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Date : 20190912


Dossier : A-275-18

Référence : 2019 CAF 230

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LE JUGE STRATAS

LE JUGE WEBB

LE JUGE DE MONTIGNY

 

 

ENTRE :

MAOZ BETSER-ZILEVITCH

appelant

et

NEXEN INC. ET CNOOC CANADA INC.,

CHACUNE INDIVIDUELLEMENT ET EXPLOITANT LEUR ENTREPRISE SOUS LA DÉNOMINATION SOCIALE DE THE LONG LAKE OIL SANDS PROJECT

intimées

Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 12 septembre 2019.

Jugement rendu à l’audience à Ottawa (Ontario), le 12 septembre 2019.

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LE JUGE DE MONTIGNY

 


Date : 20190912


Dossier : A-275-18

Référence : 2019 CAF 230

CORAM :

LE JUGE STRATAS

LE JUGE WEBB

LE JUGE DE MONTIGNY

 

 

ENTRE :

MAOZ BETSER-ZILEVITCH

appelant

et

NEXEN INC. ET CNOOC CANADA INC.,

CHACUNE INDIVIDUELLEMENT ET EXPLOITANT LEUR ENTREPRISE SOUS LA DÉNOMINATION SOCIALE DE THE LONG LAKE OIL SANDS PROJECT

intimées

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(Prononcé à l’audience à Ottawa (Ontario), le 12 septembre 2019.)

LE JUGE DE MONTIGNY

[1]  Notre Cour est saisie de l'appel interjeté de la décision rendue par un juge de la Cour fédérale (le juge) accueillant la requête des intimées en exécution d’une transaction. La Cour a conclu que les parties avaient conclu une entente contraignante mettant fin à l’action en contrefaçon de brevet sous-jacente. Les modalités de cette entente figurent dans l’offre de transaction écrite de l’appelante datée du 25 janvier 2017. Le juge a aussi conclu que l’entente comportait toutes les modalités essentielles, puis il a fixé les modalités non essentielles, sur lesquelles les parties ne s’entendaient pas dans leur tentative d’officialisation de l’entente. En conséquence, le juge a rejeté l’action intentée par l’appelant à l’encontre des intimées, et lui a ordonné de payer la somme de 5 000 $ à ces dernières à titre de dépens relatifs à la requête.

[2]  Il n'est pas controversé entre les parties ne conteste le fait que c'est la jurisprudence Apotex Inc. c. Allergan Inc., 2016 CAF 155 [Allergan], de notre Cour, qui consacre les principes applicables quant au moment où la correspondance portant sur la transaction résulte en une entente contraignante. Comme l’a observé le juge, il doit y avoir une intention mutuelle et objective de créer des liens juridiques; une contrepartie en échange d’une promesse; et les modalités de l’entente doivent être objectivement certaines. En l’espèce, l’appelant conteste l’application de ces principes aux faits et attaque les conclusions du juge selon lesquelles il y avait eu entente sur les modalités principales de la transaction. Le droit est bien fixé : de telles questions d’interprétation des contrats soulèvent des questions mélangées de fait et de droit, et qu’elles ne sont susceptibles d'intervention qu'en présence d’une erreur manifeste et dominante, à moins qu’il ne soit possible d'extraire une question de droit pur (Sattva Capital Corp. c. Creston Moly Corp., 2014 CSC 53, [2014] 2 R.C.S. 633.

[3]  À notre avis, le juge n’a pas commis d’erreur en concluant qu’une entente contraignante avait été conclue entre les parties. La question de savoir s’il y a eu entente ou non sur les modalités essentielles d’une transaction doit être examinée de manière objective au regard de toutes les circonstances. Le fait qu’une entente de principe devait être suivie d’une entente formelle, et que plusieurs différends se soient manifestés entre les parties durant la rédaction de ladite entente formelle, n’enlève rien au fait que les parties s’étaient bel et bien entendues sur les modalités essentielles exposées dans leur correspondance. Toute discorde sur l’interprétation de l’entente, ou de ses modalités non essentielles, ne vient en rien annuler l’entente initiale.

[4]  La question que doit trancher le juge est celle de savoir si une tierce partie objective aurait conclu que les parties avaient l’intention de se lier par des modalités essentielles suffisamment certaines au moment de la conclusion de l’entente. À notre sens, le juge n’a commis aucune erreur susceptible d'intervention puisque, vu le dossier, les parties avaient l’intention de conclure une entente contraignante. Le libellé de l’offre de transaction et de la lettre d’acceptation, la conduite des parties, et la lettre adressée à la Cour informant le juge chargé de l’instance qu’une entente avait été conclue, sous réserve de l’examen, de l’officialisation et de l’exécution par les parties d’une transaction formelle, pouvaient tous être interprétés comme démontrant que les parties étaient bel et bien parvenues à une entente sur les modalités essentielles de la transaction.

[5]  Le seul fait que les parties ne s’entendaient pas sur certaines des modalités de l’entente au moment de la formaliser ne vient pas donner à celles-ci un caractère plus essentiel que celles sur lesquelles elles s’étaient entendues. Comme l’a observé notre Cour dans la décision Allergan, « un désaccord persistant sur les conditions non essentielles est sans importance ». La tentative, par l’une ou l’autre des parties, d’obtenir davantage que ce qui avait été entendu au préalable ne constitue pas une preuve d’absence d’entente sur les modalités essentielles de la transaction au moment où l’appelant a présenté une offre de transaction et à celui où les intimées l’ont acceptée.

[6]  Enfin, l’appelant soutient qu’il avait le droit de résilier la transaction au motif que les intimées auraient tenté d’obtenir une transaction non conforme à son offre, et ce, au cours du processus de formalisation de l’entente. Or, nous estimons, à l’instar des intimés, que l’appelant avance cette position trop tardivement dans le processus. Cet argument n’a été soulevé ni devant le juge ni dans l’avis d’appel. Questionné sur le sujet, l’avocat de l’appelant a clarifié qu’il ne cherchait plus à faire valoir cet argument devant notre Cour. Quoiqu’il en soit, l’appelant surestime l’importance de la mésentente sur le libellé de l’entente définitive. L’appelant n’est pas parvenu à démontrer d’effets réels et pratiques découlant de cette mésentente entre les parties (relativement aux droits conférés dans la licence, à la nécessité de donner un avis avant la vente ou la cession du brevet, et à la portée de la renonciation). En outre, il n’y avait certainement aucunement mésentente quant à l’objet de la transaction. On ne saurait non plus sérieusement soutenir que le texte proposé par les intimées aurait privé l’appelant d’une part considérable des gains obtenus par l’entente.


[7]  Pour tous les motifs susmentionnés, nous estimons ainsi que l’appel doit être rejeté avec dépens établis à 5 000 $, tout compris, devant être versés aux intimées.

« Yves de Montigny »

j.c.a.

Traduction certifiée conforme

François Brunet, réviseur


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

A-275-18

 

INTITULÉ :

MAOZ BETSER-ZILEVITCH c. NEXEN INC. ET CNOOC CANADA, INC. CHACUNE INDIVIDUELLEMENT ET EXPLOITANT LEUR ENTREPRISE SOUS LA DÉNOMINATION SOCIALE DE THE LONG LAKE OIL SANDS PROJECT

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

OTTAWA (ONTARIO)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 12 septembre 2019

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LE JUGE STRATAS

LE JUGE WEBB

LE JUGE DE MONTIGNY

 

 

PRONONCÉS À L’AUDIENCE PAR :

LE JUGE DE MONTIGNY

 

COMPARUTIONS :

Shaun B. Cody

 

Pour l’appelant

 

Steven B. Garland

Daniel S. Davies

 

Pour les INTIMÉes

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

New Horizon Law

Calgary (Alberta)

 

Pour l’appelant

 

Smart & Biggar

Ottawa (Ontario)

 

Pour les INTIMÉes

 

 

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