Dossier : A-320-19
Référence : 2022 CAF 29
CORAM :
|
LA JUGE GAUTHIER
LE JUGE DE MONTIGNY
LE JUGE LEBLANC
|
||
|
ENTRE : |
|
|
|
MICHEL FAULLEM |
|
|
|
demandeur |
|
|
|
et
|
|
|
|
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA |
|
|
|
défendeur |
|
|
Audience tenue à Ottawa (Ontario), le 2 décembre 2021.
Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 15 février 2022.
MOTIFS DU JUGEMENT : |
LA JUGE GAUTHIER |
Y ONT SOUSCRIT : |
LE JUGE DE MONTIGNY LE JUGE LEBLANC |
Date : 20220215
Dossier : A-320-19
Référence : 2022 CAF 29
CORAM :
|
LA JUGE GAUTHIER
LE JUGE DE MONTIGNY
LE JUGE LEBLANC
|
||
|
ENTRE : |
|
|
|
MICHEL FAULLEM |
|
|
|
demandeur |
|
|
|
et |
|
|
|
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA |
|
|
|
défendeur |
|
|
MOTIFS DU JUGEMENT
LA JUGE GAUTHIER
[1] M. Faullem nous demande d’infirmer une décision de la Division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (la Division d’appel). Cette dernière a rejeté un appel à l’encontre de la décision de la Division générale du Tribunal confirmant que c’est à bon droit que la Commission de l’assurance-emploi du Canada (la Commission) a informé le demandeur que des sommes reçues rétroactivement de la Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) pour les semaines où il a reçu des prestations d’assurance-emploi constituaient une rémunération, et que conséquemment un montant de 26 945,00 $ de trop-payé devait être remboursé par le demandeur.
[2] La décision de la Division d’appel (Michel Faullem c. Commission de l’assurance-emploi du Canada (3 juillet 2019), AD-18-302) et de la Division générale (Michel Faullem c. Commission de l’assurance-emploi du Canada (28 mars 2018), GE-17-3246/GE-17-3248/GE-17-3249/GE-17-3250) portent sur quatre (4) dossiers (AD-18-302, AD-18-303, AD-18-304 et AD-18-306), visant quatre (4) périodes de prestations distinctes en vertu de la Loi sur l’assurance-emploi, L.C. 1996, ch. 23 (la Loi), commençant le 19 mai 2013 et se terminant le 11 décembre 2016.
[3] En 2013, l’emploi du demandeur a pris fin après qu’il ait été victime de harcèlement psychologique, tel que confirmé dans deux décisions du Tribunal administratif du travail québécois (TAT) datées respectivement du 3 juin et du 8 novembre 2016. Suite à la décision du 8 novembre, la CNESST lui a versé pour la période allant du 16 mai 2013 au 1er janvier 2017 un montant journalier à titre d’indemnité de remplacement de revenu.
[4] Après que le demandeur ait informé la Commission de la réception de ces sommes en 2017, celle-ci l’a avisé que cette information aurait un impact sur les prestations qu’il avait reçues, et qu’il y aurait un trop-payé à rembourser pour chacune des périodes de prestations qui serait confirmée par voie d’avis de dette.
[5] La position du demandeur, qui n’a pas d’avocat, a beaucoup évolué depuis son premier appel devant la Division générale. Il est évident qu’il a mis beaucoup de temps et d’efforts pour présenter son dossier. Il a pris des mois à peaufiner ses représentations écrites devant la Division d’appel (voir paragraphe 9 de la décision) qu’il a soumises par le biais de très nombreuses annexes qui se chevauchent et contiennent d’innombrables références difficiles à repérer dans les dossiers des parties devant nous.
[6] Bien que la Division d’appel lui ait expliqué que ses pouvoirs étaient limités aux questions décrites au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, L.C. 2005, ch. 34 (LMEDS) et que l’appel ne constituait pas une audience de novo, le demandeur s’attendait à une analyse détaillée de tous et chacun des points qu’il avait soulevés dans ses représentations écrites, et même ceux qui étaient implicites ou non apparents selon lui.
[7] Il est important, avant d’entreprendre l’analyse des questions en litige devant nous, de souligner comme nous l’avons fait à l’audience, qu’une demande de contrôle judiciaire est soumise à des normes de révision strictes, et qu’elle ne permet pas à notre Cour de substituer sa propre discrétion ni son interprétation des dispositions législatives à celle du décideur administratif auquel le législateur a confié cette tâche. Une demande de contrôle judiciaire n’est pas une action en dommages pour négligence ou même mauvaise conduite dans l’administration de la Loi.
[8] La complexité de la législation en matière sociale est une dure réalité pour les justiciables qui se représentent eux-mêmes. Mais le système de justice administrative à plusieurs paliers mis en place par le législateur dans la Loi ne peut être considéré comme une période d’apprentissage, permettant aux parties de parfaire l’analyse de leur dossier et de la législation de façon à pouvoir soulever à tout moment de nouvelles questions. Ce système ne peut davantage être utilisé pour obtenir des avis juridiques sur des questions qui pourraient se soulever plus tard ou pour expliquer des dispositions qui ne s’appliquent pas en l’espèce.
[9] Ceci dit, après un examen minutieux du présent dossier, et pour les motifs qui suivent, je conclus que la décision devant nous ne contient pas d’erreur révisable qui pourrait justifier l’intervention de notre Cour, sauf pour ce qui est d’un montant de 1 103,60 $, que le demandeur a remboursé à l’Agence du revenu du Canada (l’ARC) pour l’année fiscale 2016.
I. Les faits
[10] J’ai souligné quelques faits dans mon introduction, mais il est nécessaire d’ajouter d’autres détails pour mieux mettre en contexte les questions soulevées devant nous. Naturellement, je n’entends pas ici détailler tous les faits que le demandeur a inclus dans son mémoire de 40 pages, ou dans son dossier de demande.
[11] Je reproduis ici en partie le tableau de synthèse que l’on retrouve à la page 151 du dossier du demandeur afin d’indiquer les périodes de prestations en cause, la date où le demandeur a été informé de la répartition des sommes reçues, la date des avis de dettes et les montants de trop-payé calculés par la Commission.
Division d’appel
|
Date de :
|
Date d’admissi. CAEC
|
Date de demande initiale
|
Répartition des sommes par la CAEC
|
Fin de la période de 36 mois prévue à l’article 52
|
Date du relevé de l’avis de Dette
|
Somme calculée
|
||
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
En blanc
|
Début
|
Fin
|
En blanc
|
En blanc
|
En blanc
|
En blanc
|
En blanc
|
Lettre initiale
|
Avis de dette
|
AD-18-303
|
19-mai-13
|
29-sept-13
|
19-mai-13
|
21-mai-13
|
06-juin-17
|
19-mai-16
|
28-juin-17
|
7 515 $
|
7 515 $
|
AD-18-302
|
29-juin-14
|
29-mars-15
|
22-juin-14
|
25-juin-14
|
06-juin-17
|
22-juin-17
|
10-juin-17
|
5 460 $
|
5 460 $
|
AD-18-304
|
05-avr-15
|
23-août-15
|
05-avr-15
|
12-mars-15
|
06-juin-17
|
23-août-18
|
10-juin-17
|
5 929 $
|
5 929 $
|
AD-18-306
|
22-mai-16
|
11-déc-16
|
22-mai-16
|
16-juin-16
|
06-juin-17
|
|
03-juin-17
|
11 126 $
|
11 126 $
|
[12] Après avoir reçu les avis de dettes, le demandeur a demandé une révision à la Commission en vertu de l’article 112 de la Loi. Ce sont les décisions confirmant les montants à rembourser que le demandeur a contesté devant la Division générale. Dans la décision de la Commission du 1er septembre 2017 portant sur la période 4 (AD-18-306 ci-dessus), le trop payé est un montant de 8 041.00 $, soit le montant de 11 126,00 $ indiqué dans le tableau ci-dessus moins un ajustement fiscal d’un montant de 3 085,00 $ perçu par l’ARC (page 472 du dossier du défendeur).
[13] Tel qu’il appert de la décision de la Division générale datée du 28 mars 2018, ce que le demandeur remettait essentiellement en question, c’était la justesse des calculs et des tableaux qu’on lui avait remis, et la piètre qualité du service reçu de la part des agents de la Commission. Cela aurait grandement contribué à sa difficulté à comprendre la situation et les montants qui lui sont réclamés, surtout lorsque l’on considère qu’à l’époque, il était en cours d’évaluation psychologique.
[14] Je note aussi que la Division générale a précisé que si des ajustements aux montants déclarés par le demandeur à titre de salaire dans le passé étaient nécessaires, il fallait contacter la Commission directement. De même, toutes questions quant à l’impact des retenues d’impôt, la possibilité de se faire rembourser l’impôt sur le revenu retenu sur les prestations d’assurance-emploi, et toute question relative à un ajustement fiscal pour l’année 2016 devraient être soumises à l’ARC, puisqu’elles ne sont pas de la compétence du Tribunal.
[15] La question relative à l’ajustement fiscal mentionnée ci-dessus était de déterminer pourquoi la Commission n’avait pas déduit le plein montant de 4 188,00 $ effectivement perçu par l’ARC plutôt que seulement le montant de 3 085,00 $ apparemment reçu par la Commission.
[16] Devant la Division d’appel, le débat a pris de l’ampleur. Je traiterai plus en détails des conclusions pertinentes de la Division générale et de la Division d’appel dans mon analyse afin d’éviter des répétitions.
[17] Les dispositions législatives les plus pertinentes sont reproduites à l’Annexe des présents motifs.
II. Questions en litige
[18] La Division d’appel a résumé ce qu’elle considérait être les sept (7) principales questions soulevées devant elle comme suit :
Question en litige no 1 : Est-ce que la division générale a erré en concluant que les sommes reçues par le prestataire à titre d’indemnité de remplacement de revenu de la CNESST constituaient une rémunération aux termes de l’article 35(2)(b) du Règlement sur l’AE et que celle-ci avait été effectuée conformément à l’article 36(12) (d) du Règlement sur l’AE?
Question en litige no 2 : Est-ce que la division générale a erré en ne tenant pas compte du traitement réservé au prestataire par la Commission?
Question en litige no 3 : Est-ce que la division générale a erré en ne tenant pas compte des erreurs de calculs dans la répartition de la rémunération du prestataire?
Question en litige no 4 : Est-ce que la division générale a erré en ignorant le remboursement des prestations par le prestataire par l’entremise d’un ajustement fiscal pour la période de mai à décembre 2016?
Question en litige no 5 : Est-ce que la division générale a erré en ignorant l’article 145(2) de la Loi sur l’AE?
Question en litige no 6 : Est-ce que la division générale a erré en n’appliquant pas le délai de prescription de 36 mois prévus à l’article 52 de la Loi sur l’AE? Ou subsidiairement, l’article 46.01 de la Loi sur l’AE?
Question en litige no 7 : Est-ce que la division générale a erré en ne procédant pas à la défalcation de la dette du prestataire?
[19] Le demandeur a repris ces questions devant cette Cour (sauf la question 5 qu’il a abandonnée) puisqu’il soutient que les réponses de la Division d’appel sont toutes déraisonnables (mémoire du demandeur au para. 63). Il argue que la Division d’appel n’a pas suffisamment justifié sa décision à plusieurs égards, particulièrement quant à la question 6. Pour faciliter la compréhension, j’utilise la numérotation des questions devant la Division d’appel dans mon analyse.
[20] Le demandeur ajoute aussi que la Division d’appel aurait dû traiter de l’article 56.1 du Règlement sur l’assurance-emploi, DORS/96-332 (le Règlement) qui prévoit certaines limites au pouvoir de la Commission d’imposer des pénalités ou des intérêts à un prestataire. Selon lui ceci était nécessaire, puisqu’il soupçonne que le montant de 1 103,60 $ (4 188,00 $ - 3 085,00 $) qui demeure toujours injustifié, a probablement été perçu à titre d’intérêt ou d’une pénalité (voir tableau récapitulatif à la page 16 du mémoire du demandeur et paragraphe 185 du mémoire) et qu’elle ne pouvait le faire à ce stade-ci.
[21] Le demandeur a présenté de nouveaux arguments devant nous comme l’application possible du sous-alinéa 35(10)a)(ii) du Règlement (tableau récapitulatif mentionné ci-dessus et paragraphe 185 du mémoire). Selon lui, cette disposition était pertinente car elle permet de déduire ses dépenses si les indemnités reçues de la CNESST constituent une rémunération. Selon moi, il n’y a pas lieu d’exercer notre discrétion de répondre à ces nouveaux arguments dans le cadre de cette demande de contrôle judiciaire puisqu’il n’y a pas ici de circonstances exceptionnelles qui justifient une exception au principe général applicable et compte tenu de l’absence de preuve au dossier qui permettrait d’appliquer le sous-alinéa 35 (10)a)(ii) ou de déterminer, tel qu’il le demande aussi, la nature des coûts administratifs au sens de l’article 46.01 de la Loi (Alberta (Information and Privacy Commissioner) c. Alberta Teachers’ Association, 2011 CSC 61, [2011] A.C.S. no 61, cité dans Merck Canada Inc. c. Canada (Santé), 2021 CAF 224, [2021] A.C.F. no 1906 au para. 63; Tsleil-Waututh Nation c. Canada (Office nationale de l'énergie), 2016 CAF 219 au para.78).
[22] Au risque de me répéter, notre rôle dans le cadre de cette demande de contrôle judiciaire est limité. La norme de la décision raisonnable s’applique à toutes les questions soulevées devant nous, y compris aux erreurs de droit alléguées (interprétation de la Loi et du Règlement). En effet, même si le demandeur utilise parfois des expressions comme « manquement au principe de justice naturelle »
ou « violation »
de ce principe, ce qu’il conteste vraiment c’est l’impact de l’interprétation adoptée par la Division d’appel (voir par exemple l’annexe 16 intitulée « Justice naturelle »
soumise à la Division d’appel, pages 124-126 du dossier du demandeur, les pages 979, 980, 990, 1031, 1555, 1556, 1572 et 1573 du dossier du défendeur, paragraphe 59 du mémoire du demandeur). Il n’y a pas devant nous quelque situation qui pourrait constituer de près ou de loin un manquement à l’équité procédurale ou aux principes de justice naturelle aux termes du paragraphe 58(1) de la LMEDS.
III. Analyse
[23] Je commence en précisant que le principe de transparence et de justification n’exige pas que le décideur écrive une thèse sur chaque question soulevée par une partie et traite de tous et chacun des arguments qu’elle met de l’avant pour appuyer une position. Je n’ai donc pas l’intention d’essayer de résumer les longues représentations faites par le demandeur, qui ne sont pas toujours des plus limpides. Il faut dire que les dispositions législatives applicables ne pêchent pas par leur clarté. J’ai donc lu et relu les arguments présentés par le demandeur à plusieurs reprises pour m’assurer de les comprendre et d’en saisir le sens. Je ne traite donc que de ce qu’il me semble essentiel de commenter. Tout autre argument ou proposition doit être considéré comme ayant été rejeté parce que non fondé.
Question 1 : Les sommes reçues de la CNESST constituent-elles une rémunération sujette à répartition?
[24] Tant la Division générale que la Division d’appel ont conclu que les sommes reçues de la CNESST étaient une rémunération aux fins de l’application de l’article 45 de la Loi qui traite de remboursement par un prestataire de versements de prestations excédentaires.
[25] Dans sa décision aux paragraphes 29 à 35, la Division générale examine d’abord la nature des sommes reçues par le demandeur. Outre l’application des articles 35 et 36 du Règlement, la Division générale a considéré la jurisprudence indiquant qu’une rémunération au sens de la Loi comprend tout gain ou contrepartie reçu pour le travail accompli. Pour être considéré comme une rémunération, le revenu doit provenir d’un emploi ou il doit exister un lien suffisant entre l’emploi du prestataire et la somme reçue (Canada (Procureure générale) c. Roch, 2003 CAF 356, [2003] A.C.F. no. 1429 (Roch)).
[26] La Division générale examine ensuite la preuve au dossier pour déterminer la nature des sommes reçues et réfère aux lettres émises par la CNESST qui indiquent clairement que les montants en litige versés au demandeur de manière rétroactive l’ont été à titre d’indemnité de remplacement de revenu pour la période du 16 mai 2013 jusqu’au 1er janvier 2017. Elle note ensuite que conformément à l’alinéa 35(2)b) du Règlement, les indemnités de cette nature qu’un prestataire reçoit pour un accident de travail ou une maladie professionnelle constituent une rémunération. S’appuyant sur une jurisprudence comportant des faits similaires, la Division générale conclut que les sommes reçues en l’espèce constituent une rémunération à être répartie conformément aux exigences règlementaires.
[27] Dans sa décision, la Division d’appel confirme d’abord que la preuve au dossier, soit les lettres de la CNESST, permettait à la Division générale de conclure que les montants en litige ont été versés à titre d’indemnité de remplacement de revenu. Elle confirme ensuite que la décision de la Division générale à l’effet qu’il s’agit d’une rémunération sujette à répartition est conforme à la réglementation et est appuyée par une jurisprudence constante.
[28] Le demandeur ne conteste pas la validité de l’alinéa 35(2)b) du Règlement qui établit la rémunération aux fins des bénéfices de prestations, particulièrement quant à l’application des articles 45 et 46 de la Loi.
[29] Il conteste plutôt son application en l’espèce en se fondant sur deux propositions. Premièrement, selon lui, il n’y a pas de lien suffisant entre ces sommes et son emploi, tel que requis dans Roch (voir a contrario page 991, bas de la page, du dossier du défendeur). Selon lui, son cas est unique. Il ajoute que cette question n’a jamais été déterminée par une cour supérieure.
[30] Deuxièmement, le demandeur indique que cette disposition du Règlement a été mal interprétée à cause d’une mauvaise conception de l’article 45 auquel elle réfère, et qui ne s’applique pas à son cas selon lui.
[31] À l’audience devant nous, le demandeur a rajouté que la notion de revenu intégral n’est pas la même chose que celle de rémunération au sens de la Loi.
[32] Dans Roch, notre Cour a clairement indiqué aux paragraphes 35 et 38 que la Commission pouvait ajouter par voie de règlement, à la définition usuelle du mot « rémunération »
(“earnings”
en anglais), des gains ou revenus qui, en réalité, n’en sont pas mais qui, par certains côtés, y ressemblent. C’est exactement ce que la Commission a fait à l’alinéa 35(2)b).
[33] La question du lien avec l’emploi ne sert qu’à délimiter le pouvoir règlementaire de la Commission énoncé à l’article 54 de la Loi, et à s’assurer que des revenus, comme des allocations familiales par exemple, qui n’ont aucun lien avec un emploi, ne soient pas inclus par règlement dans le concept de rémunération aux fins des prestations. Elle sert aussi à interpréter la règlementation lorsque son application à une situation donnée n’est pas claire comme dans Roch. Il demeure qu’en l’absence d’une contestation de la validité d’une disposition claire, celle-ci doit être appliquée par le Tribunal.
[34] En l’espèce, comme cela a été noté dans Rock, notre Cour avait déjà indiqué, dès 1986, dans Côté c. Canada (Commission de l'emploi et de l'immigration) (1986), 69 N.R. 126 (C.A.F.), [1986] A.C.F. no 447 (C.A.F.) (QL), que des indemnités de remplacement de revenu reçues suite à un accident de travail ou à une maladie professionnelle étaient clairement des revenus qui pourraient valablement être assimilés à une rémunération par règlement, puisque le lien entre un tel revenu et l’emploi passé ou présent était évident.
[35] Il était donc raisonnable pour la Division d’appel de conclure que la Division générale n’avait pas erré en appliquant le texte clair de l’alinéa 35(2)b) du Règlement à la situation du demandeur puisque les indemnités reçues par ce dernier étaient en lien avec la lésion ou maladie professionnelle qu’il avait subie dans le cadre de son emploi (voir la décision du TAT datée du 8 novembre 2016).
[36] La détermination quant à la nature des sommes reçues est, comme l’indique la Division d’appel, appuyée par la preuve au dossier devant la Division générale. Cette détermination quant à cette question de fait est donc raisonnable.
[37] À cet égard, il convient de noter comme l’a fait le défendeur, que le résumé de l’étude d’impact de la règlementation, Règlement sur l’assurance-chômage — modification (Résumé de l’étude d’impact de la réglementation), Gazette du Canada, partie II (1947-1997), vol. 123, no 7 (29 mars 1989) à la p.1918 (le RÉIR), qui accompagnait la première mouture de ce qui est devenu l’alinéa 35(2)b) du Règlement, réfère spécifiquement à des indemnités de remplacement de revenu reçues en vertu de législation provinciale comme celle qui existait alors au Québec, et ce, afin d’éviter une double indemnisation pendant les périodes de prestation.
[38] Je note aussi que le fait qu’un prestataire doive contester le rejet de sa demande d’indemnisation auprès d’organismes comme la CNESST (à qui les compétences de la CSST ont été dévolues) par voie de demande de révision et d’appel n’est pas unique non plus. Par exemple, dans Commission de l’assurance-emploi du Canada c. A.D., 2017 TSSDAAE 179 (A.D.), le prestataire avait dû faire de tels efforts et attendre deux ans avant d’obtenir rétroactivement le paiement d’indemnités de remplacement de revenu suite à un accident de travail. Je note d’ailleurs à cet égard que la décision de Lacasse c. Commission de l’assurance-emploi du Canada, 1998 CanLII 7512, [1998] A.C.F. no 319 (C.A.F.), appliquée dans A.D. avait déjà eu à traiter d’indemnités de remplacement de revenu reçues sur une longue période en vertu de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, confirmant que celles-ci étaient sujettes à répartition.
[39] Je traiterai de la question de savoir si l’alinéa 35(2)b) s’applique ou non, compte tenu de l’interprétation proposée par le demandeur de l’article 45, sous la question 6. Mais comme je l’expliquerai plus loin, il n’y a rien qui me permette de conclure que l’interprétation de l’alinéa 35(2)b) adoptée par la Division d’appel est déraisonnable. De plus, bien que brefs, les motifs à cet égard sont suffisants pour comprendre son raisonnement.
[40] Avant de passer à la deuxième question, il est opportun de mentionner que le demandeur n’a présenté aucune preuve à quelque décideur administratif impliqué dans ses dossiers à ce jour appuyant sa position qu’il avait droit à des déductions pour le temps qu’il a consacré, et les dépenses qu’il a engagées, pour obtenir des décisions du TAT afin de forcer la CNESST à lui verser les indemnités à titre de remplacement de revenu. Comme je l’ai dit, l’argument fondé sur le paragraphe 35(10) du Règlement est nouveau. Le demandeur soumet qu’il appartenait à la Commission et aux autres décideurs administratifs de soulever cette question eux-mêmes. Je ne suis pas d’accord.
[41] La Commission n’a pas inclus dans la rémunération sujette à répartition le montant de 2 000,00 $ reçu de l’ancien employeur du demandeur a titre de dédommagement pour ses frais d’avocats (seconde entente de novembre 2016, à la page 917 du dossier du défendeur). La Commission ne pouvait savoir que cette somme ne couvrait pas les frais effectivement encourus. Bien qu’il soit logique de penser que les frais juridiques encourus pour obtenir les indemnités de remplacement de revenu constituent des dépenses pour gagner ce revenu, tel n’est pas le cas en ce qui concerne un dédommagement pour le temps que le prestataire a lui-même investi. Il appert de l’avis de demande de contrôle judiciaire que le demandeur était bien au fait de l’existence du Guide de la détermination de l’admissibilité (voir page 8 de l’avis de demande). Ce guide publié par le gouvernement et accessible en ligne, traite des déductions possibles de dépenses, y inclus certains frais juridiques dans le calcul de la rémunération; c’est le demandeur qui devait fournir la preuve qu’il avait droit à une déduction.
[42] Compte tenu de la norme de contrôle qui s’applique à l’interprétation du paragraphe 35(10), cette Cour doit s’abstenir de donner sa propre interprétation puisque cette disposition n’a pu être considérée par les décideurs administratifs à qui le législateur a donné ce mandat.
Question 2 : La compétence du Tribunal à l’égard du comportement des agents de la Commission
[43] La Division générale indique que les difficultés créées par les erreurs cléricales et les tableaux complexes fournis au demandeur ont pu avoir un impact sur sa compréhension des sommes en jeu et peuvent avoir été une source de frustration pour lui. Elle indique toutefois qu’elle n’est pas en mesure d’apporter des correctifs à cette situation ou à l’égard du mécontentement de l’appelant relativement à la qualité générale du service reçu de la part des agents de la Commission. Elle souligne aussi que la Commission ne semble pas avoir mis la bonne foi du demandeur en doute puisqu’elle n’a pas imposé de pénalité.
[44] La Division d’appel a confirmé que la Division générale n’avait pas compétence pour remédier aux nombreux reproches adressés à la Commission quant à la façon dont le demandeur a été traité (comme un fraudeur, selon lui) par les agents de la Commission.
[45] Le demandeur voulait que ces instances interviennent pour sanctionner le comportement des agents de la Commission à son égard. Il note le manque d’effort raisonnable des agents de la Commission pour répondre à ses questions, les erreurs de calculs qui ont créé une confusion inutile, le fait qu’ils n’ont pas cherché à appliquer les dispositions du paragraphe 35(10) du Règlement et qu’ils l’ont traité comme un fraudeur, malgré sa bonne foi, sa coopération constante et le fait qu’il était une personne vulnérable.
[46] Tel que mentionné dès le départ, la compétence de la Division d’appel est limitée à ce qui est prévue au paragraphe 58(1) de la LMEDS; ni elle ni la Division générale n’ont compétence pour sanctionner un comportement inapproprié des agents de la Commission. Ces décideurs n’ont pas davantage compétence pour accorder des dommages-intérêts ou encore pour défalquer des sommes à titre punitif, tel que je l’expliquerai dans mon analyse de la question 7.
[47] La Division d’appel n’a donc commis aucune erreur révisable et de la même façon, notre Cour n’a pas compétence dans le cadre d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision de la Division d’appel pour accorder les sanctions demandées.
[48] Le manque d’imputabilité allégué par le demandeur est une question qu’il peut porter à l’attention des autorités gouvernementales ou politiques qui ont le pouvoir d’effectuer des changements au niveau de la fonction publique.
[49] Il est opportun de noter toutefois que les outils mis à la disposition des citoyens tel que le Guide gagneraient à être mis à jour et à inclure plus de détails sur des situations comme celle du demandeur.
[50] De plus, même si les arguments des prestataires ne sont pas toujours clairs, les représentants de la Commission devraient faire un plus grand effort que celui qui a été fait en l’instance pour faciliter la compréhension du dossier. Comme je l’indique en traitant de la question 4, et malgré la recommandation claire de la Division d’appel (voir paragraphe 56 ci-dessous), ni la Commission ni ses avocats n’ont fait d’efforts raisonnables avant le 2 février 2022 pour clarifier comment une somme de 1 103,60 $ avait été imputée. Cette situation n’est certes pas acceptable. Je note aussi en passant que la Commission et ses représentants continuent de s’appuyer sur des décisions jurisprudentielles sans vraiment s’assurer de leur pertinence, probablement parce que le Guide n’est pas toujours à jour. Par exemple, devant la Division d’appel, la Commission, dans ses très brèves représentations écrites, s’appuyait sur une décision décrite comme émanant de « la Cour d’appel fédérale Claveau c Canada (PG), # T-1268-07, au soutien de sa position qu’il n’y a aucune limite de temps en vertu de l’article 45 comparativement à l’article 52 de la Loi »
(voir dossier du défendeur p. 787). Pourtant la Division d’appel avait déjà indiqué clairement en 2015 (M.L. c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2015 TSSDA 587 au para. 20-21) que cette décision (effectivement rendue par la Cour fédérale, 2008 FC 672) ne traitait pas de cette question et que c’était la décision de notre Cour dans Chartier qui était pertinente.
Question 3 : La répartition de la rémunération / erreurs de calcul
[51] La Division générale a examiné la répartition et les calculs faits par la Commission. Compte tenu des arguments présentés par le demandeur, la Division générale dit avoir entrepris de vérifier pour chacune des périodes de prestation en cause le travail de répartition des montants en litige. Elle indique qu’elle ne fera pas mention de certains éléments soulevés par l’appelant ou d’erreurs cléricales qu’elle a identifiées qui n’ont pas d’impact sur la question devant elle.
[52] Pour les périodes débutant le 19 mai 2013 et le 5 avril 2015, la Division générale n’a relevé aucune erreur relativement à la répartition des montants reçus qui pourrait avoir un impact sur le trop-payé dû par l’appelant. Quant aux périodes débutant le 25 juin 2014 et le 22 mai 2016, la Division générale note plusieurs erreurs qu’elle qualifie de cléricales, puisque les montants qui semblent avoir été inscrits aux mauvais endroits ou ajoutés de manière erronée dans le tableau, n’ont aucun impact sur les calculs refaits par la Division générale quant au montant total du trop-payé pour chaque telle période de prestation (Motifs aux para. 40 à 41, 43).
[53] La Division générale traite ensuite de la question de l’arrondissement des sommes reçues de la CNESST soulevée par l’appelant, et indique que le paragraphe 36(20) du Règlement prévoit que les sommes assujetties à la répartition doivent être arrondies au dollar supérieur si elles comportent une fraction d’un dollar, égale ou supérieure à 50 cents, et au dollar inférieur si elles comportent une fraction en moins. Elle conclut qu’il n’y a donc aucune erreur révisable à cet égard.
[54] Dans sa décision, la Division d’appel rappelle comment les calculs sont faits et note qu’en ce qui concerne les prestations de maladie (période 1), 100% des sommes reçues doivent être déduites. Je comprends ici que comme les indemnités payées par la CNESST en l’espèce excèdent le montant des prestations reçues par le demandeur, le trop-payé ne nécessite aucun calcul et toutes les prestations reçues de la Commission doivent être remboursées.
[55] Après avoir refait les calculs, la Division d’appel confirme qu’elle ne peut trouver aucune erreur qui aurait pour effet de changer le montant établi du trop-payé pour chacune des périodes.
[56] Traitant du montant de 4 188,60 $ remboursé par le demandeur à l’ARC en mai 2016, la Division d’appel demande à la Commission de justifier pourquoi seulement 3 085,00 $ ont été déduits du trop-payé exigé, soit la somme que la Commission dit avoir reçu de l’ARC. Elle recommande qu’un état de compte précis et détaillé soit remis au demandeur dans les 30 jours de sa décision.
[57] Le demandeur argue que certains calculs demeurent incompréhensibles pour lui. Il semble qu’il ne comprend toujours pas pourquoi les calculs quant à la période 1 ne sont pas semblables à ceux dans les tableaux s’appliquant aux autres périodes. Il veut plus d’explications quant aux semaines de carence pour lesquelles aucun trop-payé n’est réclamé puisqu’aucune prestation ne lui avait été versée par la Commission. Il ne comprend pas non plus comment les erreurs décrites aux paragraphes 40, 41 et 43 des motifs de la Division générale peuvent ne pas avoir eu d’impact sur le total du trop-payé pour les périodes concernées.
[58] Toutefois, il ne fournit dans son mémoire aucune précision nous permettant de déterminer que la Division d’appel a commis une erreur révisable en concluant sur la base des tableaux corrigés suite aux commentaires de la Division générale qu’effectivement, le total du trop-payé pour chaque période n’était pas erroné.
[59] Même si le demandeur se représente lui-même, il a le fardeau de nous convaincre que la Division d’appel a commis une erreur révisable. Il ne l’a pas fait.
[60] Quant aux calculs pour la période 1, comme je l’ai déjà indiqué au paragraphe 54 ci-dessus, il appert, tant de la décision de la Commission qui traite de cette période, que du paragraphe 27 des motifs de la Division d’appel, que les prestations de maladie (seules payées durant cette période), sont remboursables à 100% puisque les indemnités reçues à titre de remplacement de revenu excèdent le montant des prestations reçues. Aucun calcul n’est donc nécessaire. Avec respect, je ne vois pas en quoi cette situation était compliquée. Les montants répartis sur les semaines de carence ne peuvent avoir d’impact sur les montants réclamés pour cette période puisqu’aucune prestation n’a été payée et n’était payable.
[61] Pour ce qui est de l’impact des indemnités reçues de la CNESST réparties sur d’autres périodes qui incluent des semaines de carence, les règles appliquées par la Commission sont expliquées dans ses décisions suite à la demande de révision (pages 453 et 472 du dossier du défendeur et paragraphe 44 de la décision de la Division générale). Le demandeur n’a pas soulevé d’erreur a cet égard et ce n’est pas le rôle de notre Cour de refaire les calculs de la Commission.
[62] Finalement, le demandeur suggère que les périodes 1 et 2 devraient être traitées comme une seule et même période. Comme je l’ai mentionné, chaque période a fait l’objet d’une demande de révision distincte devant la Commission et d’un appel distinct devant le Tribunal même s’ils ont été entendus ensemble. Je ne peux donc considérer un tel argument à ce stade-ci, dont le but ultime est simplement de permettre au demandeur d’arguer que l’article 52, qui proscrit tout nouvel examen d’une demande de prestations au-delà d’une période de 36 mois, s’applique aussi à la période 2.
[63] Je conclus quant à cette question que le demandeur n’a pas établi que la Division d’appel a commis une erreur qui justifierait notre intervention. Toutefois, comme je l’ai mentionné plus haut, je traiterai de la question du remboursement payé à l’ARC sous la question 4.
Question 4 : Le Tribunal a-t-il erré en ignorant le remboursement partiel du trop-payé par l’entremise d’un ajustement fiscal pour la période de mai à décembre 2016?
[64] La Division générale ne traite pas de cette question qu’elle considère hors de sa compétence (voir paragraphes 14 et15 ci-dessus). La Division d’appel a confirmé qu’elle n’avait pas la compétence en la matière mais a recommandé qu’une explication détaillée soit fournie au demandeur. Je comprends de ceci qu’elle ne pouvait élucider cette question en se fondant sur les documents devant elle.
[65] Devant la Division d’appel, la Commission avait plaidé que l’article 145 que l’on retrouve dans la partie VII de la Loi ne s’appliquait pas, car le demandeur ne travaillait pas (et ce malgré l’avis de cotisation au dossier). Selon elle, toute question ayant trait au remboursement effectué par le demandeur à l’ARC n’était donc pas de la compétence du Tribunal, et le prestataire devait s’adresser à l’ARC pour comprendre pourquoi on avait déduit seulement 3 085,00 $ plutôt que 4 188,60 $ à titre de trop-payé réclamé pour cette période. La Division d’appel a conclu que même si elle n’avait pas compétence pour régler cette question, il demeurait important que la Commission donne une explication détaillée au prestataire à cet égard.
[66] Malheureusement, il semble que la Commission a choisi de reproduire laconiquement les informations déjà fournies au demandeur, lesquelles n’expliquaient en rien le sort du montant de 1 103,60 $ perçu par l’ARC. Au surplus, ces explications contenaient encore les erreurs notées par la Division générale pour les semaines du 5 et du 12 juin 2016.
[67] Bien que l’exercice par l’ARC de son pouvoir en vertu de l’article 145 de la Loi soit soumis à la compétence exclusive de la Cour canadienne de l’impôt, le législateur a clairement choisi d’éviter aux prestataires d’avoir à demander un remboursement de l’ARC lorsque l’article 45 s’appliquait.
[68] En effet, aux termes de l’article 45 de la Loi, seuls les versements de prestations excédentaires tels que définis dans la Loi doivent être remboursés. À l’article 2, cette expression exclut les sommes perçues par l’ARC en vertu de l’article 145 de la Loi (Partie VII). À cet égard, le Tribunal avait donc compétence pour s’assurer que la Commission n’exigeait que le montant du versement de prestations excédentaires, tel que défini dans la Loi. La Commission devait déduire les montants perçus en vertu de l’article 145 pour calculer le montant de la créance en vertu de l’article 45.
[69] La position de la Commission quant à la non-application de l’article 145 n’a pas été corrigée ni expliquée devant nous à l’audience. Ce n’est que suite à une directive de la Cour visant à clarifier en vertu de quel autre pouvoir l’ARC pouvait réclamer un remboursement avant même qu’un avis de dette soit expédié, que la Commission et ses procureurs se sont véritablement penchés sur la question et ont finalement tenté d’élucider le sort du montant de 1 103,60 $.
[70] Je note ici que l’absence d’effort pour élucider cette question a eu d’autres impacts, puisque qu’il semble que c’est à cause d’informations erronées reçues d’un agent de la Commission que le demandeur s’est mis à soupçonner que la Commission lui avait imposé une pénalité ou des intérêts en vertu de l’article 56.1 du Règlement. Cela l’a amené à arguer que la Division générale avait refusé d’exercer sa juridiction à l’égard de cette « erreur »
, et à demander à cette Cour d’interpréter cette disposition.
[71] Après avoir revu le dossier et compte tenu que notre rôle n’est pas de spéculer ni de fournir une interprétation législative en l’absence de faits précis la justifiant, je n’entendais pas traiter de l’article 56.1. Il reste que le manque de transparence de la Commission a causé des délais et une perte de temps tant au demandeur qu’à la Cour.
[72] Ceci dit, je comprends maintenant des représentations additionnelles du défendeur contenues dans sa lettre du 2 février 2022 qu’effectivement, c’est bien en vertu de l’article 145 que l’ARC a perçu le montant de 4 188,60 $ du demandeur, et ce, sur la base d’un T4E émis par la Commission pour l’année fiscale 2016. Rien n’indique qu’un T4E amendé a été émis par la suite. Lorsque le remboursement a été perçu par l’ARC, la Commission n’avait pas encore calculé l’impact des indemnités de la CNESST payées en 2017 pour les semaines des prestations versées durant l’année fiscale 2016. En l’absence de plus d’explications et de preuve, le montant perçu par l’ARC devait être déduit.
[73] Le défendeur explique maintenant qu’après la répartition de juin 2016, le demandeur restait éligible à des prestations d’assurance-emploi de 3 678,00 $ en 2016 (ce montant n’apparait pas dans les tableaux produits devant la Division d’appel). Il ajoute que l’ARC avait donc le droit de percevoir 30% de cette somme en vertu de l’article 145, soit 1 103,40 $. Selon le défendeur, cette somme n’avait donc pas à être déduite pour établir le versement des prestations excédentaires pour cette période.
[74] De la même manière que le demandeur ne peut nous demander de réécrire l’histoire dans ces dossiers, le défendeur ne peut pas maintenant tenter de justifier une position qu’il n’a jamais avancée jusqu’ici, surtout lorsqu’il confirme lui-même que le document justificatif n’était pas devant le Tribunal. Comme je l’ai dit, la Division générale et la Division d’appel avaient compétence pour s’assurer que le calcul du versement des prestations excédentaires prévues à l’article 45 était fait selon les règles. La question n’était pas de savoir si l’ARC avait bien exercé son pouvoir. Elle n’était pas non plus de déduire simplement ce que la Commission avait reçu de l’ARC en juin 2017 (Dossier du défendeur p. 319), mais bien de déduire ce qui a été perçu du demandeur en vertu de la Partie VII de la Loi.
[75] Compte tenu de la preuve au dossier qui indiquait clairement le montant perçu en vertu de la Partie VII de la Loi, je conclus que la décision de la Division d’appel à l’égard de cette question est déraisonnable. Elle avait compétence pour examiner cette question.
[76] Au regard de la preuve et de l’absence d’explications de la Commission devant la Division d’appel, celle-ci ne pouvait que conclure que le plein montant 4 188,60 $ devait être exclu du calcul pour la période 4. Dans les circonstances très particulières de l’espèce, y compris le temps écoulé et le fait qu’il n’y a aucune autre erreur révisable dans ces dossiers, il n’y a pas lieu de renvoyer le dossier à la Division d’appel; il y a plutôt lieu de rendre la décision que la Division d’appel aurait dû rendre sur cette question (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration c Vavilov, 2019 CSC 65 au para.142).
Question 6 : L’application des articles 45 et 52, et subsidiairement de l’article 46.01 de la Loi
[77] La Division générale ne traite pas des questions soulevées pour la première fois devant la Division d’appel quant à l’application des articles 52 et 46.01 de la Loi. Selon le demandeur, elle aurait tout de même dû le faire.
[78] La Division d’appel traite de l’application de ces dispositions aux paragraphes 36 à 54 de sa décision. La Division d’appel note d’abord que l’application de l’article 52 n’est pertinente qu’au remboursement des prestations de maladie payées pendant la première période (voir tableau au paragraphe 11 ci-dessus). Elle souligne que c’est l’article 45 de la Loi qui oblige un prestataire à rembourser le versement excédentaire de prestations qui n’auraient pas été payées si les montants reçus de la CNESST avaient été versés ou devaient être versés au moment où les prestations d’assurance-emploi ont été payées par la Commission.
[79] La Division d’appel confirme que ce moyen n’a pas été soulevé devant la Division générale, mais que de toute façon, elle est d’avis que la Division générale n’a pas erré à cet égard, parce que l’article 52 ne s’applique pas au recouvrement de créances en vertu de l’article 45 de la Loi. Elle mentionne que le 2 novembre 2016, le demandeur et la CNESST se sont entendus qu’il avait le droit d’obtenir rétroactivement des indemnités en lien avec le harcèlement psychologique subi dans le cadre de son emploi. Elle conclut que les calculs des sommes dues en vertu de l’article 45 peuvent être effectués en tout temps. Toutefois, la Loi (paragraphe 47(3)) prévoit une prescription de 72 mois pour le recouvrement de telles créances. Selon elle, cette disposition prend en compte les longs délais qui caractérisent les processus judiciaires et les discussions hors cour. De plus, elle note que « malgré une argumentation fort habile »
elle n’a pas été convaincue qu’il y avait lieu de ne pas suivre les enseignements de la Cour d’appel fédérale dans Chartier c. Canada (Procureur général), 2010 CAF 150, [2011] 4 R.C.F. 327 (Chartier) (Motifs au para. 44, note de bas de page 6).
[80] Quant à l’argument subsidiaire portant sur l’application de l’article 46.01, la Division d’appel note qu’elle n’avait pas pu bénéficier d’une analyse de la Division générale quant à savoir si la Commission avait de fait exercé son pouvoir discrétionnaire. Elle relève en outre que le demandeur avait reconnu qu’il manquait des informations essentielles au dossier pour déterminer l’application possible de cet article. Je comprends du demandeur que l’information sur les coûts reliés au recouvrement du trop-payé par la Commission n’était effectivement pas au dossier (voir article 46.01 à l’annexe 1).
[81] Le demandeur a beaucoup insisté sur l’erreur qu’aurait commise la Division d’appel en appliquant l’article 45 de la Loi et en refusant d’appliquer la prescription de 36 mois prévue à l’article 52.
[82] Il nous demande de clarifier l’interprétation à donner aux articles 43, 44, 45, 46 et 52, et subsidiairement, à l’article 46.01. Il nous fournit à cet égard ce qui selon lui est l’ensemble des décisions où ces articles sont cités pour quelque raison. En d’autres mots, il veut que cette Cour fasse le « grand ménage »
pour qu’il comprenne mieux la loi.
[83] La Division d’appel devait déterminer si la Direction générale avait erré en appliquant l’article 45, qui seul semble s’appliquer à des personnes admissibles et non exclues pour les périodes données quel que soit la nature des prestations versées (spéciales ou régulières). De fait, devant la Division d’appel, le demandeur n’a pas pris de position formelle à cet égard (voir par exemple pages 991, 1012 et 1013 du dossier du défendeur) laissant plutôt cette détermination à la discrétion du décideur administratif. Devant nous, il argue maintenant que c’est l’article 44 que la Division d’appel aurait dû appliquer puisque la première période n’implique que des prestations de maladie (prestations spéciales plutôt que des prestations régulières). Pourtant, il ne prétend pas qu’il n’était pas admissible à recevoir le plein montant de ces prestations de maladie au moment où elles lui ont été versées.
[84] Il soutient aussi que la CNESST n’est pas un employeur, et qu’elle n’agissait pas au nom de son employeur, que les sommes payées ne proviennent pas des biens de son employeur (il n’était pas encore failli) et qu’il ne s’agit pas de dommages-intérêts pour congédiement abusif. Donc, pour lui, aucune des situations précises décrites à l’article 45 ne s’applique à son cas.
[85] Toutefois, il ne conteste pas que c’est bien suite à une décision du TAT entérinant une entente intervenue le 2 novembre 2016 et cassant la décision de la CNESST du 18 février 2014 refusant sa demande d’indemnisation pour maladie professionnelle en vertu de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles du Québec, que la CNESST lui a versé les indemnités de remplacement de revenu. Dans cette décision, la CNESST était une partie intervenante puisque c’est sa décision qui faisait l’objet de la requête devant le TAT.
[86] L’objet de l’article 45 et de la Loi est discuté au paragraphe 31 de l’arrêt Chartier de notre Cour, cité par la Division d’appel. J’en cite un extrait pertinent :
[31] Les articles 45, 46 et 47 respectent le but et les objectifs de la Loi qui sont d’apporter un soutien matériel aux personnes affligées par la perte de leur emploi. La Loi prévoit un régime contributoire d’assurance. Elle ne vise, ne permet, ni n’encourage la réception et la rétention de prestations excédentaires. Il ne faut pas perdre de vue que le coût du régime d’assurance-emploi est supporté par les travailleurs et les employeurs. Le régime n’est ni conçu, ni administré pour l’enrichissement de certains prestataires au détriment des autres prestataires ainsi que des travailleurs et employeurs qui le financent...
[87] La situation devant la Division d’appel et devant nous est analogue à celle prévue spécifiquement à l’article 45, et rien dans le contexte ou l’objet de cette disposition et de la Loi en général ne permet d’interpréter les mots « soit pour toute autre raison »
et « une personne autre que l’employeur »
afin d’exclure le présent scénario.
[88] Le demandeur soutient qu’il ne s’est pas enrichi, qu’il continue de subir une perte du fait de la lésion ou maladie professionnelle qu’il a subie. Il n’a jamais été indemnisé pour le plein salaire qu’il a perdu. Il n’y a donc pas double indemnisation.
[89] C’est mal comprendre la Loi, dont le but n’est pas de compenser le plein salaire qui a été perdu par un prestataire. La Loi et le Règlement fixent les paramètres des montants assurés en vertu de la Loi. Au-delà de ces montants, elle prévoit l’obligation de rembourser un certain pourcentage qui implique les calculs complexes que l’on retrouve dans les tableaux applicables aux périodes 2 à 4. Il n’est jamais question de limiter l’application de l’article 45 aux cas où un prestataire reçoit une compensation de son plein salaire.
[90] Hormis une contestation de la constitutionalité des dispositions devant nous, la Division d’appel et cette Cour sont tenues d’appliquer ces choix faits par le législateur, et ce, même si le demandeur les décrit comme injustes et discriminatoires face à des personnes dans sa situation. Comme je l’ai déjà dit, la rémunération à laquelle réfère l’article 45 est définie à l’alinéa 35(2)b) du Règlement et inclut le revenu intégral qui y est prescrit. Et rien dans le texte de l’article 45 ne vient limiter cette définition. L’usage des mots « notamment »
confirme bien que les exemples qui suivent, tels que les dommages-intérêts pour congédiement abusif, ou les montants réalisés provenant de biens d’un failli, ne sont pas limitatifs.
[91] Je conclus donc que la décision de la Division d’appel d’appliquer l’article 45 aux faits de la présente affaire est raisonnable.
[92] Pour ce qui est de l’application de l’article 52, le demandeur argue que la Division d’appel aurait eu tort d’appliquer la décision de notre Cour dans Chartier. Selon le demandeur, cette décision serait erronée dans la mesure où elle établit que l’article 52 ne s’applique pas au remboursement de prestations excédentaires en vertu de l’article 45, ou aux retenues à faire en vertu de l’article 46. Il soutient que même si notre Cour traite de Braga c. Canada (Procureur général), 2009 CAF 167, [2009] A.C.F. no 628 dans Chartier, elle n’a pas suffisamment tenu compte de cette décision ou de d’autres décisions comme Blais c. Canada (Procureur général), 2011 CAF 320, [2011] A.C.F. no 1628, et des décisions qui y sont citées. Selon lui, l’introduction de notions comme « disposition administrative »
et « fonction décisionnelle »
dans Chartier résulte en un traitement asymétrique et crée des restrictions que la Loi ne prévoit pas.
[93] Il n’est pas utile de tenter de décrire plus en détail les nombreux arguments présentés par le demandeur dans son mémoire (voir paragraphes 81 à 136 et 138 du mémoire du demandeur). L’interprétation qu’il propose est certes plausible, mais elle n’est pas la seule possible, comme en témoigne l’interprétation adoptée dans Chartier, une décision rendue par un banc particulièrement expérimenté de cette Cour en matière d’assurance-emploi.
[94] Cette décision venait mettre un terme à la confusion résultant d’une diversité d’opinions adoptées par différents conseils arbitraux. L’interprétation adoptée dans Chartier a depuis été appliquée par les décideurs administratifs. Elle a stabilisé l’état du droit, et permis une application uniforme de la Loi dans les milliers de dossiers que la Commission traite à chaque année sans qu’ils ne fassent l’objet de jurisprudence publiée.
[95] Le défendeur soutient qu’aucune des circonstances exceptionnelles auxquelles réfère l’arrêt de cette Cour dans l’arrêt Miller c. Canada (Procureur général), 2002 CAF 370, [2002] A.C.F. no 1375 n’existe dans le présent dossier, et qu’il ne serait donc pas justifié de renverser le précédent établi dans l’arrêt Chartier. En principe, je suis d’accord.
[96] Mais ce qui est important de constater ici, c’est que le législateur est présumé être au fait de la jurisprudence, et qu’il intervient régulièrement par voie d’amendement lorsqu’il considère que cette jurisprudence ne reflète pas la politique qu’il souhaite maintenir. C’est une forme de dialogue entre les cours et le législateur.
[97] En l’espèce, le législateur n’a pas amendé l’article 52 pour souligner son intention de le voir appliquer au recouvrement de versements de prestations excédentaires prévues à l’article 45. Au contraire, en 2012, il a adopté une nouvelle disposition — l’article 46.01 — qui s’applique uniquement au remboursement en vertu de l’article 45 ou aux retenues en vertu de l’article 46, soit les dispositions en cause dans l’affaire Chartier.
[98] Le législateur y précise qu’aucun versement excédentaire ou retenue n’est à rembourser lorsqu’il s’est écoulé « plus de trente-six mois depuis le licenciement ou la cessation d’emploi du prestataire pour lequel la rémunération est payée ou à payer et que, de l’avis de la Commission, le coût administratif pour la détermination du remboursement est vraisemblablement égal ou supérieur à sa valeur »
. Je note ici que cette période de 36 mois est différente de celle prévue à l’article 52, qui traite des 36 mois qui suivent le moment où des prestations ont été payées ou sont devenues payables. L’importance de la deuxième condition est confirmée par le fait que le législateur a pris la peine de suspendre son application à cause de la pandémie en 2021 jusqu’en septembre 2022 (Loi no. 1 d’exécution de budget de 2021, L.C. 2021, c. 23, paragraphes 317(1), 317(2), 339(1), 339(2)).
[99] L’ajout de l’article 46.01 confirme que le délai de l’article 52 ne s’applique pas dans les cas prévus à l’article 45, et que le législateur a entériné l’interprétation adoptée dans Chartier.
[100] Je conclus que l’interprétation adoptée par la Division d’appel était raisonnable et n’avait pas à être plus étoffée dans les circonstances de l’espèce. La Cour comprend parfaitement que la Division d’appel a fondé son interprétation sur celle établie dans Chartier.
[101] Je passe donc à la thèse du demandeur à l’effet que la Division d’appel devait appliquer l’article 46.01 ou au moins l’interpréter, de façon à lui permettre de décider s’il pourrait soulever une nouvelle défense sur cette base.
[102] Comme la Division d’appel, je confirme que l’absence d’éléments de preuve au dossier ne permettait pas de déterminer si la deuxième condition de l’article 46.01 est rencontrée, et que cette question n’a pas été présentée devant la Division générale (paragraphe 58(1) de la LMEDS). En l’absence de preuve et d’arguments, il ne pouvait s’agir d’une erreur de droit de la part de la Division générale tel que le soutient le demandeur.
[103] D’autant plus que la position du demandeur devant la Division d’appel n’est pas claire : d’une part, il dit que la Division d’appel aurait pu s’appuyer sur la preuve faite dans un autre dossier (G.K. c. Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2017 TSSDAAE 348) devant le même membre de la Division d’appel, dans lequel la Commission avait établi que le coût administratif moyen était de 329,00 $. De l’autre, il soumet qu’en vertu de l’article 46.01, il faut ajouter à cela les coûts juridiques de la Commission pour défendre sa position en appel et que le langage de l’article 46.01, et particulièrement le mot « détermination »,
exigeait une interprétation.
[104] Le demandeur admet qu’il y a très peu de jurisprudence sur l’interprétation et l’application de l’article 46.01, et nous demande de combler cette lacune, ce qui, encore une fois, n’est pas notre rôle, aussi frustrant cela puisse-t-il être pour le demandeur.
[105] Je ne peux donc que conclure que la décision de la Division d’appel, à l’effet qu’elle ne devait pas en l’espèce décider de cette question, est raisonnable.
[106] Je mentionne tout de même que le Tribunal et la Commission auraient avantage à examiner cette question plus en détail dans le futur. Il est loin d’être évident au regard de son évolution législative, que le législateur voulait limiter l’application de l’article 46.01 aux seuls cas où le remboursement serait moindre que 329,00 $. Si l’intention était de fixer un plafond général sans égard aux circonstances particulières d’un dossier, il était facile de le faire comme il l’a fait à l’alinéa 56(1)a) du Règlement.
Question 7 : La défalcation (paragraphe 56(1) du Règlement)
[107] Traitant de cette dernière question, la Division d’appel rappelle qu’elle a déterminé à plusieurs reprises qu’elle n’avait pas compétence pour traiter de telles questions.
[108] Le demandeur n’a jamais demandé à la Commission d’utiliser son pouvoir en vertu du paragraphe 56(1) du Règlement afin de défalquer tout ou une partie du trop-payé décrit dans les avis de dette.
[109] Devant la Division d’appel, il a argué que la Division générale avait erré en ne procédant pas à la défalcation de sa dette. C’est à bon droit que la Division d’appel a confirmé que seule la Commission a le pouvoir de défalquer en vertu du paragraphe 56(1) du Règlement. De plus, de telles décisions de la Commission ne peuvent faire l’objet d’une révision. L’article 112.1 est parfaitement clair à cet égard. Seules les décisions rendues en vertu de l’article 112 sont appelables devant la Division générale.
[110] L’adoption de l’article 112.1 en 2014 est, selon moi, un autre exemple du dialogue entre les cours et le législateur auquel j’ai fait allusion en discutant de l’arrêt Chartier. Il semble que les motifs concourants du Juge Stratas dans l’affaire Steel c. Canada (Procureur général), 2011 CAF 153, [2011] A.C.F. No. 657 (QL) (Steel), avaient soulevés certains doutes quant à la question de savoir si un prestataire pouvait demander la révision d’une décision rendue en vertu du paragraphe 56(1) du Règlement et dès lors, en appeler au Tribunal aux termes de l’article 113 de la Loi. Le législateur a jugé bon de mettre fin à cette incertitude en adoptant l’article 112.1.
[111] Je suis donc satisfaite que la conclusion de la Division d’appel à cet égard est raisonnable.
IV. Conclusion
[112] Je conclus de ce qui précède que la décision de la Division d’appel est raisonnable, sauf quant à la question du montant du versement des prestations excédentaires pour la période 4 duquel il fallait déduire en juin 2017 le montant perçu en vertu de la Partie VII en mai 2017. Je propose donc de rejeter la demande de contrôle sauf à l’égard de cet aspect et de rendre la décision qui aurait dû être rendue dans le dossier AD-18-306 en ordonnant la déduction d’une somme additionnelle de 1 103,60 $ du trop payé au montant de 8 041,00 $ confirmé par la Commission dans sa décision du 1er septembre 2017.
[113] Le demandeur demande des dépens comme ceux accordés dans Steel, où le demandeur dans cette affaire n’avait pas eu de succès devant notre Cour. Je note que dans cette affaire, le demandeur était représenté par avocat, ce qui lui donnait droit généralement à certains montants fixés dans le Tarif B des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, et que les parties s’étaient entendues sur une somme de 5 000,00 $ si sa demande de contrôle était accordée. La Cour accorde rarement des dépens à des personnes se représentant elles-mêmes autres que pour rembourser les montants effectivement déboursés dans le cadre de la demande de contrôle. Toutefois, comme je l’ai mentionné, en l’espèce, le comportement de la Commission et de ses procureurs a créé de la confusion, une perte de temps et des retards. Je propose donc d’accorder des dépens de 1 000,00 $ au demandeur.
« Johanne Gauthier »
j.c.a.
« Je suis d’accord |
Yves de Montigny j.c.a. » |
« Je suis d’accord |
René LeBlanc j.c.a. » |
ANNEXE
Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social
L.C. 2005, ch. 34
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Règlement sur l’assurance-emploi (DORS/96-332)
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Loi sur l’assurance-emploi, L.C. 1996, ch. 23
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Loi no 1 d’exécution du budget de 2021
L.C. 2021, ch. 23
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
COUR D’APPEL FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
Dossier : |
A-320-19 |
APPEL D’UNE DÉCISION DE M. PIERRE LAFONTAINE, TSSC DU 3 JUILLET 2019, N° DES DOSSIERS : AD-18-302, AD-18-303, AD-18-304 ET AD-18-306.
INTITULÉ :
|
MICHEL FAULLEM c. LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA |
||
LIEU DE L’AUDIENCE :
|
Ottawa (Ontario) |
|
|
DATE DE L’AUDIENCE :
|
LE 2 décembre 2021 |
|
|
MOTIFS DU JUGEMENT :
|
LA JUGE GAUTHIER |
|
|
Y ONT SOUSCRIT :
|
LE JUGE DE MONTIGNY LE JUGE LEBLANC |
|
|
DATE DES MOTIFS :
|
LE 15 FÉVRIER 2022 |
|
|
COMPARUTIONS :
Michel Faullem |
Pour le demandeur SE REPRÉSENTANT LUI-MÊME |
Attila Hadjirezaie |
Pour le défendeur |
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
A. François Daigle Sous-procureur général du Canada |
Pour le défendeur |