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Date : 20130530

 

Dossier : A-48-12

 

Référence : 2013 CAF 140

 

CORAM :      LA JUGE GAUTHIER

                        LE JUGE MAINVILLE

                        LE JUGE WEBB

 

 

 

ENTRE :

BOARDWALK EQUITIES INC.

appelante

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

 

 

Audience tenue à Calgary (Alberta), le 23 avril 2013

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 30 mai 2013

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                                                          LE JUGE WEBB

Y ONT SOUSCRIT :                                                                             LA JUGE GAUTHIER

                                                                                                               LE JUGE MAINVILLE


Date : 20130530

Dossier : A-48-12

 

Référence : 2013 CAF 140

 

CORAM :      LA JUGE GAUTHIER

                        LE JUGE MAINVILLE

                        LE JUGE WEBB

 

 

ENTRE :

BOARDWALK EQUITIES INC.

appelante

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE WEBB

[1]               L’appelante se pourvoit contre une décision du juge Jorré (le juge) de la Cour canadienne de l’impôt (2012 CCI 7). L’appel a été instruit en même temps que l’appel formé dans l’affaire Calgary Board of Education c. Sa Majesté la Reine (A‑49‑12).

 

[2]               En 2001, les coûts de l’énergie ayant connu une augmentation substantielle, la province de l’Alberta (la province) a mis en œuvre un programme visant à aider les consommateurs à acquitter les coûts élevés de l’énergie. La province effectuait des versements aux fournisseurs d’électricité et de gaz naturel en fonction des factures faites aux consommateurs. Un montant de TPS a été facturé à l’appelante et payé par celle-ci; il a été calculé en fonction de la somme totale facturée par les fournisseurs pour le gaz naturel et l’électricité consommée, sans prise en compte de ce que ces fournisseurs recevraient de la province. Soutenant qu’elle n’avait pas à acquitter de TPS sur les sommes que la province a versées aux fournisseurs, l’appelant fait valoir qu’elle a payé par erreur une partie de la TPS, et elle en demande le remboursement en application du paragraphe 261(1) de la Loi sur la taxe d’accise, L.R.C. 1985, ch. E‑15 (la Loi). Le juge n’a pas retenu l’argument du montant payé par erreur. Pour les motifs qui suivent, je rejetterais l’appel.

 

[3]               Le programme mis en œuvre par la province aidait au paiement des coûts d’électricité et de gaz naturel, de gaz propane et d’autres huiles de chauffage. Pour les consommateurs résidentiels, le montant d’aide était fixe mais, pour les consommateurs non résidentiels, il était établi en fonction de l’énergie consommée. Le présent appel ne porte que sur le montant d’aide établi en fonction de l’électricité et du gaz naturel consommés par l’appelante, une consommatrice non résidentielle.

 

[4]               S’agissant de l’aide concernant le coût du gaz naturel, les arrêtés ministériels (MO 6/01 et 17/01) prévoyaient que [traduction] « [l]e remboursement relatif au gaz naturel sera versé aux utilisateurs de gaz naturel en Alberta ». Ces arrêtés employaient le mot [traduction] « remboursement » (rebate), tandis que le Transportation and Utilities Grants Regulation, Alta. Reg. 355/1986, sous le régime duquel les arrêtés avaient été pris, autorisait le ministre à verser des subventions (grants). Les factures établies par les fournisseurs qualifiaient aussi ces montants de [traduction] « remboursements ». La question de savoir si les montants doivent être considérés comme des remboursements ou des subventions n’influe pas, selon moi, sur l’issue de l’affaire. Les sommes reçues de la province par les fournisseurs constituaient simplement une aide financière qui, une fois versée aux fournisseurs, réduisait le montant de l’obligation de leurs clients.

 

[5]               Dans l’exposé conjoint des faits déposé devant la Cour canadienne de l’impôt, les parties ont reconnu que, par souci de commodité administrative, la province versait directement les sommes aux fournisseurs de gaz naturel une fois que ceux‑ci avaient indiqué au gouvernement la quantité de gaz naturel consommée par leurs clients albertains. Les fournisseurs établissaient les factures en tenant compte du montant qui serait payé par la province en application du programme d’aide, lequel montant était généralement versé à la date d’exigibilité de la facture du client ou la veille.

 

[6]               L’aide applicable à l’électricité provenait du Balancing Pool. Les règles en régissant la distribution étaient établies par le Power Pool Council (paragraphe 8(1) du Balancing Pool Allocation Regulation, Alta. Reg. 330/2000). Selon la définition d’[traduction] « allocation de consommation mensuelle admissible » énoncée aux Balancing Pool Rules, version révisée du 1er octobre 2001, les sommes étaient versées aux clients non résidentiels. Le fournisseur d’électricité octroyait un crédit (qualifié de remboursement) à l’égard du montant à provenir du Balancing Pool. La facture que le fournisseur envoyait aux clients reflétait ce crédit. Par l’intermédiaire du Balancing Pool, la province versait l’aide afférente à l’électricité aux fournisseurs en fonction des crédits qu’ils avaient inscrits à leurs factures. Comme les parties l’ont reconnu, les versements étaient faits directement aux fournisseurs parce qu’il était plus facile et efficient de procéder ainsi que d’effectuer des paiements directs à chaque consommateur d’électricité de l’Alberta.

 

[7]               L’assujettissement à la TPS est prévu au paragraphe 165(1) de la Loi, dont voici le texte en vigueur en 2001:

165. (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente partie, l’acquéreur d’une fourniture taxable effectuée au Canada est tenu de payer à Sa Majesté du chef du Canada une taxe calculée au taux de 7% sur la valeur de la contrepartie de la fourniture.

 

165.  (1) Subject to this Part, every recipient of a taxable supply made in Canada shall pay to Her Majesty in right of Canada tax in respect of the supply calculated at the rate of 7% on the value of the consideration for the supply.

 

[8]               L’acquéreur de la fourniture est la personne à qui il incombe d’acquitter la TPS calculée en fonction de la valeur de la contrepartie de ladite fourniture. Les termes « contrepartie » et « acquéreur » sont définis ainsi au paragraphe 123(1) de la Loi :

« contrepartie » Est assimilé à une contrepartie tout montant qui, par effet de la loi, est payable pour une fourniture.

[…]

 

« acquéreur »

 

 

a) Personne qui est tenue, aux termes d’une convention portant sur une fourniture, de payer la contrepartie de la fourniture;

 

 

b) personne qui est tenue, autrement qu’aux termes d’une convention portant sur une fourniture, de payer la contrepartie de la fourniture;…

 

 

“consideration” includes any amount that is payable for a supply by operation of law;

 

 

“recipient” of a supply of property or a service means

 

(a) where consideration for the supply is payable under an agreement for the supply, the person who is liable under the agreement to pay that consideration,

 

(b) where paragraph (a) does not apply and consideration is payable for the supply, the person who is liable to pay that consideration, and …

 

 

 

[9]               Le montant de TPS payable à l’égard d’un produit ou service acquis aux termes d’une convention correspond au taux applicable (7 % en 2001) multiplié par le montant de la contrepartie payable selon la convention. La TPS est calculée en fonction du montant de la contrepartie payable, non du montant effectivement payé.

 

[10]           Comme il en a été fait mention, la TPS imposée à l’appelante a été établie en fonction du montant total que celle‑ci devait payer pour sa consommation de gaz naturel et d’électricité, avant application du crédit afférent aux sommes que les fournisseurs recevraient de la province. Il s’agit en l’espèce de déterminer si, à la date de l’assujettissement à la TPS, le montant payable par l’appelante en contrepartie de la fourniture de gaz naturel et d’électricité aux termes des conventions applicables était le montant total facturé pour cette fourniture (avant application du crédit inscrit à la facture pour le montant que le fournisseur recevrait par la suite de la province) ou le montant net résultant de l’application du crédit.

 

[11]           Aux termes du paragraphe 168(1) de la Loi, la TPS est payable au premier en date des jours suivants : le jour du paiement de la contrepartie ou le jour où la contrepartie devient due. Selon le paragraphe 152(1) de la Loi, la contrepartie d’une fourniture taxable est réputée devenir due le premier en date des jours énumérés aux alinéas a) à c) (dont l’un est le jour où le fournisseur délivre une facture pour la fourniture). Il résulte en l’espèce de ces dispositions que la TPS était payable à la date où les factures relatives à la fourniture d’électricité et de gaz naturel ont été délivrées. Bien que le crédit découlant de la somme qui serait versée par la province figurât sur les factures, le versement de cette somme était postérieur à la date de la facture.

 

[12]           Les arrêtés et règles applicables énonçaient que la province paierait la somme aux consommateurs (incluant l’appelante). Le paiement a été fait indirectement à l’appelante, puisque la province versait aux fournisseurs de gaz naturel et d’électricité une partie des sommes payables par l’appelante pour cette fourniture. À la date de la facture, le crédit qui y était inscrit n’a pas réduit l’obligation de l’appelante à l’égard de la contrepartie payable pour le gaz naturel et l’électricité. Rien n’indiquait que si, pour une raison ou une autre, la province ne versait pas le mondant du crédit indiqué, les fournisseurs seraient incapables de recouvrer ce montant auprès des consommateurs (y compris l’appelante). À mon avis, la province n’avait pas assumé partiellement l’obligation de l’appelante de payer ses fournisseurs de gaz naturel et d’électricité; elle avait simplement mis en œuvre un programme d’aide financière à l’intention des consommateurs de gaz naturel et d’électricité de l’Alberta. L’aide financière octroyée par la province à ces consommateurs prenait la forme de versements à leurs fournisseurs de gaz naturel et d’électricité.

 

[13]           L’obligation de l’appelante a été réduite lorsque les fournisseurs ont reçu les fonds de la province, puisque ces fonds ont été acceptés par eux à titre de paiement partiel de la somme que l’appelante aurait autrement dû acquitter aux termes des conventions qu’elle avait conclues avec eux. Toutefois, cela s’est produit après la date des factures et après la date de l’assujettissement à la TPS. Par conséquent, la TPS à acquitter par l’appelante a correctement été établie à 7 % de la contrepartie payable pour la fourniture de gaz naturel et d’électricité avant application du crédit afférent à la somme que les fournisseurs recevraient par la suite de la province.

 

[14]           En conséquence, je rejetterais l’appel avec un seul mémoire de frais pour le présent appel et pour l’appel dans l’affaire Calgary Board of Education, chacune des appelantes devant payer la moitié des dépens adjugés.

 

« Wyman W. Webb »

j.c.a.

 

« Je suis d’accord.

            Johanne Gauthier, j.c.a. »

 

« Je suis d’accord.

            Robert M. Mainville, j.c.a. »

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Mario Lagacé, jurilinguiste


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                                            A-48-12

 

 

INTITULÉ :                                                                         BOARDWALK EQUITIES INC.

                                                                                                c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                                  Calgary (Alberta)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                                 Le 23 avril 2013

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                               LE JUGE WEBB

 

Y ONT SOUSCRIT :                                                           LES JUGES GAUTHIER ET MAINVILLE

                                                                                               

 

DATE DES MOTIFS :                                                         Le 30 mai 2013

 

 

COMPARUTIONS :

 

Salvador Mirandola

Patrick Lindsay

 

POUR L’APPELANTE

 

Kathleen Lyons

POUR L’INTIMÉE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Borden Ladner Gervais s.r.l.

POUR L’APPELANTE

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

POUR L’INTIMÉE

 

 

 

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