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Date : 20200520


Dossiers : A-398-18

A-404-18

Référence : 2020 CAF 93

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LE JUGE WEBB

LE JUGE RENNIE

LA JUGE MACTAVISH

 

Dossier : A-398-18

 

 

ENTRE :

 

 

DIETER EISBRENNER

 

 

appelant

 

 

et

 

 

SA MAJESTÉ LA REINE

 

 

intimée

 

 

Dossier : A-404-18

 

 

ET ENTRE :

 

 

V. ROSS MORRISON

 

 

appelant

 

 

et

 

 

SA MAJESTÉ LA REINE

 

 

intimée

 

Audience tenue à Toronto (Ontario), le 3 mars 2020.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 20 mai 2020.

MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE WEBB

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE RENNIE

LA JUGE MACTAVISH

 


Date : 20200520


Dossiers : A-398-18

A-404-18

Référence : 2020 CAF 93

CORAM :

LE JUGE WEBB

LE JUGE RENNIE

LA JUGE MACTAVISH

 

Dossier : A-398-18

 

 

ENTRE :

 

 

DIETER EISBRENNER

 

 

appelant

 

 

et

 

 

SA MAJESTÉ LA REINE

 

 

intimée

 

 

Dossier : A-404-18

 

 

ET ENTRE :

 

 

V. ROSS MORRISON

 

 

appelant

 

 

et

 

 

SA MAJESTÉ LA REINE

 

 

intimée

 

MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE WEBB

[1]  Les présents appels ont été déposés en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. (1985), ch. 1 (5e suppl.) (la Loi), et portent sur la réduction ou le refus de crédits d’impôt pour dons de bienfaisance que M. Morrison a demandés en lien avec sa participation au programme de dons appelé Canadian Gift Initiatives (le programme CGI) et que M. Eisbrenner et M. Morrison ont demandés en lien avec leur participation au programme de dons appelé Canadian Humanitarian Trust (le programme CHT). Pour le programme CGI, le montant du crédit d’impôt pour dons de bienfaisance accordé à M. Morrison pour son don de plusieurs produits pharmaceutiques a été réduit de manière importante. Les deux appelants se sont vu refuser les crédits d’impôt pour dons de bienfaisance qu’ils avaient demandés pour avoir donné des produits pharmaceutiques à un organisme de bienfaisance enregistré dans le cadre du programme CHT. Les appels qu’ils ont interjetés auprès de la Cour canadienne de l’impôt concernant les crédits d’impôt associés aux produits pharmaceutiques ont été rejetés (2018 CCI 220).

[2]  Les présents appels ont été réunis conformément à l’ordonnance rendue par notre Cour le 25 janvier 2019. Il a été décidé que l’appel dans le dossier A-398-18 était l’appel principal. La version originale des présents motifs sera versée dans ce dossier et une copie en sera versée dans le dossier A-404-18.

[3]  Pour les motifs qui suivent, je rejetterais les présents appels.

I.  Les faits

[4]  Devant la Cour canadienne de l’impôt, les appels de M. Morrison et de M. Eisbrenner ont été entendus ensemble sur preuve commune. Pour M. Morrison, les années d’imposition visées par l’appel étaient 2003, 2004 et 2005. Pour M. Eisbrenner, seule l’année d’imposition 2005 était visée par l’appel.

[5]  La question en litige pour l’année d’imposition 2003 de M. Morrison concernait sa participation au programme CGI. Dans le cadre de ce programme, M. Morrison a acquis des produits pharmaceutiques dont le prix d’achat était de 9 500 $. Il a ensuite fait don de ces produits pharmaceutiques à un organisme de bienfaisance enregistré, qui lui a remis un reçu de 56 503 $. M. Morrison a déclaré un gain en capital de 47 003 $ et il a demandé un crédit d’impôt pour dons de bienfaisance pour un don de 56 503 $. Le ministre du Revenu national (le ministre) a établi que la juste valeur marchande des produits pharmaceutiques n’était que de 1 759 $. Par conséquent, le montant du crédit d’impôt pour dons à un organisme de bienfaisance enregistré que M. Morrison était autorisé à demander en 2003 a été établi en fonction d’un don de 1 759 $ seulement.

[6]  Le programme CHT a été créé par la société World Health Initiatives Inc. (WHI), qui en a assuré la promotion. M. Morrison et M. Eisbrenner ont tous deux participé au programme CHT en 2004 et en 2005. Toutefois, dans le cas de M. Eisbrenner, seule l’année d’imposition 2005 est visée par le présent appel.

[7]  Dans le cadre de ce programme, M. Morrison a fait un don en espèces de 15 350 $ en 2004 et un autre de 15 075 $ en 2005. M. Eisbrenner a fait un don en espèces de 39 966 $ en 2005. Ils ont chacun obtenu des reçus pour don de bienfaisance dont le montant correspondait à leur contribution en espèces.

[8]  En faisant ces dons en espèces, M. Morrison et M. Eisbrenner obtenaient la possibilité d’être sélectionnés comme bénéficiaires de capital de l’une des fiducies de Canadian Humanitarian Trusts (les fiducies de CHT). Après avoir été sélectionnés comme bénéficiaires de capital de l’une de ces fiducies, ils ont été informés qu’ils avaient le droit de recevoir un nombre donné d’unités de médicaments essentiels figurant sur la liste préparée par l’Organisation mondiale de la Santé (les unités de ME de l’OMS), sous réserve d’un privilège. Le certificat relatif aux unités de ME de l’OMS remis à chaque personne comprenait une liste de différents produits pharmaceutiques et leur [traduction] « valeur pharmaceutique ». Le montant du privilège était également indiqué. Le ministre a présumé que le montant du privilège correspondait au prix d’achat de ces produits pharmaceutiques (aux sous-alinéas 14(mm)ii) à iv) de la réponse de la Couronne à l’avis d’appel de M. Morrison pour l’année d’imposition 2004, aux alinéas correspondants 13(oo) à (qq) de la réponse à l’avis d’appel de M. Morrison pour l’année d’imposition 2005 et aux alinéas 18(pp) à (rr) de la réponse à l’avis d’appel de M. Eisbrenner pour l’année d’imposition 2005). Il a été établi que KP Innovispharm Ltd. (KP Innovispharm) était la titulaire des privilèges (au paragraphe 56 des motifs).

[9]  Après avoir reçu ces unités de ME de l’OMS, M. Morrison et M. Eisbrenner ont tous les deux signé des actes de donation en faveur d’un organisme de bienfaisance enregistré (l’organisme de bienfaisance ayant reçu les dons en nature), lequel leur a remis, pour les unités de ME de l’OMS, des reçus indiquant les sommes suivantes :

[EN BLANC]

2004

2005

M. Morrison

41 109 $

37 815 $

M. Eisbrenner

[EN BLANC]

124 459 $

[10]  Il s’avère que l’organisme de bienfaisance ayant reçu les dons en nature a à son tour remis les produits pharmaceutiques à un autre organisme de bienfaisance (l’organisme de bienfaisance distributeur), qui devait distribuer les produits pharmaceutiques dans certains pays, par exemple le Vietnam, l’Équateur et des pays d’Afrique. Les produits pharmaceutiques provenaient de l’extérieur du Canada et ils étaient distribués à l’extérieur du Canada, sans jamais y entrer.

[11]  En 2004, dans le cadre du programme CHT, M. Morrison a versé 15 350 $ en espèces et a obtenu des reçus pour dons de bienfaisance d’un montant total de 56 459 $ (15 350 $ + 41 109 $). En 2005, il a versé 15 075 $ en espèces et a obtenu des reçus pour dons de bienfaisance d’un montant total de 52 890 $ (15 075 $ + 37 815 $). En 2005, M. Eisbrenner a versé 39 966 $ en espèces et il a obtenu des reçus pour dons de bienfaisance d’un montant total de 164 425 $ (39 966 $ + 124 459 $). Chacun d’eux a obtenu des reçus pour de dons de bienfaisance d’un montant correspondant à plus de 300 % du montant des espèces versées.

[12]  Lors de l’établissement de la nouvelle cotisation à l’égard de M. Morrison pour l’année d’imposition 2004, ce dernier s’est vu refuser les crédits d’impôt pour dons de bienfaisance demandés tant pour les espèces versées que pour les unités de ME de l’OMS. Le résultat est demeuré le même malgré le dépôt d’un avis d’opposition. Pour l’année d’imposition 2005, ni M. Morrison ni M. Eisbrenner ne se sont vu accorder de crédits d’impôt pour dons de bienfaisance relativement au programme CHT. Après le dépôt d’avis d’opposition, une nouvelle cotisation a été établie à l’égard l’année d’imposition 2005 des deux appelants, dans laquelle ils ont obtenu un crédit d’impôt pour dons de bienfaisance du montant du don en espèces. L’établissement des nouvelles cotisations pour l’année d’imposition 2005 n’a rien changé au refus du crédit d’impôt pour dons de bienfaisance pour les unités de ME de l’OMS.

[13]  M. Morrison a fait appel devant la Cour canadienne de l’impôt de la décision sur la juste valeur marchande des produits pharmaceutiques qu’il a donnés en 2003 dans le cadre du programme CGI et du refus du crédit d’impôt pour dons de bienfaisance pour sa contribution en espèces et les unités de ME de l’OMS données dans le cadre du programme CHT pour l’année d’imposition 2004. M. Morrison et M. Eisbrenner ont interjeté appel auprès de la Cour canadienne de l’impôt à l’encontre de la décision du ministre de ne pas reconnaître les reçus pour les unités de ME de l’OMS données dans le cadre du programme CHT pour l’année d’imposition 2005.

II.  La décision de la Cour canadienne de l’impôt

[14]  Le juge de la Cour canadienne de l’impôt a conclu que M. Morrison n’avait pas prouvé que la juste valeur marchande des produits pharmaceutiques dont il avait fait don dans le cadre du programme CGI était supérieure à celle établie par le ministre. M. Morrison n’a produit aucune preuve d’expert sur l’établissement de la juste valeur marchande; il s’est plutôt fondé sur l’évaluation faite par les promoteurs du programme CGI. La Couronne a fait témoigner M. Berndt, Ph. D., qui avait préparé un rapport d’expert sur la valeur des produits pharmaceutiques. Il a conclu que, dans leur évaluation, les promoteurs du programme CGI avaient considérablement surestimé la valeur des produits pharmaceutiques. Le juge de la Cour canadienne de l’impôt a retenu le témoignage de l’expert de la Couronne et a rejeté l’appel de M. Morrison.

[15]  En ce qui concerne le programme CHT, le juge de la Cour canadienne de l’impôt a conclu que M. Morrison et M. Eisbrenner n’avaient pas établi qu’ils avaient acquis les produits pharmaceutiques prétendument donnés aux organismes de bienfaisance ayant reçu les dons en nature. Plus précisément, au paragraphe 152 de ses motifs, le juge a dit des certificats relatifs aux unités de ME de l’OMS qu’il s’agissait :

[...] de simples pièces sans valeur utilisées par WHI pour donner l’impression aux participants au programme de CHT que les produits pharmaceutiques étaient transférés de CHT aux participants et par la suite transférés des participants à des organismes de bienfaisance recueillant des dons en nature, alors qu’en réalité, les produits pharmaceutiques liés au programme de CHT étaient directement vendus par les fabricants desdits produits à des entités étrangères et étaient stockés dans un entrepôt en Hollande pour être ensuite distribués à des organismes de [bienfaisance] dans divers pays, de façon à présenter une façade d’activité caritative que WHI (par l’intermédiaire de CDL) pourrait utiliser pour effectuer la mise en marché du programme de CHT.

[16]  Par conséquent, le juge a confirmé les nouvelles cotisations refusant le crédit d’impôt pour dons de bienfaisance pour les unités de ME de l’OMS.

[17]  Le juge de la Cour canadienne de l’impôt a accueilli l’appel de M. Morrison portant sur l’année d’imposition 2004 à l’égard de son don en espèces. Par conséquent, M. Morrison a eu droit à un crédit d’impôt pour dons de bienfaisance pour le don en espèces de 15 350 $. La Couronne n’a pas interjeté appel de cette conclusion.

III.  Les questions en litige et la norme de contrôle

[18]  L’appel de M. Morrison à l’égard de l’année d’imposition 2003 est fondé sur son allégation selon laquelle le juge de la Cour canadienne de l’impôt a commis une erreur en concluant que la juste valeur marchande des produits pharmaceutiques donnés en 2003 n’était que de 1 759 $. Il s’agit d’une conclusion de fait et la norme de contrôle est celle de l’erreur manifeste et dominante (Housen c. Nikolaisen, 2002 CSC 33, [2002] 2 R.C.S. 235).

[19]  En ce qui concerne les appels à l’égard du programme CHT, les appelants soutiennent que le juge de la Cour canadienne de l’impôt a commis une erreur en concluant que les certificats relatifs aux unités de ME de l’OMS étaient des « pièces sans valeur » et que, par conséquent, ni l’un ni l’autre des appelants n’avait fait don de produits pharmaceutiques en 2004 ou en 2005. Cette question générale se ramène à la question de savoir à qui il incombait de prouver que ces personnes avaient fait l’acquisition des produits pharmaceutiques. Les appelants soulèvent également la question de l’admissibilité de certains documents admis par le juge de la Cour canadienne de l’impôt. Dans son mémoire, M. Morrison soulève la question de savoir si le juge de la Cour canadienne de l’impôt a tiré une conclusion sur une question que les parties n’avaient pas soulevée. Dans la mesure où ces questions sont des questions de droit, la norme de contrôle applicable est celle de la décision correcte et, dans la mesure où il s’agit de questions de fait ou de questions mixtes de fait et de droit (en l’absence de question de droit isolable), la norme de contrôle applicable est celle de l’erreur manifeste et dominante (Housen c. Nikolaisen).

IV.  Analyse

A.  L’année d’imposition 2003 de M. Morrison – programme CGI

[20]  La première question porte sur la valeur des produits pharmaceutiques donnés dans le cadre du programme CGI. L’établissement de la juste valeur marchande de ces produits pharmaceutiques est une question de fait. Dans le présent appel, M. Morrison doit démontrer que le juge de la Cour canadienne de l’impôt a commis une erreur manifeste et dominante.

[21]  La Cour suprême du Canada a adopté les descriptions suivantes de l’erreur manifeste et dominante dans l’arrêt Benhaim c. St-Germain, 2016 CSC 48, [2016] 2 R.C.S. 352 :

38  Il est tout aussi utile de rappeler ce qu’on entend par « erreur manifeste et dominante ». Le juge Stratas décrit la norme déférente en ces termes dans l’arrêt South Yukon Forest Corp. c. R., 2012 CAF 165, 4 B.L.R. (5th) 31, par. 46 :

L’erreur manifeste et dominante constitue une norme de contrôle appelant un degré élevé de retenue [...] Par erreur « manifeste », on entend une erreur évidente, et par erreur « dominante », une erreur qui touche directement à l’issue de l’affaire. Lorsque l’on invoque une erreur manifeste et dominante, on ne peut se contenter de tirer sur les feuilles et les branches et laisser l’arbre debout. On doit faire tomber l’arbre tout entier.

39  Ou, comme le dit le juge Morissette dans l’arrêt J.G. c. Nadeau, 2016 QCCA 167, par. 77 (CanLII), « une erreur manifeste et dominante tient, non pas de l’aiguille dans une botte de foin, mais de la poutre dans l’œil. Et il est impossible de confondre ces deux dernières notions. »

[22]  Dans le présent appel, M. Morrison n’a pas établi que le juge de la Cour canadienne de l’impôt a commis une erreur, et encore moins une erreur manifeste et dominante, en concluant que la juste valeur marchande des produits pharmaceutiques était seulement de 1 759 $. Je rejetterais l’appel de M. Morrison visant son année d’imposition 2003.

B.  Les années d’imposition 2004 et 2005 de M. Morrison; l’année d’imposition 2005 de M. Eisbrenner – programme CHT

[23]  Les autres questions dans le présent appel portent sur le programme CHT et le montant des crédits demandés par M. Morrison pour les années d’imposition 2004 et 2005 et par M. Eisbrenner pour l’année d’imposition 2005. La première question soulevée est celle de savoir à qui incombait le fardeau de la preuve. M. Eisbrenner a pris l’initiative en présentant des observations à cet égard.

1)  Le fardeau de la preuve

[24]  Au début de son analyse, le juge de la Cour canadienne de l’impôt a consacré plusieurs pages à la question de savoir à qui incombait le fardeau de la preuve dans les affaires fiscales. Le juge de la Cour canadienne de l’impôt répondait à l’invitation du juge Stratas, dans l’arrêt Sarmadi c. Canada, 2017 CAF 131, [2017] A.C.F. no 637 (QL), lancée aux juges de la Cour canadienne de l’impôt, à donner leur avis sur les motifs concourants que j’ai rédigés dans l’arrêt Sarmadi concernant la question du fardeau de la preuve. Dans l’arrêt Sarmadi, j’ai passé en revue les différentes affaires dans lesquelles la question du fardeau de la preuve avait été examinée. J’ai également examiné le contexte dans lequel sont interjetés les appels devant la Cour canadienne de l’impôt. J’ai conclu ce qui suit :

[61]  À mon avis, il devrait incomber à un contribuable de prouver, selon la prépondérance des probabilités, les faits qu’il allègue dans son avis d’appel et qui sont niés par la Couronne. Dans la plupart des cas, ceci devrait mettre un terme à la discussion sur le fardeau de preuve parce que les hypothèses de fait du ministre dans le cadre de l’imposition d’une nouvelle cotisation au contribuable seraient généralement incompatibles avec les faits plaidés par le contribuable relativement aux faits substantiels sur lesquels la nouvelle cotisation a été fondée.

[62]  Si, en imposant une nouvelle cotisation au contribuable, le ministre a présumé de certains faits qui ne sont pas incompatibles avec les faits allégués par le contribuable, il semblerait également logique d’exiger que le contribuable prouve, selon la prépondérance des probabilités, que ces faits présumés par le ministre (qui sont en litige et qui ne relèvent pas de la connaissance exclusive ou particulière du ministre) ne sont pas exacts. L’exigence qu’un contribuable réfute les faits présumés par le ministre dans le cadre de l’imposition d’une nouvelle cotisation ne fait que déplacer le fardeau sur la personne qui a connaissance (ou qui devrait avoir connaissance) des faits. Le fardeau passe également à la personne qui a indirectement affirmé, lors de la production de sa déclaration de revenus, certains faits qui seraient incompatibles avec les faits présumés par le ministre au moment d’imposer une nouvelle cotisation au contribuable.

[63]  Lorsque tous les éléments de preuve ont été présentés, le juge de la Cour de l’impôt devrait alors (et seulement alors) déterminer si le contribuable s’est acquitté de ce fardeau. Si le contribuable a réfuté, selon la prépondérance des probabilités, les faits particuliers présumés par le ministre, en se fondant sur tous les éléments de preuve, aucun fardeau n’est déplacé sur le ministre de réfuter la preuve que le juge de la Cour de l’impôt a estimé avoir été établie par le contribuable. Soit le contribuable a réfuté les faits présumés, soit il ne l’a pas fait.

[25]  Au paragraphe 36 de l’arrêt Sarmadi, j’ai également affirmé que, si le ministre allègue un fait ne relevant pas des hypothèses de fait sur lesquelles il s’est fondé lors de l’établissement ou de la confirmation de la cotisation établie à l’égard d’un contribuable, il aura alors le fardeau de prouver ce fait (Canada c. Loewen, 2004 CAF 146, [2004] A.C.F. no 638 (QL), au paragraphe 11).

[26]  Dans l’arrêt Sarmadi, notre Cour ne s’est pas penchée sur la question du fardeau de la preuve à l’égard des faits servant à justifier l’imposition de la pénalité prévue aux articles 163 et 163.2 de la Loi (lequel fardeau incombe au ministre en vertu du paragraphe 163(3) de la Loi). Dans l’arrêt Sarmadi, notre Cour n’a pas non plus examiné la question des nouvelles cotisations établies après la période normale de nouvelle cotisation, pour lesquelles il incombe au ministre de démontrer les faits qui justifieraient l’établissement de la nouvelle cotisation (Succession de Vine c. Canada, 2015 CAF 125, [2015] 4 R.C.F. 698, au paragraphe 24).

[27]  Le juge Stratas, dans ses motifs concordants de l’arrêt Sarmadi, a écrit :

[69]  J’ai lu les motifs du juge Webb sur la question du fardeau de la preuve des appels en matière d’impôt. Je le félicite pour son examen de cette question.

[70]  Cette question avait été préalablement examinée par la Cour. Les motifs de mon collègue reviennent d’une certaine façon sur cette question et la formulent de manière quelque peu différente. Je trouve les propos de mon collègue réfléchis, inspirants et intéressants.

[71]  Toutefois, à ce moment-ci et dans les présentes circonstances, je refuse d’exprimer un avis définitif sur l’exactitude de ses vues concernant ce point fondamental. Les perspectives des commentateurs pourraient aider. Les juges de la Cour de l’impôt pourraient avoir une perspective utile. De plus, dans le cadre d’un appel futur devant la Cour où cette question aurait de l’importance, un autre avocat pourrait également apporter sa contribution.

[28]  La juge Woods a souscrit aux observations du juge Stratas (au paragraphe 16 de ses motifs).

[29]  Bien qu’en l’espèce le juge de la Cour canadienne de l’impôt ait reconnu qu’il était lié par l’arrêt de notre Cour House c. Canada, 2011 CAF 234, [2011] A.C.F. no 1220 (QL), son analyse du fardeau de la preuve appuie de manière générale les conclusions que j’ai tirées dans l’arrêt Sarmadi.

[30]  En l’espèce, la question du fardeau de la preuve est importante étant donné qu’il existe très peu d’éléments de preuve sur la propriété des produits pharmaceutiques et la manière dont les fiducies de CHT ont acquis les produits pharmaceutiques qu’elles auraient transférés à M. Eisbrenner et à M. Morrison. Comme l’a fait observer le juge de la Cour canadienne de l’impôt, aucun des témoins à l’audience devant la Cour canadienne de l’impôt n’a été en mesure d’expliquer le fonctionnement du programme CHT. Si les fiducies de CHT n’ont pas fait l’acquisition des produits pharmaceutiques, elles ne pouvaient pas les transférer à M. Eisbrenner et à M. Morrison. À leur tour, si ces derniers n’ont pas fait l’acquisition des produits pharmaceutiques, ils n’ont alors fait aucun don aux organismes de bienfaisance ayant reçu les dons en nature.

[31]  En l’espèce, la principale conclusion du juge de la Cour canadienne de l’impôt est que ni M. Eisbrenner ni M. Morrison n’ont été propriétaires des produits pharmaceutiques en question et que, par conséquent, ils n’ont rien donné aux organismes de bienfaisance ayant reçu les dons en nature. Bien que le ministre ait formulé plusieurs hypothèses de fait qui ne relèveraient pas de la connaissance de M. Eisbrenner et de M. Morrison, notamment le nombre de participants au programme CHT et le nombre total de dons en cause pour tous les participants, ces hypothèses sont sans incidence sur la question de savoir si M. Eisbrenner et M. Morrison ont été propriétaires des produits pharmaceutiques en question. La question à trancher dans le présent appel est celle de savoir à qui il incombait de prouver que les appelants avaient la propriété des produits pharmaceutiques.

[32]  À mon avis, la présente affaire illustre une observation que j’ai faite dans l’arrêt Sarmadi concernant les faits pertinents invoqués par l’appelant dans un appel devant la Cour canadienne de l’impôt. Elle soulève la question du rôle de l’avis d’appel dans les instances devant la Cour canadienne de l’impôt. Si l’on regarde uniquement les hypothèses formulées par le ministre dans sa réponse déposée en vue d’une audience devant la Cour canadienne de l’impôt, on écarte les faits pertinents invoqués par le contribuable dans son avis d’appel ou sur lesquels le contribuable devrait se fonder pour démontrer l’exactitude de la déclaration de revenus qu’il a produite.

[33]  Aux termes des Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure générale), DORS/90-688a (les Règles générales de la CCI), « [l]’avis d’appel doit se conformer aux formules 21(1)a), d), e) ou f) » (article 48) [non souligné dans l’original]. La formule 21(1)a) est la formule générale à utiliser pour interjeter appel d’une nouvelle cotisation. Il y est énoncé qu’il faut énumérer dans l’avis d’appel « les faits pertinents qui servent de fondement à l’appel ». Ne pas énumérer certains faits pertinents dans un avis d’appel pourrait entraîner la radiation de l’appel en application de l’article 53 des Règles générales de la CCI, au motif que l’avis d’appel ne révèle aucun moyen raisonnable d’appel.

[34]   Aux termes de l’article 49 des Règles générales de la CCI, la Couronne, dans sa réponse, doit notamment indiquer « a) les faits admis; b) les faits niés; c) les faits que l’intimée ne connaît pas et qu’elle n’admet pas; d) les conclusions ou les hypothèses de fait sur lesquelles le ministre s’est fondé en établissant sa cotisation [...] ».

[35]  Comme je l’ai noté dans l’arrêt Sarmadi, les règles visant les actes de procédure sont différentes dans les instances régies par la procédure informelle devant la Cour canadienne de l’impôt. La procédure informelle s’applique généralement aux appels interjetés devant la Cour canadienne de l’impôt lorsque le total des montants en cause (à l’exclusion des intérêts) est égal ou inférieur à 25 000 $ et si le contribuable l’a demandée (article 18 de la Loi sur la Cour canadienne de l’impôt, L.R.C. (1985), ch. T-2). Aux termes de l’article 4 des Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure informelle), DORS/90-688b, le contribuable n’est pas tenu d’utiliser la formule figurant à l’annexe 4 : « [l]’appel visé à l’article 3 est interjeté par le dépôt [...] d’un avis d’appel qui peut être établi conformément au modèle figurant à l’annexe 4 » [non souligné dans l’original]. Compte tenu de la nature informelle de ces instances, il arrive souvent, dans les affaires régies par la procédure informelle, que le seul document qui donne la moindre indication des faits sur lesquels porte le litige soit la réponse déposée par la Couronne.

[36]  Il est important de noter que, si le ministre établit une nouvelle cotisation à l’égard d’une personne qui a produit une déclaration de revenus (ou s’il n’établit pas la cotisation conformément à la déclaration de revenus telle qu’elle a été produite), c’est parce qu’il ne reconnaît pas l’exactitude d’une somme (ou de sommes) que la personne a inscrite dans sa déclaration de revenus ou parce qu’il a établi que le contribuable a omis une somme qui aurait dû être incluse dans le revenu. Lorsqu’il est fait appel de cette nouvelle cotisation (ou cotisation), l’absence dans l’avis d’appel de faits pertinents nécessaires pour étayer l’exactitude de la déclaration de revenus produite ne doit pas avoir pour effet de déplacer vers le ministre le fardeau de prouver ces faits (Johnston v. Minister of National Revenue, [1948] S.C.R. 486, aux pages 480 à 490, [1948] CanLII 1).

[37]  En l’espèce, le fait pertinent selon lequel M. Eisbrenner avait la propriété des produits pharmaceutiques en question figurait dans son avis d’appel devant la Cour canadienne de l’impôt, dans la partie « Énoncé des faits pertinents qui fondent l’appel » :

[traduction]

5.  Le deuxième don a été fait en nature. Plus précisément, en 2005, j’ai fait l’acquisition de plusieurs produits pharmaceutiques (les « produits pharmaceutiques »), dont j’ai ensuite fait don à un organisme de bienfaisance enregistré au Canada (l’organisme donataire des produits pharmaceutiques) [...]

6.  J’étais le propriétaire en common law et le propriétaire bénéficiaire des produits pharmaceutiques juste avant que j’en fasse faire don à l’organisme donataire des produits pharmaceutiques [...]

[38]  De même, M. Morrison a invoqué les mêmes faits dans ses avis d’appel à la Cour canadienne de l’impôt pour les années d’imposition 2004 et 2005. Cette déclaration selon laquelle ils ont tous les deux été propriétaires des produits pharmaceutiques qu’ils auraient donnés aux organismes de bienfaisance ayant reçu les dons en nature se trouverait aussi de façon implicite dans la les déclarations de revenus qu’ils ont produites pour les années d’imposition 2004 et 2005. Pour calculer ses crédits d’impôt, M. Morrison a inclus un don de bienfaisance de 41 109 $ pour l’année d’imposition 2004 et un don de bienfaisance de 37 815 $ pour l’année d’imposition 2005 pour le don de produits pharmaceutiques à l’organisme de bienfaisance ayant reçu les dons en nature. Pour calculer ses crédits d’impôt pour l’année d’imposition 2005, M. Eisbrenner a inclus un don de bienfaisance de 124 459 $ pour le don de produits pharmaceutiques à l’organisme de bienfaisance ayant reçu les dons en nature. Comme les appelants ont inscrit ces sommes à titre de dons de bienfaisance, ils devraient être en mesure de prouver qu’ils avaient le droit de les inclure. Les contribuables ne devraient pas être encouragés à déclarer des sommes dans leurs déclarations de revenus sans savoir ou sans tenter de savoir s’ils peuvent dûment le faire.

[39]  Dans sa réponse à l’avis d’appel à la Cour canadienne de l’impôt de M. Eisbrenner, la Couronne a affirmé ce qui suit :

[traduction]

6.  En ce qui concerne le paragraphe 5 de l’avis d’appel, il affirme que les dons en nature n’étaient pas des dons au sens de l’article 118.1 de la Loi. Il ne connaît ni n’admet les autres allégations de fait du paragraphe 5.

7.  En ce qui concerne le paragraphe 6 de l’avis d’appel, il nie que l’appelant ait été le propriétaire en common law et le propriétaire bénéficiaire des produits pharmaceutiques. [...]

[40]  Dans sa réponse aux avis d’appel de M. Morrison pour les années d’imposition 2004 et 2005, la Couronne a affirmé ne pas connaître et ne pas admettre les faits allégués dans les paragraphes des avis d’appel de M. Morrison qui correspondaient aux paragraphes 5 et 6 de l’avis d’appel de M. Eisbrenner.

[41]  Par conséquent, soit la Couronne a soit nié les allégations de fait sur la propriété des produits pharmaceutiques, soit elle a affirmé ne pas connaître et ne pas admettre ce fait.

[42]  Dans son mémoire, M. Morrison soulève la question de savoir si les hypothèses de fait concernant la propriété des produits pharmaceutiques formulées par le ministre dans les réponses à ses avis d’appel soulèvent des questions mixtes de fait et de droit. Rien n’indique, dans l’un ou l’autre de ses avis d’appel à la Cour canadienne de l’impôt ou dans les réponses déposées par la Couronne, que l’une ou l’autre des parties ait soulevé une question de droit concernant la décision quant à la propriété des produits pharmaceutiques. Au contraire, dans ses avis d’appel, M. Morrison affirme simplement, comme un fait, qu’il était le propriétaire en common law et le propriétaire bénéficiaire des produits pharmaceutiques. À mon avis, comme je l’explique en détail plus loin, puisque M. Morrison a fait valoir qu’il était le propriétaire en common law et le propriétaire bénéficiaire des produits pharmaceutiques, dans la mesure où cette affirmation nécessite l’établissement de faits, il incombait à M. Morrison de prouver les principaux faits sous-jacents pour étayer son allégation selon laquelle il avait la propriété des produits pharmaceutiques.

[43]  À l’alinéa 28(e) de son mémoire des faits et du droit, M. Eisbrenner a affirmé que [traduction] « le contribuable et la Couronne portent chacun le fardeau de prouver les faits respectifs qu’ils allèguent (niveau de preuve moyen, niveau de preuve faible) ». Les niveaux de preuve moyen et faible dont il est question renvoient au paragraphe 25 de son mémoire, où il est écrit que le niveau de preuve moyen correspond à [traduction] « une question qui doit être tranchée » et que le niveau de preuve faible correspond à [traduction] « l’existence ou non d’un fait ». La question de savoir si M. Eisbrenner a acquis la propriété des produits pharmaceutiques et s’il l’a transférée à un organisme de bienfaisance enregistré serait une question de fait qui, par conséquent, serait assujettie à un [traduction] « niveau de preuve faible ». M. Eisbrenner ne soutient nulle part qu’il existait une question de droit concernant la propriété des produits pharmaceutiques. Son mémoire est entièrement rédigé sur le fondement qu’il ne s’agissait que d’une question de fait.

[44]  Malgré cette déclaration dans son mémoire, lorsque l’avocat de M. Eisbrenner a été interrogé à l’audience sur le fardeau de la preuve applicable aux faits invoqués par son client, il a répondu que ce qu’il avait fait valoir dans son avis d’appel ne devrait pas être pris en compte. En effet, il a soutenu que l’avis d’appel ne devait pas être pris en considération et que la Cour canadienne de l’impôt devrait tenir compte uniquement de la réponse déposée par la Couronne.

[45]  En outre, selon les observations de M. Eisbrenner, il n’était pas tenu d’établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’il était propriétaire des produits pharmaceutiques. Il lui suffisait plutôt d’établir qu’il existait une preuve à première vue, ce qui, selon lui, constituait une norme moins rigoureuse que la prépondérance des probabilités. Par conséquent, selon les observations de M. Eisbrenner, même s’il a fait valoir qu’il était propriétaire des produits pharmaceutiques, il n’était pas tenu d’établir ce fait selon la prépondérance des probabilités.

[46]  Le juge McIntyre, s’exprimant au nom de la Cour suprême du Canada, a affirmé, dans l’arrêt Commission ontarienne des droits de la personne c. Simpsons-Sears, [1985] 2 R.C.S. 536, à la page 558, 1985 CanLII 18 (C.S.C.) :

Pour commencer, l’expérience a montré qu’en matière de règlement judiciaire des différends, l’attribution du fardeau de la preuve à l’une ou l’autre partie est un élément essentiel. Ce fardeau n’est pas toujours nécessairement lourd – il varie en fonction de chaque cas – et il se peut qu’il n’incombe pas à une partie pour tous les points de l’affaire; il peut passer d’une partie à l’autre. Mais, faute de mieux en pratique, on a jugé nécessaire, pour assurer une solution claire dans toute instance judiciaire, d’attribuer le fardeau de la preuve à l’une ou l’autre partie, pour les départager. Par conséquent, je suis d’accord avec la commission d’enquête pour dire que chaque cas se ramène à une question de preuve et donc que, dans ces affaires comme dans toute instance civile, il doit y avoir reconnaissance et attribution claires et nettes du fardeau de la preuve. À qui doit‑il incomber? Suivant la règle bien établie en matière civile, ce fardeau incombe au demandeur. Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.

[Non souligné dans l’original.]

[47]  Comme l’a fait observer la Cour suprême du Canada, la règle bien établie en matière civile porte que la personne qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Toutefois, bien qu’il ait reconnu ce principe dans son mémoire, M. Eisbrenner a dans les faits soutenu ne pas être lié par ce principe. Il n’a pas non plus expliqué la manière dont sa thèse, selon laquelle il devait prouver le fait qu’il avait la propriété des produits pharmaceutiques uniquement à première vue et non selon la norme plus rigoureuse de la prépondérance des probabilités, était conforme à la conclusion énoncée par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt F.H. c. McDougall, 2008 CSC 53, [2008] 3 R.C.S. 41 :

49  En conséquence, je suis d’avis de confirmer que dans une instance civile, une seule norme de preuve s’applique, celle de la prépondérance des probabilités. Dans toute affaire civile, le juge du procès doit examiner la preuve pertinente attentivement pour déterminer si, selon toute vraisemblance, le fait allégué a eu lieu.

[48]  En l’espèce, si, comme l’a soutenu M. Eisbrenner, les faits qu’il a invoqués dans son avis d’appel ne sont pas pertinents et que seules les hypothèses de fait formulées par le ministre le sont, pourquoi les Règles générales de la CCI disposeraient-elles que l’appelant doit énumérer les faits pertinents qui servent de fondement à son appel? Le fait qu’il soit précisé dans la formule 21(1)a) des Règles générales de la CCI que l’appelant doit, dans son avis d’appel, « [é]numérer les faits pertinents qui servent de fondement à l’appel » étaye la conclusion selon laquelle, dans une instance devant la Cour canadienne de l’impôt, le principe général portant que « [c]elui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver » s’applique encore. Il est tout à fait logique que l’appelant, qui se fonde sur plusieurs faits pertinents, ait le fardeau de les prouver. Étant donné que M. Eisbrenner et M. Morrison ont fait valoir qu’ils avaient la propriété des produits pharmaceutiques, le fardeau de le prouver selon la norme de preuve civile – la prépondérance des probabilités – doit leur incomber.

[49]  Il ne devrait pas en être autrement simplement parce que, dans sa réponse à l’avis d’appel de M. Eisbrenner, la Couronne a noté à l’alinéa 18(eee) que l’une des hypothèses formulées par le ministre était que [traduction] « l’appelant n’a jamais pris possession des produits pharmaceutiques ou n’en a jamais acquis le titre ». Que cette hypothèse ait été formulée ne change rien au fait que M. Eisbrenner a fait valoir qu’il avait la propriété des produits pharmaceutiques et qu’il s’agissait d’un fait pertinent nécessaire à l’établissement du montant du crédit d’impôt pour dons de bienfaisance qu’il a demandé dans sa déclaration de revenus relativement à ces produits pharmaceutiques.

[50]  Il convient également de mentionner qu’au paragraphe 13 de son mémoire, M. Eisbrenner a affirmé ceci : [traduction] « M. Eisbrenner avait une connaissance directe des hypothèses de fait du ministre énoncées aux alinéas 18(p), (qq), (yy) à (ccc) et (eee) à (iii) de la réponse de la Couronne. » Par conséquent, M. Eisbrenner a reconnu avoir une connaissance directe quant à la question de savoir s’il avait ou non acquis le titre de propriété des produits pharmaceutiques. Toutefois, malgré la déclaration de M. Eisbrenner selon laquelle il avait une connaissance directe du fait qu’il avait ou non acquis le titre de propriété des produits pharmaceutiques et malgré le fait qu’il avait fait valoir cette connaissance dans son avis d’appel, il ne lui incomberait pas de démontrer ce fait selon la prépondérance des probabilités. Je ne souscris pas à cette thèse.

[51]  Dans ses motifs, le juge de la Cour canadienne de l’impôt a également remarqué que le ministre avait formulé des hypothèses incohérentes dans ses réponses aux avis d’appel de M. Eisbrenner et de M. Morrison. Toutefois, la Couronne, dans les deux cas, a nié ou n’a pas admis le fait que les appelants aient eu la propriété des produits pharmaceutiques. L’incohérence est implicite dans les hypothèses du ministre selon lesquelles la juste valeur marchande des produits pharmaceutiques transférés était inférieure au montant déclaré par les appelants. Comme je suis d’avis qu’il incombait aux appelants de démontrer qu’ils ont eu la propriété des produits pharmaceutiques parce qu’ils ont fait valoir cette propriété dans leurs avis d’appel, l’incohérence dans les hypothèses du ministre n’est pas pertinente lorsqu’il s’agit de décider à qui incombait le fardeau de la preuve.

[52]  À mon avis, puisque M. Eisbrenner a fait valoir qu’il avait acquis la propriété de produits pharmaceutiques et qu’il les avait transférés à l’organisme de bienfaisance ayant reçu les dons en nature, il lui incombait de démonter, selon la prépondérance des probabilités, qu’il avait la propriété des produits pharmaceutiques en question. De même, puisque M. Morrison a fait valoir qu’il avait acquis la propriété de produits pharmaceutiques et qu’il les avait transférés à l’organisme de bienfaisance ayant reçu les dons en nature, il lui incombait aussi de démonter, selon la prépondérance des probabilités, qu’il avait la propriété des produits pharmaceutiques en question. S’ils n’étaient pas les propriétaires de ces produits pharmaceutiques, ils ne possédaient rien qu’ils pouvaient donner aux organismes de bienfaisance ayant reçu les dons en nature.

2)  L’admissibilité des factures et des relevés bancaires

[53]  La seconde erreur alléguée concerne l’admission en preuve de plusieurs factures et relevés bancaires. Lors de l’audience devant la Cour canadienne de l’impôt, l’avocat de M. Eisbrenner s’est opposé à l’admission en preuve de diverses factures provenant de fabricants de produits pharmaceutiques ayant leur siège social en Italie, en Inde, en Allemagne et en France. Une objection a également été soulevée concernant l’admissibilité de certains relevés bancaires de la Banque de Chypre.

[54]  Au paragraphe 55 de ses motifs, le juge de la Cour canadienne de l’impôt s’est penché sur les factures :

55  M. Monahan a témoigné qu’il a été en mesure d’identifier les produits pharmaceutiques associés au programme de CHT en se fondant sur les documents produits par l’avocat de WHI et en les comparant à d’autres renseignements obtenus au cours de la vérification du programme de CHT par l’ARC. M. Monahan s’est servi de cette information pour identifier les fabricants et leur présenter des demandes de copies des factures des produits pharmaceutiques identifiés dans le cadre du programme de CHT. En guise de réponse, M. Monahan a reçu les copies des factures des fabricants (les « factures »). M. Monahan a déclaré que, d’après les factures, les seuls acheteurs des produits pharmaceutiques que l’ARC a identifiés dans le cadre du programme de CHT étaient MedPharm, Amstelfarma (le propriétaire de l’entrepôt en Hollande) et PK Bonapharm. Au cours de la vérification, l’ARC n’a trouvé aucun élément de preuve dont il s’avère que les produits pharmaceutiques identifiés dans le cadre du programme de CHT par WHI ont été achetés par Crunin ou KP Innovispharm [...]

[Notes de bas de page omises.]

[55]  M. Monahan était le vérificateur principal de l’Agence du revenu du Canada pour les demandes des participants au programme CHT. Il a été établi que Crunin Investments (Crunin) était la constituante des fiducies de CHT. Le nom de KP Innovispharm figurait sur le timbre de « quittance » apposé sur les certificats relatifs aux unités de ME de l’OMS et, comme je l’ai mentionné plus haut, elle a été reconnue comme étant la titulaire des privilèges.

[56]  Les relevés bancaires de la Banque de Chypre ont été obtenus à la suite d’une demande présentée par les autorités compétentes canadiennes aux autorités compétentes chypriotes. Les factures et les relevés bancaires concernent la question de savoir si Crunin ou KP Innovispharm a fait l’acquisition de produits pharmaceutiques et si des fonds ont été transférés du compte bancaire chypriote de KP Innovispharm aux fabricants de produits pharmaceutiques pour payer les produits.

[57]  Lors de l’audience, le juge de la Cour canadienne de l’impôt a fourni des motifs détaillés à l’appui de sa conclusion selon laquelle les factures et les relevés bancaires étaient admissibles à titre de preuve de la véracité de leur contenu en vertu de l’exception consacrée à la règle du ouï-dire. Le juge de la Cour canadienne de l’impôt a invoqué la décision du juge Cromwell (aujourd’hui juge à la Cour suprême du Canada), s’exprimant au nom de la Cour d’appel de la Nouvelle-Écosse, dans l’arrêt R. v. Wilcox, 2001 NSCA 45, 192 N.S.R. (2d) 159, et l’arrêt de la Cour d’appel de la Colombie-Britannique R. v. Lemay, 2004 BCCA 604, 247 D.L.R. (4th) 470.

[58]  Bien que la transcription de la décision du juge de la Cour canadienne de l’impôt sur l’admissibilité de ces documents compte environ 14 pages, ces motifs sont à peine mentionnés dans le mémoire de M. Eisbrenner. M. Morrison, dans son mémoire, se fonde simplement sur les observations de M. Eisbrenner.

[59]  Les observations de M. Eisbrenner sur ces documents (qu’il appelle les [traduction] « documents contestés ») commencent au paragraphe 63 de son mémoire. Il affirme qu’ils ont été jugés admissibles en vertu de l’exception consacrée à la règle du ouï-dire. Son premier motif d’opposition à l’admissibilité de ces documents concerne leur authentification. Toutefois, M. Eisbrenner ne précise pas pour quelles raisons il allègue que les factures ne provenaient pas de fabricants de produits pharmaceutiques ou que les relevés bancaires ne provenaient pas de la Banque de Chypre.

[60]  Le vérificateur de l’Agence du revenu du Canada a témoigné sur la manière dont il a obtenu ces documents, et le juge de la Cour canadienne de l’impôt en a tenu compte dans sa décision. La question de savoir si les documents étaient des factures de différents fabricants de produits pharmaceutiques et des relevés bancaires de la Banque de Chypre est une question de fait. M. Eisbrenner doit démontrer que le juge de la Cour canadienne de l’impôt a commis une erreur manifeste et dominante. Dans le mémoire, on n’allègue même pas l’existence d’une telle erreur manifeste et dominante.

[61]  Au paragraphe 68 de son mémoire, M. Eisbrenner écrit ce qui suit : [traduction] « [l]e juge de première instance a conclu que les documents contestés étaient nécessaires en se fondant sur la prémisse erronée qu’il était probable que personne n’avait de connaissance directe des renseignements détaillés figurant dans les documents, étant donné qu’ils ont été préparés il y a tellement longtemps ». Bien que M. Eisbrenner ait qualifié la prémisse du juge de [traduction] « prémisse erronée », il n’indique pas pourquoi elle est erronée. Comme l’a noté le juge de la Cour canadienne de l’impôt dans ses motifs, les factures des fabricants de produits pharmaceutiques ont été établies environ 12 à 14 ans avant l’audience à l’égard de l’appel. Il est difficile de comprendre pourquoi M. Eisbrenner fait valoir que quelqu’un aurait une connaissance détaillée de certaines factures établies environ 12 à 14 ans plus tôt, même si la personne qui a dans les faits établi les factures pouvait être retrouvée. Il s’agit là aussi d’une question de fait. M. Eisbrenner n’a pas démontré que le juge de la Cour canadienne de l’impôt a commis une erreur manifeste et dominante en concluant que les documents étaient nécessaires.

[62]  Au paragraphe 68 de son mémoire, M. Eisbrenner affirme également que le juge de la Cour canadienne de l’impôt [traduction] « a conclu que les documents étaient fiables parce qu’il a présumé qu’ils étaient le genre de documents qui sont établis dans le cours normal d’activités commerciales ». On voit mal pourquoi une facture ne serait pas un document établi dans le cours normal des activités d’un fabricant de produits pharmaceutiques ou pourquoi un relevé bancaire ne serait pas un document établi dans le cours normal des activités d’une banque.

[63]  En appel, l’appelant doit mettre en évidence l’erreur ou les erreurs qu’aurait commises le juge de la Cour canadienne de l’impôt et expliquer pourquoi, selon lui, l’erreur a été commise, avec suffisamment de précision pour permettre à notre Cour de déterminer si l’erreur a été commise. De simples affirmations selon lesquelles le juge de la Cour canadienne de l’impôt a commis des erreurs ne sont pas suffisantes. M. Eisbrenner n’a pas précisé pourquoi, selon lui, ces documents n’étaient pas nécessaires ou n’étaient pas fiables. Absolument rien ne justifie l’intervention de notre Cour dans les conclusions du juge de la Cour canadienne de l’impôt en ce qui concerne le caractère nécessaire ou la fiabilité des documents.

[64]  Le fait que les documents n’étayent pas l’allégation de M. Eisbrenner selon laquelle il avait la propriété des produits pharmaceutiques ne suffit pas à justifier l’inadmissibilité des documents au motif que M. Eisbrenner pourrait en subir un préjudice indu.

[65]  Par conséquent, je suis d’avis que M. Eisbrenner n’a pas établi qu’il existait un motif justifiant l’intervention de notre Cour dans la conclusion du juge de la Cour canadienne de l’impôt selon laquelle les factures et les relevés bancaires étaient admissibles.

3)  L’argument supplémentaire avancé par M. Morrison

[66]  Dans son avis d’appel, M. Morrison a soulevé une question supplémentaire, celle de savoir si le juge de la Cour canadienne de l’impôt a tiré une conclusion sur une question que les parties n’avaient pas soulevée. Cette question concerne la conclusion du juge de la Cour canadienne de l’impôt selon laquelle les certificats étaient des « pièces sans valeur » et que les appelants ne possédaient aucun produit pharmaceutique à donner à l’organisme de bienfaisance enregistré. Toutefois, comme dans son avis d’appel, M. Morrison avait fait valoir qu’il avait la propriété des produits pharmaceutiques, la propriété des produits pharmaceutiques était une question dont la Cour canadienne de l’impôt était saisie. Il n’y a donc aucun fondement à l’observation qu’il avance dans son mémoire (appelée la question B) selon laquelle [traduction] « le juge de la Cour canadienne de l’impôt [a commis] une erreur de droit en tirant une conclusion fondée sur certains faits ou principes que les parties n’ont ni invoqués ni fait valoir ».

4)  Les certificats relatifs aux unités de ME de l’OMS

[67]  Les seuls éléments de preuve qu’ont présentés M. Morrison et M. Eisbrenner à l’appui de leur allégation selon laquelle ils ont fait l’acquisition des produits pharmaceutiques sont les certificats remis par l’une des fiducies de CHT. Comme je l’ai mentionné précédemment, le juge de la Cour canadienne de l’impôt a conclu qu’il s’agissait de « pièces sans valeur ». Ces certificats indiquent que le participant désigné au programme CHT avait le droit de recevoir un certain nombre d’unités de ME de l’OMS. Ce document atteste également que le participant désigné est le propriétaire des unités de ME de l’OMS précisées dans l’annexe jointe. L’annexe jointe présente une liste de divers produits pharmaceutiques, assortis d’un chiffre considéré comme étant la [traduction] « valeur pharmaceutique » des médicaments et le montant de la charge.

[68]  Deux attestations figurent au verso des certificats. M. Eisbrenner détenait deux certificats : un pour 78 unités de ME de l’OMS et l’autre pour 66 unités de ME de l’OMS. La première attestation est identique pour les deux certificats et elle est rédigée ainsi :

[traduction]

Je transfère, donne, cède, transmets et rends, de manière inconditionnelle et absolue, tous mes titres sur les unités énumérées dans le présent document à Choson Kallah Fund de Toronto. À cette fin, je déclare par ailleurs qu’il est dans mon intention que les droits sur ces unités soient absolument dévolus à la date du présent acte de transfert, sous réserve uniquement d’un privilège sur le titre des unités.

La remise d’une copie du présent acte de fiducie confère toute autorisation nécessaire pour que soient effectués en mon nom le transfert et la cession des unités à l’organisme susmentionné.

[69]  Au bas de ce texte, un espace est réservé à la date, à la signature du cédant et au nom du cessionnaire. Choson Kallah Fund de Toronto est désignée comme la cessionnaire. Une signature illisible figure dans l’espace réservé à la signature du cédant.

[70]  Sous cette première attestation, sur chaque certificat, figure une autre attestation, rédigée ainsi :

[traduction]

Je transfère, donne, cède, transmets et rends, de manière inconditionnelle et absolue, tous mes titres sur les unités énumérées dans le présent document à Escarpment Biosphere Foundation. À cette fin, je déclare par ailleurs qu’il est dans mon intention que les droits sur ces unités soient absolument dévolus à la date du présent acte de transfert, sous réserve uniquement d’un privilège sur le titre des unités.

La remise d’une copie du présent acte de fiducie confère toute autorisation nécessaire pour que soient effectués en mon nom le transfert et la cession des unités à l’organisme susmentionné.

[71]  Après ce texte, un espace est réservé à la date, à la signature du cédant et au nom du cessionnaire. Escarpment Biosphere Foundation est désignée comme la cessionnaire. Toutefois, rien sauf le pronom [traduction] « je » n’identifie le cédant. La signature d’une personne figure dans l’espace réservé à la signature du cédant (laquelle semble différente de la signature de la personne qui a signé la première attestation), mais rien n’indique que cette personne ne signe pas en son propre nom. À l’audience, l’avocat de M. Eisbrenner a affirmé que la seconde attestation avait servi au transfert des unités de ME de l’OMS par Choson Kallah Fund de Toronto à Escarpment Biosphere Foundation. Toutefois, rien dans l’attestation même n’indique qu’il s’agit d’autre chose que du transfert effectué par la personne qui a signé cette attestation.

[72]   À mon avis, il faut alors chercher à savoir si ces certificats visaient à établir un droit de propriété à l’égard de la quantité importante de produits pharmaceutiques énumérés dans l’annexe. Selon les annexes des documents de M. Eisbrenner, un des certificats a servi au transfert de produits pharmaceutiques d’une [traduction] « valeur pharmaceutique » de 80 516 $ et l’autre au transfert de produits d’une [traduction] « valeur pharmaceutique » de 66 984 $. Selon M. Eisbrenner, ces produits pharmaceutiques étaient censés avoir été transférés par lui à l’organisme de bienfaisance ayant reçu les dons en nature, lequel organisme les aurait ensuite transférés à l’organisme de bienfaisance distributeur. Toutefois, le libellé de la seconde attestation au verso des certificats n’a pas pour effet d’exécuter cette seconde cession.

[73]  Dans le cas de M. Morrison, le certificat remis pour l’année d’imposition 2004 contient les mêmes attestations, sauf que le cessionnaire est Meoroth dans la première attestation et Canadian Physicians for Aid and Relief dans la seconde attestation. Il semble que le certificat de M. Morrison pour l’année d’imposition 2005 n’ait pas été versé au dossier. La seconde attestation du certificat de M. Morrison pour l’année d’imposition 2004 présente la même difficulté. Rien dans cette attestation n’indique que la personne qui signe à titre de cédant le fait au nom d’une autre personne, puisque l’attestation commence par le pronom [traduction] « je », et rien n’indique que la personne qui signe à titre de cédant ne le fait pas en son propre nom.

[74]  Par conséquent, je suis d’avis que M. Eisbrenner et M. Morrison n’ont pas établi que le juge de la Cour canadienne de l’impôt a commis une erreur manifeste et dominante en concluant que les certificats étaient des « pièces sans valeur » et que les appelants n’avaient pas la propriété des produits pharmaceutiques qu’ils affirment avoir donnés aux organismes de bienfaisance ayant reçu les dons en nature.

V.  Conclusion

[75]  Par conséquent, je rejetterais les appels.

[76]  Après l’audience, les parties ont présenté une lettre dans laquelle elles affirmaient avoir convenu que, si la Couronne obtenait gain de cause dans le présent appel, cette dernière aurait droit à des dépens établis à 4 000 $ au total. Par conséquent, j’adjugerais des dépens de 2 000 $ à la Couronne pour chaque appel (4 000 $ au total).

« Wyman W. Webb »

j.c.a.

« Je souscris à ces motifs.

Donald J. Rennie, j.c.a. »

« Je souscris à ces motifs.

Anne L. Mactavish, j.c.a. »

Traduction certifiée conforme

Elisabeth Ross, jurilinguiste


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


APPEL DE JUGEMENTS DE LA COUR CANADIENNE DE L’IMPÔT

DU 7 NOVEMBRE 2018, DOSSIERS NOS 2015-858(IT)G pour le dossier A-398-18 et

2008-2759(IT)G, 2008-2779(IT)G et 2014-3231(IT)G pour le dossier A-404-18

DOSSIER :

A-398-18

 

INTITULÉ :

DIETER EISBRENNER c.

SA MAJESTÉ LA REINE

 

ET DOSSIER :

A-404-18

 

INTITULÉ :

V. ROSS MORRISON c.

SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 3 mars 2020

MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE WEBB

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE RENNIE

LA JUGE MACTAVISH

DATE DES MOTIFS :

Le 20 mai 2020

COMPARUTIONS :

Justin Kutyan

Martin Gentile

Pour l’appelant

DIETER EISBRENNER

V. Ross Morrison

Shane Greaves

Pour l’appelant

V. ROSS MORRISON

Andrew Miller

Stephen Ji

Pour l’intimée

SA MAJESTÉ LA REINE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

KPMG cabinet juridique s.r.l./S.E.N.C.R.L.

Toronto (Ontario)

Pour l’appelant

DIETER EISBRENNER

Morrison Brown Sosnovitch LLP

Toronto (Ontario)

Pour l’appelant

V. ROSS MORRISON

Nathalie G. Drouin

Sous-procureure générale du Canada

Pour l’intimée

SA MAJESTÉ LA REINE

 

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