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Date : 20191218


Dossier : A-202-19

Référence : 2019 CAF 318

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE DE MONTIGNY

LE JUGE LOCKE

 

 

ENTRE :

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

appelant

Et

NOUVEAU AMERICANA faisant affaire sous le nom NUEVO AMERICANA

intimée

Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 17 décembre 2019.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 18 décembre 2019.

MOTIFS DU JUGEMENT :

LA JUGE GAUTHIER

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE DE MONTIGNY

LE JUGE LOCKE

 


Date : 20191218


Dossier : A-202-19

Référence : 2019 CAF 318

CORAM :

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE DE MONTIGNY

LE JUGE LOCKE

 

 

ENTRE :

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

appelant

et

NOUVEAU AMERICANA faisant affaire sous le nom NUEVO AMERICANA

intimée

MOTIFS DU JUGEMENT

LA JUGE GAUTHIER

[1]  L’appelant conteste la décision rendue par le Tribunal canadien du commerce extérieur (AP-2017-004) (le Tribunal), qui a accueilli l’appel interjeté par Nouveau Americana faisant affaire sous le nom de Nuevo Americana (Nuevo), en application de l’article 67 de la Loi sur les douanes, LRC (1985), ch. 1 (2e suppl.).

[2]  L’appelant soutient que le critère jurisprudentiel utilisé par le Tribunal pour déterminer si les marchandises devraient être classées dans les numéros tarifaires 9401.30.10, 9401.61.10, 9401.71.10 et 9401.79.10 du Tarif des douanes, LC 1997, ch. 36 (Tarif des douanes), en tant que marchandises pour « usages domestiques », fait en sorte que peu de marchandises peuvent en fait être classées dans cette catégorie. L’appelant soutient en outre que le critère du Tribunal fait essentiellement abstraction des principes énoncés dans le Tarif des douanes et dans les Règles générales pour l’interprétation du Système harmonisé (les Règles générales), notamment la Règle 3a) qui porte sur la spécificité.

[3]  Dans l’arrêt Canada (Procureur général) c. Igloo Vikski Inc., 2016 CSC 38, au para 16 (Igloo), la Cour suprême du Canada a réaffirmé que la norme de contrôle applicable est celle de la décision raisonnable. Puis, au paragraphe 17, la Cour suprême mentionne que le Tribunal jouit d’une expertise spécialisée dans l’interprétation du tarif douanier « fort complexe ». Même les questions de droit sont « très technique[s] ». Par conséquent, le Tribunal est souvent mieux outillé que notre Cour pour trancher ces questions.

[4]  La jurisprudence du Tribunal établit assez clairement que la mention « pour usages domestiques » ne s’applique qu’aux marchandises qui sont « conçues principalement » à ces fins. Cette notion renvoie à l’« usage prévu » des marchandises par opposition à leur « usage réel ou ultime ». Voir, par exemple, les décisions Canac Marquis Grenier Ltée c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada, AP-2016-005, au para 25; et IKEA Supply AG c. Président de l’Agence des services frontaliers du Canada, AP-2013-053, au para 18. Il ne s’agit pas de la question en litige en l’espèce.

[5]  Le Tribunal tient habituellement compte d’une variété de facteurs au moment d’appliquer ce critère à une affaire précise. Il convient de préciser que l’appelant ne conteste aucune des conclusions de fait du Tribunal. Il convient également de souligner que l’appelant n’a présenté aucun témoin devant le Tribunal. Il semble plutôt s’être fié au fait qu’il incombait à Nuevo de démontrer que le classement fait par l’Agence des services frontaliers du Canada de ses chaises, comme étant des marchandises « pour usages domestiques » dans les numéros tarifaires précités, était erroné.

[6]  Là encore, s’appuyant sur sa propre jurisprudence, le Tribunal mentionne au paragraphe 18 que, pour s’acquitter de ce fardeau, Nuevo doit démontrer que ses chaises : i) ont été conçues à la fois pour usages domestiques et pour d’autres usages ou ii) ont été conçues principalement pour d’autres usages. Je ne suis pas convaincue que cette déclaration parfaitement logique soit déraisonnable.

[7]  L’appelant est notamment préoccupé par le paragraphe 21, où le Tribunal mentionne que Nuevo doit présenter des éléments de preuve qui établissent un fondement factuel solide pour démontrer que l’usage non domestique des marchandises « est plus que simplement potentiel, accessoire, occasionnel ou auxiliaire ».

[8]  L’appelant semble craindre que l’application, par le Tribunal, de cette dernière déclaration, laquelle a également été invoquée dans des affaires précédentes, pourrait finir par dénuer cette catégorie de son sens.

[9]  Je suis d’avis que ce paragraphe doit être lu dans son contexte. Ce paragraphe ne modifie pas en soi le critère énoncé par le Tribunal, pas plus qu’il n’équivaut à une erreur susceptible de révision qui justifierait notre intervention.

[10]  De fait, l’hypothèse ou la crainte soulevée devant nous n’est pas corroborée par les faits en l’espèce. Il ne fait aucun doute que le Tribunal était convaincu, à la lumière du dossier de la preuve, que les chaises en cause n’étaient pas « conçues principalement » pour usages domestiques, car, après avoir soupesé tous les facteurs pertinents, il a conclu que les marchandises en cause étaient conçues à la fois pour usages domestiques et pour d’autres usages.

[11]  Avec tout le respect que je dois à l’opinion contraire exprimée par l’appelant, je conclus que le Tribunal a suivi exactement l’approche prescrite par la Cour suprême dans Igloo (aux para 20-29). Le Tribunal a clairement établi qu’il ne s’agissait pas d’un cas où les marchandises en cause pouvaient être classées dans les deux catégories. Les marchandises ne pouvaient tout simplement pas être classées comme étant des marchandises « pour usages domestiques ». Il n’y avait donc pas lieu d’invoquer la Règle 3, puisqu’elle n’est pas pertinente en l’espèce.

[12]  Par conséquent, je rejetterais le présent appel avec dépens mutuellement convenus, fixés à 1 500 $ tout compris.

« Johanne Gauthier »

j.c.a.

« Je suis d’accord

Yves de Montigny, j.c.a. »

« Je suis d’accord

George R. Locke, j.c.a. »


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


APPEL D’UNE DÉCISION RENDUE PAR LE TRIBUNAL CANADIEN DU COMMERCE EXTÉRIEUR (TCCE) EN DATE DU 6 MARS 2019, NUMÉRO D’APPEL AP-2017-004

DOSSIER :

A-202-19

 

 

INTITULÉ :

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA c. NOUVEAU AMERICANA faisant affaire sous le nom de NUEVO AMERICANA

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 17 décembre 2019

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

LA JUGE GAUTHIER

 

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE DE MONTIGNY

LE JUGE LOCKE

 

DATE DES MOTIFS :

Le 18 décembre 2019

COMPARUTIONS :

Jennifer Bond

 

Pour l’appelant

 

Michael Kaylor

Pour l’intimée

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Nathalie G. Drouin

Sous-procureure générale du Canada

 

Pour l’appelant

Lapointe Rosenstein Marchand Melançon, S.E.N.C.R.L.

Montréal (Québec)

Pour l’intimée

 

 

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