ENTRE :
et
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
et SA MAJESTÉ LA REINE
Audience tenue à Winnipeg (Manitoba), le 7 juin 2012.
Jugement rendu à l’audience à Winnipeg (Manitoba), le 7 juin 2012.
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR : LE JUGE STRATAS
Dossier : A‑241‑11
Référence : 2012 CAF 171
CORAM : LE JUGE NOËL
LA JUGE DAWSON
LE JUGE STRATAS
ENTRE :
SAGKEENG MEMORIAL ARENA INC.
appelante
et
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL
et SA MAJESTÉ LA REINE
intimés
MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR
(Prononcés à l’audience à Winnipeg (Manitoba) le 7 juin 2012)
[1] La Cour est saisie de l’appel d’une décision, datée du 24 mai 2011, par laquelle le ministre du Revenu national a refusé l’enregistrement de l’appelante à titre d’« œuvre de bienfaisance » en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C., 1985, ch. 1 (5e suppl.).
[2] Les parties conviennent que l’exercice du pouvoir discrétionnaire du ministre en l’espèce était guidé par la définition d’« œuvre de bienfaisance » énoncée à l’article 149.1 de la Loi et interprétée par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Vancouver Society of Immigrant and Visible Minority Women c. M.R.N., [1999] 1 R.C.S. 10.
[3] Le ministre a refusé d’enregistrer l’appelante, celle‑ci ne l’ayant pas convaincu qu’elle était une « œuvre de bienfaisance ». Pour parvenir à cette décision, le ministre a appliqué les principes juridiques établis aux faits qui lui avaient été soumis. Dans ces circonstances, nous devons appliquer la norme déférente de la décision raisonnable dans notre examen de la décision du ministre : International Pentecostal Ministry c. Ministre du Revenu national, 2010 CAF 51, au paragraphe 6; Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Khosa, 2009 CSC 12.
[4] Pour étayer sa demande d’enregistrement, l’appelante s’est principalement fondée sur deux documents : un projet de modification de ses statuts constitutifs et un projet de convention de mandat avec Fort Alexander Holdings Inc., une entreprise qui devait l’appuyer dans son travail. Des déclarations générales d’intention figurent dans ces documents quant aux activités que l’appelante et Fort Alexander entendaient poursuivre.
[5] Plusieurs lettres ont été échangées entre l’appelante et le ministre, qui a finalement refusé d’enregistrer l’appelante à titre d’« œuvre de bienfaisance ». Dans plusieurs de ces lettres, le ministre a indiqué qu’il n’était pas satisfait des renseignements contenus dans les documents produits par l’appelante parce qu’ils étaient insuffisants et n’étaient pas assez détaillés.
[6] À plus d’une occasion, le ministre a demandé à l’appelante de lui fournir des renseignements détaillés confirmant, entre autres choses, que ses activités étaient orientées vers des objectifs charitables et qu’elle consacrerait toutes ses ressources à des activités de bienfaisance. Le ministre était également préoccupé à propos de la participation de Fort Alexander Holdings Inc. et se demandait si l’appelante conserverait la direction et le contrôle de ses ressources consacrées aux activités de bienfaisance. Le projet de modification des statuts constitutifs et le projet de convention de mandat produits par l’appelante n’ont pas répondu à ses questions.
[7] L’appelante n’a jamais fourni au ministre les renseignements exigés. Les préoccupations du ministre ont principalement motivé sa décision, en date du 24 mai 2011, de refuser l’enregistrement de l’appelante.
[8] Nous concluons que les préoccupations du ministre étaient fondées sur les conditions énoncées à l’article 149.1 de la Loi et les principes juridiques établis dans l’arrêt Vancouver Society, précité. D’après les faits, il était tout à fait acceptable et défendable pour le ministre d’exiger de l’appelante des renseignements plus complets et de meilleure qualité. C’est une chose de produire des projets de documents qui témoignent de ses aspirations, mais c’en est une autre de présenter des documents définitifs qui font état d’intentions détaillées et crédibles.
[9] À cet égard, il convient de rappeler que, lorsqu’un organisme est enregistré à titre d’« œuvre de bienfaisance », il en tire des avantages importants. Il est exempté de l’obligation de payer de l’impôt et peut délivrer des reçus officiels aux donateurs : voir les paragraphes 110.1(1) et 118.1 (1) de la Loi. Avant de consentir à l’enregistrement, le ministre est en droit d’exiger des renseignements crédibles et détaillés qui répondent aux exigences de l’article 149.1, de l’arrêt Vancouver Society, et de toute autre décision applicable.
[10] L’appelante allègue également qu’il y a eu manquement à l’équité procédurale. À la fin de l’échange entre le ministre et l’appelante, celle‑ci a produit une lettre en date du 18 avril 2011. Dans cette lettre, l’avocat de l’appelante a fait des observations, invitant le ministre à formuler des commentaires, et a exprimé sa volonté d’apporter des changements au projet de modification des statuts constitutifs. Il n’a pas demandé qu’on lui accorde un délai pour trouver les renseignements nécessaires. À première vue, cette lettre du 18 avril 2011 vise à répondre aux préoccupations du ministre. L’appelante reproche au ministre de ne pas avoir répondu à cette lettre et d’avoir, plutôt, simplement rendu sa décision définitive.
[11] À notre avis, il n’y a aucun manquement à l’équité dans ces circonstances. En fait, la conduite du ministre témoigne d’une très grande équité. Presque un an avant sa décision définitive, le ministre a fait part de ses préoccupations à l’appelante dans une lettre d’équité administrative en date du 29 juin 2010. Le ministre a exprimé de nouveau ses préoccupations dans un avis en date du 15 septembre 2010 et dans une lettre de proposition en date du 28 février 2011, dans laquelle il a accordé à l’appelante une prorogation du délai pour répondre. Les préoccupations du ministre sont demeurées constantes. Dès le début, l’appelante savait ce qu’on lui reprochait. Le ministre lui a offert amplement l’occasion d’y remédier.
[12] Par conséquent, nous rejetons l’appel avec dépens.
Traduction certifiée conforme
Mario Lagacé, jurilinguiste
COUR D’APPEL FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : A‑241‑11
APPEL D’UNE DÉCISION EN DATE DU 24 MAI 2011 DU MINISTRE DU REVENU NATIONAL
INTITULÉ : SAGKEENG
MEMORIAL ARENA INC. c.
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL ET SA MAJESTÉ LA REINE
LIEU DE L’AUDIENCE : Winnipeg (Manitoba)
DATE DE L’AUDIENCE : Le 7 juin 2012
MOTIFS DU JUGEMENT
DE LA COUR : LES JUGES NOËL, DAWSON ET STRATAS
PRONONCÉS À L’AUDIENCE PAR : LE JUGE STRATAS
COMPARUTIONS :
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POUR L’APPELANTE
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POUR LES INTIMÉS
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Duboff Edwards Haight & Schachter Law Corporation Winnipeg (Manitoba)
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POUR L’APPELANTE
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Sous‑procureur général du Canada |
POUR LES INTIMÉS
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