Décisions de la Cour d'appel fédérale

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Date : 20211122


Dossier : A-143-21

Référence : 2021 CAF 224

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE LOCKE

LE JUGE LEBLANC

 

 

ENTRE :

 

 

MERCK CANADA INC.

 

 

appelante

 

 

et

 

 

LA MINISTRE DE LA SANTÉ

 

 

intimée

 

Audience tenue par vidéoconférence organisée par le greffe le 19 octobre 2021.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 22 novembre 2021.

MOTIFS DU JUGEMENT :

LA JUGE GAUTHIER

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE LOCKE

LE JUGE LEBLANC

 


Date : 20211122


Dossier : A-143-21

Référence : 2021 CAF 224

CORAM :

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE LOCKE

LE JUGE LEBLANC

 

 

ENTRE :

 

 

MERCK CANADA INC.

 

 

appelante

 

 

et

 

 

LA MINISTRE DE LA SANTÉ

 

 

intimée

 

MOTIFS DU JUGEMENT

LA JUGE GAUTHIER

[1] La Cour est saisie de l’appel d’une décision de la Cour fédérale qui a rejeté la demande de contrôle judiciaire présentée par Merck Canada Inc. à l’égard du refus par la ministre de la Santé d’inscrire le brevet no 2830806 (le brevet 806) au registre des brevets suivant le paragraphe 4(6) du Règlement sur les médicaments brevetés (Avis de conformité), D.O.R.S./93-133 (le Règlement) (Merck Canada Inc. c. le ministre de la Santé, 2021 CF 345).

[2] Je conviens avec les parties que la Cour fédérale a opté pour la bonne norme de contrôle, à savoir celle de la décision raisonnable. Partant, notre Cour a pour rôle en l’espèce d’examiner la décision de la ministre pour déterminer si la Cour fédérale a correctement appliqué cette norme (Agraira c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2013 CSC 36, [2013] 2 R.C.S. 559, par. 46). Comme notre Cour l’a fait observer, un tel examen « ne signifie pas pour autant que l’appelante peut ou devrait faire fi des motifs qui justifient le rejet prononcé par la Cour fédérale. » Au contraire, « si la Cour fédérale, comme en l’espèce, semble avoir répondu entièrement à tous les arguments avancés, il incombe à l’appelante de démontrer en appel l’erreur qui vicie le raisonnement de la Cour fédérale » (Banque de Montréal c. Canada (Procureur général), 2021 CAF 189, par. 4).

[3] Merck a fait valoir une seule question principale à la ministre. Suivant sa propre interprétation des paragraphes 3(2) et 4(6) du Règlement, il était loisible à la ministre de proroger le délai de 30 jours prévu à cette dernière disposition. Elle a également énoncé diverses raisons justifiant l’exercice par la ministre de son pouvoir discrétionnaire en sa faveur, vu les circonstances [traduction] « exceptionnelles » de l’affaire. Tout particulièrement, elle a fait remarquer que l’erreur commise par inadvertance par son agent des brevets après l’avènement de la COVID-19 n’avait entrainé qu’un retard d’un jour (selon ses calculs, qui ne correspondent pas aux règles de pratique applicables au dépôt électronique). Quoi qu’il en soit, cette erreur n’a porté préjudice à aucun tiers, selon Merck.

[4] Ce n’est qu’à la note de bas de page 16 de la section consacrée au contexte de ses observations présentées à la ministre, qui concerne la COVID-19, que Merck mentionne le projet de loi C‑20, Loi concernant des mesures supplémentaires liées à la COVID-19 (le projet de loi C‑20), qui est devenu la Loi sur les délais et autres périodes (COVID-19), édictée suivant l’article 11 de la Loi concernant des mesures supplémentaires liées à la COVID-19, L. C. 2020, ch. 11 (Loi sur les délais) le 27 juillet 2020. Et pourtant, elle a présenté ces observations dans une lettre datée du 4 août 2020 (soit après l’entrée en vigueur de la Loi sur les délais). Même si Merck n’a fondé les arguments qu’elle a présentés à la ministre sur aucune des dispositions de cette loi, la ministre a tenu compte de cette loi.

[5] Devant nous, Merck soulève des arguments semblables à ceux qu’elle a présentés à la Cour fédérale à l’appui de sa thèse selon laquelle les conclusions de la ministre quant aux paragraphes 3(2) et 4(6) du Règlement et à la Loi sur les délais n’étaient pas raisonnables. Toutefois, pour la première fois, elle affirme également que, même si la Cour conclut que l’interprétation par la ministre du paragraphe 6(1) de la Loi sur les délais est raisonnable, [traduction] « une réparation en equity devrait être accordée en l’espèce » (mémoire des faits et du droit de l’appelante, par. 48).

[6] Selon Merck, la Cour a le pouvoir d’accorder une réparation en equity, et l’exercice de ce pouvoir est à la fois nécessaire et opportun en l’espèce. À l’appui de sa thèse, elle affirme qu’elle a agi raisonnablement et avec diligence en vue de protéger son droit et que des facteurs hors de son contrôle, à savoir l’erreur commise par son agent des brevets après l’avènement de la COVID-19, lui ont mis des bâtons dans les roues.

[7] Le présent appel constitue un effort louable de la part de Merck de remédier à l’erreur de son agent des brevets, qui ne l’a informée de la délivrance du brevet 806 que le 15 juin 2020. Bien que louable et compréhensible, l’appel doit être rejeté. Ce n’est pas la première fois qu’un agent des brevets rate une échéance, et ce ne sera malheureusement pas la dernière. Le présent appel s’ajoute à plusieurs autres tentatives, qui remontent à la fin des années 90, visant à passer outre aux délais prévus au Règlement, notamment à l’article 4.

I. Analyse

A. Pouvoir discrétionnaire du ministre au titre des paragraphes 3(2) et 4(6) du Règlement

[8] Je vais d’abord examiner le pouvoir discrétionnaire de la ministre au titre des paragraphes 3(2) et 4(6) du Règlement. Je reconnais que Merck a traité de la conclusion de la ministre sur l’application de la Loi sur les délais en premier. Toutefois, j’aborde les arguments dans cet ordre parce que le pouvoir discrétionnaire que le Règlement conférerait à la ministre de proroger le délai prévu au Règlement constituait la question principale présentée à cette dernière.

[9] Il est acquis au débat qu’avant 2017, les délais de rigueur prévus à l’article 4 et au paragraphe 6(1) du Règlement faisaient partie intégrante de l’exercice de mise en équilibre élaboré par le législateur au moment où il a adopté le régime — que l’on peut qualifier de draconien — prévu au Règlement. À la lumière du dossier, j’estime que l’affaire présente un seul aspect nouveau : l’erreur à laquelle Merck tente évidemment de remédier a été commise peu après l’avènement de la COVID‑19, soit en juin 2020.

[10] Pour les motifs qui sont exposés ci-après, je suis d’avis que, même si je suis sensible à la situation malheureuse de l’appelante, l’intervention de la Cour ne serait pas justifiée en se fondant sur les arguments plutôt théoriques invoqués. Il faut toujours faire preuve de prudence lorsque des « circonstances exceptionnelles » sont alléguées, et qu’il s’agit d’interpréter des dispositions statutaires de façon à ce qu’elles puissent s’appliquer dans toutes les situations auxquelles ces dispositions s’appliquent. C’est un élément important de la présente instance, qui découle d’une erreur commise par l’agent des brevets de Merck pendant une période où des milliers de brevets ont néanmoins été délivrés, et ce malgré la pandémie.

[11] Je signale que les arguments que Merck a présentés à la ministre étaient brefs et ne faisaient pas allusion à la jurisprudence qui sous-tend maintenant sa plaidoirie devant la Cour. Merck n’avait renvoyé qu’à trois arrêts de la Cour suprême qui portent sur les principes modernes d’interprétation des lois énoncés par Driedger et l’objet général de la Loi sur les brevets, L.R.C. (1985) ch. P‑4.

[12] Merck prétendait simplement que, depuis les modifications apportées en 2017 au Règlement, notamment au paragraphe 3(2), la ministre a la discrétion d’ajouter des brevets au registre et que rien dans le libellé du paragraphe 4(6) ne l’empêche de proroger le délai qui y est prévu. Les dispositions législatives pertinentes sont reproduites à l’annexe A des présents motifs. Selon l’interprétation proposée par Merck du verbe « peut », qui figure au paragraphe 4(6), l’action qu’il désigne ne serait pas impérative, et se distingue de celle que traduit le verbe « doit » qui figure au paragraphe 4(5). Elle prétendait ensuite que, dans les circonstances exceptionnelles de l’affaire (qui se résument essentiellement à l'avènement de la COVID), la ministre devrait exercer son pouvoir discrétionnaire et ajouter ce brevet, car en l’espèce, il n’en découlerait aucun préjudice à des tiers. Merck affirmait qu’un tel exercice serait conforme à l’objet du régime énoncé dans la Loi sur les brevets et le Règlement pris en vertu de cette dernière.

[13] Merck soutient maintenant que la décision du ministre n’est pas raisonnable, car elle n’est pas suffisamment étayée. Selon elle, la ministre n’aurait pas procédé à l’interprétation téléologique globale des dispositions en cause que la Cour suprême exige dans l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Vavilov, 2019 CSC 65 (Vavilov). Selon Merck, la décision se résume à une série d’énoncés. Elle présente également d’autres arguments justifiant sa thèse selon laquelle l’interprétation de la ministre n’est pas raisonnable.

[14] Je ne suis pas d’accord avec Merck pour dire que la décision du ministre n’est pas suffisamment motivée. Bien qu’elle soit brève, à l’instar des observations de Merck, elle indique que la ministre a tenu compte de tous les arguments et préoccupations qui lui avaient été présentés. En premier lieu, la ministre a évalué l’argument de Merck selon lequel le dépôt avait été effectué avec très peu de retard. Selon la ministre, même si elle pouvait faire fi de la pratique établie en matière de dépôt électronique, le brevet 806 ne respecterait toujours pas le délai prescrit par le Règlement, car il serait réputé avoir été déposé à la fin du 31e jour (à 22 h 35) après la délivrance du brevet.

[15] En deuxième lieu, la ministre résume de manière appropriée, selon moi, l’argument soulevé par Merck. Tout d’abord, à la page 2 de sa décision, elle aborde le délai prévu au paragraphe 4(6) à la lumière des observations de Merck quant aux libellés différents des paragraphes 4(5) et (6). À son avis, le choix du verbe « peut » qui figure au paragraphe 4(6) traduit la possibilité pour la première personne de présenter une liste de brevets en dehors du délai imparti au paragraphe 4(5). Toutefois, cette possibilité est subordonnée à la délivrance du brevet postérieure au dépôt de la présentation de drogue, et au dépôt de la liste des brevets dans les 30 jours de la délivrance du brevet.

[16] Selon la ministre, l’interprétation proposée par Merck du mot « peut » mènerait à une interprétation absurde des délais et serait contraire à l’objet même que sert le délai prévu au paragraphe 4(6). Elle ne souscrit pas non plus à la thèse avancée par Merck selon laquelle le respect strict des délais va à l’encontre de l’objet du Règlement et de la Loi sur les brevets. Renvoyant au Résumé d’étude d’impact de la réglementation (RÉIR) accompagnant les modifications de 2017, elle mentionne, à la page 5 de sa décision, que l’objet décrit dans le RÉIR demeure le suivant : « [l]a politique sur les brevets pharmaceutiques du gouvernement cherche à équilibrer, d’une part, une protection efficace des brevets visant des drogues innovantes et, d’autre part, l’entrée sur le marché en temps opportun des médicaments génériques moins coûteux qui leur font concurrence ». Selon la ministre, les délais prescrits par le Règlement jouent un rôle intégral dans cette recherche d’équilibre. Comme le gouverneur en conseil a décidé pour l’administration du Règlement de fixer et de conserver le délai de 30 jours prescrit, le ministre estime que l’objet du texte réglementaire est respecté plutôt que contourné.

[17] Ayant examiné le régime prévu aux articles 3 et 4, la ministre fait observer que le RÉIR qui accompagne les modifications de 2017 (RÉIR de 2017) indique expressément, à la page 3322, que les « critères régissant l'inscription d'un brevet au registre des brevets demeure[nt] inchangés ». La ministre mentionne également, à la page 4 de sa décision, que le RÉIR de 2017 précise sous la rubrique « Tenue du registre des brevets » que son pouvoir discrétionnaire d’examiner le registre (par. 3(2.3)) lui permet de « réexaminer les décisions antérieures relatives à l’inscription qu’elle a déjà prises à la lumière de toute décision subséquente dans laquelle la Cour a interprété différemment les exigences en matière d’admissibilité ».

[18] De l’avis de la ministre, les exigences mentionnées au paragraphe 3(2) englobent forcément les délais prévus aux paragraphes 4(5) et (6). La ministre étaye son raisonnement sur la décision rendue par la Cour fédérale dans l’affaire Hoffmann-La Roche Ltd. c. Canada (Santé), 2005 CF 1415, conf. par 2006 CAF 335 (Hoffmann). Tout particulièrement, elle invoque le passage où la Cour fédérale affirme ne pas souscrire à la thèse voulant que le ministre soit habilité à accepter un dépôt tardif aux termes de l’article 3 du Règlement. La Cour fédérale, dans la décision Hoffman, ne reconnaît pas l’existence d’une exception au délai de 30 jours applicable dans le libellé de l’article 3 (modifié depuis), tout particulièrement compte tenu du fait que l’article 3 renvoyait à l’article 4 sans mentionner de pouvoir de prorogation du délai prévu à cette dernière disposition.

[19] Enfin, selon la ministre, point n’est besoin de déterminer si la seconde personne a subi un préjudice dans l’application du délai, puisqu’elle n’est pas habilitée à accepter les listes de brevets déposées après l’expiration du délai prescrit au Règlement. La ministre a également traité des divers arguments de Merck sur la protection des données et les répercussions de ce régime en l’espèce.

[20] Je note l’observation de la ministre selon laquelle son refus d’ajouter la liste de brevets comprenant le brevet 806 au registre des brevets n’a pas privé Merck des droits que lui confère la Loi sur les brevets. Ainsi, Merck pouvait toujours défendre le monopole et l’exclusivité qu’elle possède à l’égard de l’objet revendiqué dans le brevet 806, que ce dernier soit ou non inscrit dans le registre des brevets.

[21] Dans l’arrêt Vavilov, la Cour suprême du Canada nous rappelle que les décideurs administratifs ne sont pas tenus à une norme de perfection et qu’il ne faut pas s’attendre à ce que leurs décisions soient rédigées comme les motifs d’un tribunal judiciaire procédant à l’interprétation de dispositions législatives. En outre, « les décideurs administratifs peuvent estimer qu’il n’est pas nécessaire de s’attarder, dans leurs motifs, au moindre signal d’une intention législative » (Vavilov, par. 122). Dans bien des cas, et à mon avis en l’espèce, « il peut se révéler nécessaire de ne prendre en compte que les aspects principaux du texte, du contexte ou de l’objet » (Vavilov, par. 122).

[22] Si le fond d’une décision administrative doit être conforme au texte, au contexte et à l’objet de la disposition en cause, le décideur administratif n’est pas tenu de procéder à une analyse qui examine tous les raisonnements possibles (Vavilov, par. 120 et 127). Il ne faut pas, à cet égard, négliger les observations présentées à la ministre.

[23] Comme j’en discuterai ci-après, devant nous, Merck renvoie maintenant à certains passages du RÉIR de 2017 à l’appui de nouveaux arguments qu’elle n’a pas fait valoir à la ministre. Dans de telles circonstances, je ne peux reprocher à la ministre l’absence de mention expresse de ces passages ou d’analyse sur leur interprétation étant donné que l’argument ne lui avait pas été soumis.

[24] Un examen raisonnable de la décision — présenté dans un ordre un peu différent de celui de Merck — m’amène à conclure que la ministre a examiné toutes les observations présentées par Merck. La ministre n’y souscrivait tout simplement pas. Je suis convaincue que l’analyse de la ministre suffit pour que la Cour ne perde pas confiance dans les conclusions que la ministre a tirées (Vavilov, par. 122). Sa décision est intelligible, transparente et est suffisamment motivée.

[25] Certes, la ministre aurait pu en dire davantage, tout particulièrement compte tenu du fait que la question des délais prévus par le Règlement ne date pas d’hier. Par exemple, elle aurait très bien pu renvoyer au RÉIR qui accompagnait les modifications apportées en 2006 au Règlement (Résumé d’étude d’impact de la réglementation, Gazette du Canada, partie II, vol. 140, no 21 (2006) (le RÉIR de 2006) (voir, en particulier, la rubrique « Objectif des modifications » à la p. 1515). Ce texte entendait préciser les « exigences relatives à l’inscription des brevets » et mettre fin aux tentatives des premières personnes à passer outre aux délais de rigueur prévus à l’article 4. En fait, le raisonnement de la ministre est tout à fait conforme au RÉIR de 2006, le libellé duquel est repris par la Cour fédérale dans la décision Immunex Corporation c. Canada (Santé), 2008 CF 1409, aux paragraphes 32 et 33. Pour citer un autre passage du RÉIR de 2006 :

[p. 1511]

[. . .] Ces exigences reposent sur certains principes fondamentaux devant être respectés afin que le règlement de liaison fonctionne de manière équilibrée avec l’exception relative à la fabrication anticipée. Avant de passer à l’explication du fonctionnement de quelques-unes de ces exigences, les principes qui les sous-tendent seront d’abord décrits.

[…]

[p. 1513]

Parmi les changements intégrés dans les modifications de 1998 ayant pour objet de « faciliter la mise en marché des médicaments génériques », on retrouve des dispositions visant à renforcer les exigences relatives à l’inscription des brevets. Plus précisément, le règlement de liaison modifié réaffirme l’application de délais stricts pour l’inscription d’un brevet au registre et exige également que les brevets soient pertinents quant à la concentration, à la forme posologique et à la voie d’administration de la drogue approuvée. [Non souligné dans l’original.]

[26] Le RÉIR de 2006 mentionne (à l’instar de la décision de la ministre) que bien que certains brevets qui ne sont pas admissibles à la protection que confère le Règlement puissent ultimement être contrefaits par l’entrée sur le marché d’un produit générique, le gouvernement estime que les intérêts de la politique sous-jacente ont fait pencher la balance en faveur de l’approbation immédiate du médicament générique. Dans ces cas, il est préférable que la question soit tranchée dans le cadre d’une action en contrefaçon ordinaire (RÉIR de 2006, p. 1512).

[27] Or, à mon avis, point n’était besoin pour la ministre de renvoyer à ce document, car Merck devrait bien le connaître (comme le devrait son avocat spécialiste). En effet, Merck a utilisé ce régime depuis les tout débuts, et je peux présumer qu’elle est au courant des modifications apportées au fil des ans et de leur objet. Il suffisait à la ministre de signaler que le RÉIR de 2017 indique clairement que les exigences relatives à l’inscription des brevets demeurent inchangées, ce qu’elle a fait.

[28] Cela dit, dans son mémoire des faits et du droit et à l’audience, Merck, par l’entremise de son nouvel avocat, soulève de nouveaux arguments quelque peu surprenants. Ces arguments se trouvent presque diamétralement opposés à ceux qu’elle a tenus devant la ministre ainsi qu’à d’autres arguments qui figurent dans son mémoire. Comme ils ne sont pas fondés, je ne m’y attarderai que brièvement.

[29] En premier lieu, selon Merck, la ministre affirme que le paragraphe 3(2) ne lui confère aucun pouvoir discrétionnaire, ce qui contredit l’énoncé de notre Cour dans l’arrêt Apotex Inc. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-Être social), 2000 CanLII 14856, [1999] A.C.F. n1978 (C.A.F.) et dans l’affaire Astrazeneca Canada Inc. c. Canada (Ministre de la Santé), 2004 CF 736, [2004] A.C.F. no 883 (Q.L.), conf. par 2005 CAF 175. Dans ces affaires, la Cour estime que le pouvoir du ministre d’ajouter, ou non, ou de supprimer un brevet du registre, que lui confère le par. 3(1) du Règlement est discrétionnaire. Selon Merck, dans l’affaire Hoffmann, la Cour fédérale aurait oublié de mentionner cette jurisprudence lorsqu’elle a conclu à l’absence de pouvoir discrétionnaire habilitant le ministre à accepter une liste de brevets après l’expiration du délai de 30 jours. En affirmant que la décision de la ministre ne pouvait être limitée par l’affaire Hoffmann, Merck prétend que la ministre a agi déraisonnablement en fondant sa décision sur cette affaire (mémoire de l’appelante, par. 60 et 61).

[30] Ce n’est pas du tout ce que la ministre a dit dans sa décision. La ministre a reconnu qu’elle avait le pouvoir d’ajouter ou de supprimer des brevets du registre conformément à l’article 3 du Règlement, car elle doit tenir le registre. Toutefois, elle a indiqué que sa discrétion d’ajouter des brevets au registre ne peut s’exercer qu’à l’égard des brevets qui respectent [traduction] « les exigences relatives à l’adjonction au registre ».

[31] À mon avis, il n’existe pas de contradiction entre, d’une part, cette thèse, qui est étayée par le libellé clair — et selon moi sans équivoque — du paragraphe 3(2) du Règlement, l’objet du Règlement et leur historique et, d’autre part, les deux affaires invoquées par Merck à cet égard (voir le paragraphe 29 des présents motifs). D’ailleurs, à l’audience, l’avocat de Merck a même admis que l’argument était fondé sur une interprétation stricte de la décision de la ministre, suivant laquelle l’article 3 ne lui conférerait aucun pouvoir discrétionnaire.

[32] En deuxième lieu, contrairement à ce qu’avance Merck, le renvoi par la ministre à l’affaire Hoffmann ne rend pas sa décision déraisonnable. Les conclusions de la Cour fédérale qui figurent au paragraphe 23 de ses motifs étaient pertinentes, car elles portent sur l’interaction entre les articles 3 et 4 (avant leur modification). En réponse à une question posée à l’audience, l’avocat de Merck a rectifié le tir, affirmant que l’affaire Hoffmann, comme les autres décisions qui concernent les délais prévus à l’article 4 avant les modifications de 2017, avait perdu beaucoup de sa pertinence.

[33] Merck propose une autre interprétation surprenante. Elle soutient que les délais prévus aux paragraphes 4(5) et (6) ne constituent pas des exigences pour l’inscription des brevets, car le libellé restructuré du paragraphe 3(2) ne renvoie plus expressément à l’article 4. Merck signale que les mots « admissible » et « admissibilité » figurent aux paragraphes 4(2), (3) et (3.1) et qu’ils sont absents des paragraphes 4(5) et (6). Merck ajoute que le RÉIR de 2017 vient appuyer une telle interprétation, car après avoir précisé que les critères régissant l’inscription des brevets demeurent inchangés, à la p. 3322, il mentionne seulement les critères d’admissibilité sur le fond. Par conséquent, selon Merck, l’examen du paragraphe 3(2) effectué à la lumière du RÉIR de 2017 et du libellé de l’article 4 dans son ensemble mène à une seule interprétation raisonnable : la ministre est investie des pleins pouvoirs discrétionnaires lui permettant de proroger les délais prévus au Règlement.

[34] Je ne suis pas d’accord.

[35] L’interprétation de Merck est contraire à la manière dont le Règlement est compris et appliqué depuis des années. Par conséquent, on s’attendrait à tout le moins à ce qu’un changement si radical apporté à un important critère d’adjonction d’un brevet au registre ait été clairement expliqué dans le RÉIR de 2017. Comme le mentionne la ministre, le RÉIR de 2017 indique expressément que les critères régissant l’inscription des brevets demeurent inchangés.

[36] En outre, le changement radical qu’allègue Merck ne serait pas passé inaperçu au sein du secteur pharmaceutique ou chez les avocats spécialisés en propriété intellectuelle. Or, Merck n’a produit aucun commentaire écrit sur le sujet.

[37] Comme l’explique le RÉIR de 2017, les modifications de 2017 avaient pour principal objet le respect des obligations et engagements du Canada au titre de l’Accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union européenne, signé par le Canada et l’Union européenne le 30 octobre 2016 (entré en vigueur de manière provisoire le 21 septembre 2017) (AECG). Voilà les changements radicaux apportés au Règlement.

[38] La mention des critères d’admissibilité sur le fond énumérés à la p. 3322 du RÉIR de 2017 est compréhensible vu la dernière phrase du premier paragraphe qui figure sous la rubrique « Critères régissant l’inscription du brevet », qui rappelle que ces critères demeurent applicables, même si toutes les revendications d’un brevet inscrit peuvent dorénavant faire l’objet d’une action intentée en vertu du Règlement. Le seul autre passage pertinent du RÉIR de 2017 commence à la page 3322, sous la rubrique « Tenue du registre des brevets » et explique que les changements apportés ont pour seul objet de répondre aux préoccupations soulevées par le Comité mixte permanent d’examen de la réglementation. Il n’indique aucun changement à la politique législative bien connue qui sous-tend l’inscription des brevets.

[39] Ce qui précède va également à l’encontre de l’interprétation que Merck a proposée à la ministre, à savoir celle qui établit une distinction nette entre le libellé des paragraphes 4(5) et (6) du Règlement. Pourquoi s’attacher à établir une telle distinction si elle estime que le paragraphe 3(2) confère à la ministre un nouveau pouvoir discrétionnaire? Comment Merck peut-elle affirmer que sa nouvelle interprétation proposée est la seule qui soit raisonnable?

[40] Ce nouvel argument est également incompatible avec la jurisprudence que Merck invoque à l’appui d’une autre attaque dirigée contre la décision de la ministre, à savoir que celle-ci aurait omis d’appliquer, ou de justifier sa décision de ne pas appliquer, la décision Compagnie pharmaceutique Procter & Gamble Canada, Inc. c. Canada (Ministre de la Santé), [2003] 4 F.C. 445, 2003 CFPI 583 (appel rejeté pour un autre motif par 2003 CAF 467, [2004] 2 R.C.F. 85) (Procter & Gamble).

[41] Cette affaire portait sur une requête, présentée en application de l’alinéa 6(5)a) (devenu l’article 6.07), sollicitant le rejet de la demande pour cause d’inadmissibilité du brevet à l’adjonction en raison du non-respect des délais prévus à ce qui est devenu le paragraphe 4(6) du Règlement. Il est important de signaler que les différences dans le libellé des dispositions prévoyant les délais et celles énonçant les critères d’admissibilité sur le fond ont toujours existé, et ce au fil des versions. Si Merck avance que Procter & Gamble est la seule décision publiée qui présente une situation juridique et factuelle comparable à celle dont nous sommes saisis, ce n’est toutefois pas la seule affaire où le non-respect des délais prévus à l’article 4 a été invoqué au soutien d’une requête visant à contester l’admissibilité à l’adjonction d’un brevet. L’absence du mot « admissible » de versions antérieures des paragraphes 4(5) et (6) n’a jamais mené à la conclusion que le non-respect de ces importants délais n’emporterait pas l’inadmissibilité à l’adjonction d’un brevet.

[42] Ce qui m’amène au dernier argument soulevé par Merck sur le fondement de la décision Procter & Gamble. Je ne suis pas d’accord pour dire que la ministre a fait erreur en n’examinant pas cette affaire. Premièrement, Merck a omis d’y renvoyer expressément dans ses observations à la ministre. Deuxièmement, cette affaire n’étaye tout simplement pas la thèse de Merck selon laquelle, parce qu’une [traduction] « exception a été faite » dans cette affaire, « la ministre était tenue de justifier sa décision de s’éloigner de cette jurisprudence en l’espèce » (mémoire des faits et du droit de l’appelante, par. 75).

[43] Comme je suis l’auteur des motifs du jugement Procter & Gamble, je suis bien au fait des questions soulevées dans cette affaire. J’estime que cette décision étaye la conclusion de la ministre selon laquelle les délais prévus au paragraphe 4(6) sont de rigueur; elle ne la contredit pas. Il est indubitable que la Cour fédérale et la Cour d’appel fédérale étaient d’avis dans cette affaire que le paragraphe 4(6), comme il était alors libellé, prévoyait des délais de rigueur auxquels l’admissibilité du brevet à l’adjonction était subordonnée. Dans l’affaire Procter & Gamble, la véritable question dont était saisie la Cour fédérale était celle de savoir à quel moment le délai de 30 jours commençait à courir. Il s’agissait d’une question de fait qu’il fallait trancher suivant la norme de contrôle applicable aux requêtes en rejet.

[44] Dans l’affaire Procter & Gamble, la Cour fédérale conclut que la date de délivrance du brevet était en litige en raison de circonstances exceptionnelles (à savoir la nomination d’un nouveau commissaire aux brevets et le temps qu’il a mis pour la délivrance du brevet). La Cour d’appel s’est dite d’avis que, considérer une date autre que la date de délivrance inscrite au brevet créerait trop d’incertitude. Par conséquent, elle a affirmé que les cours ne devaient pas tenir compte d’une date autre que celle qui figure sur ce document officiel. Rien dans les motifs de la Cour d’appel ne laisse entendre que la ministre pouvait, à sa discrétion, proroger le délai de 30 jours prévu au paragraphe 4(6), comme cette disposition était alors libellée, ou que le non-respect de ce délai n’était pas fatal.

[45] En fait, c’est seulement en raison de ce délai de rigueur et de l’intérêt public dans l’intégrité du registre des brevets que le juge Evans n’a pas souscrit à l’avis des juges majoritaires suivant lequel la doctrine de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée s’appliquait. Les juges majoritaires, sous la plume du juge Rothstein (plus tard juge à la Cour suprême du Canada), étaient d’avis que, si les exigences relatives aux délais importaient, il n’en résultait pas pour autant que la doctrine de la préclusion ne s’appliquait pas ou que la Cour devrait exercer le pouvoir discrétionnaire lui permettant de refuser d’appliquer cette doctrine.

[46] Comme il est mentionné plus haut, les délais prévus à l’article 4 jouent un rôle important dans le régime établi par le Règlement, et leur importance a toujours été reconnue. Partant, il était parfaitement raisonnable pour la ministre de conclure qu’ils sont visés par l’expression « conformes aux exigences pour adjonction au registre » qui figure au paragraphe 3(2) du Règlement.

[47] Par conséquent, je suis satisfaite que la Cour fédérale a correctement appliqué la norme de la décision raisonnable en concluant que la décision de la ministre à l’égard des paragraphes 3(2) et 4(6) était raisonnable.

B. Décision de la ministre sur les effets de la Loi sur les délais

[48] Merck avait la possibilité de présenter à la ministre les observations qu’elle a par la suite présentées à notre Cour et à la Cour fédérale. Elle aurait pu soutenir que le paragraphe 6(1) de la Loi sur les délais s’appliquait aux délais prévus au paragraphe 4(6) du Règlement, parce que l’inscription d’un brevet sur une liste est le « point d’accès » d’une action visée au paragraphe 6(1). Elle n’en a rien fait, même si cette loi était en vigueur au moment où elle a présenté ses observations écrites. Comme il est mentionné plus haut, Merck n’a fait que mentionner l’existence du projet de loi C‑20 au soutien de sa thèse selon laquelle l’avènement de la COVID‑19 constituait des circonstances exceptionnelles justifiant l’exercice par la ministre de son pouvoir discrétionnaire.

[49] Quoi qu’il en soit, la ministre, après avoir pris connaissance des observations de Merck, y compris les notes de bas de page dans la section consacrée au contexte, a fait quelques observations sur cette loi. Elle l’a fait après avoir conclu que, contrairement à ce qu’avançait Merck, elle n’avait pas de discrétion lui permettant de proroger les délais prévus, malgré une interruption des activités commerciales.

[50] Plus précisément, la ministre a mentionné à la page 6 que la Loi sur les délais [traduction] « a pour effet de proroger certains délais légaux, y compris ceux applicables à l’introduction d’une instance judiciaire ». Elle a signalé que cette loi ne proroge pas le délai applicable en vertu du paragraphe 4(6) du Règlement pour le dépôt par la première personne d’une liste de brevets.

[51] Je suis d’accord avec Merck pour dire que, comme la ministre a traité de cette question, sa position à cet égard est susceptible de contrôle judiciaire. Toutefois, je ne crois pas que la ministre était tenue en l’espèce de procéder à une analyse complète des dispositions législatives, comme le prétend Merck.

[52] Comme le libellé de la Loi sur les délais est clair et que cette dernière ne comprend que trois dispositions pertinentes, je suis satisfaite dans les circonstances que la décision de la ministre est intelligible et suffisamment transparente. L’article 5 de cette loi prévoit clairement qu’elle proroge uniquement certains délais légaux. Le paragraphe 6(1) prévoit la suspension des délais de prescription applicables à l’introduction d’une instance devant une cour. Il va sans dire que la ministre n’assimilait pas l’inscription d’un brevet au titre de l’article 4 du Règlement à une instance devant une cour. En effet, la seule disposition qui établit un délai de prescription pour l’introduction d’une instance devant une cour est l’article 6 du Règlement. Fait plus important encore, les délais administratifs prévus aux lois fédérales sont visés expressément par l’article 7 de la Loi sur les délais. Il habilite les ministres responsables de l’application de lois énumérées à l’annexe de la Loi sur les délais à suspendre ou à proroger les délais qui y sont prévus. Ni la Loi sur les brevets, ni le Règlement n’y sont énumérés, et ce même si c’est dans cette annexe que l’on devrait normalement s’attendre à ce que les délais comme ceux prévus aux paragraphes 4(5) et (6) y soient traités.

[53] À vrai dire, il est difficile d’imaginer que la ministre, voire une cour, ait pu anticiper l’argument que Merck soulève à présent et qui veut que, comme l’inscription d’un brevet au registre constitue une condition essentielle, les délais prévus au paragraphe 4(6) — et vraisemblablement au paragraphe 4(5) — soient assimilables à des délais de prescription du droit d’introduire une instance devant une cour au sens où il faut l’entendre pour l’application du paragraphe 6(1) de la Loi sur les délais.

[54] Quant à l’issue de la décision elle-même, à savoir que la Loi sur les délais ne s’applique pas au paragraphe 4(6), je suis également satisfaite que cette conclusion est raisonnable. Après avoir soigneusement considéré les représentations et la jurisprudence présentées par Merck, j’estime que sa thèse sur cette question n’est pas fondée.

[55] Point n’est besoin d’en dire davantage à cet égard, car je souscris aux énoncés de la Cour fédérale aux paragraphes 18 à 31 de ses motifs. En effet, je conviens avec l’intimé que la thèse de Merck revient à dire que tout délai pour l’obtention d’un brevet sous le régime de la Loi sur les brevets est aussi un délai de prescription du droit d’introduire une instance devant une cour, car un brevet constitue une condition essentielle au dépôt d’une action pour contrefaçon de brevet en vertu de la Loi sur les brevets.

[56] Enfin, Merck soutient que la conclusion de la ministre n’est pas raisonnable, sur le fondement du commentaire qui figure à la page 6 de sa décision :

[traduction]

De plus, le 30 juillet 2020, un décret a été pris en vertu du paragraphe 6(4) de la Loi sur les délais ayant pour objet de préciser que cette loi n’a pas d’effet sur les délais prévus au Règlement par application du paragraphe 55.2(5) de la Loi sur les brevets.

[57] Merck attaque la validité de ce commentaire, qui va à l’encontre de la conclusion de la Cour fédérale dans la décision Viiv Healthcare Company c. Sandoz Canada Inc., 2020 CF 1040 (Viiv), qui a été rendue le même jour que la décision de la ministre. L’analyse de la ministre semble porter sur le paragraphe 2(2) du décret, qui a été pris quelques jours suivant l’entrée en vigueur de la loi, et qui intéresse les délais administratifs et non seulement ceux qui s’appliquent aux instances devant une cour. En revanche, dans l’affaire Viiv, la Cour fédérale a porté son regard sur le paragraphe 2(1) du décret, qui prévoit, selon elle, la levée de toute suspension du délai prévu au paragraphe 6(1) du Règlement pour l’introduction d’une demande devant la Cour. C’était la seule question dont elle était saisie. Dans ce cadre, la Cour fédérale a ajouté que le paragraphe 55.2(5) de la Loi sur les brevets n’avait pas l’effet que lui attribue la ministre en l’espèce, car, à son avis, le paragraphe 6(1) de la Loi sur les délais et le paragraphe 6(1) du Règlement ne sont pas incompatibles.

[58] Nous ne siégeons pas ici en appel de la décision de la Cour fédérale dans l’affaire Viiv. Je ne tiens donc pas à en dire davantage sur le sujet. Pour les besoins de la cause, il suffit de dire que le commentaire de la ministre cité plus haut semble a priori incorrect. Quelle que soit la manière dont on qualifie cette « erreur », je conviens avec la Cour fédérale pour dire que cette « erreur » ne rend pas la conclusion de la ministre, selon laquelle la Loi sur les délais ne s’applique pas au paragraphe 4(6), déraisonnable. Comme il ressort de l’emploi, par la ministre, de l’expression [traduction] « de plus », ce n’était pas le seul argument à l’appui de sa position.

C. Réparation en equity

[59] Passons à la dernière question, que Merck n’a pas présentée à la Cour fédérale.

[60] Merck reconnaît que notre Cour n’est pas habilitée à accorder une réparation en equity dans les cas où une telle intervention enfreindrait des règles statutaires claires. J’ajouterais à ce qui précède qu’il existe une jurisprudence solide sur les délais statutaires clairement prévus par le législateur.

[61] Et pourtant, Merck nous demande d’établir une distinction entre cette jurisprudence et la présente affaire en raison des circonstances exceptionnelles de cette dernière, notamment l’avènement de la COVID‑19. Elle indique diverses mesures prises par le législateur (la Loi sur les délais) et les décideurs administratifs, comme la commissaire aux brevets (en vertu de l’article 78 de la Loi sur les brevets). Selon elle, la Cour devrait faire preuve de souplesse dans de telles circonstances exceptionnelles. Merck affirme également que, si la Loi sur les délais ne s’applique pas aux délais prévus aux paragraphes 4(5) et (6), il s’agit manifestement d’un oubli de la part du législateur. Or, je fais remarquer que la Loi sur les délais et le décret pris le 30 juillet 2020 témoignent d’une décision réfléchie.

[62] Selon Merck, la Cour est habilitée à lui accorder une réparation en equity en vertu de la doctrine expansive de la levée de la déchéance.

[63] Comme il a été mentionné à l’audience, la Cour exerce avec circonspection son pouvoir d’examiner de nouveaux arguments. Il est primordial que la cour d’appel soit convaincue que le dossier de preuve qui porte sur une nouvelle question soit complet. Comme l’affirme la Cour suprême du Canada dans l’affaire Alberta (Information and Privacy Commissioner) c. Alberta Teachers’ Association, 2011 CSC 61, [2011] 3 R.C.S. 654 [Alberta Teachers’ Association], soulever des questions pour la première fois (dans le cadre d’une demande de contrôle judiciaire ou d’une appel d’une telle décision) « peut porter indûment préjudice à la partie adverse et priver la cour de justice des éléments de preuve nécessaires pour trancher » (Alberta Teachers’ Association, par. 26).

[64] Même si la Cour était habilitée à accorder la réparation demandée (ce dont je doute), je ne suis pas convaincue que la preuve qui nous a été présenté est adéquate et que nous pourrions examiner la question sans causer de préjudice à l’intimé. Comme l’intimé fait valoir vigoureusement, il n’a eu aucune possibilité d’attaquer la preuve par affidavit de Merck ou de produire d’autres éléments de preuve sur la situation factuelle maintenant avancée, étant donné que la Cour fédérale était saisie d’autres questions.

[65] J’estime, après un examen minutieux du dossier, que ce dernier n’explique guère la situation ayant mené à l’erreur de l’agent des brevets. La preuve est non seulement lacunaire, mais elle est également fondée sur du ouï-dire, voire du double ouï-dire. S’il n’est pas nécessaire de démontrer l’absence de faute pour que la doctrine de la levée de la déchéance en equity s’applique, comme l’affirme Merck, mais il faut tout de même déterminer si l’appelante a agi raisonnablement avant d’exercer ce pouvoir discrétionnaire (Saskatchewan River Bungalows Ltd. c. La Maritime, Compagnie d’assurance-vie, [1994] 2 R.C.S. 490, p. 504, 1994 CanLII 100).

[66] Par conséquent, je refuserais d’exercer le pouvoir discrétionnaire dont la Cour est investie afin de trancher cette nouvelle demande de réparation en equity en faveur de Merck.

II. Conclusion

[67] Pour les motifs qui précèdent, et comme les parties n’ont pas demandé de dépens, je propose que cet appel soit rejeté sans dépens.

« Johanne Gauthier »

j.c.a.

« Je suis d’accord

George R. Locke j.c.a. »

« Je suis d’accord

René LeBlanc j.c.a. »

 


Annexe A

Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), DORS/93-133

[…]

[…]

Registre et liste de brevets

Register and Patent List

[…]

[…]

3 (2) Le ministre tient un registre des brevets qui ont été présentés pour adjonction au registre et des certificats de protection supplémentaire qui mentionnent ces brevets. À cette fin, le ministre :

3 (2) The Minister shall maintain a register of patents that have been submitted for addition to the register and certificates of supplementary protection in which any of those patents are set out

a) ajoute au registre tout brevet inscrit sur une liste de brevets et tout certificat de protection supplémentaire qui sont conformes aux exigences pour adjonction au registre;

(a) by adding any patent on a patent list or certificate of supplementary protection that meets the requirements for addition to the register;

b) refuse d’ajouter au registre tout brevet et tout certificat de protection supplémentaire qui ne sont pas conformes aux exigences pour adjonction au registre;

(b) by refusing to add any patent or certificate of supplementary protection that does not meet the requirements for addition to the register;

c) supprime du registre tout brevet ou tout certificat de protection supplémentaire :

(c) by deleting any patent or certificate of supplementary protection

(i) qui y a été ajouté à la suite d’une erreur administrative,

(i) that was added to the register due to an administrative error,

(ii) qui a été déclaré invalide ou nul aux termes des paragraphes 60(1) ou 125(1) de la Loi sur les brevets,

(ii) that has, under subsection 60(1) or 125(1) of the Patent Act, been declared to be invalid or void,

(iii) qui a été déclaré inadmissible à l’inscription au registre au titre du paragraphe 6.07(1),

(iii) that has, under subsection 6.07(1), been declared to be ineligible for inclusion on the register, or

(iv) qui fait l’objet d’une demande de suppression par la première personne à l’égard de la liste de brevets qui comprend ce brevet;

(iv) the deletion of which was requested by the first person in respect of the patent list that includes that patent;

d) supprime, à l’égard d’une présentation de drogue nouvelle ou d’un supplément à une présentation de drogue nouvelle, tout brevet qui est expiré, sauf si un certificat de protection supplémentaire mentionnant ce brevet est inscrit au registre à l’égard de cette présentation ou de ce supplément;

(d) by deleting, in respect of a new drug submission or a supplement to a new drug submission, any patent that has expired, unless a certificate of supplementary protection in which the patent is set out is included on the register in respect of that submission or supplement; and

e) supprime tout certificat de protection supplémentaire qui est expiré.

(e) by deleting any certificate of supplementary protection that has expired.

[…]

[…]

4 (1) La première personne qui dépose ou a déposé la présentation de drogue nouvelle ou le supplément à une présentation de drogue nouvelle peut présenter au ministre, pour adjonction au registre, une liste de brevets qui se rattache à la présentation ou au supplément.

4 (1) A first person who files or who has filed a new drug submission or a supplement to a new drug submission may submit to the Minister a patent list in relation to the submission or supplement for addition to the register.

(1.1) La liste de brevets peut comprendre un brevet qui est périmé en application de l’article 44 de la Loi sur les brevets — compte non tenu de l’article 46 de cette loi — et qui est mentionné dans un certificat de protection supplémentaire ayant pris effet.

(1.1) The patent list may include a patent whose term under section 44 of the Patent Act, without taking into account section 46 of that Act, has expired and that is set out in a certificate of supplementary protection that has taken effect.

(2) Est admissible à l’adjonction au registre tout brevet, inscrit sur une liste de brevets, qui se rattache à la présentation de drogue nouvelle, s’il contient, selon le cas :

(2) A patent on a patent list in relation to a new drug submission is eligible to be added to the register if the patent contains

a) une revendication de l’ingrédient médicinal, l’ingrédient médicinal ayant été approuvé par la délivrance d’un avis de conformité à l’égard de la présentation;

(a) a claim for the medicinal ingredient and the medicinal ingredient has been approved through the issuance of a notice of compliance in respect of the submission;

b) une revendication de la formulation contenant l’ingrédient médicinal, la formulation ayant été approuvée par la délivrance d’un avis de conformité à l’égard de la présentation;

(b) a claim for the formulation that contains the medicinal ingredient and the formulation has been approved through the issuance of a notice of compliance in respect of the submission;

c) une revendication de la forme posologique, la forme posologique ayant été approuvée par la délivrance d’un avis de conformité à l’égard de la présentation;

(c) a claim for the dosage form and the dosage form has been approved through the issuance of a notice of compliance in respect of the submission; or

d) une revendication de l’utilisation de l’ingrédient médicinal, l’utilisation ayant été approuvée par la délivrance d’un avis de conformité à l’égard de la présentation.

(d) a claim for the use of the medicinal ingredient, and the use has been approved through the issuance of a notice of compliance in respect of the submission.

(2.1) Les règles ci-après s’appliquent au moment de la détermination de l’admissibilité des brevets pour leur adjonction au registre aux termes du paragraphe (2) :

(2.1) The following rules apply when determining the eligibility of a patent to be added to the register under subsection (2):

a) pour l’application de l’alinéa (2)a), un brevet qui contient la revendication de l’ingrédient médicinal est admissible même si la présentation comprend, en plus de l’ingrédient médicinal revendiqué dans le brevet, d’autres ingrédients médicinaux;

(a) for the purposes of paragraph (2)(a), a patent that contains a claim for the medicinal ingredient is eligible even if the submission includes, in addition to the medicinal ingredient claimed in the patent, other medicinal ingredients;

b) pour l’application de l’alinéa (2)b), un brevet qui contient la revendication de la formulation est admissible si la présentation comprend les ingrédients non médicinaux précisés dans la revendication — si des ingrédients non médicinaux y sont précisés —, même si la présentation contient des ingrédients non médicinaux additionnels;

(b) for the purposes of paragraph (2)(b), a patent that contains a claim for the formulation is eligible if the submission includes the non-medicinal ingredients specified in the claim, if any are specified, even if the submission contains any additional non-medicinal ingredients; and

c) pour l’application de l’alinéa (2)d), un brevet qui contient la revendication de l’utilisation de l’ingrédient médicinal est admissible si la présentation comprend l’utilisation revendiquée dans le brevet, même si :

(c) for the purposes of paragraph (2)(d), a patent that contains a claim for the use of the medicinal ingredient is eligible if the submission includes the use claimed in the patent, even if

(i) la présentation comprend l’utilisation d’ingrédients médicinaux additionnels,

(i) the submission includes additional medicinal ingredients,

(ii) la présentation comprend d’autres utilisations,

(ii) the submission includes other additional uses of the medicinal ingredient, or

(iii) l’utilisation comprise dans la présentation requiert l’utilisation de l’ingrédient médicinal en conjonction avec une autre drogue.

(iii) the use that is included in the submission requires the use of the medicinal ingredient in combination with another drug.

(3) Est admissible à l’adjonction au registre tout brevet, inscrit sur une liste de brevets, qui se rattache au supplément à une présentation de drogue nouvelle visant une modification de la formulation, une modification de la forme posologique ou une modification de l’utilisation de l’ingrédient médicinal, s’il contient, selon le cas :

(3) A patent on a patent list in relation to a supplement to a new drug submission is eligible to be added to the register if the supplement is for a change in formulation, a change in dosage form or a change in use of the medicinal ingredient, and

a) dans le cas d’une modification de formulation, une revendication de la formulation modifiée, la formulation ayant été approuvée par la délivrance d’un avis de conformité à l’égard du supplément;

(a) in the case of a change in formulation, the patent contains a claim for the changed formulation that has been approved through the issuance of a notice of compliance in respect of the supplement;

b) dans le cas d’une modification de la forme posologique, une revendication de la forme posologique modifiée, la forme posologique ayant été approuvée par la délivrance d’un avis de conformité à l’égard du supplément;

(b) in the case of a change in dosage form, the patent contains a claim for the changed dosage form that has been approved through the issuance of a notice of compliance in respect of the supplement; or

c) dans le cas d’une modification d’utilisation de l’ingrédient médicinal, une revendication de l’utilisation modifiée de l’ingrédient médicinal, l’utilisation ayant été approuvée par la délivrance d’un avis de conformité à l’égard du supplément.

(c) in the case of a change in use of the medicinal ingredient, the patent contains a claim for the changed use of the medicinal ingredient that has been approved through the issuance of a notice of compliance in respect of the supplement.

(3.1) Est admissible à l’adjonction au registre, à l’égard d’une présentation de drogue nouvelle ou d’un supplément à une présentation de drogue nouvelle, tout certificat de protection supplémentaire si, à la fois :

(3.1) A certificate of supplementary protection is eligible to be added to the register in respect of a new drug submission or a supplement to a new drug submission if

a) le brevet mentionné dans le certificat de protection supplémentaire est inscrit au registre à l’égard de cette présentation ou de ce supplément;

(a) the patent that is set out in the certificate of supplementary protection is included on the register in respect of that submission or supplement; and

b) cette présentation ou ce supplément vise une drogue à l’égard de laquelle le certificat de protection supplémentaire confère des droits, facultés et privilèges visés par l’article 115 de la Loi sur les brevets.

(b) the submission or supplement relates to a drug with respect to which the certificate of supplementary protection grants rights, privileges and liberties referred to in section 115 of the Patent Act.

(4) La liste de brevets comprend :

(4) A patent list shall contain the following:

a) l’identification de la présentation de drogue nouvelle ou du supplément à la présentation de drogue nouvelle qui s’y rattachent;

(a) an identification of the new drug submission or the supplement to a new drug submission to which the list relates;

b) l’ingrédient médicinal, la marque nominative, la forme posologique, la concentration, la voie d’administration et l’utilisation prévus à la présentation ou au supplément qui s’y rattachent;

(b) the medicinal ingredient, brand name, dosage form, strength, route of administration and use set out in the new drug submission or the supplement to a new drug submission to which the list relates;

c) à l’égard de chaque brevet qui y est inscrit, le numéro de brevet, la date de dépôt de la demande de brevet au Canada, la date de délivrance de celui-ci et la date d’expiration du brevet aux termes des articles 44 ou 45 de la Loi sur les brevets;

(c) for each patent on the list, the patent number, the filing date of the patent application in Canada, the date of grant of the patent and the date on which the term limited for the duration of the patent will expire under section 44 or 45 of the Patent Act;

d) à l’égard de chaque brevet qui y est inscrit, une déclaration portant que la première personne qui a déposé la présentation de drogue nouvelle ou le supplément à une présentation de drogue nouvelle qui s’y rattache :

(d) for each patent on the list, a statement that the first person who filed the new drug submission or the supplement to a new drug submission to which the list relates

(i) soit en est le propriétaire,

(i) is the owner of the patent,

(ii) soit en détient la licence exclusive ou détient une telle licence à l’égard d’un certificat de protection supplémentaire qui mentionne ce brevet,

(ii) has an exclusive licence to the patent or to a certificate of supplementary protection in which that patent is set out, or

(iii) soit a obtenu le consentement du propriétaire pour l’inscrire sur la liste;

(iii) has obtained the consent of the owner of the patent to its inclusion on the list;

e) l’adresse au Canada de la première personne aux fins de signification de l’avis d’allégation visé à l’alinéa 5(3)a) ou les nom et adresse au Canada d’une autre personne qui peut en recevoir signification comme s’il s’agissait de la première personne elle-même;

(e) the address in Canada for service, on the first person, of a notice of allegation referred to in paragraph 5(3)(a) or the name and address in Canada of another person on whom service may be made with the same effect as if service were made on the first person; and

f) une attestation de la première personne portant que les renseignements fournis aux termes du présent paragraphe sont exacts et que chaque brevet qui y est inscrit est conforme aux conditions d’admissibilité prévues aux paragraphes (2) ou (3).

(f) a certification by the first person that the information submitted under this subsection is accurate and that each patent on the list meets the eligibility requirements of subsection (2) or (3).

(5) Sous réserve du paragraphe (6), la première personne qui présente une liste de brevets doit le faire au moment du dépôt de la présentation de drogue nouvelle ou du supplément à une présentation de drogue nouvelle qui s’y rattachent.

(5) Subject to subsection (6), a first person who submits a patent list must do so at the time the person files the new drug submission or the supplement to a new drug submission to which the patent list relates.

(6) La première personne peut, après la date de dépôt de la présentation de drogue nouvelle ou du supplément à une présentation de drogue nouvelle et dans les trente jours suivant la délivrance d’un brevet faite au titre d’une demande de brevet dont la date de dépôt au Canada est antérieure à celle de la présentation ou du supplément, présenter une liste de brevets, à l’égard de cette présentation ou de ce supplément, qui contient les renseignements visés au paragraphe (4).

(6) A first person may, after the date of filing of a new drug submission or a supplement to a new drug submission, and within 30 days after the issuance of a patent that was issued on the basis of an application that has a filing date in Canada that precedes the date of filing of the submission or supplement, submit a patent list, including the information referred to in subsection (4), in relation to the submission or supplement.

(7) La première personne qui a présenté une liste de brevets doit tenir à jour les renseignements y figurant, mais ne peut toutefois y ajouter de brevets.

(7) A first person who has submitted a patent list must keep the information on the list up to date but, in so doing, may not add a patent to the list.

(8) Le ministre inscrit sur la liste de brevets la date de dépôt et le numéro de la présentation de drogue nouvelle ou du supplément à une présentation de drogue nouvelle qui se rattache à la liste présentée.

(8) The Minister shall insert on the patent list the date of filing and submission number of the new drug submission or the supplement to a new drug submission in relation to which the list was submitted.

[…]

[…]

Droits d’action

Right of Action

6 (1) La première personne ou le propriétaire d’un brevet qui reçoit un avis d’allégation en application de l’alinéa 5(3)a) peut, au plus tard quarante-cinq jours après la date à laquelle la première personne a reçu signification de l’avis, intenter une action contre la seconde personne devant la Cour fédérale afin d’obtenir une déclaration portant que la fabrication, la construction, l’exploitation ou la vente d’une drogue, conformément à la présentation ou au supplément visé aux paragraphes 5(1) ou (2), contreferait tout brevet ou tout certificat de protection supplémentaire visé par une allégation faite dans cet avis.

6 (1) The first person or an owner of a patent who receives a notice of allegation referred to in paragraph 5(3)(a) may, within 45 days after the day on which the first person is served with the notice, bring an action against the second person in the Federal Court for a declaration that the making, constructing, using or selling of a drug in accordance with the submission or supplement referred to in subsection 5(1) or (2) would infringe any patent or certificate of supplementary protection that is the subject of an allegation set out in that notice.

[…]

[…]

6.07 (1) Lors de l’action intentée en vertu du paragraphe 6(1), la Cour fédérale peut, sur requête de la seconde personne, déclarer qu’un brevet ou un certificat de protection supplémentaire est inadmissible à l’inscription au registre.

6.07 (1) In an action brought under subsection 6(1), the Federal Court may, on the motion of the second person, declare that a patent or certificate of supplementary protection is ineligible for inclusion on the register.


Loi sur les délais et autres périodes (COVID-19), édictée suivant l’article 11 de la Loi concernant des mesures supplémentaires liées à la COVID-19, L. C. 2020, ch. 11

[…]

[…]

Objet

Purpose

5 (1) La présente loi a pour objet :

5 (1) The purpose of this Act is

a) de suspendre temporairement certains délais et de permettre, temporairement et d’une façon souple, la suspension et la prolongation d’autres délais afin d’éviter que des circonstances exceptionnelles découlant de la maladie à coronavirus 2019 (COVID-19) n’en rendent le respect difficile ou impossible;

(a) to temporarily suspend certain time limits and to temporarily authorize, in a flexible manner, the suspension or extension of other time limits in order to prevent any exceptional circumstances that may be produced by coronavirus disease 2019 (COVID-19) from making it difficult or impossible to meet those time limits; and

b) de permettre, temporairement et d’une façon souple, la prolongation d’autres périodes afin d’éviter que leur expiration n’entraîne des effets injustes ou indésirables en raison de ces circonstances exceptionnelles.

(b) to temporarily authorize, in a flexible manner, the extension of other periods in order to prevent any unfair or undesirable effects that may result from the expiry of those periods due to those exceptional circumstances.

[…]

[…]

Délais concernant les instances

Time Limits Related to Proceedings

Suspension

Suspensions

6 (1) Les délais ci-après prévus sous le régime d’une loi fédérale sont suspendus pour la période commençant le 13 mars 2020 et se terminant soit le 13 septembre 2020, soit à la date antérieure fixée par décret pris sur recommandation du ministre de la Justice :

6 (1) The following time limits are, if established by or under an Act of Parliament, suspended for the period that starts on March 13, 2020 and that ends on September 13, 2020 or on any earlier day fixed by order of the Governor in Council made on the recommendation of the Minister of Justice:

a) tout délai de prescription du droit d’introduire une instance devant une cour;

(a) any limitation or prescription period for commencing a proceeding before a court;

b) tout délai relatif à l’accomplissement d’un acte dans le cadre d’une instance devant une cour;

(b) any time limit in relation to something that is to be done in a proceeding before a court; and

c) tout délai dans lequel une demande visant à obtenir l’autorisation d’introduire une instance ou d’accomplir un acte dans le cadre d’une instance doit être présentée à une cour.

(c) any time limit within which an application for leave to commence a proceeding or to do something in relation to a proceeding is to be made to a court.

[…]

[…]

Autres délais et périodes

Other Time Limits and Periods

Arrêtés – lois et règlements

Ministerial orders — Acts and regulations

7 (1) Le ministre chargé de l’application d’une loi fédérale figurant dans la colonne 1 de l’annexe — ou d’une partie pertinente de cette loi — peut, par arrêté :

7 (1) The minister who is responsible for an Act of Parliament set out in column 1 of the schedule or a relevant portion of the Act may make an order

a) suspendre ou prolonger tout délai prévu sous le régime d’une disposition de cette loi figurant dans la colonne 2;

(a) suspending or extending a time limit that is established by or under any provision of the Act that is set out in column 2;

b) prolonger toute autre période prévue sous le régime d’une disposition de cette loi figurant dans la colonne 2;

(b) extending any other period that is established by or under any provision of the Act that is set out in column 2;

c) si un règlement figure dans la colonne 2 en regard de cette loi :

(c) if a regulation is set out in column 2 in respect of the Act,

(i) suspendre ou prolonger tout délai prévu sous le régime de ce règlement,

(i) suspending or extending a time limit that is established by or under that regulation, or

(ii) prolonger toute autre période prévue sous le régime de ce règlement;

(ii) extending any other period that is established by or under that regulation; or

d) prolonger la suspension ou la prolongation.

(d) extending a suspension or extension.

Arrêtés – règlements

Ministerial orders — regulations

(2) Le ministre chargé de l’application d’un règlement figurant dans la colonne 1 de l’annexe — ou d’une partie pertinente de ce règlement — peut, par arrêté :

(2) The minister who is responsible for a regulation set out in column 1 of the schedule or a relevant portion of the regulation may make an order

a) suspendre ou prolonger tout délai prévu sous le régime d’une disposition de ce règlement figurant dans la colonne 2;

(a) suspending or extending a time limit that is established by or under any provision of the regulation that is set out in column 2;

b) prolonger toute autre période prévue sous le régime d’une disposition de ce règlement figurant dans la colonne 2;

(b) extending any other period that is established by or under any provision of the regulation that is set out in column 2; or

c) prolonger la suspension ou la prolongation.

(c) extending a suspension or extension.

[…]

[…]

Contenu supplémentaire

Additional content

(6) L’arrêté pris en vertu des paragraphes (1) ou (2) peut prévoir :

(6) An order under subsection (1) or (2) may provide that

a) que la suspension ou la prolongation ne s’applique à l’égard d’une situation précisée dans l’arrêté que si une personne, une cour ou un organe précisé dans l’arrêté y consent;

(a) a suspension or extension does not apply in respect of any circumstance specified in the order without the consent of a person, court or body specified in the order;

b) que la suspension ou la prolongation s’applique à l’égard d’une situation précisée dans l’arrêté à moins qu’une personne, une cour ou un organe précisé dans l’arrêté n’en décide autrement;

(b) a suspension or extension applies in respect of any circumstance specified in the order unless a person, court or body specified in the order decides otherwise; or

c) qu’une personne, une cour ou un organe précisé dans l’arrêté peut modifier l’effet de l’arrêté en vue de son application à une situation précisée dans l’arrêté.

(c) a person, court or body specified in the order may vary the effects of the order in relation to any circumstance specified in the order.

Règlements

Regulations

(7) Le gouverneur en conseil peut, par règlement pris sur recommandation du ministre de la Justice, limiter ou assujettir à des conditions le pouvoir de prendre des arrêtés conféré par les paragraphes (1) ou (2).

(7) The Governor in Council may, on the recommendation of the Minister of Justice, make regulations restricting, or imposing conditions on, a power to make an order under subsection (1) or (2).


Loi sur les brevets, L.R.C. 1985, c. P-4

[…]

[…]

Règlements

Regulations

Divergences

Inconsistency or conflict

55.2 (5) Une disposition réglementaire prise sous le régime du présent article prévaut sur toute disposition législative ou réglementaire fédérale divergente.

55.2 (5) In the event of any inconsistency or conflict between
(a) this section or any regulations made under this section, and
(b) any Act of Parliament or any regulations made thereunder,
this section or the regulations made under this section shall prevail to the extent of the inconsistency or conflict.

[…]

[…]

Délai prorogé

Time period extended

78 (1) Le délai fixé sous le régime de la présente loi, relativement à toute affaire devant le Bureau des brevets, pour l’accomplissement d’un acte qui expire un jour réglementaire ou un jour désigné par le commissaire est prorogé jusqu’au premier jour suivant qui n’est ni réglementaire ni désigné par le commissaire.

78 (1) If a time period fixed under this Act, in respect of any business before the Patent Office, for doing anything ends on a prescribed day or a day that is designated by the Commissioner, that time period is extended to the next day that is not a prescribed day or a designated day.

Pouvoir de désigner un jour

Power to designate day

(2) Le commissaire peut, en raison de circonstances imprévues et s’il est convaincu qu’il est dans l’intérêt public de le faire, désigner un jour pour l’application du paragraphe (1) et, le cas échéant, il en informe le public sur le site Web de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada.

(2) The Commissioner may, on account of unforeseen circumstances and if the Commissioner is satisfied that it is in the public interest to do so, designate any day for the purposes of subsection (1). If a day is designated, the Commissioner shall inform the public of that fact on the website of the Canadian Intellectual Property Office.


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


Appel d’un jugement rendu par l’honorable juge Fothergill le 20 avril 2021, no de dossier T-1476-20

DOSSIER :

A-143-21

 

 

INTITULÉ :

MERCK CANADA INC. c. LE MINISTRE DE LA SANTÉ

 

 

lieu de l’audience :

Ottawa (Ontario)

 

DATE de l’audience :

le 19 OctobrE 2021

 

motifs du jugement :

LA JUGE GAUTHIER

 

y ont souscrit :

LE JUGE LOCKE

LE JUGE LEBLANC

 

DATE :

le 22 NOVEMbrE 2021

 

COMPARUTIONS

Julie Desrosiers

Jason Markwell

 

pour l’appelante

 

Kirk Shannon

Charles Maher

 

pour l’intimé

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

FASKEN MARTINEAU DUMOULIN LLP

Toronto ON

 

pour l’appelante

 

A. François Daigle

Sous-procureur général du Canada

pour l’intimé

 

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