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Date : 20120611

Dossier : A‑455‑11

Référence : 2012 CAF 174

 

CORAM :      LE JUGE EN CHEF BLAIS

                        LE JUGE LÉTOURNEAU

                        LE JUGE PELLETIER

 

ENTRE :

HOLLICK SOLAR SYSTEMS LIMITED

et CONSERVAL ENGINEERING INC.

appelantes

et

ÉNERGIE MATRIX INC.

intimée

 

 

 

 

 

Audience tenue à Montréal (Québec), le 4 juin 2012

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 11 juin 2012

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                  LE JUGE LÉTOURNEAU

Y ONT SOUSCRIT :                                                                          LE JUGE EN CHEF BLAIS

                                                                                                                      LE JUGE PELLETIER

 


Date : 20120611

Dossier : A‑455‑11

Référence : 2012 CAF 174

 

CORAM :      LE JUGE EN CHEF BLAIS

                        LE JUGE LÉTOURNEAU

                        LE JUGE PELLETIER

 

ENTRE :

HOLLICK SOLAR SYSTEMS LIMITED

et CONSERVAL ENGINEERING INC.

appelantes

et

ÉNERGIE MATRIX INC.

intimée

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

LE JUGE LÉTOURNEAU

 

[1]               Hollick Solar Systems Limited et Conserval Engineering Inc., les appelantes, contestent le jugement par lequel le juge Scott de la Cour fédérale (le juge) a rejeté l’action dans laquelle elles alléguaient qu’Énergie Matrix Inc., l’intimée, a contrefait le brevet canadien no 1,326,619 (le brevet 619) en vendant un système de chauffage de l’air par énergie solaire appelé MatrixAir (le système Matrix).

 

[2]               L’appel soulève la question suivante :

 

Le juge a‑t‑il commis une erreur susceptible de contrôle en concluant que le système Matrix ne contrefait pas le brevet 619 des appelantes?

 

 

[3]               Ce moyen d’appel suppose que le juge a fait erreur :

 

a)         dans l’interprétation de la revendication 10 du brevet 619 lorsqu’il a conclu que le positionnement de l’orifice d’admission d’air au sommet du panneau du système de chauffage par énergie solaire SolarWall des appelantes était un élément essentiel de l’invention;

 

b)         en parvenant à la conclusion que la variante du système Matrix influençait de façon appréciable le fonctionnement de l’invention décrite à la revendication 10 du brevet 619;

 

c)         en écartant à tort le témoignage de l’expert des appelantes;

 

d)         en omettant d’examiner l’argument subsidiaire selon lequel le système Matrix de l’intimée offert et vendu sur le marché contrefait effectivement le brevet 619 parce que l’orifice d’admission d’air du système Matrix n’est pas vraiment situé dans la partie inférieure et que, en fait, sur certains systèmes, cet orifice est situé dans la partie supérieure.

 

[4]               Pour les motifs exposés ci‑dessous, je suis d’avis de rejeter l’appel.

 

Les faits à l’origine du litige

 

[5]               Hollick Solar Systems Limited (Hollick) et Conserval Engineering Inc. (Conserval) sont des sociétés affiliées. Conserval offre depuis 30 ans des solutions d’énergie renouvelable telles que des systèmes de chauffage par énergie solaire. Elle ne fabrique pas ces systèmes. Elle achète plutôt des composants clés à des fournisseurs et les revend.

 

[6]               Énergie Matrix est une société qui offre une gamme de systèmes de chauffage par énergie solaire depuis 1985. De 1991 à mars 2007, elle a distribué des systèmes de chauffage par énergie solaire conçus par Conserval. En raison d’un désaccord entre les parties, l’accord de distribution a pris fin et Énergie Matrix a commencé à faire des estimations et à vendre un système de chauffage par énergie solaire appelé MatrixAir.

 

[7]               Le système Matrix correspond en fait au système des appelantes à une variante près : au lieu de comporter un orifice d’entrée au sommet de l’espace d’admission d’air, comme dans la description du brevet 619 des appelantes figurant dans les revendications 1 et 10 de ladite invention, l’orifice d’entrée du système Matrix est situé dans la partie inférieure de l’espace d’admission d’air, ou près celle‑ci.

 

Analyse de la décision contestée et des prétentions des parties

 

[8]               Il n’est pas nécessaire d’examiner l’argument subsidiaire des appelantes vu ma conclusion sur la principale question soulevée en l’espèce.

 

[9]               Il ressort clairement des motifs de la décision contestée et des mémoires exposant les faits et le droit soumis par les parties en appel que la seule question qui se posait dans la présente affaire était celle de savoir si l’emplacement de l’admission d’air dont il est question dans les revendications 1 et 10 était un élément essentiel de l’invention, qui limitait donc la portée du brevet 619.

 

[10]           Aux paragraphes 2 et 35 des motifs de la décision, le juge affirme ce qui suit :

 

[2]        Au départ, la défenderesse a contesté la validité du brevet. Elle a par la suite modifié son acte de procédure et a soutenu que le système MatrixAir étant une variante qui échappe à la portée du brevet 619, il ne peut donc y avoir contrefaçon du brevet. La défenderesse a déposé une défense modifiée et une demande reconventionnelle le 11 janvier 2008.

 

[35]      Les demanderesses allèguent que la présente affaire vise une seule question, celle de savoir si la restriction précisant l’entrée [traduction] « au sommet » qui figure dans les revendications 1 et 10 est essentielle. Une conclusion selon laquelle cette restriction n’est pas essentielle signifie, selon les demanderesses, qu’elle peut être omise et par conséquent, tous les systèmes MatrixAir offerts en vente et vendus par la défenderesse ont contrefait le brevet canadien 619.

 

 

[11]           Au paragraphe 7 de leur mémoire des faits et du droit, les appelantes affirment ce qui suit :

 

[traduction]

La principale question en litige est celle de savoir s’il est exact que la restriction consistant à préciser que l’orifice d’entrée d’air se trouve « au sommet » n’est pas un élément essentiel de la revendication 10, de sorte que le système MatrixAir contreferait cette revendication.

 

 

[12]           Les appelantes réaffirment ensuite leur argument subsidiaire, mentionné précédemment au point d) du paragraphe 3, à examiner que s’il est conclu que la restriction constitue un élément essentiel de la revendication 10.

 

[13]           Le fait que l’intimée comprenait que la seule question à trancher visait le caractère essentiel de la restriction consistant à préciser que l’orifice d’entrée d’air se trouve « au sommet » qui figure à la revendication 10 ressort tout au long de la lecture de son mémoire des faits et du droit.

 

[14]           Le juge a fait une brève allusion à l’approche énoncée par la Cour suprême dans Free World Trust c. Électro Santé Inc., [2000] 2 R.C.S. 1024, concernant l’interprétation des revendications : voir le paragraphe 51 de ses motifs de jugement. Il a ensuite entrepris de trancher la seule question en litige devant lui. Pour se faire, il s’est appuyé sur l’arrêt Free World Trust : ibidem au paragraphe 54. Il a suivi les enseignements de la Cour suprême pour déterminer si la restriction figurant à la revendication 10 constitue un élément essentiel de l’invention.

 

[15]           Il n’est pas contesté que le système Matrix comporte une variante par rapport au système de chauffage de l’air SolarWall des appelantes. Il s’agissait donc de déterminer si la variante influence de façon appréciable le fonctionnement de l’invention.

 

[16]           Pour répondre à cette question, le juge a examiné la preuve d’expert fournie tant par les appelantes que par l’intimée. Il a écarté la preuve de l’expert des appelantes concernant un certain nombre de questions, mais dans tous les cas il a justifié sa décision de le faire. Il est vrai qu’il semble ne pas avoir bien compris la preuve de l’expert des appelantes (voir au paragraphe 58 de ses motifs de jugement) sur la question de savoir si l’efficacité est le critère devant être utilisé pour évaluer l’effet de la variante, mais il a néanmoins appliqué le bon test. Au paragraphe 59, il a affirmé ce qui suit :

 

Le critère n’est pas de savoir si la variante améliore le rendement de l’invention, mais plutôt si elle a un effet appréciable sur le fonctionnement de l’invention, que cet effet soit positif ou négatif.

 

 

[17]           Le juge a accepté le témoignage de l’expert de l’intimée selon lequel la variante influence de façon appréciable le fonctionnement de l’invention : voir les paragraphes 64, 72, 73 et 74 de ses motifs de jugement. Il nous est en fait demandé de remettre en cause l’appréciation que le juge a faite de la preuve d’expert portant sur des questions factuelles et de crédibilité et d’y substituer ensuite notre propre appréciation. Nous sommes fortement désavantagés à cet égard et, suivant la norme de contrôle applicable, nous ne pouvons pas entreprendre pareil exercice à moins que le juge n’ait commis des erreurs de droit ou des erreurs dominantes et manifestes sur des questions de fait ou des questions mixtes de fait et de droit : voir Housen c. Nikolaisen, [2002] 2 R.C.S. 235. Après avoir examiné le dossier dont la Cour disposait, je n’ai trouvé aucune erreur de cette nature susceptible d’avoir une incidence importante sur la décision en appel et qui justifierait l’intervention de la Cour.

 

[18]           Pour les motifs exposés précédemment, malgré l’excellente argumentation de l’avocat des appelantes, je rejetterais l’appel avec dépens.

 

 

« Gilles Létourneau »

j.c.a.

 

 

« Je suis d’accord

            Pierre Blais, juge en chef »

 

« Je suis d’accord

            J.D. Denis Pelletier, j.c.a. »

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Chantal DesRochers, LL.B., D.E.S.S. en trad.

 

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    A‑455‑11

 

 

INTITULÉ :                                                  HOLLICK SOLAR SYSTEMS LIMITED et CONSERVAL ENGINEERING INC. c.
ÉNERGIE MATRIX INC.

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                          Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                         Le 4 juin 2012

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                       LE JUGE LÉTOURNEAU

 

Y ONT SOUSCRIT :                                   LE JUGE EN CHEF BLAIS

                                                                        LE JUGE PELLETIER

 

 

DATE DES MOTIFS :                                 Le 11 juin 2012

 

 

COMPARUTIONS :

 

Pascal Lauzon

 

POUR LES APPELANTES

 

François M. Grenier

 

POUR L’INTIMÉE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

BCF

Montréal (Québec)

 

POUR LES APPELANTES

 

ROBIC, s.e.n.c.r.l.

Montréal (Québec)

 

POUR L’INTIMÉE

 

 

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