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Date : 20190627

Dossier : A-178-19

Référence : 2019 CAF 194

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE STRATAS

LE JUGE LASKIN

 

 

ENTRE :

APOTEX INC.

appelante

et

BRISTOL-MYERS SQUIBB CANADA CO. ET BRISTOL-MYERS SQUIBB HOLDINGS IRELAND UNLIMITED COMPANY

intimées

Audience tenue à Toronto (Ontario), le 27 juin 2019.

Jugement rendu à l’audience à Toronto (Ontario), le 27 juin 2019.

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LA JUGE GAUTHIER

 


Date : 20190627

Dossier : A-178-19

Référence : 2019 CAF 194

CORAM :

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE STRATAS

LE JUGE LASKIN

 

 

ENTRE :

APOTEX INC.

appelante

et

BRISTOL-MYERS SQUIBB CANADA CO. ET BRISTOL-MYERS SQUIBB HOLDINGS IRELAND UNLIMITED COMPANY

intimées

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(Prononcés à l’audience à Toronto (Ontario), le 27 juin 2019.)

LA JUGE GAUTHIER

[1]  Notre Cour est saisie d’un appel interjeté par Apotex Inc. d’une ordonnance interlocutoire rendue par la protonotaire Milczynski. La protonotaire a rejeté la requête d’Apotex visant à obliger les intimées à répondre à cinq questions auxquelles elles se sont opposées en interrogatoire préalable.

[2]  De manière générale, ces questions visaient à obtenir des précisions sur les allégations figurant dans la réponse modifiée des intimées. Les intimées ont mentionné des [traduction« propriétés améliorées », des [traduction] « des propriétés pharmacocinétiques améliorées » et des [traduction] « avantages et des bienfaits » de l’apixaban, selon la divulgation et les revendications du brevet canadien no 2 461 202 (le brevet 202), quant aux inhibiteurs du facteur Xa de l’art antérieur, dont le brevet canadien no 2 349 330 (le brevet 330), lequel porte sur le genre incluant l’apixaban.

[3]  Apotex soutient, en défense contre l’instance intentée par les intimées en vertu du paragraphe 6(1) du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), DORS/93-133, notamment que le brevet 202 est un brevet de section invalide pour plusieurs motifs, incluant, mais sans s’y limiter, pour cause de double brevet, d’antériorité, d’évidence et d’absence d’utilité.

[4]  La décision discrétionnaire de la protonotaire, comme en l’espèce, ne peut être infirmée que si elle comporte une erreur de droit ou une erreur manifeste et dominante concernant une question de fait ou mélangée de fait et de droit (Hospira Healthcare Corp. c. Kennedy Institute of Rheumatology, 2016 CAF 215, 402 D.L.R. (4th) 497 (C.A.F.) aux para 64-65, 79). Depuis la jurisprudence Hospira, le droit est bien fixé : la norme de contrôle ne dépend pas de l’identité du décideur ou de sa mission, mais plutôt de la nature de la question en litige (voir les paras 51-54, 66 à 79).

[5]  La protonotaire n’a pas conclu que les réponses aux cinq questions vu leur formulation étaient pertinentes, car la question des [traduction] « avantages et des bienfaits » divulgués dans le brevet 202 sera, au final, tranchée à titre de question de droit par le juge chargé d’interpréter le brevet, qui aura tenu compte des témoignages des experts sur la manière dont la personne versée dans l’art comprendrait le texte du brevet. Or, elle est allée plus loin. Elle a conclu que même si ces questions avaient été pertinentes, d’autres facteurs, qu’elles avaient le droit de prendre en compte, appelaient l’exercice de son pouvoir discrétionnaire de rejeter la requête.

[6]  Plus précisément, elle a conclu que les réponses ne seraient pas véritablement utiles étant donné les courts échéanciers applicables à l’instance devant elle, et ce, particulièrement vu que, comme l’a soutenu Apotex, les réponses aux questions seraient accueillies [traduction] « sous réserve de l’avis d’experts ». Elle a également conclu que la question en litige, c’est-à-dire le bienfait ou l’avantage divulgué dans le brevet 202, le cas échéant, ferait l’objet de l’interprétation du brevet 202 par la personne versée dans l’art et des témoignages des experts. De plus, elle a conclu que les experts d’Apotex n’auraient aucune difficulté à se prononcer sur ces questions, vu les documents et les renseignements exhaustifs divulgués jusqu’à ce jour, et leur propre examen du brevet 202, du brevet 330 et de la prétendue demande de brevet 131. Elle a également conclu qu’elle pourrait examiner la nécessité de produire une réponse en preuve, le cas échéant, au moment opportun.

[7]  La protonotaire a entendu les arguments d’efficacité et de proportionnalité avancés par Apotex. Toutefois, son appréciation de ces facteurs l’a menée à rendre la conclusion qu’attaque Apotex. Apotex nous demande essentiellement d’apprécier à nouveau ces éléments et leur incidence sur l’exercice du pouvoir discrétionnaire du décideur. Or, la norme de contrôle est celle de l’erreur manifeste et dominante. Il s’agit d’un seuil très difficile à franchir pour un appelant (Benhaim c. St­Germain, 2016 CSC 48, [2016] 2 R.C.S 352, citant South Yukon Forest Corp. c. R., 2012 CAF 165, 4 B.L.R. (5th) 31, au para 46). Nous ne constatons aucune erreur qui appellerait l’intervention de notre Cour.

[8]  Cela dit, nous n’aurions peut-être pas exercé notre pouvoir discrétionnaire de la même manière que la protonotaire. Dans la plupart des cas, la divulgation hâtive des faits, des preuves et des positions favorise l’efficacité des procédures. Toutefois, la protonotaire avait le droit de parvenir à une vision de ce qui serait la meilleure solution pour l’avancement de cette instance en particulier. L’appelant connaît le fardeau qui lui incombe. Le processus d’interrogatoires préalables était à la fois fouillé et utile; nous ne pouvons conclure qu’il y ait matière à intervention en l’espèce.

[9]  Le temps est un facteur crucial dans le présent appel. Il est important que les étapes restantes dans l’échéancier établi par la protonotaire, chargée de la gestion de l’instance, ne soient pas retardées. En conséquence, nous ne formulerons aucune observation sur la conclusion de la protonotaire et ses motifs quant à la question de la pertinence des questions telles qu’elles sont formulées. Il n’est pas utile de le faire en l’espèce.

[10]  Nous rendons hommage à M. Brodkin pour son solide argumentaire.

[11]  L’appel sera rejeté avec dépens fixés au montant convenu de 3 500 $, tous frais et débours compris relativement au présent appel et à la demande d’autorisation.

« Johanne Gauthier »

j.c.a.


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


APPEL D’UNE ORDONNANCE DE MADAME LA PROTONOTAIRE MILCZYNSKI, DATÉE DU 28 MARS 2019, DOSSIER NO T-350-18

DOSSIER :

A-178-19

 

 

INTITULÉ :

APOTEX INC. c. BRISTOL-MYERS SQUIBB CANADA CO. ET BRISTOL-MYERS SQUIBB HOLDINGS IRELAND UNLIMITED COMPANY

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 27 juin 2019

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE STRATAS

LE JUGE LASKIN

 

PRONONCÉS À L’AUDIENCE PAR :

LA JUGE GAUTHIER

COMPARUTIONS :

Andrew Brodkin

Jordan D. Scopa

 

Pour l’appelante

 

David A.Tait

Sanjaya Mendis

Pour les intimées

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Goodmans LLP

Toronto (Ontario)

 

Pour l’appelante

 

McCarthy Tétrault S.E.N.C.R.L., s.r.l.

Toronto (Ontario)

Pour les intimées

 

 

 

 

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