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Date : 20120919

Dossier : A‑476‑11

Référence : 2012 CAF 240

 

CORAM:       LE JUGE NOËL

                        LE JUGE PELLETIER

                        LA JUGE GAUTHIER

 

ENTRE :

la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada

appelante

et

l’OFFICE DES TRANSPORTS DU CANADA et

le Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée

intimés

 

 

 

Audience tenue à Montréal (Québec), le 18 septembre 2012.

Jugement rendu à Montréal (Québec), le 19 septembre 2012.

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                        LE JUGE PELLETIER

Y ONT SOUSCRIT :                                                                                             LE JUGE NOËL

                                                                                                                      LA JUGE GAUTHIER

 


Date : 20120919

Dossier : A‑476‑11

Référence : 2012 CAF 240

 

CORAM:       LE JUGE NOËL

                        LE JUGE PELLETIER

                        LA JUGE GAUTHIER

 

ENTRE :

la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada

appelante

et

l’OFFICE DES TRANSPORTS DU CANADA et

le Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée

intimés

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE PELLETIER

[1]               L’appelante, la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (le CN), interjette appel d’une décision de l’Office des transports du Canada (l’Office), conformément à l’article 41 de la Loi sur les transports au Canada, L.C. 1996, ch. 10 (la Loi). Cet article permet d’interjeter appel des décisions de l’Office, avec l’autorisation de la Cour, sur une question de droit ou de compétence. Dans le présent appel, les questions soulevées ont trait à l’équité procédurale et les décisions prises à cet égard sont susceptibles de contrôle selon la norme de la décision correcte.

 

[2]               Au fil des ans et à la lumière d’une importante jurisprudence, l’Office a mis au point un mode d’administration du régime de plafond de revenu prévu à l’article 150 de la Loi. Ce faisant, il a élaboré certains critères pour établir la répartition du revenu, du tonnage et du millage entre les compagnies de chemin de fer régies dans divers contextes, comme l’interconnexion et l’aiguillage (désignées ensemble sous le terme interconnexion), qui ont l’une et l’autre trait au déplacement des wagons d’une société ferroviaire par une autre moyennant des frais. En réponse à une demande d’observations faite par l’Office, le CN a recommandé que l’organisme réexamine son approche quant aux revenus d’interconnexion, au tonnage et au millage en fonction du fait que, contrairement à ce à quoi l’Office s’attendait au moment de l’adoption des procédures en cause dans sa décision no 114‑R‑2001 (la décision de 2001), le revenu tiré de l’interconnexion est inégalement réparti entre les sociétés ferroviaires, et cela défavorise le CN dans le calcul du revenu auquel il a droit. Le CN a présenté une comptabilisation (sous forme de tableau) du volume des revenus d’interconnexion tirés par lui et par le Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée (le CP) depuis l’instauration du programme jusqu’à la date du dernier calcul des plafonds de revenu par l’Office. Le tableau permet de constater que le CN tire systématiquement davantage de revenus d’interconnexion que le CP (dossier d’appel, page 105). Le CN a proposé deux moyens pour corriger le déséquilibre apparent qu’il a relevé.

 

[3]               L’Office a répondu aux observations du CN sans traiter directement de la question du déséquilibre apparent des revenus d’interconnexion. Il a plutôt expliqué pourquoi il n’était pas disposé à recourir à l’un ou l’autre des moyens proposés par le CN. Concernant le premier moyen – la non‑répartition des revenus d’interconnexion entre le transporteur qui effectue les manœuvres d’aiguillage et le transporteur de ligne –, l’Office a fait remarquer qu’on ne lui avait pas présenté de nouveaux motifs qui justifieraient de réviser sa décision prise en 2001 d’inclure les revenus d’interconnexion dans le revenu du transporteur effectuant les manœuvres d’aiguillage et de les déduire du revenu du transporteur de ligne.

 

[4]               Le deuxième moyen proposé par le CN consistait à inclure le millage et le tonnage associés à l’interconnexion du trafic dans le calcul du tonnage et de la longueur moyenne des mouvements aux fins de la formule établie à l’article 151 de la Loi, en tenant pour acquis que les manœuvres en cause constituent des mouvements du grain autonomes selon la propre décision de 2001 de l’Office. Concernant ce deuxième moyen, l’Office a souligné qu’il n’avait pas décidé en fait que chaque segment individuel d’un mouvement du grain du lieu d’expédition jusqu’au port constituait un mouvement du grain, mais plutôt qu’un mouvement du grain était la somme des segments admissibles constitutifs du mouvement. L’Office a décidé en 2001 que le mouvement du grain pendant l’interconnexion était un segment admissible du mouvement du grain et non pas un mouvement autonome. La prémisse sur laquelle reposait le deuxième moyen proposé par le CN était par conséquent inexacte.

 

[5]               Le CN soutient que la réponse donnée par l’Office à ses observations a enfreint son droit à l’équité procédurale pour deux motifs. Premièrement, le CN affirme que les motifs formulés par l’Office étaient insuffisants parce qu’on n’y traitait pas de l’élément central de ses observations, soit le déséquilibre apparent entre ses revenus d’interconnexion et ceux du CP. Deuxièmement, le CN fait valoir que l’Office a omis de mener des consultations additionnelles au sujet d’un argument, en lien avec la définition du mouvement du grain, qui n’avait jamais été soulevé et qui ne lui avait pas été présenté avant la date de la décision.

 

[6]               Bien que le CN ait fait allusion dans son avis d’appel à une erreur de droit commise par l’Office, son mémoire des faits et du droit fait voir clairement que cette erreur est alléguée au soutien de son argument fondé sur l’équité procédurale. D’ailleurs, aucune réparation n’a été sollicitée à cet égard, si ce n’est une demande de [traduction] « directives à donner à l’Office si l’affaire devait lui être renvoyée pour des motifs d’équité procédurale » (mémoire des faits et du droit du CN, paragraphe 83).

 

[7]               Quant à la question de l’équité procédurale, la décision à l’examen a été prise dans le contexte d’un processus de consultation permanent. Il ne s’agit pas d’une décision judiciaire ou quasi judiciaire qui a une incidence sur les droits des parties. Si l’Office avait jugé valables les mesures proposées par le CN, il aurait alors amorcé un processus plus large de consultation auprès d’autres intéressés, à l’issue duquel il aurait pris une décision d’orientation qui n’aurait pas nécessairement intégré les mesures du CN. La nature du processus est telle que l’obligation d’équité procédurale à respecter a une portée relativement restreinte. Après avoir sollicité des propositions en vue de consultations ultérieures, l’Office devait prendre en compte les propositions formulées. L’Office l’a fait, tel qu’il ressort clairement de sa décision.

 

[8]               Les motifs énoncés par l’Office pour ne pas avoir donné suite aux propositions du CN sont rationnels et intelligibles, et ils permettent au CN de comprendre pourquoi ses propositions n’ont pas été retenues. Bien que l’Office n’ait pas traité expressément du déséquilibre apparent entre les revenus tirés de l’interconnexion par les transporteurs, il est manifeste qu’il a conclu que les statistiques fournies par le CN ne suffisaient pas à justifier la révision de la décision à laquelle il était arrivé en 2001. Cela dit, c’est chaque année qu’on établit le plafond de revenu et le revenu associé au mouvement du grain de l’Ouest de chaque société ferroviaire. Selon l’évolution de la situation, toute décision ainsi prise pourra donner lieu éventuellement à une réparation. En outre, l’Office ayant désormais adopté des lignes directrices à cet égard, il sera loisible au CN de mettre de nouveau la question de l’avant s’il peut démontrer que la méthode actuelle de répartition soulève un problème important qui justifierait la tenue de consultations.

 

[9]               Quant à la définition du mouvement du grain, le CN a soulevé la question pour la première fois lorsqu’il a invoqué la décision de 2001 de l’Office pour faire valoir que les mouvements d’interconnexion étaient des mouvements du grain pour l’application de la formule du plafond de revenu. L’Office a simplement fait ressortir dans sa réponse que, si l’on concluait qu’un segment particulier d’un mouvement du grain est visé par la définition prévue dans la loi, cela ne revenait pas à dire que le segment constitue à lui seul un mouvement du grain au sens de l’article 147 de la Loi. Rien ne permet de dire que l’Office a décidé de ne pas procéder à de nouvelles consultations pour un motif non précédemment soulevé par les parties.

 

[10]           Il n’y a eu aucun manquement à l’équité procédurale et rien ne justifie par conséquent l’intervention de la Cour. Pour ce qui est du défaut du CN de traiter de manière exhaustive dans son mémoire des faits et du droit de la prétendue erreur de droit de l’Office, je laisserais cette question être tranchée dans le cadre d’une procédure où une argumentation complète sera présentée en présence de toutes les parties intéressées.

 

[11]           En conséquence, l’appel sera rejeté, mais sans frais.

 

 

« J.D. Denis Pelletier »

j.c.a.

 

 

« Je suis d’accord.

            Marc Noël, j.c.a. »

 

« Je suis d’accord.

            Johanne Gauthier, j.c.a. »

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Mario Lagacé, jurilinguiste

 


Cour d’appel fédérale

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    A‑476‑11

 

INTITULÉ :                                                  LA COMPAGNIE DES CHEMINS DE FER NATIONAUX DU CANADA c.
L’OFFICE DES TRANSPORTS DU CANADA ET AUTRE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                          Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                         Le 18 septembre 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                      LE JUGE PELLETIER

 

Y ONT SOUSCRIT :                                   LE JUGE NOËL

                                                                        LA JUGE GAUTHIER

 

DATE DES MOTIFS :                                 Le 19 septembre 2012

 

 

Comparutions :

 

Eric Harvey

Nadia Effendi

 

Pour l’appelante

 

John Dodsworth

 

POUR L’INTIMÉ

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Services du contentieux du CN

Montréal (Québec)

Borden Ladner Gervais s.r.l.

Ottawa (Ontario)

 

Pour l’appelante

 

Office des transports du Canada

Direction des services juridiques

Gatineau (Québec)

 

POUR L’INTIMÉ

 

 

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