Décisions de la Cour d'appel fédérale

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Date : 20120831

Dossier : A-166-11

Référence : 2012 CAF 226

 

 

CORAM :      LA JUGE LAYDEN-STEVENSON *

                        LA JUGE GAUTHIER

                        LE JUGE STRATAS

 

 

ENTRE :

HARMONY CONSULTING LTD.

appelante

et

G. A. FOSS TRANSPORT LTD., GORDON A. FOSS et JOE CRISTELLO

intimés

 

 

Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 14 février 2012.

Jugement prononcé à Ottawa (Ontario), le 31 août 2012.

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                        LA JUGE GAUTHIER

Y A SOUSCRIT :                                                                                            LE JUGE STRATAS

 

N'A PAS PRIS PART AU JUGEMENT :                          LA JUGE LAYDEN-STEVENSON *

 

 

 

* La juge Layden‑Stevenson n'a pu participer aux délibérations de la Cour. Elle est décédée le 27 juin 2012. Le jugement et les présents motifs sont rendus en vertu du paragraphe 45(3) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F‑7.

 


 

 

 

Date : 20120831

Dossier : A-166-11

Référence : 2012 CAF 226

 

CORAM :      LA JUGE LAYDEN-STEVENSON *

                        LA JUGE GAUTHIER

                        LE JUGE STRATAS

 

ENTRE :

HARMONY CONSULTING LTD.

appelante

et

G. A. FOSS TRANSPORT LTD., GORDON A. FOSS et JOE CRISTELLO

intimés

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

LA JUGE GAUTHIER

[1]               Harmony Consulting Ltd. (Harmony) interjette appel de la décision de la Cour fédérale, dont la référence est 2011 CF 340, rejetant son action pour violation du droit d'auteur à l'égard de programmes informatiques pour lesquels une licence a été accordée à G. A. Foss Transport Ltd. (Foss). Foss et ses deux actionnaires, Gordon A. Foss et Joe Cristello, étaient les défendeurs à l'action.

 

[2]               Au paragraphe 25 de ses motifs (les motifs), la juge de première instance a décrit comme suit les divers programmes informatiques en cause :

a.         Petro Dispatch 2000 : logiciel initial acheté par Foss Transport, utilisé pour l'entrée des commandes, l'expédition, la réconciliation post‑commande, la facturation et les prévisions. Il comprenait les modules suivants :

 

i.          module d'expédition principal;

 

ii.         module post‑commande;

 

iii.        module de facturation;

 

iv.        module de rapports;

 

v.         module de prévision de dépassement.

 

b.         Programme de facturation selon la carte d'accès : les installations verrouillées par carte sont des postes d'approvisionnement, généralement complètement automatisés, dont l'accès s'effectue au moyen d'une carte de crédit et d'un code [...] pour les véhicules commerciaux. Ce programme produit des factures pour les clients utilisant ce type d'installations.

 

c.         Programme Railmaster : Ce programme se composait de deux sections distinctes; la gestion des wagons et l'expédition. La section de la gestion des wagons assurait un suivi des stocks dans les wagons, se chargeait de la facturation du temps sur les voies d'évitement et de l'expédition des produits en vrac. Le module d'expédition avait trait à l'expédition de ciment, de produits de pétrole lourd, d'asphalte et d'huiles usées.

 

d.         Module de la paie : ce module a été conçu pour effectuer les fonctions de paie en fonction du type de conducteur, du type de charge et d'accords liés aux achats. Les données au sujet des noms des conducteurs et autres détails étaient entrées, mais la personnalisation du module selon les exigences de Foss Transport n'a jamais été entièrement effectuée, et M. Chari n'a également pas rendu le programme opérationnel pour Foss Transport. En fin de compte, Foss Transport n'a jamais utilisé ce programme pour les fonctions de paie.

 

e.         Modifications : afin que Foss Transport puisse utiliser le logiciel, de nombreuses modifications et de nombreux « ajouts » ont été effectués, pour la plupart des modifications mineures au programme visant à faciliter l'utilisation du logiciel par le personnel administratif de Foss Transport. Des modifications ont notamment été apportées aux taux de rectification et à la méthode de tarification afin de se conformer au modèle opérationnel de Foss Transport et aux pratiques du secteur. Sans égard à l'importance ou au type de modification, la demanderesse a affirmé que ces modifications devaient être couvertes par un nouveau contrat de licence et être protégées par un droit d'auteur distinct.

 

[3]               À mon avis, bien que les motifs contiennent certaines erreurs, un certain nombre des conclusions de la juge de première instance sont confirmées. Ensemble, ces conclusions sont suffisantes pour maintenir la décision qu'elle a prise. Par conséquent, je rejetterais l'appel de Harmony.

 

[4]               Harmony soulève de nombreuses questions en appel. On peut les regrouper comme suit :

i)          Qui est le titulaire du droit d'auteur sur Petro Dispatch 2000?

ii)         L'un des droits d'auteur de Harmony a‑t‑il été violé?

iii)        Les particuliers intimés sont-ils personnellement responsables d'une telle violation?

 

LE CONTEXTE FACTUEL

[5]               Harmony a été constituée en société le 16 mars 2000 par Sushil Chari. Harmony fournit des services de programmation informatique et de soutien. Foss exploite une entreprise de transport par camion, de postes de carburant diésel libre‑service et de produits pétroliers. Gordon Foss et Joe Cristello sont respectivement le président et le vice‑président de Foss.

 

[6]               Au début de l'an 2000, Foss envisageait la modernisation de ses activités en mettant en place des systèmes informatiques de répartition et de facturation. Elle avait fait appel à des programmeurs indépendants dans le passé, mais l'expérience n'avait pas été favorable. Dans ce cas‑ci, Foss avait retenu les services d'un programmeur pour préparer le prédécesseur d'un des programmes en cause, le Railmaster. Malheureusement, ce programmeur est décédé avant d'avoir pu achever le travail. Dans le cas du programme lié à l'entreprise de cartes d'accès, Foss a découvert que le programme n'était pas homologué pour l'an 2000, mais elle n'a pu obtenir l'aide de l'auteur de ce programme, car il avait déménagé à la côte Ouest.

 

[7]               La juge de première instance a statué que le programme Petro Dispatch 2000 (Petro) est une compilation de nombreux modules organisés par fonction. Plusieurs de ses éléments constitutifs ne sont pas originaux et ne sont pas protégés par le droit d'auteur. Toutefois, la compilation était en soi originale et pouvait être protégée par le droit d'auteur. Comme tous les autres programmes en cause, Petro avait été développé pour la base de données Microsoft Access dont Foss est propriétaire. Ce point n'est plus contesté. Une large partie de l'action de Harmony était fondée sur la violation du droit d'auteur sur la compilation en question.

 

[8]               Foss a conclu trois contrats de licence avec Harmony. Le premier contrat de licence, du 29 mars 2000, porte sur le logiciel Petro. Le deuxième porte sur le programme Railmaster, alors que le troisième s'applique au programme de facturation selon la carte d'accès. Ces deux derniers contrats de licence sont datés du 26 mars 2001. Les trois contrats de licence prévoient que des licences perpétuelles sont concédées à Foss, et Foss a payé intégralement les droits de ces licences. La juge de première instance a estimé que les contrats de licence n'avaient jamais été dûment résiliés, et que Foss avait le droit d'utiliser les programmes jusqu'à ce qu'ils soient remplacés à différentes dates avant le procès.

 

[9]               Outre les contrats de licence susmentionnés, Foss et Harmony avaient conclu une entente de soutien et d'entretien en vertu de laquelle Foss payait Harmony 1 000 $ par semaine pour apporter des corrections, des adjonctions, des modifications ou des mises à jour aux programmes sous licence. L'interprétation donnée par la juge de première instance des divers contrats entre les parties n'est plus contestée lors du présent appel.

 

[10]           La juge de première instance a estimé que les programmes sous licence soumis à son examen avaient été créés par M. Chari, actionnaire, dirigeant et administrateur unique de Harmony.

 

[11]           Avant la constitution en société de Harmony, M. Chari faisait de la programmation (de même que de la vente de fournitures médicales) pour une autre société détenue par lui et son frère, Atrimed Medical Supply Inc. (Atrimed). M. Chari a commencé à travailler sur Petro en 1998.

 

[12]           La juge de première instance a conclu qu'Atrimed préparait Petro pour Roy Curran Transport (RCT). La personne-ressource principale chez RCT était M. Reynolds qui, plus tard, a présenté M. Chari à Foss au début de l'an 2000, en invitant alors MM. Foss et Cristello aux bureaux de RCT pour y assister à une démonstration de ce logiciel.

 

[13]           La conclusion de la juge de première instance selon laquelle Petro avait été intégralement mis au point avant la constitution en société de Harmony, mais devait être adapté afin de convenir aux activités de Foss, n'est pas contestée. Cependant, certains points sont encore contestés en appel, à savoir si les modifications qui étaient nécessaires pour répondre aux besoins de Foss avant que l'entreprise ne commence à utiliser Petro en février 2001 (ou en août 2001, comme le prétend Harmony) étaient de nature à justifier des droits d'auteur distincts.

 

[14]           À la demande de Foss, M. Chari a préparé le programme de facturation selon la carte d'accès et le programme Railmaster quelque temps après que Harmony eut été constituée en société en 2000. Le module de prévision de dépassement a été préparé plus tard, en 2002.

 

[15]           La juge de première instance a conclu que les seules modifications qui étaient originales et protégées de façon distincte par le droit d'auteur, au sens de la Loi sur le droit d'auteur, L.R.C. 1985, ch. C‑42 (la Loi), étaient le module de prévision de dépassement, Railmaster et le module de la paie. Toutefois, comme l'a mentionné la juge de première instance, Foss n'a jamais utilisé le module de la paie.

 

[16]           Comme l'a fait remarquer la juge de première instance, au départ, les relations des parties étaient amicales. M. Chari fournissait des services en vertu de l'entente de soutien et Foss réglait sans tarder toutes les factures. Toutefois, en mars 2003, le soutien fourni par Harmony à Foss en vertu de l'entente ayant diminué, les relations s'étaient quelque peu détériorées. M. Chari a autorisé Foss à embaucher un autre programmeur pour assurer le soutien des programmes sous licence. Foss a donc retenu les services de Mme Warth, qui, par la suite, a donné le compte de Foss en sous‑traitance à Bill Benton et à son entreprise, BiLd Solutions. Néanmoins, Foss a continué de verser à Harmony les frais hebdomadaires de 1 000 $ prévus dans l'entente de soutien, et ce, jusqu'au 23 mars 2004.

 

[17]           En 2003, M. Chari est devenu propriétaire de RCT et a essayé de la regrouper avec Foss. Ils n'ont pu en arriver à une entente sur le regroupement. La juge de première instance a estimé que cet échec avait joué un rôle catalyseur dans la rupture complète des rapports entre les parties. Plusieurs choses se sont passées au moment de la rupture. La juge de première instance a constaté que M. Chari avait fait passer unilatéralement à 2 000 $ les frais prévus à l'entente de soutien. M. Chari affirmait que Foss avait accumulé un arriéré de près de 20 000 $ après l'échec du regroupement. La juge de première instance a conclu que M. Chari avait fabriqué l'arriéré de paiement et les factures en souffrance afin de justifier son comportement ultérieur. La juge a de plus constaté, et ce point n'est pas contesté, que M. Chari avait ajouté deux « bombes à retardement » aux modules de facturation et d'expédition. M. Chari les a décrites comme étant un code précis et une règle de validation ajoutés aux modules de sorte qu'ils ne puissent pas être utilisés illégalement par Foss après certaines dates. De son point de vue, il s'agissait de mesures de sécurité qui n'étaient pas conçues pour endommager le système d'exploitation de Foss. Cependant, comme la juge de première instance l'a constaté, elles ont causé beaucoup de dégâts. Le 18 avril 2004, la première « bombe à retardement » a explosé, causant une panne du système informatique de Foss. Le 1er mai 2004, la seconde « bombe à retardement » a explosé, perturbant les activités de l'entreprise.

 

[18]           Monsieur Chari n'était pas disponible pour réactiver les programmes et, plus tard, lorsqu'on lui a demandé de le faire, il a refusé. On a appelé Mme Warth. Celle‑ci a réussi à corriger la situation et à réactiver les modules touchés. C'est alors que Foss a résilié l'entente de service et a retenu les services de BiLd pour assurer le soutien technique du logiciel sous licence de Foss.

 

[19]           La plupart des violations alléguées du droit d'auteur sont survenues après ces événements. Ces prétentions seront analysées plus en détail lorsqu'il sera question de la deuxième question en litige mentionnée au paragraphe 4 ci‑dessus, à savoir s'il y a eu violation d'un droit d'auteur appartenant à Harmony, mais il convient de souligner ici que Harmony s'appuie principalement sur les éléments suivants à l'appui de ses allégations relatives au droit d'auteur :

                     les modifications aux programmes effectuées par Mme Warth et M. Benton (paragraphes 113 à 115 des motifs);

                     les modifications apportées à l'écran de démarrage de Petro afin d'éliminer le nom de Harmony et de le remplacer par BiLd;

                     l'utilisation des programmes sous licence par un nombre d'utilisateurs plus grand que celui qui était prévu aux contrats de licence.

 

[20]           Harmony allègue que chacun de ces éléments constitue une reproduction de travaux protégés par le droit d'auteur et constitue ainsi une violation de ce droit. Toutefois, il faut signaler que Harmony a fait valoir devant la juge de première instance qu'une violation des modalités des contrats de licence ou de l'entente de soutien constitue nécessairement une violation de son droit d'auteur (paragraphes 260 et 261 des motifs).

 

[21]           Ni M. Chari ni Atrimed n'étaient demandeurs dans la poursuite devant la Cour fédérale. Ils n'avaient pas non plus cédé par écrit le moindre droit qu'ils pouvaient avoir sur Petro en mars 2000. De fait, pendant sa preuve principale, Harmony a déposé un acte de cession nunc pro tunc, de M. Chari à Harmony, du 10 juin 2009 (une semaine avant le procès). Cette cession prétendait céder notamment tous les droits que M. Chari détenait dans Petro, une cession qui se serait faite « dans l'esprit de M. Chari » le 16 mars 2000. La cession comprenait une renonciation des droits moraux de M. Chari dans Petro en faveur de Harmony.

 

[22]           Pour éviter les répétitions, les conclusions les plus pertinentes de la juge de première instance sur la propriété et la violation seront abordées plus loin, lors de l'examen de ces questions. À ce moment‑ci, toutefois, il importe de souligner une série de conclusions de base sur la crédibilité tirées par la juge de première instance qui ont influé sur bon nombre de ses autres conclusions et sur son appréciation globale de l'affaire. Selon la juge de première instance, le témoignage de M. Chari, principal témoin de Harmony, n'était pas crédible. Elle a écarté l'essentiel de son témoignage, en particulier lorsqu'il contredisait celui de M. Cristello. La juge de première instance n'a pas non plus été impressionnée par M. Reynolds, le seul autre témoin présenté par Harmony, qui a surtout témoigné au sujet des dommages‑intérêts. Par contre, elle a accepté l'essentiel des témoignages livrés par les témoins des faits de Foss. La juge de première instance a souligné que Mme Warth, que l'on avait fait comparaître à titre de témoin des faits uniquement, était un témoin particulièrement utile et crédible. Je considère comme inattaquable en appel chacune de ces conclusions relatives à la crédibilité.

 

[23]           Monsieur Lo était le seul témoin expert cité à comparaître devant la Cour. Foss s'est surtout appuyée sur son témoignage quant à l'utilité du logiciel pour son entreprise. Bien que la juge de première instance ait estimé que ce témoignage était crédible, elle a émis des doutes sur sa pertinence. M. Lo a aussi fait diverses observations sur la nature et la portée du code source qu'il avait examiné eu égard aux diverses fonctions. La juge de première instance cite ce témoignage dans une certaine mesure et se fonde sur lui pour établir s'il subsistait un droit d'auteur sur les ouvrages qui auraient fait l'objet d'une violation.

 

ANALYSE

La norme de contrôle

[24]           La norme de contrôle de toutes ces questions n'est pas contestée. Il s'agit de la décision correcte pour les questions de droit et de l'erreur manifeste et dominante en ce qui concerne les questions mixtes de fait et de droit qui sont principalement de nature factuelle et les questions de fait (Housen c. Nikolaisen, 2002 CSC 33, [2002] 2 R.C.S. 235 (Housen)).

 

[25]           En l'espèce, j'estime qu'il est particulièrement important de répéter ce que mon collègue le juge Stratas disait dans l'arrêt R. c. South Yukon Forest Corporation, 2012 CAF 165, aux paragraphes 46 et 51 :

[46]      L'erreur manifeste et dominante constitue une norme de contrôle appelant un degré élevé de retenue : H. L. c. Canada (Procureur général), 2005 CSC 25, [2005] 1 R.C.S. 401; Peart c. Peel Regional Police Services (2006), 217 O.A.C. 269 (C.A.), aux paragraphes 158 et 159; arrêt Waxman, précité. Par erreur « manifeste », on entend une erreur évidente, et par erreur « dominante », une erreur qui touche directement à l'issue de l'affaire. Lorsque l'on invoque une erreur manifeste et dominante, on ne peut se contenter de tirer sur les feuilles et les branches et laisser l'arbre debout. On doit faire tomber l'arbre tout entier.

 

[...]

 

[51]      Parfois, des appelants soutiennent, en invoquant l'erreur manifeste et dominante, que les motifs ne mentionnent pas certaines questions qu'ils estiment importantes, ou ne le font que sommairement. Pour juger de la validité d'une telle prétention, il faut veiller à bien faire la différence entre l'erreur manifeste et dominante véritable, d'une part, et le sous‑produit légitime de l'examen minutieux et de la synthèse ou les formulations inadéquates innocentes, d'autre part.

 

[26]           Pour ce qui est des conclusions de fait, notamment les conclusions relatives à la crédibilité, l'énoncé suivant, tiré de l'arrêt Waxman c. Waxman (2004), 186 O.A.C. 201, 44 B.L.R. (3d) 165, 2004 CanLII 39040 (C.A. Ont.), au paragraphe 297, est également pertinent :

[TRADUCTION]

 

Une erreur « dominante » est une erreur qui est suffisamment importante pour vicier la conclusion de fait contestée. Lorsque la conclusion de fait contestée est fondée sur une multitude de conclusions, la conclusion voulant qu'une ou plusieurs de ces conclusions soient fondées sur une erreur « manifeste » ne signifie pas automatique que l'erreur soit également « dominante ». L'appelant doit établir que l'erreur compromet irrémédiablement la conclusion de fait contestée, de sorte que le fait ne saurait être confirmé étant donné cette erreur : Schwartz c. Canada, [1996] 1 R.C.S. 254, à la page 281.

 

[27]           Au paragraphe 277 de l'arrêt Waxman, la Cour d'appel de l'Ontario écrit : [TRADUCTION] « L'appréciation détaillée et sévère de la crédibilité faite par la juge de première instance soulève une très grande difficulté pour les appelants dans les présents appels. » Je suis d'avis que ces termes sont pertinents pour ce qui est de l'essentiel des conclusions portant sur des questions de fait et des questions mixtes de droit et de fait en l'espèce.

 

Le fardeau de la preuve

[28]           La juge de première instance estimait que, pour obtenir gain de cause, Harmony devait établir tous les éléments prévus au paragraphe 27(1) de la Loi (toutes les dispositions pertinentes de la Loi sont reproduites à l'annexe A de mes motifs). Elle a donc précisé que Harmony devait la convaincre, selon la prépondérance des probabilités, de ce qui suit :

                     la société était la titulaire du droit d'auteur des programmes informatiques en cause;

                     les actions de Foss constituaient une violation de son droit d'auteur exclusif (paragraphe 3(1));

                     ces actions avaient eu lieu sans son consentement.

 

[29]           Harmony soutient que la juge de première instance a déplacé à tort le fardeau de la preuve au sujet du consentement. En se fondant sur la décision Aga Khan c. Tajdin, 2011 CF 14 (Aga Khan), de la Cour fédérale, conf. par 2012 CAF 12 (Aga Khan (C.A.F.)), Harmony soutient que le consentement est un moyen de défense et qu'à ce titre, c'est à Foss qu'il incombe de l'établir. Elle allègue que la juge de première instance a mal interprété l'arrêt antérieur de notre Cour, Positive Attitude Safety System Inc. c. Albian Sands Energy Inc., 2005 CAF 332, [2006] 2 R.C.F. 50 (Positive). Selon Harmony, notre Cour n'a jamais eu l'intention de faire reposer le fardeau de la preuve sur la demanderesse dans cet arrêt. Je ne puis souscrire à cet argument.

 

[30]           Dans l'arrêt Aga Khan (C.A.F.), notre Cour a confirmé la décision rendue par la Cour fédérale dans Aga Khan, et a pris soin de préciser que l'exposé de la Cour fédérale relativement au fardeau de la preuve ne constituerait pas une erreur dominante eu égard aux circonstances particulières de cette affaire. J'estime important de répéter la déclaration antérieure de notre Cour sur cette question.

 

[31]           S'exprimant au nom de la Cour dans l'arrêt Positive, le juge Pelletier a soutenu que la violation est définie dans la Loi par l'absence de consentement et que, par conséquent, pour établir la violation, il faut prouver l'absence de consentement (voir le paragraphe 39). Je suis d'avis que cette déclaration doit signifier qu'en ce qui concerne l'absence de consentement, la charge de persuasion incombe au demandeur. Cette interprétation est conforme au principe général selon lequel le demandeur doit établir, selon la prépondérance des probabilités, tous les éléments nécessaires à son action.

 

[32]           L'extrait suivant tiré d'un court article par David Vaver au sujet de la décision de la Cour fédérale dans Aga Khan résume parfaitement ma réflexion sur le sujet :

[TRADUCTION]

 

Les coûts et les risques liés à la cueillette et à la présentation d'éléments de preuve sont fonction des règles du fardeau de la preuve, lesquelles permettent de relever les actions bien fondées et d'écarter les actions mal fondées. Elles ne doivent pas être « irréalistes et indûment onéreuses » pour le demandeur et doivent servir l'objet du droit pertinent. La Loi sur le droit d'auteur comporte des règles précises relativement au fardeau de la preuve qui permettent au demandeur de bénéficier des présomptions de l'identité de l'auteur, du droit d'auteur et de la qualité du demandeur si le défendeur les conteste, et des présomptions de validité et de propriété du droit d'auteur si le droit est enregistré. Ces présomptions permettent initialement au demandeur de s'acquitter de l'obligation de produire certains éléments de preuve sur la question; elles ne déplacent pas son ultime fardeau de la preuve. Il n'existe aucune présomption en matière de consentement et il n'y a aucune raison de sous‑entendre son existence, à plus forte raison l'existence d'un renversement plus draconien du fardeau de la preuve. Le fait pour le demandeur de prouver qu'il n'a pas donné de consentement exprès est rarement une corvée : c'est lui le mieux placé pour dire s'il l'a donné. Et même s'il s'agissait d'une corvée, c'est un faible prix à payer pour un droit qui empêche autrui, parfois pendant plus d'un siècle, de faire ce qu'il serait normalement libre de faire.

 

Le défendeur qui affirme avoir obtenu le consentement implicite du demandeur fait également de cette question une question en litige, mais il semble alors raisonnable que le défendeur invoque et prouve les faits sur lesquels il s'appuie et les conclusions qu'il en tire. Le demandeur peut alors produire tout ce qui peut tendre à réfuter cette preuve. Cela n'a pas pour effet de modifier l'ultime fardeau de la preuve, lequel incombe au demandeur tout au long du processus. Seule la charge de la présentation est déplacée sur le défendeur : celui‑ci est tenu de produire une certaine preuve de consentement, sinon le demandeur, dont la réclamation semble valable à première vue, a gain de cause. Si, dans l'appréciation de la preuve, la cour est convaincue que le demandeur n'a pas donné son consentement implicite, celui‑ci obtient gain de cause. Si le défendeur parvient à prouver le consentement implicite, le demandeur, qui ne s'est pas acquitté de son fardeau de la preuve, perd. En théorie, si la preuve ne permet pas à la cour d'être convaincue que le demandeur n'a pas donné son consentement implicite, le demandeur perd aussi. Peu de causes sont aussi difficiles à trancher, mais certaines peuvent l'être, comme nous le démontrerons plus loin dans cet article.

 

David Vaver, Consent or No Consent: The Burden of Proof in Intellectual Property Infringement Suits (2001), 23 I.P.J. 147, pages 148 et 149.

 

Originalité

[33]           Comme je l'ai déjà souligné, la juge de première instance a conclu que Railmaster, le module de prévision de dépassement et le module de la paie étaient protégés par des droits d'auteur distincts. Elle a aussi conclu que Foss avait réfuté la présomption de l'existence d'un droit d'auteur sur le programme de facturation selon la carte d'accès (voir le paragraphe 182 des motifs).

 

[34]           La juge de première instance a conclu qu'aucune des modifications apportées après l'installation de Petro chez Foss en mars 2000 ne satisfaisait au critère d'originalité exigé pour être protégée par le droit d'auteur au sens de la Loi.

 

[35]           Il semble que Harmony ne conteste que la conclusion de la juge de première instance touchant l'insuffisance d'originalité des « autres modifications » effectuées pour adapter Petro aux activités de Foss et aux normes courantes du secteur entre mars 2000 et février 2001 (ou jusqu'en août 2001, selon Harmony). Son argument repose pour l'essentiel sur le fait qu'il existerait une contradiction entre les conclusions énoncées par la juge de première instance au paragraphe 39 et sa conclusion selon laquelle ces modifications n'étaient pas protégées par le droit d'auteur.

 

[36]           Je suis d'avis qu'il n'y a aucune contradiction entre le paragraphe 39 des motifs, où ces modifications sont décrites comme étant « importantes », et l'analyse qu'a faite la juge du niveau de talent et de jugement requis pour conclure que les modifications en cause sont originales et, à ce titre, protégées par le droit d'auteur.

 

[37]           Il est facile de qualifier les modifications d'importantes si l'on considère que Foss ne pouvait expédier ou facturer sans que, par exemple, les prix, les taux ou les unités de mesure adéquats soient en place. Cela ne signifie pas pour autant que ces modifications étaient autre chose que des modifications mécaniques qui n'exigeaient pas de talent et de jugement particuliers, comme l'a constaté la juge.

 

[38]           Il n'est pas contesté que la juge a utilisé le critère approprié dans son analyse (les principes sont résumés aux paragraphes 147 à 153 des motifs) et je ne crois pas qu'elle ait commis une erreur manifeste et dominante dans son application de ce critère aux faits qui lui ont été soumis.

 

[39]           Cela dit, j'entends maintenant examiner les arguments de Harmony au regard de la conclusion de la juge de première instance selon laquelle Harmony n'est pas la titulaire du droit d'auteur sur Petro.

 

La propriété

Objection préliminaire

[40]           À titre préliminaire, Harmony fait valoir que la juge de première instance a commis une erreur en autorisant Foss à présenter un « nouvel » argument qui n'apparaissait pas dans les précisions données à l'égard de sa défense. Harmony a fait remarquer que Foss n'a jamais fait valoir qu'Atrimed ou M. Chari étaient les titulaires du droit d'auteur sur Petro.

 

[41]           Bien que l'objet des actes de procédure (y compris les précisions fournies) soit de restreindre l'étendue des questions à trancher au procès afin que la partie adverse puisse s'y préparer, les actes de procédure ne comprennent que les faits pertinents sur lesquels les parties se fondent pour établir leur thèse juridique. Comme il est indiqué à l'article 175 des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106 (les Règles), une partie peut soulever des points de droit, mais ils ne lient jamais la Cour sur ces questions. De plus, la Cour est tenue de trancher les points de droit en se fondant sur l'ensemble de la preuve déposée ou versée sans objection au dossier de la cour.

 

[42]           En l'espèce, nonobstant la plainte de Harmony au sujet des actes de procédure, il a toujours été entendu que Foss contestait le fait que Harmony soit titulaire d'un droit d'auteur sur Petro (voir le paragraphe 12 de la défense). De fait, Harmony s'appuie sur cette contestation pour étayer son argument selon lequel la Cour aurait dû appliquer le paragraphe 34.1(2) de la Loi (voir le paragraphe 50 ci‑dessous).

 

[43]           Cependant, Harmony affirme que les précisions qu'elle a reçues de l'avocat de Foss au début de l'instance en octobre 2005 se bornent à divulguer les faits suivants :

                     En 1998, Shawn Reynolds, alors directeur de l'exploitation chez RCT, a retenu les services d'Atrimed, une société dirigée par M. Chari, pour préparer un programme informatique à l'intention de RCT selon les exigences de celle‑ci. C'est ce programme qui, par la suite, a fait l'objet d'une licence concédée à Foss (Petro).

                     Monsieur Reynolds a fourni tous les renseignements sur le domaine nécessaires au programme, et plusieurs programmeurs d'Atrimed ont travaillé à sa conception.

                     L'accord entre RCT et Atrimed prévoyait qu'Atrimed créerait un programme à un coût réduit, et que RCT et M. Reynolds seraient les propriétaires du programme et de tous les codes. En échange, Atrimed serait autorisée à vendre le logiciel à d'autres parties et à en assurer le soutien pour son propre bénéfice. M. Reynolds et Atrimed ont aussi convenu que celui‑ci présenterait M. Chari à d'autres clients éventuels, notamment Foss.

                     Monsieur Reynolds n'a jamais été payé, et il a avisé Foss qu'il avait l'intention d'intenter une poursuite pour recouvrer les montants qui lui étaient dus.

 

[44]           Harmony ne prétend pas avoir subi un préjudice. Un simple examen des réponses de M. Chari lors de son contre‑interrogatoire révèle qu'il était bien préparé à répondre aux questions touchant sa relation avec Atrimed et les faits relatifs à la propriété. La propriété était en jeu et Harmony était prête à en traiter.

 

[45]           Des éléments de preuve ont été présentés au procès sur l'identité de la personne qui avait effectivement passé le marché avec RCT pour préparer Petro, et sur la nature de la relation entre M. Chari, Atrimed et Harmony. Pendant son interrogatoire principal, M. Chari a parlé de son droit d'auteur sur Petro qu'il a cédé à Harmony et de l'acte de cession de droit d'auteur nunc pro tunc signé le 10 juin 2009. Durant son contre-interrogatoire, il a été interrogé sur sa relation avec Atrimed et Harmony et sur d'autres détails relatifs à la façon dont la cession à Harmony aurait été effectuée en mars 2000 (en ce qui a trait au module de prévision de dépassement, à Railmaster, et au module de la paie). Harmony n'a pas soulevé la moindre objection lorsque cet élément de preuve a été présenté.

 

[46]           Au bout du compte, Harmony devait prouver qu'elle était titulaire du droit d'auteur. Indépendamment de la question des actes de procédure, Harmony a mis en cause, de son propre chef, en soulevant la question de la cession nunc pro tunc, la relation entre M. Chari et Atrimed.

 

Les conclusions de la juge de première instance sur le titulaire du droit d'auteur des divers programmes

 

[47]           Les conclusions de la juge de première instance quant au titulaire du droit d'auteur des divers programmes peuvent se résumer comme suit :

                     En vertu du paragraphe 13(3) de la Loi, le droit d'auteur sur Petro appartient à Atrimed au motif que M. Chari a exécuté l'oeuvre en vertu d'un contrat de louage de service.

                     L'application du paragraphe 13(3) suffit à réfuter la présomption en faveur de l'auteur prévue à l'alinéa 34.1(1)b) de la Loi.

                     En se fondant sur le même raisonnement et en vertu du paragraphe 13(3) de la Loi, le droit d'auteur sur les programmes originaux préparés après le 16 mars 2000 (le module de prévision de dépassement, le programme Railmaster et le module de la paie) appartient à Harmony.

                     Même si, comme on l'a fait valoir, le droit d'auteur sur Petro appartenait à M. Chari en 2000, Harmony n'a pas démontré, selon la prépondérance des probabilités, l'existence des faits nécessaires pour étayer ses arguments selon lesquels ces droits étaient détenus en fiducie pour son bénéfice avant sa constitution en société ou qu'elle peut se fonder sur la cession nunc pro tunc antidatée au 16 mars 2000.

 

Le titulaire du droit d'auteur sur Petro

[48]           Harmony conteste la validité de la conclusion de la juge selon laquelle M. Chari n'était pas le titulaire du droit d'auteur sur Petro (à l'exception des droits moraux) et qu'Atrimed l'était. Harmony soutient que la juge n'a pas tenu compte d'éléments de preuve probants en concluant que M. Chari avait exécuté l'oeuvre en vertu d'un contrat de louage de service et que, par conséquent, le paragraphe 13(3) de la Loi s'appliquait, de sorte qu'Atrimed était la titulaire du droit.

 

[49]           Harmony ajoute que la juge a commis une erreur de droit en rejetant son argument selon lequel M. Chari détenait en fiducie pour Harmony le droit d'auteur sur Petro avant sa constitution en société, et que ce droit lui avait été transmis au moment de sa constitution en société. Selon Harmony, la juge de première instance a conclu à tort que la cession du 10 juin 2009 (mentionnée au paragraphe 21 ci‑dessus) ne pouvait pas prendre effet le 16 mars 2000. Harmony souligne que la conclusion de la juge sur ce point était illogique, compte tenu de certains éléments de preuve non contestés, telles les licences.

 

[50]           De plus, Harmony affirme que la juge de première instance a eu tort en droit de ne pas tenir compte de la présomption prévue à l'alinéa 34.1(2)b) de la Loi et de ne pas l'appliquer. Cette présomption prévoit que lorsque aucun acte de cession n'a été enregistré et lorsque, notamment, la qualité du demandeur est contestée, la personne dont le nom figure sur le logiciel en tant que titulaire du droit d'auteur est, jusqu'à preuve du contraire, présumée être le titulaire du droit d'auteur de ce logiciel.

 

[51]           Subsidiairement, le dernier argument de Harmony est qu'elle est nécessairement copropriétaire du droit d'auteur sur Petro, étant donné que la juge a reconnu, à l'égard du logiciel, qu'il « s'était avéré nécessaire d'y apporter des modifications importantes avant [que Foss] ne puisse l'utiliser dans le cadre de son modèle opérationnel et des pratiques courantes du secteur » (voir le paragraphe 39 des motifs).

 

[52]           En premier lieu, en ce qui concerne les conclusions de la juge de première instance fondées sur le paragraphe 13(3) de la Loi, je constate que le raisonnement qu'elle a suivi a été proposé par Harmony dans sa plaidoirie en réponse (pages 03588 à 03593 du dossier d'appel, vol. 11, onglet 11) pour étayer sa prétention selon laquelle tous les programmes écrits par M. Chari après le 16 mars 2000 lui appartenaient.

 

[53]           C'est sans doute ce qui explique pourquoi Harmony ne conteste pas l'approche ou le critère juridique adoptés par la juge. En revanche, Harmony prétend que celle‑ci a appliqué à tort le paragraphe 13(3) de la Loi à Atrimed, alors qu'il est évident que la situation factuelle touchant la relation entre M. Chari et Atrimed était très différente de celle qui liait M. Chari à Harmony. En particulier, Harmony affirme que mis à part le témoignage de M. Chari selon lequel il était un responsable d'Atrimed, rien n'indique qu'il était effectivement un dirigeant de cette société. En outre, il n'était qu'un des deux actionnaires d'Atrimed alors qu'il était l'unique propriétaire de Harmony et son seul dirigeant. Tous les contrats de licence conclus après mars 2000 sont dressés au nom de Harmony.

 

[54]           En conséquence, Harmony invite en fait la Cour à substituer son appréciation de la preuve à celle de la juge de première instance (voir les paragraphes 21 et 22 du mémoire de l'appelante). Or, nous ne pouvons substituer notre opinion concernant la preuve à celle de la juge de première instance. Le critère applicable est l'erreur manifeste et dominante.

 

[55]           Harmony ne m'a pas convaincue de l'existence d'une erreur manifeste et dominante dans la conclusion de la juge selon laquelle M. Chari était un employé d'Atrimed (voir le paragraphe 240 des motifs). La juge aurait pu expliquer plus clairement les raisons qui l'ont amenée à tirer cette conclusion plutôt qu'à conclure, sur la base du critère de common law pertinent, que M. Chari était un entrepreneur indépendant. Cependant, les éléments de preuve dignes de foi établissant la nature exacte de la relation professionnelle liant M. Chari à Atrimed (et, ultérieurement, à Harmony) n'étaient pas suffisants, particulièrement en raison de l'absence de crédibilité de M. Chari. Je suis d'avis que la juge de première instance pouvait raisonnablement tirer cette conclusion, vu la preuve dont elle disposait.

 

[56]           Dans l'arrêt 671122 Ontario Ltd. c. Sagaz Industries Canada Inc., 2001 CSC 59, [2001] 2 R.C.S. 983 (Sagaz Industries), la Cour suprême du Canada a reconnu qu'aucun critère universel ne permet de déterminer si une personne est un employé ou un entrepreneur indépendant. La question centrale est de savoir si la personne qui a été engagée pour fournir les services les fournit en tant que personne travaillant à son compte (Sagaz Industries, au paragraphe 47). J'estime que la juge a examiné cette question. Sa conclusion sur ce point est que M. Chari a préparé Petro pour le compte d'Atrimed (voir les paragraphes 234 à 239 des motifs).

 

[57]           La juge semble également avoir appliqué un raisonnement semblable à l'analyse effectuée dans certaines affaires mettant en jeu des actionnaires, des dirigeants et des administrateurs de sociétés à actionnariat restreint. Cela signifie, à mon avis, qu'elle était convaincue que, dans les circonstances particulières de l'espèce, elle pouvait constater l'existence d'un contrat de service tacite entre M. Chari et Atrimed. Évidemment, il ne faudrait pas en déduire que le paragraphe 13(3) de la Loi s'applique toujours dans de tels cas.

 

[58]           Mis à part l'argument subsidiaire de Harmony selon lequel le droit d'auteur sur Petro lui appartenait au moins conjointement, ces éléments suffisent pour trancher la première question portant sur le propriétaire du droit d'auteur. Néanmoins, j'ajouterai trois brèves remarques avant d'aborder l'argument subsidiaire de la propriété conjointe.

 

[59]           Premièrement, je ne crois pas que la présente affaire soit indiquée pour trancher la question de savoir si un droit d'auteur peut être détenu en fiducie, en equity, avant la constitution d'une société. Comme la juge l'a constaté, les faits de l'espèce n'étayent pas la conclusion que M. Chari aurait envisagé la constitution de Harmony en société pendant la période où il « faisait affaire » par l'intermédiaire d'Atrimed de 1998 à 2000 (voir le paragraphe 226 des motifs). Là encore, la conclusion de la juge repose sur son appréciation de la crédibilité de M. Chari. En outre, en l'absence d'indication contraire, la juge est présumée avoir examiné le dossier d'un bout à l'autre (Housen, paragraphe 46). Elle avait bien pris connaissance des contrats de licence. Harmony n'a pas réfuté cette présomption et, à mon avis, n'a pas démontré l'existence d'une erreur susceptible de contrôle qui justifierait l'intervention de la Cour.

 

[60]           De plus, la juge de première instance a estimé qu'il n'y avait pas d'éléments de preuve crédibles suffisants pour permettre de conclure que M. Chari avait cédé le droit d'auteur (s'il en était le titulaire) à Harmony le 16 mars 2000, soit à la date mentionnée dans l'acte de cession du 10 juin 2009. Elle a estimé que la preuve de M. Chari donnait en fait à penser que la cession écrite n'était pour lui qu'un expédient (paragraphes 217 et 218 des motifs). Là encore, je suis d'avis qu'il n'a pas été démontré que la juge avait commis une erreur manifeste et dominante à cet égard.

 

[61]           J'ajouterais qu'en se fondant sur l'arrêt Marcus c. Quaker Oats Co. of Canada (1988), 90 N.R. 310, 19 C.I.P.R. 60 (C.A.F.), de notre Cour, la juge de première instance a tenu compte de la conception juridique la plus favorable pour ce qui est des cessions nunc pro tunc. Marcus est une affaire concernant la cession d'une marque de commerce, non d'un droit d'auteur. La juge de première instance ne s'est pas demandé si les différences entre les lois sur le droit d'auteur et les marques de commerce à l'égard des cessions pouvaient être importantes. À l'évidence, elle n'a pas tenu compte de la décision rendue par la juge Sharlow (maintenant juge à la Cour d'appel fédérale) dans J. L. De Ball Canada Inc. c. 421254 Ontario Ltd. (1999), 179 F.T.R. 231, [1999] A.C.F. no 1977 (QL) (C.F. 1re inst.), aux paragraphes 23 et 24, car il semble que les parties ne lui ont pas cité cette affaire.

 

[62]           Enfin, bien qu'il eût été préférable pour la juge de première instance de mentionner la présomption énoncée au sous‑alinéa 34.1(2)b)(ii) de la Loi, cette présomption, tout comme celle favorable à l'auteur prévue à l'alinéa 34.1(1)b) à laquelle la juge renvoie, est aisément réfutable lorsque, comme en l'espèce, la partie au bénéfice de laquelle la présomption est destinée produit une preuve directe du fondement juridique en vertu duquel son nom figure à titre d'auteur sur l'oeuvre protégée et que la juge de première instance conclut que ce fondement est indéfendable. Elle a écarté la présomption en faveur de l'auteur en se fondant sur la preuve dont elle disposait et a estimé que le paragraphe 13(3) de la Loi s'appliquait.

 

[63]           Je n'ai pas le moindre doute que les autres conclusions de la juge de première instance examinées ci-dessus à l'égard d'Atrimed et de la cession nunc pro tunc réfutaient implicitement la présomption en faveur de Harmony. En d'autres termes, le fait qu'elle ne parle pas expressément de cette présomption dans ses motifs ne pouvait avoir aucune incidence importante sur sa conclusion finale selon laquelle le droit d'auteur sur Petro n'appartenait pas à Harmony avant le 10 juin 2009 (voir les paragraphes 248 et 249 des motifs).

 

[64]           J'aborderai maintenant le dernier argument de Harmony sur la question de la propriété, soit sa propriété conjointe du droit d'auteur sur Petro. Au paragraphe 49 de son mémoire, Harmony affirme ce qui suit :

[TRADUCTION]

 

[Harmony] fait valoir que si la juge Heneghan a raison quant à ses conclusions sur le propriétaire du logiciel, selon sa conclusion de fait au paragraphe 39 du jugement, le droit d'auteur sur les éléments de Petro Dispatch créés par M. Chari après le 16 mars 2000 doit nécessairement appartenir à la demanderesse. D'autres tribunaux ont souscrit à l'argument selon lequel un logiciel peut appartenir en partie à différentes personnes, en particulier les changements et les ajouts effectués après une date précise; voir, par exemple, Star Data Systems Inc. v. Quasimodo Consulting Services Ltd., 1996 CarswellOnt 4256 (C.J. Ont.).

 

[65]           J'ai examiné les arguments présentés à la juge de première instance, et il semble que Harmony n'ait pas soulevé cet argument subsidiaire devant elle. Il semble aussi que cet argument repose sur l'interprétation de Harmony selon laquelle le fait que la juge mentionne au paragraphe 39 de ses motifs que des modifications importantes étaient nécessaires pour adapter Petro aux activités de Foss (voir les paragraphes 33 à 39 ci‑dessus) signifie nécessairement que ces modifications sont protégées en vertu de la Loi. Cependant, comme je l'ai déjà mentionné, la juge a conclu que les modifications visées au paragraphe 39 n'étaient pas originales, et celles‑ci ne confèrent donc pas de droit d'auteur à Harmony. Par conséquent, ces modifications ne peuvent conférer à Harmony un quelconque droit d'auteur sur Petro.

 

[66]           Enfin, il importe de souligner que la seule affaire citée par Harmony, Star Data Systems Inc. v. Quasimodo Consulting Services Ltd. (1996), 18 O.T.C. 42 (Div. gén. Ont.), ne portait pas sur une compilation comme dans le cas de Petro. Généralement, le droit d'auteur sur une compilation est indépendant et distinct du droit d'auteur qui peut s'appliquer aux différentes parties (CCH Canadienne Ltée c. Barreau du Haut‑Canada, 2004 CSC 13, [2004] 1 R.C.S. 339; Robertson c. Thomson Corp., 2006 CSC 43, [2006] 2 R.C.S. 363).

 

La violation

[67]           S'agissant des allégations de violation du droit d'auteur faites par Harmony (et à l'exclusion de celles qui ont trait à Balmar Petroleum Ltd., que la juge de première instance n'a pas commentées étant donné ses conclusions relatives à la propriété), la juge a tiré les conclusions suivantes :

                     Les seules copies effectuées par Mme Warth ou M. Benton l'ont été en tant que copies de sauvegarde, au cas où surviendrait une défaillance ou une erreur pendant qu'ils apportaient, à la demande de Foss, de petites corrections et des modifications (paragraphe 113 des motifs) à la copie originale des programmes sous licence conservés au serveur Citrix (voir les paragraphes 262 et 305 des motifs).

                     Le fait d'établir une seule copie de sauvegarde ne constitue pas une multiplication (voir le paragraphe 271 des motifs).

                     Même si tel était le cas, ces copies n'étaient pas effectuées sans le consentement du titulaire du droit d'auteur (l'alinéa 2b des contrats de licence autorise Foss à faire des copies à des fins de sauvegarde) (voir les paragraphes 272, 273 et 305 des motifs).

                     Les modifications apportées aux programmes sous licence sans qu'il y ait multiplication de l'oeuvre protégée, c'est‑à‑dire sans reproduction, ne constituent pas une violation sous le régime de la Loi, mais elles peuvent constituer des violations des contrats de licence (voir les paragraphes 255, 261, 267 et 268 des motifs).

                     Compte tenu du fait que le code objet et le code source ont été mis à la disposition de Foss sur la copie originale des programmes sous licence que M. Chari a installés, et du peu d'éléments de preuve présentés quant à la décompilation du code objet sous licence qui a été effectuée, si tant est qu'elle a eu lieu, Harmony n'a pas établi, suivant la prépondérance des probabilités, une quelconque violation à cet égard (voir les paragraphes 274 à 278 et 305 des motifs).

                     Foss avait été autorisée à utiliser le mode « création » intégré à son programme Microsoft Access pour apporter certaines modifications, comme des changements aux cases à cocher et aux fichiers de sa base de données (voir les paragraphes 279 et 281 à 284 des motifs).

                     La seule modification qui aurait pu être effectuée au module de prévision de dépassement est la mise à jour de la version de 1997 du programme Microsoft Access de Foss à la version de l'an 2000. La preuve a indiqué qu'il suffisait d'ouvrir les modules de base de données en utilisant la nouvelle version de ce programme de Microsoft. Harmony n'a pas établi, suivant la prépondérance des probabilités, qu'une telle mise à jour violait ses droits exclusifs au regard du paragraphe 3(1) de la Loi (voir les paragraphes 287, 288 et 297 des motifs).

                     La modification de l'écran de démarrage (fausse attribution) et toutes les autres modifications dont il n'a pas été prouvé qu'elles aient comporté une reproduction pendant le processus de modification, mais qui ont une incidence sur l'intégrité de l'oeuvre protégée, peuvent constituer des violations des droits moraux de l'auteur. Or, il n'était pas nécessaire de trancher cette question, puisque le titulaire des droits moraux n'était pas partie à l'instance (voir les paragraphes 289 à 292 des motifs).

                     Les droits prévus à l'article 3 de la Loi ne comprennent pas un droit exclusif d'utilisation, et l'utilisation en soi ne constitue pas une violation (voir le paragraphe 262 des motifs).

                     Selon la preuve présentée et en supposant, mais sans trancher la question, que Foss contrevenait à la limite du nombre d'utilisateurs prévue au « contrat de licence de logiciel », Harmony n'a pas établi que l'utilisation par plus de cinq utilisateurs constituait une violation de la Loi (voir le paragraphe 263 des motifs).

 

[68]           Harmony ne soulève que deux questions en appel. Premièrement, elle soutient que la juge de première instance a fondamentalement mal interprété l'alinéa 30.6b) de la Loi et que les copies effectuées par Mme Warth n'étaient pas faites à des fins de sauvegarde au sens des contrats de licence. Deuxièmement, Harmony fait valoir que la juge a mal compris [TRADUCTION] « la nature du droit d'auteur sur un « écran » dans le cas d'un logiciel » (paragraphe 57 du mémoire de l'appelante). Comme il existe des droits d'auteur sur les images qu'affiche un logiciel à l'écran et qu'une reproduction visuelle sur les moniteurs de plus de cinq utilisateurs avait lieu sans consentement, cette reproduction constitue nécessairement une violation (paragraphes 60 et 61 du mémoire de l'appelante).

 

Les copies de sauvegarde

[69]           Selon Harmony, même si la juge de première instance n'a pas renvoyé expressément à l'alinéa 30.6b) de la Loi dans ses motifs, elle l'a implicitement appliqué pour conclure qu'une seule copie de sauvegarde du logiciel n'était pas une reproduction.

 

[70]           Je suis d'avis que les copies dont il est question au paragraphe 271 des motifs peuvent être des reproductions qui constituent une violation (article 3 de la Loi) des programmes sous licence, si elles ont été faites sans consentement. Selon les faits constatés par la juge de première instance et exposés dans les motifs, je conviens que l'alinéa 30.6b) de la Loi ne s'appliquait pas.

 

[71]           Cela dit, Harmony ne m'a pas convaincue que la juge avait également tort de conclure que Harmony ne s'était pas acquittée de son fardeau d'établir l'absence de consentement (paragraphe 27(1) de la Loi). La juge a retenu le témoignage de Mme Warth, à savoir que ces copies étaient faites strictement à des fins de sauvegarde (paragraphe 269 des motifs). Les contrats de licence ne prévoient aucune restriction quant au nombre de copies de sauvegarde que Foss pouvait faire. De fait, M. Cristello en faisait une au moins quotidiennement. Je constate que les contrats de licence ont été décrits comme étant des « clauses standard » utilisées par M. Chari.

 

[72]           Aucun témoignage d'expert n'a établi que l'expression [TRADUCTION] « aux fins de sauvegarde » avait un sens technique autre que son sens ordinaire, soit une chose que l'on garde en réserve pour remplacer l'original en cas d'urgence. Rien n'indique non plus que la notion d'« urgence » comporte, dans ce domaine, un sens particulier qui la restreint à certains événements, à l'exclusion d'une défaillance ou d'une erreur survenue pendant que l'on travaille sur le logiciel.

 

[73]           Rien n'établissait que ces copies ont été utilisées à d'autres fins. La juge a peut‑être utilisé une mauvaise formulation au paragraphe 271 (« l'établissement d'une seule copie de sauvegarde aux fins de modification d'un logiciel » au lieu de « avant de modifier un logiciel »), mais cela n'a pas d'incidence sur la validité des conclusions énoncées aux paragraphes 269 et 273 de ses motifs.

 

[74]           Je ne suis pas convaincue que la juge de première instance ait commis une erreur manifeste et dominante en concluant que Harmony n'avait pas établi que la modification de l'écran de démarrage entraînait nécessairement la fabrication d'une reproduction non autorisée. Par conséquent, dans de telles circonstances, le changement de nom apparaissant à cet écran (fausse attribution alléguée de l'oeuvre) ne pouvait être contesté que par le titulaire des droits moraux sur Petro. Ces droits ne peuvent être cédés et appartiennent à l'auteur.

 

L'écran et le nombre d'utilisateurs

[75]           La juge de première instance écrit dans ses motifs qu'elle n'avait pas à trancher la question de savoir si Foss a dépassé le nombre d'utilisateurs autorisé par les contrats de licence au motif que cela ne constituerait pas, à son avis, une violation d'un droit protégé en vertu du paragraphe 3(1) de la Loi.

 

[76]           Je suis d'accord avec la juge de première instance pour dire que la Loi n'accorde pas au titulaire du droit d'auteur le droit exclusif d'utiliser l'oeuvre protégée. À cet égard, les droits du titulaire du droit d'auteur diffèrent de ceux qui sont accordés au titulaire d'un brevet ou d'une marque de commerce.

 

[77]           La juge de première instance n'a pas cité les deux décisions sur lesquelles s'appuie Harmony pour affirmer que la juge a commis une erreur en rejetant son argument selon lequel la projection de son programme sur les moniteurs de plus de cinq utilisateurs constitue une reproduction non autorisée de son oeuvre protégée : Delrina Corp. c. Triolet Systems Inc. (1993), 9 B.L.R. (2d) 140, 47 C.P.R. (3d) 1 (Div. gén. Ont.) (Delrina (Division générale)), conf. par (2002), 58 O.R. (3d) 339, 156 O.A.C. 166 (C.A. Ont.) (Delrina (Cour d'appel)), et la décision rendue par la Cour fédérale dans Eros — Équipe de recherche opérationnelle en santé inc. c. Conseillers en gestion et informatique C.G.I. inc., 2004 CF 178, [2005] 3 R.C.F. D‑12 (Eros).

 

[78]           Je dois évidemment me pencher sur les arguments relatifs aux programmes de Harmony qui étaient, en fait, utilisés par Foss (le module de prévision de dépassement et le programme Railmaster).

 

[79]           Bien que les arguments n'aient pas été formulés avec clarté, que ce soit oralement ou par écrit (voir les paragraphes 59 à 62 du mémoire de l'appelante), je crois comprendre que ce qu'affirme Harmony, en se fondant sur l'arrêt Delrina (Cour d'appel), est que l'écran est une reproduction, dans une forme matérielle différente (présentation visuelle), du code objet protégé des programmes sous licence (Eros).

 

[80]           À l'audience, l'avocat de Harmony a aussi fait référence aux écrans comme étant des oeuvres d'art (je suppose qu'il s'agit d'oeuvres artistiques). Ainsi, je crois comprendre que Harmony prétend aussi en appel que la reproduction sur le moniteur de l'utilisateur chez Foss est une reproduction des formes protégées (oeuvres artistiques distinctes) intégrées à ses programmes informatiques.

 

[81]           Après avoir examiné la transcription des arguments présentés à la juge de première instance, je n'ai relevé que deux passages pertinents, quoique extrêmement brefs, qui traitent de ces questions :

[TRADUCTION]

 

Lors de la plaidoirie

 

Sur la question des écrans, j'ai inclus à notre recueil de jurisprudence et de doctrine, onglets 13 et 14, deux décisions où les juges de la Haute Cour de justice de l'Ontario ont soutenu que les écrans et le logiciel sont protégés par le droit d'auteur (page 03278 du dossier d'appel, vol. 10, onglet 10).

 

En réponse

 

Madame le juge, tout changement à l'écran est une reproduction. Il y a un droit d'auteur sur le contenu des écrans. Les décisions Gemologists et Del Rena [sic] l'indiquent clairement. Chaque fois qu'un changement est apporté à un programme informatique, l'ancien programme est remplacé par le nouveau. Cela constitue une reproduction (page 03641 du dossier d'appel, vol. 11, onglet 11).

 

[82]           Je tiens à mentionner ces passages parce que notre Cour n'a jamais examiné la question du droit d'auteur sur les écrans. Il s'agit d'un sujet d'importance qui peut avoir de profondes répercussions. Un seul exemple suffira à illustrer ce point. Il est maintenant d'usage courant chez les utilisateurs particuliers d'avoir plusieurs écrans branchés simultanément à leur ordinateur. Ces consommateurs doivent‑ils acheter plus d'une licence pour les programmes qu'ils utilisent?

 

[83]           Je suis d'avis que notre Cour doit se garder d'aborder davantage que ce qui est absolument nécessaire lorsqu'une question n'a pas été entièrement débattue devant l'une ou l'autre Cour et qu'il y a manifestement absence de preuve et de conclusions sur lesquelles repose un argument, comme c'est le cas en l'espèce.

 

[84]           Manifestement, l'argument fondé sur Eros selon lequel les formes comprises dans ces programmes peuvent être protégées en tant qu'oeuvres artistiques distinctes n'a pas été présenté à la juge de première instance, laquelle n'a tiré aucune conclusion à cet égard. Harmony n'a fait mention d'aucun élément de preuve précis sur ce point dans son mémoire. J'estime que la Cour ne devrait pas examiner cet argument.

 

[85]           J'aborderai maintenant l'argument de Harmony fondé sur la décision Delrina (Division générale), et plus particulièrement sur son paragraphe 28.

 

[86]           Il importe de souligner que la Cour d'appel de l'Ontario a expressément refusé d'exprimer quelque opinion que ce soit sur les énoncés sur lesquels Harmony s'appuie maintenant. La Cour d'appel n'a pas donné d'opinion sur ces énoncés essentiellement parce qu'il s'agissait de remarques incidentes, compte tenu des conclusions du juge sur les faits (Delrina (Cour d'appel), paragraphe 6).

 

[87]           Le passage de la décision Delrina (Division générale) relevé par Harmony est le suivant :

[TRADUCTION]

 

En suivant les instructions du manuel et en tapant les bonnes touches du clavier du terminal, l'utilisateur du programme fait en sorte que l'ordinateur projette un écran dont la forme et le contenu sont dictés par la façon dont il a été programmé par le code objet. L'écran ainsi produit est la reproduction du code objet sous une « forme matérielle » différente. J'entends par là le style et le format de l'écran, non pas les chiffres que l'ordinateur peut afficher à l'écran lorsque l'opérateur du programme lui passe la commande.

 

[88]           Avec égards, je ne puis admettre qu'un écran est simplement une reproduction du code objet. L'article 2 de la Loi définit ainsi un programme d'ordinateur :

« programme d'ordinateur » Ensemble d'instructions ou d'énoncés destiné, quelle que soit la façon dont ils sont exprimés, fixés, incorporés ou emmagasinés, à être utilisé directement ou indirectement dans un ordinateur en vue d'un résultat particulier.

 

[89]           J'estime que l'écran affiché sur le moniteur d'un utilisateur est le résultat d'un ensemble d'instructions plutôt que la reproduction de l'ensemble d'instructions sous une autre forme. Pour reprendre l'analogie présentée par la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Cuisenaire c. South West Imports Ltd., [1969] R.C.S. 208, l'écran est le pâté de lapin plutôt que la recette (la recette étant l'ensemble d'instructions).

 

[90]           Cette distinction est particulièrement claire si l'on considère que M. Chari a expliqué, au cours de son contre‑interrogatoire (voir les pages 01887 à 01889 du dossier d'appel, vol. 7, onglet 2), que ce qui se passe dans les coulisses est assez différent, même si les écrans propres à chaque produit sont très similaires, en ce sens que la même forme est utilisée.

 

[91]           Dans les circonstances, il n'y a pas lieu d'examiner le second volet de l'argument de Harmony, à savoir qu'un affichage visuel constitue en soi une reproduction dans une forme matérielle.

 

[92]           J'estime que Harmony n'a pas établi que la juge de première instance avait commis une erreur pouvant justifier l'intervention de la Cour.

 

[93]           J'ajouterais qu'il est essentiel, lors d'une action en contrefaçon concernant un programme d'ordinateur, de fournir au juge de première instance des éléments de preuve techniques précis et clairs pour appuyer l'argument selon lequel il y a nécessairement reproduction lors de l'exécution de certaines actions. Les conclusions formulées dans d'autres affaires ne peuvent se substituer à la preuve à présenter en l'espèce. Harmony n'a pas présenté de témoignage d'expert et a tenté de fonder son argumentation sur le témoignage des témoins de Foss. Cette stratégie est toujours risquée. En fait, la juge de première instance est arrivée à la conclusion que Harmony n'avait pas produit une preuve suffisante pour établir la violation selon la prépondérance des probabilités.

 

[94]           Dans les circonstances, je ne vois pas la nécessité de traiter des questions soulevées en appel quant à la responsabilité personnelle des particuliers intimés.

 

La preuve matérielle

[95]           Dans sa dernière question en appel, Harmony soutient avoir droit à un nouveau procès au motif que la décision de la juge de première instance, dans sa globalité, est viciée par une décision relative à la preuve qu'elle a rendue, laquelle a eu au bout du compte une incidence sur son appréciation de la crédibilité de M. Chari. La juge y fait référence brièvement aux paragraphes 22 à 24 des motifs.

 

[96]           Durant le contre‑interrogatoire de Mme Warth, l'avocat de Harmony a tenté d'utiliser son ordinateur, dans lequel une copie du programme Petro avait été installée, pour demander à ce témoin des faits d'effectuer des recherches qui n'avaient pas été faites auparavant, dans le but d'examiner une [TRADUCTION] « très grave allégation » faite par M. Cristello durant son réinterrogatoire. Plus particulièrement, certaines factures figurant à l'onglet 140 du recueil de documents pour l'instruction et abordées durant son contre-interrogatoire ne semblaient pas être, à tous, des factures exactes payables à Balmar Petroleum Ltd., puisque le module de facturation de Petro n'avait jamais été utilisé pour facturer quiconque autre que les quatre clients dont M. Cristello avait donné la liste.

 

[97]           Il semble qu'à ce moment‑là, l'avocat de Harmony n'était même pas certain que cet élément soit nécessaire, puisqu'il avait versé à l'onglet 156 du recueil de documents pour l'instruction les « copies d'écran » (page 03122 du dossier d'appel, vol. 10, onglet 8). Le CD‑ROM utilisé n'avait pas été déposé comme pièce au dossier. Une objection a d'abord été soulevée au sujet du fait que ce témoin n'avait pas été présenté en tant qu'expert et que Harmony ne pouvait s'en servir pour présenter une contrepreuve au sujet d'une chose que Mme Warth n'avait jamais faite auparavant. Je crois que c'est ce qui a amené la juge de première instance à se fonder sur l'article 287 des Règles. En dépit de l'opinion contraire exprimée par l'avocat de Harmony, ce sujet n'était pas approprié lors du contre‑interrogatoire de ce témoin.

 

[98]           Je tiens à souligner que l'avocat de Harmony a dit à notre Cour qu'il avait voulu que Mme Warth effectue les recherches qui avaient été faites par M. Chari. Il n'est même pas clair que M. Chari ait témoigné sur la manière dont ces factures avaient été obtenues.

 

[99]           Quoi qu'il en soit, la juge a demandé si un ordinateur indépendant serait disponible de sorte qu'il puisse être déposé en preuve au besoin. Aucun n'était disponible et Harmony n'a pas cherché à obtenir un bref ajournement pour satisfaire à cette exigence, pas plus qu'elle ne l'a fait le lendemain, quand le contre‑interrogatoire s'est poursuivi. Plusieurs questions ont été posées au témoin au sujet des factures et du système utilisé chez Foss, dont celle de savoir si des données erronées pouvaient avoir été entrées par erreur dans la base de données.

 

[100]       À aucun moment Harmony n'a indiqué à la juge de première instance que la preuve matérielle était importante pour faire valoir sa thèse. Harmony n'a pas cherché à présenter de preuve en réponse à l'égard des allégations de M. Cristello, à propos desquelles la juge avait indiqué qu'elles devraient être appréciées individuellement. Harmony n'a pas expliqué à notre Cour la raison pour laquelle cette preuve n'a pas été ou n'a pas pu être présentée en réponse.

 

[101]       La juge a soupesé le risque d'autoriser une telle démonstration (effet préjudiciable) par rapport à sa valeur probante. C'était là le bon critère. Elle a refusé le recours à cette preuve matérielle. Après avoir examiné le contexte global, l'exercice de son pouvoir discrétionnaire fondé sur les faits dont elle était saisie et découlant de l'utilisation du bon critère juridique doit être confirmé, à plus forte raison si l'on considère que le « doute » soulevé par M. Cristello au sujet de ces factures est le tout dernier élément que la juge de première instance a mentionné dans sa liste des facteurs qui ont compromis le témoignage de M. Chari (voir le paragraphe 26 ci‑dessus). J'ajouterais à cet égard que la juge avait plusieurs motifs de conclure que M. Chari n'était pas crédible, et ces motifs demeurent inchangés en appel.

 

CONCLUSION

[102]       Pour les motifs qui précèdent, je rejetterais le présent appel avec dépens.

 

« Johanne Gauthier »

j.c.a.

 

« Je suis d'accord.

            Le juge Stratas »

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Yves Bellefeuille, réviseur

 


ANNEXE « A »

 

 

Loi sur le droit d'auteur, L.R.C. (1985), ch. C‑42

 

R.S.C. 1985, c. C‑42

 

 Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente loi.

 

[...]

 

 In this Act,

 

. . .

« compilation » Les oeuvres résultant du choix ou de l'arrangement de tout ou partie d'oeuvres littéraires, dramatiques, musicales ou artistiques ou de données.

 

[…]

 

 

“compilation” means

 

(a) a work resulting from the selection or arrangement of literary, dramatic, musical or artistic works or of parts thereof, or

 

(b) a work resulting from the selection or arrangement of data;

« oeuvre littéraire » Y sont assimilés les tableaux, les programmes d'ordinateur et les compilations d'oeuvres littéraires.

 

[...]

 

 

“literary work” includes tables, computer programs, and compilations of literary works;

 

. . .

« programme d'ordinateur » Ensemble d'instructions ou d'énoncés destiné, quelle que soit la façon dont ils sont exprimés, fixés, incorporés ou emmagasinés, à être utilisé directement ou indirectement dans un ordinateur en vue d'un résultat particulier.

 

[...]

 

 

“computer program” means a set of instructions or statements, expressed, fixed, embodied or stored in any manner, that is to be used directly or indirectly in a computer in order to bring about a specific result;

 

. . .

 (1) Le droit d'auteur sur l'oeuvre comporte le droit exclusif de produire ou reproduire la totalité ou une partie importante de l'oeuvre, sous une forme matérielle quelconque, d'en exécuter ou d'en représenter la totalité ou une partie importante en public et, si l'oeuvre n'est pas publiée, d'en publier la totalité ou une partie importante; ce droit comporte, en outre, le droit exclusif :

 

 (1) For the purposes of this Act, “copyright”, in relation to a work, means the sole right to produce or reproduce the work or any substantial part thereof in any material form whatever, to perform the work or any substantial part thereof in public or, if the work is unpublished, to publish the work or any substantial part thereof, and includes the sole right

 

. . .

 

a) de produire, reproduire, représenter ou publier une traduction de l'oeuvre;

 

(a) to produce, reproduce, perform or publish any translation of the work,

b) s'il s'agit d'une oeuvre dramatique, de la transformer en un roman ou en une autre oeuvre non dramatique;

 

(b) in the case of a dramatic work, to convert it into a novel or other non-dramatic work,

c) s'il s'agit d'un roman ou d'une autre oeuvre non dramatique, ou d'une oeuvre artistique, de transformer cette oeuvre en une oeuvre dramatique, par voie de représentation publique ou autrement;

 

(c) in the case of a novel or other non-dramatic work, or of an artistic work, to convert it into a dramatic work, by way of performance in public or otherwise,

d) s'il s'agit d'une oeuvre littéraire, dramatique ou musicale, d'en faire un enregistrement sonore, film cinématographique ou autre support, à l'aide desquels l'oeuvre peut être reproduite, représentée ou exécutée mécaniquement;

 

(d) in the case of a literary, dramatic or musical work, to make any sound recording, cinematograph film or other contrivance by means of which the work may be mechanically reproduced or performed,

e) s'il s'agit d'une oeuvre littéraire, dramatique, musicale ou artistique, de reproduire, d'adapter et de présenter publiquement l'oeuvre en tant qu'oeuvre cinématographique;

 

(e) in the case of any literary, dramatic, musical or artistic work, to reproduce, adapt and publicly present the work as a cinematographic work,

f) de communiquer au public, par télécommunication, une oeuvre littéraire, dramatique, musicale ou artistique;

 

(f) in the case of any literary, dramatic, musical or artistic work, to communicate the work to the public by telecommunication,

g) de présenter au public lors d'une exposition, à des fins autres que la vente ou la location, une oeuvre artistique — autre qu'une carte géographique ou marine, un plan ou un graphique — créée après le 7 juin 1988;

 

(g) to present at a public exhibition, for a purpose other than sale or hire, an artistic work created after June 7, 1988, other than a map, chart or plan,

h) de louer un programme d'ordinateur qui peut être reproduit dans le cadre normal de son utilisation, sauf la reproduction effectuée pendant son exécution avec un ordinateur ou autre machine ou appareil;

 

(h) in the case of a computer program that can be reproduced in the ordinary course of its use, other than by a reproduction during its execution in conjunction with a machine, device or computer, to rent out the computer program,

i) s'il s'agit d'une oeuvre musicale, d'en louer tout enregistrement sonore.

 

(i) in the case of a musical work, to rent out a sound recording in which the work is embodied,

Est inclus dans la présente définition le droit exclusif d'autoriser ces actes.

 

[...]

and to authorize any such acts.

. . .

 (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente loi, l'auteur d'une oeuvre est le premier titulaire du droit d'auteur sur cette oeuvre.

 

[...]

 

 (1) Subject to this Act, the author of a work shall be the first owner of the copyright therein.

 

. . .

 

(3) Lorsque l'auteur est employé par une autre personne en vertu d'un contrat de louage de service ou d'apprentissage, et que l'oeuvre est exécutée dans l'exercice de cet emploi, l'employeur est, à moins de stipulation contraire, le premier titulaire du droit d'auteur; mais lorsque l'oeuvre est un article ou une autre contribution, à un journal, à une revue ou à un périodique du même genre, l'auteur, en l'absence de convention contraire, est réputé posséder le droit d'interdire la publication de cette oeuvre ailleurs que dans un journal, une revue ou un périodique semblable.

 

(3) Where the author of a work was in the employment of some other person under a contract of service or apprenticeship and the work was made in the course of his employment by that person, the person by whom the author was employed shall, in the absence of any agreement to the contrary, be the first owner of the copyright, but where the work is an article or other contribution to a newspaper, magazine or similar periodical, there shall, in the absence of any agreement to the contrary, be deemed to be reserved to the author a right to restrain the publication of the work, otherwise than as part of a newspaper, magazine or similar periodical.

(4) Le titulaire du droit d'auteur sur une oeuvre peut céder ce droit, en totalité ou en partie, d'une façon générale ou avec des restrictions relatives au territoire, au support matériel, au secteur du marché ou à la portée de la cession, pour la durée complète ou partielle de la protection; il peut également concéder, par une licence, un intérêt quelconque dans ce droit; mais la cession ou la concession n'est valable que si elle est rédigée par écrit et signée par le titulaire du droit qui en fait l'objet, ou par son agent dûment autorisé.

 

[...]

 

(4) The owner of the copyright in any work may assign the right, either wholly or partially, and either generally or subject to limitations relating to territory, medium or sector of the market or other limitations relating to the scope of the assignment, and either for the whole term of the copyright or for any other part thereof, and may grant any interest in the right by licence, but no assignment or grant is valid unless it is in writing signed by the owner of the right in respect of which the assignment or grant is made, or by the owner's duly authorized agent.

 

. . .

 (1) Constitue une violation du droit d'auteur l'accomplissement, sans le consentement du titulaire de ce droit, d'un acte qu'en vertu de la présente loi seul ce titulaire a la faculté d'accomplir.

 

[...]

 

 (1) It is an infringement of copyright for any person to do, without the consent of the owner of the copyright, anything that by this Act only the owner of the copyright has the right to do.

 

. . .

 

 Ne constituent pas des violations du droit d'auteur :

 

a) le fait, pour le propriétaire d'un exemplaire — autorisé par le titulaire du droit d'auteur — d'un programme d'ordinateur, de produire une seule copie de l'exemplaire par adaptation, modification ou conversion, ou par traduction en un autre langage informatique s'il établit que la copie est destinée à assurer la compatibilité du programme avec un ordinateur donné, qu'elle ne sert qu'à son propre usage et qu'elle est détruite dès qu'il n'est plus propriétaire de l'exemplaire;

 

 It is not an infringement of copyright in a computer program for a person who owns a copy of the computer program that is authorized by the owner of the copyright to

 

(a) make a single reproduction of the copy by adapting, modifying or converting the computer program or translating it into another computer language if the person proves that the reproduced copy is

 

(i) essential for the compatibility of the computer program with a particular computer,

 

(ii) solely for the person's own use, and

 

(iii) destroyed immediately after the person ceases to be the owner of the copy; or

 

b) le fait, pour le propriétaire d'un exemplaire — autorisé par le titulaire du droit d'auteur — d'un programme d'ordinateur, de produire une seule copie de sauvegarde de l'exemplaire ou de la copie visée à l'alinéa a) s'il établit qu'elle est détruite dès qu'il n'est plus propriétaire de l'exemplaire.

 

(b) make a single reproduction for backup purposes of the copy or of a reproduced copy referred to in paragraph (a) if the person proves that the reproduction for backup purposes is destroyed immediately when the person ceases to be the owner of the copy of the computer program.

 (1) Dans toute procédure pour violation du droit d'auteur, si le défendeur conteste l'existence du droit d'auteur ou la qualité du demandeur :

 

 (1) In any proceedings for infringement of copyright in which the defendant puts in issue either the existence of the copyright or the title of the plaintiff thereto,

 

a) l'oeuvre, la prestation, l'enregistrement sonore ou le signal de communication, selon le cas, est, jusqu'à preuve contraire, présumé être protégé par le droit d'auteur;

(a) copyright shall be presumed, unless the contrary is proved, to subsist in the work, performer's performance, sound recording or communication signal, as the case may be; and

b) l'auteur, l'artiste‑interprète, le producteur ou le radiodiffuseur, selon le cas, est, jusqu'à preuve contraire, réputé être titulaire de ce droit d'auteur.

(b) the author, performer, maker or broadcaster, as the case may be, shall, unless the contrary is proved, be presumed to be the owner of the copyright.

(2) Dans toute contestation de cette nature, lorsque aucun acte de cession du droit d'auteur ni aucune licence concédant un intérêt dans le droit d'auteur n'a été enregistré sous l'autorité de la présente loi :

 

(2) Where any matter referred to in subsection (1) is at issue and no assignment of the copyright, or licence granting an interest in the copyright, has been registered under this Act,

a) si un nom paraissant être celui de l'auteur de l'oeuvre, de l'artiste‑interprète de la prestation, du producteur de l'enregistrement sonore ou du radiodiffuseur du signal de communication y est imprimé ou autrement indiqué, de la manière habituelle, la personne dont le nom est ainsi imprimé ou indiqué est, jusqu'à preuve contraire, présumée être l'auteur, l'artiste‑interprète, le producteur ou le radiodiffuseur;

 

(a) if a name purporting to be that of

 

(i) the author of the work,

 

(ii) the performer of the performer's performance,

 

(iii) the maker of the sound recording, or

 

(iv) the broadcaster of the communication signal

 

is printed or otherwise indicated thereon in the usual manner, the person whose name is so printed or indicated shall, unless the contrary is proved, be presumed to be the author, performer, maker or broadcaster;

b) si aucun nom n'est imprimé ou indiqué de cette façon, ou si le nom ainsi imprimé ou indiqué n'est pas le véritable nom de l'auteur, de l'artiste‑interprète, du producteur ou du radiodiffuseur, selon le cas, ou le nom sous lequel il est généralement connu, et si un nom paraissant être celui de l'éditeur ou du titulaire du droit d'auteur y est imprimé ou autrement indiqué de la manière habituelle, la personne dont le nom est ainsi imprimé ou indiqué est, jusqu'à preuve contraire, présumée être le titulaire du droit d'auteur en question;

 

(b) if

 

(i) no name is so printed or indicated, or if the name so printed or indicated is not the true name of the author, performer, maker or broadcaster or the name by which that person is commonly known, and

 

(ii) a name purporting to be that of the publisher or owner of the work, performer's performance, sound recording or communication signal is printed or otherwise indicated thereon in the usual manner,

 

the person whose name is printed or indicated as described in subparagraph (ii) shall, unless the contrary is proved, be presumed to be the owner of the copyright in question; and

c) si un nom paraissant être celui du producteur d'une oeuvre cinématographique y est indiqué de la manière habituelle, cette personne est présumée, jusqu'à preuve contraire, être le producteur de l'oeuvre.

 

(c) if, on a cinematographic work, a name purporting to be that of the maker of the cinematographic work appears in the usual manner, the person so named shall, unless the contrary is proved, be presumed to be the maker of the cinematographic work.

 Nul ne peut revendiquer un droit d'auteur autrement qu'en application de la présente loi ou de toute autre loi fédérale; le présent article n'a toutefois pas pour effet d'empêcher, en cas d'abus de confiance, un individu de faire valoir son droit ou un tribunal de réprimer l'abus.

 

 No person is entitled to copyright otherwise than under and in accordance with this Act or any other Act of Parliament, but nothing in this section shall be construed as abrogating any right or jurisdiction in respect of a breach of trust or confidence.

 


 

COUR D'APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                                A-166-11

 

APPEL D'UN JUGEMENT RENDU LE 18 MARS 2011 PAR MADAME LA JUGE HENEGHAN DE LA COUR FÉDÉRALE DANS LE DOSSIER NO T‑1269‑05

 

INTITULÉ :                                                              Harmony Consulting Ltd. c. G. A. Foss Transport Ltd., Gordon A. Foss et Joe Cristello

 

LIEU DE L'AUDIENCE :                                      Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L'AUDIENCE :                                     Le 14 février 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :        La juge Gauthier

 

Y A SOUSCRIT :                                                     Le juge Stratas

 

N'A PAS PRIS PART AU JUGEMENT :            La juge Layden-Stevenson

 

DATE DES MOTIFS :                                             Le 31 août 2012

 

COMPARUTIONS :

 

Anthony Prenol

 

POUR L'APPELANTE

 

Christopher J. Staples

POUR LES INTIMÉS

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

BLAKE, CASSELS & GRAYDON LLP

Toronto (Ontario)

 

POUR L'APPELANTE

 

CHAITONS LLP

Toronto (Ontario)

POUR LES INTIMÉS

 

 

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