf erreur manifeste et dominante ou erreur de droit isolable (Housen c. Nikolaisen, [2002] 2 R.C.S. 235). Les seuls faits pertinents de la présente espèce sont ceux qui entourent les conventions pertinentes, c’est‑à‑dire, pour reprendre une expression parfois employée, leur matrice factuelle. Or aucun de ces faits n’est controversé.

 

[34]           Il faut rechercher si les paiements faits par Amex à Costco au titre de l’alinéa 3.01a) de la convention de comarquage sont la contrepartie (au sens des principes du droit contractuel) d’une fourniture taxable de Costco. Il s’agit essentiellement d’une question d’interprétation des contrats, soit une question de droit; voir Calgary (Ville) c. Canada, 2010 CAF 127, confirmé, mais sans discussion à ce sujet, par Calgary (Ville) c. Canada, 2012 CSC 20; et Harold McNeil c. Canada (Commission de l’assurance-emploi), 2009 CAF 306.

 

Questions en litige

[35]           Les parties ont proposé des cadres d’analyse différents quant aux questions que met en jeu le présent appel. C’est pourquoi elles ont aussi proposé chacune leur version des questions en litige. À mon sens, celles‑ci peuvent se formuler simplement. Le présent appel doit être rejeté si :

a)             les paiements prévus à l’alinéa 3.01a) n’étaient pas la contrepartie d’une fourniture faite par Costco au titre de la convention de comarquage;

ou

b)             les paiements prévus à l’alinéa 3.01a) formaient la contrepartie d’une fourniture faite par Costco au titre de la convention de comarquage, mais il s’agissait de la fourniture d’un service financier, laquelle est exonérée.

 

Discussion

Les paiements formaient-ils la contrepartie d’une fourniture?

[36]           Le juge de la CCI a conclu que les paiements prévus à l’alinéa 3.01a) constituaient une réduction ou un remboursement partiel de l’escompte d’Amex et non la contrepartie d’une fourniture faite par Costco au titre de la convention de comarquage. Il a tiré cette conclusion sur deux conclusions de fait, elles-mêmes fondées sur les témoignages de dirigeants d’Amex et de Costco.

 

[37]           Premièrement, Amex était disposée à accepter pour les ventes par carte Amex un taux d’escompte inférieur aux X % prévus par la convention de marchand et à consentir à un taux d’escompte de (X-Y) % dans l’hypothèse où Costco signerait la convention de comarquage. Deuxièmement, si le taux de l’escompte d’Amex était fixé à (X-Y) %, le facteur Y de la formule devait être prévu par la convention de comarquage de telle sorte que le fait qu’Amex était disposée à accepter (X-Y) % puisse rester confidentiel. Ces conclusions de fait concordent avec les preuves et ne peuvent donner lieu à aucune controverse.

 

[38]           Mais comment au juste ces faits éclairent-ils l’interprétation des contrats pertinents ou permettent-ils d’établir si les paiements prévus à l’alinéa 3.01a) constituaient la contrepartie d’une fourniture de Costco? Le juge a conclu qu’à la lumière de ceux-ci, il devait statuer en faveur de Costco. Avec tout le respect que je lui dois, je dois écarter cette conclusion. À mon sens, les faits incontestés définissent, du point de vue d’Amex, les objectifs opérationnels des accords contractuels conclus par elle et Costco. L’intelligence des objectifs opérationnels peut se révéler utile dans l’interprétation d’un contrat passé en vue de les atteindre, mais elle ne dicte pas nécessairement l’interprétation du contrat si, comme c’est ici le cas, il y a plusieurs façons d’atteindre ces objectifs et que ledit contrat ne précise pas laquelle de ces façons a été retenue.

 

[39]           Amex avait un objectif de rentrée de fonds et un objectif de confidentialité. Son objectif de rentrée de fonds était de tirer de ses accords contractuels avec Costco des sommes égales à (X-Y) % des ventes par carte Amex. Elle aurait probablement pu atteindre ces objectifs de plusieurs façons. Par exemple, les deux objectifs auraient été remplis si la convention de comarquage avait défini expressément les paiements prévus à l’alinéa 3.01a) comme une réduction ou un remboursement partiel de l’escompte d’Amex. Ou encore, les deux objectifs auraient été atteints si la même convention avait défini expressément ces paiements comme la contrepartie d’une ou de l’ensemble des obligations qu’elle fixait à Amex.

 

[40]           Cependant, les obligations et droits légaux nécessaires pour donner effet à ces deux solutions possibles ne sont pas les mêmes. La première solution aurait correspondu à la thèse de Costco selon laquelle le taux réel de l’escompte d’Amex était de (X-Y) % des ventes par carte Amex. La seconde solution aurait correspondu à la thèse de la Couronne selon laquelle les paiements prévus à l’alinéa 3.01a) constituaient la contrepartie, payée par Amex, d’une ou de plusieurs des obligations contractées par Costco au titre de la convention de comarquage.

 

[41]           Le juge de la CCI a retenu l’interprétation contractuelle proposée par Costco et conclu que les paiements prévus à l’alinéa 3.01a) constituaient une réduction ou un remboursement partiel de l’escompte dû à Amex par Costco au titre de la convention de marchand. À mon sens, l’interprétation de Costco présente trois difficultés.

 

[42]           Premièrement, l’alinéa 3.01a) se trouve dans une partie de la convention de comarquage qui porte sur la rémunération due par Amex à Costco. Il faudrait donc en déduire à première vue que les paiements prévus à cet alinéa constituaient la contrepartie d’une ou de plusieurs des obligations que cette convention fixait à Costco.

 

[43]           Deuxièmement, l’interprétation de Costco suppose que l’objectif de confidentialité d’Amex ne pouvait être atteint par l’assimilation des paiements prévus à l’alinéa 3.01a) à la réduction ou au remboursement partiel de l’escompte d’Amex. Cette hypothèse ne me semble pas fondée. Selon ma lecture du dossier, l’objectif de confidentialité devait être atteint en limitant l’accès à la convention de comarquage et non par un défaut d’explicitation à l’alinéa 3.01a).

 

[44]           Troisièmement, l’interprétation de Costco suppose qu’elle ne fournissait à Amex, au titre de la convention de comarquage, rien de valeur qui ne trouve contrepartie dans les paiements prévus à l’alinéa 3.01b) (la prime). Or, cette hypothèse ne concorde pas avec les éléments tendant à prouver que l’exclusivité – c’est‑à‑dire l’obligation que le paragraphe 2.11 de la convention de comarquage fixe à Costco de n’accepter que des cartes de crédit Amex – avait une valeur substantielle pour Amex et pouvait donc justifier le paiement par elle d’une contrepartie. La valeur de l’exclusivité pour Amex se déduit facilement des clauses contractuelles. Chaque vente de Costco réglée par une carte de crédit autre qu’une carte Amex aurait réduit pour Amex la valeur de l’ensemble de la convention de comarquage. Il serait contraire au simple bon sens de penser qu’Amex aurait signé cette convention sans s’assurer l’exclusivité.

 

[45]           À mon avis, il est plus conforme au libellé des conventions et aux faits qui ne sont pas controversés d’interpréter les paiements prévus à l’alinéa 3.01a) comme une contrepartie versée par Amex à Costco, soit pour son adhésion à la convention de comarquage, soit plus spécialement pour la clause d’exclusivité. Dans l’une ou l’autre hypothèse, Costco fournissait à Amex quelque chose de valeur en signant la convention de comarquage, quelque chose d’autre que les efforts de commercialisation exigés par l’alinéa 2.02a), dont la contrepartie était la prime. (Il n’est pas controversé entre les parties que la prime était soumise à la TPS.)

 

[46]           Les paiements prévus à l’alinéa 3.01a) constituaient-ils la contrepartie d’une « fourniture » au sens de la Loi sur la taxe d’accise? Il faut répondre à cette question par l’affirmative, étant donné la portée des définitions légales des termes « fourniture », « bien » et « service ». Les parties applicables de ces définitions sont libellées comme suit :

« fourniture » […] livraison de biens ou prestation de services, notamment par vente, transfert, troc, échange, louage, licence, donation ou aliénation.

“supply” means … the provision of property or a service in any manner, including sale, transfer, barter, exchange, licence, rental, lease, gift or disposition.

« bien » À l’exclusion d’argent, tous biens — meubles et immeubles — tant corporels qu’incorporels, y compris un droit quelconque, une action ou une part

“property” means any property, whether real or personal, movable or immovable, tangible or intangible, corporeal or incorporeal, and includes a right or interest of any kind, a share and a chose in action, but does not include money.

[…]

« service » Tout ce qui n’est ni un bien, ni de l’argent, ni fourni à un employeur par une personne qui est un salarié de l’employeur, ou a accepté de l’être, relativement à sa charge ou à son emploi.

“service” means anything other than

(a) property,

(b) money, and

(c) anything that is supplied to an employer by a person who is or agrees to become an employee of the employer in the course of or in relation to the office or employment of that person.

 

 

[47]           Toute fourniture d’un bien ou d’un service est une fourniture taxable (et donc soumise à la TPS), sauf si elle est exonérée, c’est‑à‑dire, vu les faits de la présente espèce, si elle a pour objet un service financier. Autrement dit, toute fourniture faite par Costco à Amex au titre de la convention de comarquage est soumise à la TPS, sauf s’il s’agit de la fourniture d’un service financier. Par conséquent, il reste uniquement à rechercher si ce que Costco a fourni à Amex au titre de la convention de comarquage était un service financier. Cette question est examinée dans la partie suivante des présents motifs.

 

La fourniture de Costco avait‑elle pour objet un service financier et était-elle par suite exonérée?

[48]           Comme on l’a vu ci‑dessus, le juge de la Cour de l’impôt a conclu après la première audience que si les paiements prévus à l’alinéa 3.01a) constituaient une contrepartie payée par Amex pour une fourniture faite par Costco au titre de la convention de comarquage, cette fourniture était exonérée au motif qu’elle entrait dans les prévisions de l’alinéa i) de la définition donnée de l’expression « service financier » au paragraphe 123(1) de la Loi sur la taxe d’accise. Pour la commodité du lecteur, je reproduis ici cet alinéa, déjà cité plus haut :

« service financier »

“financial service” means

[…]

i) un service rendu en conformité avec les modalités d’une convention portant sur le paiement de montants visés par une pièce justificative de carte de crédit ou de paiement.

(i) any service provided pursuant to the terms and conditions of any agreement relating to payments of amounts for which a credit card voucher or charge card voucher has been issued.

 

 

 

[49]           Je résumerais comme suit le raisonnement du juge de la CCI sur ce point. Que l’on considère les paiements prévus à l’alinéa 3.01a) comme un élément de la contrepartie de l’ensemble des obligations contractées par Costco au titre de la convention de comarquage, ou seulement comme la contrepartie des obligations de Costco autres que celles de commercialisation, Costco fournit des services d’intermédiaire entre Amex, une grande société émettrice de cartes de crédit, et ses clients éventuels. Essentiellement, la fonction de Costco, au titre de la convention de comarquage, consiste à soutenir Amex dans son activité de fourniture de crédit, et les services qu’elle lui offre ainsi font partie intégrante de cette activité d’Amex. Le juge de la CCI a formulé la conclusion suivante au paragraphe 43 de ses motifs (2009 CCI 134) :

En outre, l’alinéa i) de la définition de « service financier », dans lequel il est fait mention d’un service rendu en conformité avec les modalités d’une convention portant sur le paiement de montants visés par une pièce justificative de carte de crédit, est si large qu’il s’applique facilement aux obligations de Costco, en particulier s’il est lu avec l’expression « prendre des mesures en vue d’effectuer » pareils services, et ce, même lorsque ces obligations ne sont pas directement associées à l’obligation relative aux « efforts de commercialisation » dont il est question à l’alinéa 2.02a). [Souligné dans l’original.]

 

 

[50]           Les motifs du jugement rendu par notre Cour dans le premier appel sont muets sur la question de savoir si un quelconque élément fourni par Costco à Amex est un service financier, et il n’est pas fait mention de cette question dans les motifs du jugement de la CCI qui fait l’objet de l’appel. La Couronne n’a pas non plus soutenu dans le présent appel que le juge de la CCI a commis une erreur dans sa première décision en concluant que l’objet de la fourniture faite par Costco entrait dans le champ de l’alinéa i) de la définition de « service financier ». En outre, je ne vois dans le dossier, en l’état au moment de la première audience de la Cour de l’impôt, ni dans le dossier augmenté de sa deuxième audience, aucune raison de conclure que le juge du fond se soit trompé sur ce point. Normalement, ce serait là un motif suffisant pour conclure à la nécessité de rejeter l’appel de la Couronne contre le second jugement de la Cour de l’impôt.

 

[51]           Cependant, la Couronne soutient que notre Cour doit pousser l’examen plus loin et se rechercher si, étant donné les modifications rétroactives apportées à la définition de « service financier », il n’y aurait pas lieu de conclure que la fourniture de Costco n’est pas visée par définition actuelle de cette expression et était donc taxable au moment où elle a été faite.

 

[52]           Au moment de la deuxième audition de l’affaire par la Cour de l’impôt, la définition de « service financier » avait été modifiée par l’article 55 de la Loi sur l’emploi et la croissance économique, L.C. 2010, ch. 12 (sanctionnée le 12 juillet 2010). Ces modifications étaient réputées être entrées en vigueur le 17 décembre 1990, sous réserve des dispositions transitoires du paragraphe 55(5) applicables à certains services rendus au titre d’une convention constatée par écrit. L’alinéa i) de la définition de « service financier » n’a, quant à lui, fait l’objet d’aucune modification.

 

[53]           La définition des mots « service financier » que donne le paragraphe 123(1) de la Loi sur la taxe d’accise est maintenant libellée comme suit (j’ai souligné les passages ajoutés par l’article 55 de la Loi sur l’emploi et la croissance économique) :

« service financier »

“financial service” means

a) L’échange, le paiement, l’émission, la réception ou le transfert d’argent, réalisé au moyen d’échange de monnaie, d’opération de crédit ou de débit d’un compte ou autrement;

(a) the exchange, payment, issue, receipt or transfer of money, whether effected by the exchange of currency, by crediting or debiting accounts or otherwise,

b) la tenue d’un compte d’épargne, de chèques, de dépôt, de prêts, d’achats à crédit ou autre;

(b) the operation or maintenance of a savings, chequing, deposit, loan, charge or other account,

c) le prêt ou l’emprunt d’un effet financier;

 

(c) the lending or borrowing of a financial instrument,

d) l’émission, l’octroi, l’attribution, l’acceptation, l’endossement, le renouvellement, le traitement, la modification, le transfert de propriété ou le remboursement d’un effet financier;

(d) the issue, granting, allotment, acceptance, endorsement, renewal, processing, variation, transfer of ownership or repayment of a financial instrument,

e) l’offre, la modification, la remise ou la réception d’une garantie, d’une acceptation ou d’une indemnité visant un effet financier;

(e) the provision, variation, release or receipt of a guarantee, an acceptance or an indemnity in respect of a financial instrument,

f) le paiement ou la réception d’argent à titre de dividendes, sauf les ristournes, d’intérêts, de principal ou d’avantages, ou tout paiement ou réception d’argent semblable, relativement à un effet financier;

(f) the payment or receipt of money as dividends (other than patronage dividends), interest, principal, benefits or any similar payment or receipt of money in respect of a financial instrument,

f.1) le paiement ou la réception d’un montant en règlement total ou partiel d’une réclamation découlant d’une police d’assurance;

(f.1) the payment or receipt of an amount in full or partial satisfaction of a claim arising under an insurance policy,

g) l’octroi d’une avance ou de crédit ou le prêt d’argent;

(g) the making of any advance, the granting of any credit or the lending of money,

h) la souscription d’un effet financier;

(h) the underwriting of a financial instrument,

i) un service rendu en conformité avec les modalités d’une convention portant sur le paiement de montants visés par une pièce justificative de carte de crédit ou de paiement;

(i) any service provided pursuant to the terms and conditions of any agreement relating to payments of amounts for which a credit card voucher or charge card voucher has been issued,

j) le service consistant à faire des enquêtes et des recommandations concernant l’indemnité accordée en règlement d’un sinistre prévu par :

(i) une police d’assurance maritime,

 

(ii) une police d’assurance autre qu’une police d’assurance-accidents, d’assurance-maladie ou d’assurance-vie, dans le cas où le service est fourni :

(A) soit par un assureur ou une personne autorisée par permis obtenu en application de la législation d’une province à rendre un tel service,

(B) soit à un assureur ou un groupe d’assureurs par une personne qui serait tenue d’être ainsi autorisée n’eût été le fait qu’elle en est dispensée par la législation d’une province;

 (j) the service of investigating and recommending the compensation in satisfaction of a claim where

 

(i) the claim is made under a marine insurance policy, or

(ii) the claim is made under an insurance policy that is not in the nature of accident and sickness or life insurance and

 

(A) the service is supplied by an insurer or by a person who is licensed under the laws of a province to provide such a service, or

(B) the service is supplied to an insurer or a group of insurers by a person who would be required to be so licensed but for the fact that the person is relieved from that requirement under the laws of a province,

j.1) le service consistant à remettre à un assureur ou au fournisseur du service visé à l’alinéa j) une évaluation des dommages causés à un bien ou, en cas de perte d’un bien, de sa valeur, à condition que le fournisseur de l’évaluation examine le bien ou son dernier emplacement connu avant sa perte;

(j.1) the service of providing an insurer or a person who supplies a service referred to in paragraph (j) with an appraisal of the damage caused to property, or in the case of a loss of property, the value of the property, where the supplier of the appraisal inspects the property, or in the case of a loss of the property, the last-known place where the property was situated before the loss,

k) une fourniture réputée par le paragraphe 150(1) ou l’article 158 être une fourniture de service financier;

(k) any supply deemed by subsection 150(1) or section 158 to be a supply of a financial service,

l) le fait de consentir à effectuer, ou de prendre les mesures en vue d’effectuer, un service qui, à la fois :

(i) est visé à l’un des alinéas a) à i),

 

 

(ii) n’est pas visé aux alinéas n) à t);

(lthe agreeing to provide, or the arranging for, a service that is

 

(i)                 referred to in any of paragraphs (a) to (i), and

 

 

(ii) not referred to in any of paragraphs (n) to (t), or

m) un service visé par règlement.

(m) a prescribed service,

La présente définition exclut :

but does not include

n) le paiement ou la réception d’argent en contrepartie de la fourniture d’un bien autre qu’un effet financier ou d’un service autre qu’un service financier;

(n) the payment or receipt of money as consideration for the supply of property other than a financial instrument or of a service other than a financial service,

o) le paiement ou la réception d’argent en règlement d’une réclamation (sauf une réclamation en vertu d’une police d’assurance) en vertu d’une garantie ou d’un accord semblable visant un bien autre qu’un effet financier ou un service autre qu’un service financier;

(o) the payment or receipt of money in settlement of a claim (other than a claim under an insurance policy) under a warranty, guarantee or similar arrangement in respect of property other than a financial instrument or a service other than a financial service,

p) les services de conseil, sauf un service visé aux alinéas j) ou j.1);

(p) the service of providing advice, other than a service included in this definition because of paragraph (j) or (j.1),

q) l’un des services suivants rendus soit à un régime de placement, au sens du paragraphe 149(5), soit à une personne morale, à une société de personnes ou à une fiducie dont l’activité principale consiste à investir des fonds, si le fournisseur est une personne qui rend des services de gestion ou d’administration au régime, à la personne morale, à la société de personnes ou à la fiducie :

(i) un service de gestion ou d’administration,

(ii) tout autre service (sauf un service prévu par règlement);

(q) the provision, to an investment plan (as defined in subsection 149(5)) or any corporation, partnership or trust whose principal activity is the investing of funds, of

(i) a management or administrative service, or

(ii) any other service (other than a prescribed service),

if the supplier is a person who provides management or administrative services to the investment plan, corporation, partnership or trust,

q.1) un service de gestion des actifs;

(q.1) an asset management service,

r) les services professionnels rendus par un comptable, un actuaire, un avocat ou un notaire dans l’exercice de sa profession;

(r) a professional service provided by an accountant, actuary, lawyer or notary in the course of a professional practice,

r.1) le fait de prendre des mesures en vue du transfert de la propriété des parts du capital social d’une coopérative d’habitation;

(r.1) the arranging for the transfer of ownership of shares of a cooperative housing corporation,

r.2) le service de recouvrement de créances rendu aux termes d’une convention conclue entre la personne qui consent à effectuer le service, ou qui prend des mesures afin qu’il soit effectué, et une personne donnée (sauf le débiteur) relativement à tout ou partie d’une créance, y compris le service qui consiste à tenter de recouvrer la créance, à prendre des mesures en vue de son recouvrement, à en négocier le paiement ou à réaliser ou à tenter de réaliser une garantie donnée à son égard; en est exclu le service qui consiste uniquement à accepter d’une personne (sauf la personne donnée) un paiement en règlement de tout ou partie d’un compte, sauf si la personne qui effectue le service, selon le cas :

(i) peut, aux termes de la convention, soit tenter de recouvrer tout ou partie du compte, soit réaliser ou tenter de réaliser une garantie donnée à son égard,

 

(ii) a pour entreprise principale le recouvrement de créances;

(r.2) a debt collection service, rendered under an agreement between a person agreeing to provide, or arranging for, the service and a particular person other than the debtor, in respect of all or part of a debt, including a service of attempting to collect, arranging for the collection of, negotiating the payment of, or realizing or attempting to realize on any security given for, the debt, but does not include a service that consists solely of accepting from a person (other than the particular person) a payment of all or part of an account unless

 

 

 

(i) under the terms of the agreement the person rendering the service may attempt to collect all or part of the account or may realize or attempt to realize on any security given for the account, or

(ii) the principal business of the person rendering the service is the collection of debt,

r.3) le service, sauf un service visé par règlement, qui consiste à gérer le crédit relatif à des cartes de crédit ou de paiement, à des comptes de crédit, d’achats à crédit ou de prêts ou à des comptes portant sur une avance, rendu à une personne qui consent ou pourrait consentir un crédit relativement à ces cartes ou comptes, y compris le service rendu à cette personne qui consiste, selon le cas :

(i) à vérifier, à évaluer ou à autoriser le crédit,

(ii) à prendre, en son nom, des décisions relatives à l’octroi de crédit ou à une demande d’octroi de crédit,

(iii) à créer ou à tenir, pour elle, des dossiers relatifs à l’octroi de crédit ou à une demande d’octroi de crédit ou relatifs aux cartes ou aux comptes,

(iv) à contrôler le registre des paiements d’une autre personne ou à traiter les paiements faits ou à faire par celle-ci;

(r.3) a service (other than a prescribed service) of managing credit that is in respect of credit cards, charge cards, credit accounts, charge accounts, loan accounts or accounts in respect of any advance and is provided to a person granting, or potentially granting, credit in respect of those cards or accounts, including a service provided to the person of

 

(i) checking, evaluating or authorizing credit,

(ii) making decisions on behalf of the person in relation to a grant, or an application for a grant, of credit,

 

(iii) creating or maintaining records for the person in relation to a grant, or an application for a grant, of credit or in relation to the cards or accounts, or

(iv) monitoring another person’s payment record or dealing with payments made, or to be made, by the other person,

r.4) le service, sauf un service visé par règlement, qui est rendu en préparation de la prestation effective ou éventuelle d’un service visé à l’un des alinéas a) à i) et l), ou conjointement avec un tel service, et qui consiste en l’un des services suivants :

(i) un service de collecte, de regroupement ou de communication de renseignements,

(ii) un service d’étude de marché, de conception de produits, d’établissement ou de traitement de documents, d’assistance à la clientèle, de publicité ou de promotion ou un service semblable;

(r.4) a service (other than a prescribed service) that is preparatory to the provision or the potential provision of a service referred to in any of paragraphs (a) to (i) and (l), or that is provided in conjunction with a service referred to in any of those paragraphs, and that is

(i) a service of collecting, collating or providing information, or

 

(ii) a market research, product design, document preparation, document processing, customer assistance, promotional or advertising service or a similar service,

r.5) un bien, sauf un effet financier ou un bien visé par règlement, qui est livré à une personne, ou mis à sa disposition, conjointement avec la prestation par celle-ci d’un service visé à l’un des alinéas a) à i) et l);

(r.5) property (other than a financial instrument or prescribed property) that is delivered or made available to a person in conjunction with the rendering by the person of a service referred to in any of paragraphs (a) to (i) and (l),

s) les services dont la fourniture est réputée taxable aux termes de la présente partie;

(s) any service the supply of which is deemed under this Part to be a taxable supply, or

t) les services visés par règlement.

(t) a prescribed service.

 

 

[54]           La Couronne invoque en particulier les alinéas r.3), r.4) et r.5) de la définition modifiée, mais sans préciser lesquels de ces alinéas viseraient les services de Costco pour lesquels Amex a effectué les paiements prévus au paragraphe 3.01. La Couronne soutient qu’il faut considérer l’adoption de ces dispositions comme un signe que l’intention du législateur n’était pas d’exonérer de la TPS les services fournis par des détaillants tels que Costco à des établissements financiers tels qu’Amex.

 

[55]           La thèse de la Couronne suppose que l’adoption des alinéas r.3), r.4) et r.5) écarte la nécessité d’un examen détaillé de la définition susdite au regard des faits pertinents. Je ne puis retenir cette thèse. À mon sens, lorsqu’elle doit rechercher si une fourniture donnée est visée par la définition légale de l’expression « service financier », la Cour doit rechercher, en se fondant sur les preuves, si cette fourniture relève de l’une des inclusions des alinéas a) à m) de cette définition, ou de l’une des exclusions de ses alinéas l) à t), et doit préciser laquelle de ces inclusions ou de ces exclusions est applicable.

 

[56]           Dans la présente espèce, la Cour est confrontée avec la décision du juge de la CCI selon laquelle la fourniture en question était comprise dans la définition de « service financier » par l’effet de l’alinéa i). Or, la Couronne n’a pas soutenu que cette décision était erronée au moment où elle a été rendue, et je n’ai pu trouver aucune raison de conclure à son caractère erroné.

 

[57]           Chose plus importante, la Couronne n’a cité aucun élément du dossier qui autoriserait notre Cour à conclure que la fourniture en question ressortisse à l’une des exclusions nouvellement adoptées des alinéas r.3), r.4) et r.5) de la définition de « service financier » –  en supposant, sans décider ce point, qu’une telle conclusion exclurait nécessairement cette fourniture de ladite définition dans le cas où elle entrerait par ailleurs dans le champ de son alinéa i). La Couronne n’ayant pas pris de conclusions sur le fondement factuel de l’application des alinéas r.3), r.4) et r.5) à la présente espèce, je ne vois pas sur quelle base notre Cour pourrait conclure que la fourniture considérée entre dans les prévisions de l’un ou l’autre de ces alinéas.

 

[58]           Je ne dis pas qu’il ne soit pas permis d’apporter des modifications rétroactives à la Loi sur la taxe d’accise ou de les appliquer, mais seulement que, dans la présente espèce, on ne m’a pas convaincue de l’existence de faits d’après lesquels notre Cour pourrait conclure que la fourniture en question entre dans les prévisions des alinéas r.3), r.4) ou r.5).

 

[59]           Costco a avancé qu’elle était [TRADUCTION] « protégée par des droits acquis », autrement dit que les dispositions transitoires du paragraphe 55(5) de la Loi sur l’emploi et la croissance économique l’exemptaient de l’effet rétroactif des modifications apportées à la définition légale de l’expression « service financier ». Il n’est pas nécessaire que j’examine ce moyen et je m’en abstiendrai.

 

[60]           Je conclus que notre Cour ne serait pas fondée à infirmer la conclusion du juge de la CCI selon laquelle la fourniture en question était exonérée.

 

Observations sur l’attitude à adopter à l’égard des modifications rétroactives

L’importance d’une décision de première instance

[61]           Vu les circonstances inhabituelles de la présente espèce, on ne peut s’empêcher d’accorder un certain poids à la thèse de Costco portant que, pour des raisons d’équité, notre Cour ne devrait pas accueillir le moyen de la Couronne tiré des modifications rétroactives édictées par l’article 55 de la Loi sur l’emploi et la croissance économique. Néanmoins, notre Cour a examiné ce moyen de manière aussi approfondie que possible vu le dossier dont elle dispose.

 

[62]           Les dispositions modifiées sont complexes et techniques, et s’inscrivent dans un régime légal encore plus complexe et technique. On ne peut examiner l’application des dispositions modifiées sans effectuer une analyse éclairée d’un certain nombre de dispositions connexes (notamment les articles 138 et 139). Notre Cour serait très mal armée pour connaître de ce sujet sans pouvoir s’appuyer sur la décision motivée d’un juge devant qui on a produit en première instance des éléments de preuve visant expressément les questions de fait que soulèvent les dispositions modifiées.

 

[63]           Aucune des parties, m’empresserai-je d’ajouter, n’a soutenu que la présente espèce justifierait la tenue d’une troisième audition de l’affaire devant la Cour de l’impôt, et je n’en vois pas plus qu’elles la nécessité.

 

La procédure à suivre pour avancer un nouveau moyen fondé sur une modification rétroactive

[64]           La Couronne a invoqué à la deuxième audition de l’affaire devant la Cour de l’impôt les dispositions législatives modifiées sur lesquelles elle se fonde sans avoir modifié ses conclusions écrites en conséquence ni avoir produit d’éléments de preuve visant expressément les questions de fait que soulèvent ces dispositions. En règle générale, lorsqu’elle veut défendre une cotisation devant la Cour de l’impôt en se basant sur de nouvelles dispositions législatives (notamment des dispositions rétroactives nouvellement promulguées), la Couronne est tenue, sous réserve des règles de procédure applicables, de modifier ses conclusions écrites de manière à y ajouter toutes nouvelles allégations de fait éventuellement nécessaires et à y faire référence aux nouvelles dispositions en question.

 

[65]           La charge pèse alors sur la Couronne de prouver tous faits nouveaux pertinents faisant jouer les nouvelles dispositions qui n’auraient pas été pris en considération dans l’établissement de la cotisation contestée. Si le dossier, en l’état, ne lui permet pas de s’acquitter de cette charge, elle doit produire de nouveaux éléments de preuve, toujours sous réserve des règles de procédure applicables. Dans la présente espèce, la Couronne a eu la possibilité de produire de nouveaux éléments de preuve à la seconde audition de l’affaire par la Cour de l’impôt, mais ne semble pas s’en être prévalue.

 

Conclusion

[66]           Par ces motifs, je conclus que les paiements effectués par Amex au titre de l’alinéa 3.01a) de la convention de comarquage constituaient la contrepartie d’une fourniture de Costco, et que cette fourniture, ayant pour objet un « service financier », était exonérée. Je rejetterais donc l’appel. Costco a droit aux dépens du présent appel et du premier porté devant notre Cour.

 

 

« K. Sharlow »

j.c.a.

 

 

« Je souscris à ces motifs.

         John M. Evans, j.c.a. »

 

« Je souscris à ces motifs.

         Carolyn Layden‑Stevenson , j.c.a. »

 

 

Traduction certifiée conforme

François Brunet, réviseur

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                            A‑493‑10

 

APPEL D’UN JUGEMENT DE MONSIEUR LE JUGE CAMPBELL J. MILLER, DATÉ DU 30 NOVEMBRE 2010, DOSSIER NO 2007-1374(GST)G

 

INTITULÉ :                                                          SA MAJESTÉ LA REINE c.

                                                                                COSTCO WHOLESALE CANADA LTD.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                  Toronto

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                 Le 23 janvier 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                               LA JUGE SHARLOW

 

Y ONT SOUSCRIT :                                            LE JUGE EVANS

                                                                                LA JUGE LAYDEN-STEVENSON

 

DATE DES MOTIFS :                                         Le 30 mai 2012

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Marilyn Vardy 

Sharon Lee 

Darren Prevost

 

POUR L’APPELANTE

 

William Innes  

Neil Bass   

Timothy Fitzsimmons

POUR L’INTIMÉE

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

 

POUR L’APPELANTE

 

Fraser Milner Casgrain, s.r.l.

Toronto (Ontario)

POUR L’INTIMÉE

 

 

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