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Date : 20220330


Dossier : A-127-20

Référence : 2022 CAF 55

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE DE MONTIGNY

LA JUGE RIVOALEN

 

 

ENTRE :

DAVID GLENN BABB

demandeur

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

Audience tenue par vidéoconférence organisée par le greffe, le 8 février 2022.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 30 mars 2022.

MOTIFS DU JUGEMENT :

LA JUGE RIVOALEN

Y ONT SOUSCRIT :

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE DE MONTIGNY

 


Date : 20220330

Dossier : A-127-20

Référence : 2022 CAF 55

CORAM :

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE DE MONTIGNY

LA JUGE RIVOALEN

 

 

ENTRE :

DAVID GLENN BABB

demandeur

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

MOTIFS DU JUGEMENT

LA JUGE RIVOALEN

I. Introduction

[1] Par la présente demande de contrôle judiciaire, le demandeur, David Glenn Babb, souhaite obtenir l’annulation de la décision rendue le 23 avril 2020 par un arbitre de grief de la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (la Commission) intitulée Babb c. Agence du revenu du Canada, 2020 CRTESPF 42. Dans la décision de la Commission, l’arbitre de grief a rejeté les griefs du demandeur, concluant que l’Agence du revenu du Canada (l’ARC ou l’employeur) n’avait pas fait preuve de discrimination à son endroit et n’avait pas agi de mauvaise foi lorsqu’elle a mis fin à son emploi en raison de son incapacité. La Commission a rejeté l’allégation de discrimination en concluant que l’obligation de l’employeur de prendre des mesures d’adaptation avait pris fin au motif que le demandeur ne pouvait pas retourner au travail dans un avenir prévisible.

[2] La présente demande de contrôle judiciaire porte simplement sur la question de savoir si la Commission a raisonnablement appliqué les enseignements de la Cour suprême dans les arrêts Centre universitaire de santé McGill (Hôpital général de Montréal) c. Syndicat des employés de l’Hôpital général de Montréal, 2007 CSC 4, [2007] 1 R.C.S. 161 [McGill] et Hydro‑Québec c. Syndicat des employé‑e‑s de techniques professionnelles et de bureau d’Hydro‑Québec, section locale 2000 (SCFP‑FTQ), 2008 CSC 43, [2008] 2 R.C.S. 561 [Hydro-Québec] aux éléments de preuve dont elle disposait.

[3] Pour tous les motifs qui suivent, je rejetterais la demande de contrôle judiciaire.

II. Contexte

[4] Un bref résumé des faits est utile pour mettre en contexte les présents motifs.

[5] Le demandeur a commencé à travailler à l’ARC en 2002. Ses responsabilités professionnelles ont changé en 2005 lorsqu’il est devenu commis au traitement des recettes, l’obligeant à travailler dans un bureau et à utiliser de l’équipement de bureau lui permettant de récupérer des documents sur demande de divers bureaux fiscaux. En 2006, ses problèmes de santé liés à une sensibilité à des facteurs environnementaux au travail sont devenus graves. Début 2007, le demandeur a pris un congé de maladie de courte durée, puis un congé non payé (CNP) le 19 avril 2007. Le demandeur a fourni à l’employeur une note du médecin datée du 15 février 2008 qui indiquait qu’il n’était pas, pour le moment, apte à retourner au travail et que sa date de retour était inconnue.

[6] Le demandeur était membre du syndicat mais sa convention collective ne prévoyait pas de CNPpour raisons médicales. D’autres formes de CNP énoncées dans la convention collective, comme le soin des enfants ou les soins de longue durée d’un parent, prévoyaient un CNP maximal de cinq ans.

[7] En avril 2009, l’employeur a informé le demandeur qu’étant donné l’arrivée imminente de l’échéance de deux ans de son CNP, il recevrait bientôt une lettre conformément à la Politique relative aux blessures et maladies de l’employeur. Dans une lettre datée du 11 mai 2009, le demandeur a été informé qu’il pouvait choisir l’une des trois options suivantes : 1) retour au travail; 2) démission ou retraite pour raison médicale; ou 3) licenciement pour des raisons autres que des manquements à la discipline ou une inconduite, conformément à l’alinéa 51(1)g) de la Loi sur l’Agence du revenu du Canada, L.C. 1999, c.. 17. La lettre informait également le demandeur qu’à défaut de choisir l’une de ces trois options au plus tard le 10 juillet 2009, il serait licencié.

[8] Le demandeur a demandé une prolongation de son CNP, car il attendait un rendez-vous avec un médecin en santé environnementale pour explorer les options de traitement. L’employeur a accordé cette prolongation du 20 juillet 2009 au 18 septembre 2009.

[9] Le 28 août 2009, le médecin en santé environnementale du demandeur a déclaré dans une note médicale remise à l’employeur que le demandeur était incapable de retourner au travail à ce moment-là en raison de son état de santé persistant. De plus, le médecin a indiqué que le demandeur avait été transféré à une autre équipe médicale pour une évaluation plus approfondie. L’employeur a accordé une prolongation du CNP du demandeur d’octobre 2009 au 15 février 2010, afin de permettre à la spécialiste de compléter l’évaluation et produire son rapport médical.

[10] Le 23 octobre 2009, le médecin a déclaré dans une note médicale remise à l’employeur que le demandeur était incapable de retourner au travail à ce moment-là en raison de son état de santé persistant et qu’une date de retour au travail était encore inconnue. L’évaluation du demandeur devant la spécialiste était prévue en novembre 2009. À partir de ce moment-là, la spécialiste prendrait environ deux mois pour produire un rapport. L’employeur a accordé une nouvelle prolongation du CNP du demandeur de février 2010 au 31 mars 2010, afin de permettre au médecin du demandeur d’examiner le rapport.

[11] Le demandeur a reçu le rapport de la spécialiste en janvier 2010, mais il ne l’a jamais remis à l’employeur. L’employeur a reçu le rapport de la spécialiste au début de l’instance devant la Commission.

[12] Bien que le demandeur n’ait jamais fourni une copie du rapport de la spécialiste à l’employeur, il a envoyé, le 2 février 2010, un courriel à l’employeur pour l’informer qu’il avait reçu le rapport de la spécialiste et a cité un passage du rapport qui indiquait : [traduction] « M. Babb est actuellement complètement invalide […] ». Il a ensuite ajouté dans son courriel : [traduction] « [I]l n’est pas précisé quand et comment je pourrai reprendre mon emploi. »

[13] En mars 2010, le demandeur a demandé une prolongation supplémentaire de son CNP afin de permettre à son médecin d’examiner le rapport de la spécialiste et de fournir des recommandations de traitement. L’employeur a rejeté cette demande.

[14] Le 30 mars 2010, le médecin a indiqué dans une note remise à l’employeur que la complexité du cas du demandeur le rendait inapte à retourner au travail. Elle a ajouté qu’il n’y avait pas de mesure d’adaptation précise qui serait appropriée ou adéquate pour le demandeur, puisqu’[traduction] « il n’est aucunement en mesure de travailler à ce moment-ci ». L’employeur n’a accordé aucune autre prolongation du CNP du demandeur après le 31 mars 2010.

[15] Au 31 mars 2010, l’employeur avait accordé des prolongations du CNP du demandeur totalisant environ 11,5 mois au-delà de la date butoir initiale. L’employeur alléguait l’avoir fait parce qu’il s’attendait à ce que le demandeur lui fournisse des renseignements relatifs à ses besoins et à ses limites permettant un retour au travail avec des mesures d’adaptation. Malgré les demandes répétées de l’employeur, le demandeur a refusé de fournir ces renseignements et de consentir à une évaluation médicale par Santé Canada.

[16] Dans une lettre du 13 avril 2010, l’employeur a indiqué avoir mis fin à l’emploi du demandeur pour motif d’incapacité. La lettre informait le demandeur que chaque prolongation de son CNP lui avait été accordée en raison du fait qu’il avait besoin de temps pour rencontrer ses médecins afin de déterminer ses limites ou restrictions médicales. La lettre indiquait qu’à chaque prolongation du CNP, il était informé de la nécessité de coopérer et de soumettre les renseignements demandés, et que le défaut de le faire pourrait entraîner la fin de son emploi.

[17] Le demandeur a contesté son licenciement en déposant un grief pour discrimination et mauvaise foi. Les griefs ont été rejetés au dernier palier le 16 septembre 2011. Ils ont ensuite été renvoyés à la Commission aux fins d’arbitrage.

III. La Décision

[18] Après huit jours d’audience, dans une décision de 61 pages, la Commission a rejeté les griefs du demandeur. L’analyse de la Commission est détaillée aux paragraphes 239 à 303 de la Décision.

[19] En traitant d’abord l’allégation de discrimination se trouvant aux paragraphes 240 à 280 de la Décision, la Commission a affirmé le pouvoir que lui confère l’alinéa 226(2)a) de la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral, L.C. 2003, c. 22, art. 2, pour interpréter et appliquer les dispositions de la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. (1985), c. H-6 (la LCDP), et a fait remarquer que, selon l’article 7 de la LCDP, le fait de refuser de continuer d’employer un individu constitue un acte discriminatoire, s’il est fondé sur un motif de distinction illicite (Décision de la Commission aux para. 241 et 242). La Commission a confirmé que le demandeur doit produire une preuve prima facie avant qu’elle puisse examiner la réponse de l’employeur à l’allégation, et que le demandeur n’a qu’à démontrer que la discrimination constituait l’un des facteurs de la décision de l’employeur.

[20] La Commission a conclu que le demandeur avait produit une preuve prima facie de discrimination parce qu’il souffrait d’une déficience au sens de l’article 25 de la LCDP, un fait non contesté par l’employeur, et qu’il a subi un effet préjudiciable dans lequel sa déficience a été un facteur, puisqu’il a été licencié pour incapacité (Décision aux para. 245 et 246).

[21] Quant à l’employeur, la Commission a conclu qu’il pouvait éviter une conclusion défavorable en présentant des éléments de preuve permettant de fournir une explication raisonnable démontrant que ses agissements n’étaient en fait pas discriminatoires, ou en invoquant un moyen de défense prévu par la loi, comme une exigence professionnelle justifiée (EPJ) en application du paragraphe 15(2) de la LCDP. La Commission a conclu qu’il incombait à l’employeur de prouver que son application de la norme de deux ans établie dans sa Politique relative aux blessures et maladies pour traiter les cas de congés de maladie de longue durée était justifiée (Décision aux para. 247 à 250).

[22] S’appuyant sur l’arrêt McGill de la Cour suprême du Canada, la Commission a réitéré le critère en trois parties pour justifier la norme de deux ans (le critère de l’arrêt Meiorin) (Colombie‑Britannique (Public Service Employee Relations Commission) c. BCGSEU, [1999] 3 R.C.S. 3, 176 DLR (4th) 1 au para. 54 [Meiorin]), à savoir exiger que l’employeur prouve ce qui suit :

[TRADUCTION]

  • 1)qu’il a adopté la norme dans un but rationnellement lié à l’exécution du travail;

  • 2)qu’il a adopté la norme en croyant sincèrement qu’elle était nécessaire pour réaliser complètement l’objectif légitime lié au travail; et

  • 3)que la norme est raisonnablement nécessaire pour réaliser ce but, en démontrant qu’il serait impossible d’accommoder l’employé sans que l’employeur subisse une contrainte excessive.

[23] Le demandeur a concédé les deux premières parties du critère de l’arrêt Meiorin et, par conséquent, la Commission n’a examiné que le troisième élément constitutif : le fait que la norme est raisonnablement nécessaire sans imposer de contrainte excessive (Décision au para. 251). La question au cœur du litige porte sur l’application des éléments de preuve à la troisième partie du critère de l’arrêt Meiorin.

[24] La Commission a rejeté l’argument du demandeur selon lequel il était discriminatoire que l’employeur applique une limite rigide de deux ans aux cas de congés de maladie en vertu de la Politique relative aux blessures et maladies alors que la convention collective prévoyait un CNP maximal de cinq ans dans d’autres situations. De même, la Commission a rejeté l’argument du demandeur selon lequel le garder en CNP de maladie pendant quelques années de plus ne constituerait pas une contrainte excessive.

[25] Elle a fait remarquer que, dans l’affaire Edwards c. Conseil du Trésor (Agence des services frontaliers du Canada), 2019 CRTESPF 62, une décision invoquée par le demandeur, la Commission a confirmé que l’employeur avait le loisir de s’appuyer sur une politique interne rédigée de manière semblable à moins qu’il ne refuse à un employé le droit à un avantage qui est par ailleurs inclus dans la convention collective. En l’espèce, comme l’a conclu la Commission, la convention collective ne prévoyait pas de CNP de maladie (Décision de la Commission aux para. 237 et 254).

[26] La Commission a également souligné que l’argument du demandeur n’a pas tenu compte des directives explicites de la Cour suprême figurant dans les arrêts McGill au paragraphe 38, et Hydro-Québec aux paragraphes 12 à 19. Selon la Commission, ces arrêts étayent la proposition selon laquelle l’employeur se sera acquitté de son obligation de prendre des mesures d’adaptation s’il peut établir que l’employé était incapable de retourner au travail dans un avenir prévisible (Décision aux para. 255, 258 à 260).

[27] À la suite de son examen de la preuve médicale et d’autres éléments de preuve, la Commission a conclu que l’employeur s’était acquitté de son obligation de prendre des mesures d’adaptation (Décision au para. 279). Je traiterai plus en détail du raisonnement de la Commission et des conclusions pertinentes à cet égard dans mon analyse.

[28] Passant ensuite à l’allégation de mauvaise foi, la Commission a conclu qu’il incombait au demandeur de prouver, selon la prépondérance des probabilités, que le licenciement était entaché de mauvaise foi (Décision au para. 281). Le demandeur s’appuyait principalement sur deux éléments de preuve documentaire : une feuille de renseignements et un document d’information concernant le licenciement, qu’il a tous deux obtenus au moyen d’une demande d’accès à l’information. La Commission a conclu que rien dans la preuve n’indiquait que les témoins de l’employeur s’étaient inspirés de la feuille de renseignements pour prendre la décision de le licencier. De l’avis de la Commission, la feuille de renseignements pourrait également être interprétée comme indiquant que, si le demandeur ne soumettait pas les renseignements médicaux demandés au plus tard le 31 mars 2010, il serait licencié. C’est précisément ce qui s’est produit.

[29] La Commission a également rejeté l’argument selon lequel le document d’information avait été préparé avant que l’employeur ne reçoive la note du médecin datée du 30 mars 2010. Elle a également rejeté l’allégation selon laquelle un appel téléphonique que le demandeur avait reçu de sa gestionnaire en novembre 2008 était suspect ou répréhensible. La Commission a conclu que ni les notes contemporaines de la gestionnaire ni son témoignage à ce sujet n’indiquaient quoi que ce soit de la sorte, mais confirmaient simplement qu’elle s’était enquise de la manière dont elle pouvait faciliter le retour au travail du demandeur.

[30] Dans l’ensemble, la Commission a conclu qu’aucun des arguments du demandeur selon lesquels les agissements de l’employeur « pue[nt] la mauvaise foi » n’était convaincant. La Commission a conclu que le demandeur ne s’était pas acquitté de son obligation d’établir la mauvaise foi puisqu’il n’avait pas démontré qu’il est vraisemblable que la décision de l’employeur de le licencier était entachée de mauvaise foi (Décision au para. 303).

IV. Norme de contrôle et questions en litige

[31] Les parties conviennent que la norme de contrôle applicable à la décision de l’arbitre de grief est celle de la décision raisonnable : Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Vavilov, 2019 CSC 65, 441 D.L.R. (4th) 1 [Vavilov]; Gulia c. Canada (Procureur général), 2021 CAF 106, 2021 CarswellNat 1617 au para. 8; Canada (Procureur général) c. Douglas, 2021 CAF 89, 2021 CarswellNat 1289 au para. 5; Canada (Procureur général) c. Alexis, 2021 CAF 216, 2021 CarswellNat 4869 au para. 2).

[32] La norme de la décision raisonnable étant une norme qui commande la déférence, la cour de justice doit examiner la décision du décideur administratif avec une attention respectueuse et tenter de comprendre le fil du raisonnement qui a mené ce dernier à prendre cette décision (Vavilov aux para. 83 et 84; Mudie c. Canada (Procureur général), 2021 CAF 239, 2021 CarswellNat 5626 au para. 18). Une décision est raisonnable lorsqu’elle est fondée sur un raisonnement intrinsèquement cohérent et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles pertinentes (Société canadienne des postes c. Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes, 2019 CSC 67, 441 D.L.R. (4th) 269 au para. 2; Vavilov, aux para. 84 et 85).

[33] Voici les questions en litige que la Cour doit trancher :

  • a)Était-il raisonnable de la part de la Commission de conclure que l’employeur n’avait pas agi de manière discriminatoire envers l’employé parce qu’il s’était acquitté de son obligation de prendre des mesures d’adaptation, ayant établi sa défense relative à l’EPJ prévue au paragraphe 15(2) de la LCDP?

  • b)Était-il raisonnable de la part de la Commission de conclure que l’employeur avait agi de bonne foi lorsqu’il avait mis fin à l’emploi du demandeur pour des raisons d’incapacité?

V. La thèse du demandeur

A. Discrimination

[34] Le demandeur soutient que la Commission a mal analysé le troisième élément constitutif du critère de l’arrêt Meiorin et qu’elle aurait dû conclure que l’employeur n’avait pas établi l’existence d’une contrainte excessive, rendant ainsi la décision déraisonnable.

[35] L’essentiel de l’argument du demandeur veut que la Commission ait fondé sa conclusion relative à la contrainte excessive sur une analyse déraisonnable qui comportait une lacune fondamentale. Selon le demandeur, la Commission n’a pas examiné si la norme de deux ans établie dans la Politique relative aux blessures et maladies était une EPJ.

[36] Dans sa plaidoirie, le demandeur a cherché principalement à expliquer ce qui, affirme-t-il, constitue le défaut majeur de la Commission. À son avis, la Commission n’a jamais traité la question principale de savoir si le CNP est une forme de mesure d’adaptation. Le demandeur a renvoyé notre Cour aux autres types de CNP prévus à la convention collective, qui permettent un maximum de cinq ans d’absence du travail. Les éléments de preuve dont la Commission disposait ont confirmé que ces types de CNP étaient visés par le même code et les mêmes coûts pour l’employeur que ceux associés au CNP de maladie en question (Décision au para. 102).

[37] Selon le demandeur, l’employeur devait démontrer qu’il ne pouvait pas adapter la norme pour répondre aux besoins individuels d’un employé sans contrainte excessive. Dans l’arrêt Hydro-Québec, la demanderesse soutient que l’employée en question a été jugée incapable de retourner au travail après des absences intermittentes du travail pendant sept ans malgré de multiples tentatives infructueuses de l’employeur de convenir de mesures d’adaptation avec elle. En l’espèce, le demandeur fait valoir que l’employeur a fourni la preuve que la prolongation du CNP ne lui imposait pas une contrainte excessive et qu’il s’est simplement appuyé sur sa Politique relative aux blessures et maladies selon laquelle les cas de congé de maladie doivent être résolus une fois que le délai de deux ans du CNP est écoulé. En faisant abstraction de cet élément, le demandeur soutient que la Commission lui a déraisonnablement fait porter le fardeau, exigeant qu’il prouve sa capacité de travailler dans un avenir prévisible.

[38] En résumé, le demandeur affirme que l’employeur n’a pas établi une contrainte en l’espèce en se fondant sur les éléments de preuve dont disposait la Commission. Ainsi, la décision est déraisonnable en ce qui a trait à la conclusion selon laquelle il existe une contrainte et que l’obligation de prendre des mesures d’adaptation de l’employeur avait pris fin.

B. Mauvaise foi

[39] Le demandeur a ensuite traité de la conclusion de la Commission selon laquelle l’employeur n’avait pas fait preuve de mauvaise foi lorsqu’il a mis fin à l’emploi du demandeur. Le demandeur soutient que la Commission a appliqué un seuil excessivement élevé en l’obligeant à démontrer que la décision de licenciement « pu[ait] » la mauvaise foi, au lieu de démontrer qu’elle était « entachée » de mauvaise foi. De plus, il allègue que la Commission s’est livrée à une analyse sélective et fragmentaire des éléments de preuve sans prendre en compte l’ensemble de ces éléments. Lorsque la Commission a reconnu que « d’autres raisons » pouvaient avoir motivé la décision de licenciement de l’employeur, selon le demandeur, elle n’a pas examiné si ces autres raisons étaient [traduction] « honnêtes et équitables » ou [traduction] « trompeuses » et [traduction] « trop indifférentes ».

[40] Le demandeur est d’avis que l’ensemble des éléments de preuve brosse un tableau clair : il a été mal vu par la gestion, il a fait l’objet de mesures disciplinaires, il a été mis en garde après s’être exprimé et a été accusé d’avoir falsifié des certificats médicaux. En faisant fi de ces faits, le demandeur soutient que la Commission a rendu une décision déraisonnable.

VI. Analyse

[41] D’emblée, il convient de nous rappeler que, selon l’arrêt Vavilov, il n’appartient pas à notre Cour, dans le cadre d’un contrôle judiciaire, d’apprécier à nouveau les éléments de preuve et de mettre en doute les conclusions factuelles de la Commission ou de substituer nos opinions à celles de la Commission relativement à ses conclusions d’absence de discrimination ou de mauvaise foi (Vavilov au para. 125). Cela est d’autant plus vrai étant donné que les décisions de cette nature commandent une déférence considérable, comme en témoigne la disposition d’inattaquabilité que prévoit le paragraphe 34(1) de la Loi sur la commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral, L.C. 2013, ch. 40, art. 365 (Canada (Procureur général) c. Alliance de la Fonction publique du Canada, 2019 CAF 41, 432 D.L.R. (4th) 170 au para. 34).

A. Était-il raisonnable de la part de la Commission de conclure que l’employeur n’avait pas agi de manière discriminatoire envers l’employé parce qu’il s’était acquitté de son obligation de prendre des mesures d’adaptation, ayant établi sa défense relative à l’EPJ prévue au paragraphe 15(2) de la LCDP?

[42] Les parties conviennent, tout comme moi, que la Commission a déterminé et appliqué le critère approprié lié à la discrimination et déterminé les critères appropriés de la défense relative à l’EPJ de l’employeur et des besoins en matière de mesures d’adaptation (Décision aux para. 243 à 249).

[43] Pour les motifs qui suivent, je ne peux souscrire à l’argument du demandeur selon lequel la Commission a appliqué de manière déraisonnable le troisième élément constitutif du critère de l’arrêt Meiorin aux éléments de preuve dont elle disposait. Il est utile de rappeler que, pour satisfaire à ce troisième élément, une norme « doit tenir compte de facteurs concernant les capacités uniques ainsi que la valeur et la dignité inhérentes de chaque personne, dans la mesure où cela n’impose aucune contrainte excessive » (Meiorin au para. 62).

[44] La Cour suprême a fourni des directives importantes sur l’interprétation du troisième élément du critère de l’arrêt Meiorin dans les arrêts McGill et Hydro-Québec. Dans ces arrêts, la Cour suprême s’est penchée sur l’interaction entre l’obligation de l’employeur d’accommoder une employée malade et l’obligation de l’employée de fournir sa prestation de travail. Les conditions préalables à l’existence de l’obligation d’accommodement n’étaient pas en cause. La véritable question dont était saisie la Cour suprême portait plutôt sur l’interprétation et l’application de la norme relative à la contrainte excessive et les répercussions d’une décision selon laquelle un employé est incapable de reprendre le travail dans un avenir prévisible.

[45] Ainsi, la Commission a pris en compte de façon appropriée le troisième élément du critère de l’arrêt Meiorin en s’appuyant à la fois sur les arrêts McGill et Hydro-Québec dans son analyse. Devant nous, tout comme devant la Commission, le demandeur n’a pas vraiment abordé les paragraphes 18 et 19 de l’arrêt Hydro-Québec, dans lequel la Cour suprême a déclaré que l’obligation d’accommodement qui incombe à l’employeur cesse là où l’employé ne peut plus remplir les obligations fondamentales rattachées à la relation de travail dans un avenir prévisible, malgré les tentatives faites pour l’accommoder.

[46] Il est important d’examiner chacune des conclusions de la Commission relativement au droit de l’employeur de se fonder sur sa politique, s’il a appliqué ou non ladite politique de façon mécanique ou automatique, et si l’employeur pouvait raisonnablement conclure que le demandeur ne pouvait pas retourner au travail dans un avenir prévisible. Ce sont ces conclusions qui ont mené à la décision qui est maintenant contestée.

[47] En ce qui a trait à l’application par l’employeur de la norme de deux ans énoncée dans sa Politique relative aux blessures et maladies, la Commission a conclu que la convention collective ne comportait pas de disposition relative au CNP de maladie et qu’il était donc loisible à l’employeur d’appliquer sa Politique relative aux blessures et maladies (Décision au para. 254). En l’espèce, comme je l’ai fait remarquer, l’employeur et l’agent négociateur avaient expressément exclu les congés de maladie de la convention collective, et il était raisonnable que la Commission conclue que l’employeur pouvait appliquer sa propre politique. Il était également raisonnable que la Commission conclue que la décision Edwards se distinguait de l’espèce au regard des faits. Dans Edwards, la Commission a conclu que l’employeur avait commis un acte de discrimination à l’égard des employés en congé de maladie en rejetant leurs demandes de congé pour des raisons personnelles parce que la convention collective prévoyait un congé d’un an pour des besoins personnels sans exclure l’application de ce congé aux employés qui étaient à ce moment-là en congé de maladie (Décision aux para. 234 à 237).

[48] Ensuite, le demandeur a soutenu que l’employeur a appliqué la norme de deux ans établie dans la Politique relative aux blessures et maladies de façon automatique et mécanique. Il n’a pas soutenu devant la Commission que la Politique relative aux blessures et maladies était en soi discriminatoire et qu’elle devait être annulée. Dans ses observations présentées de vive voix à la Cour, le demandeur a confirmé qu’il n’avait pas l’intention de tenter de faire annuler la politique, même si ses arguments semblaient indiquer que telle était son intention. Quoi qu’il en soit, la question de savoir si la politique en soi était discriminatoire n’a pas été débattue devant la Commission et il n’appartient donc pas à notre Cour d’examiner un tel argument. Le caractère raisonnable d’une décision ne peut être contesté en invoquant une question qui n’a pas été soumise à la Commission (Alberta (Information and Privacy Commissioner) c. Alberta Teachers’ Association, 2011 CSC 61, [2011] 3 R.C.S. 654 aux para. 22 à 29).

[49] Je me concentrerai donc uniquement sur la manière dont la Commission a examiné l’application par l’employeur de la norme de deux ans et si elle a été appliquée automatiquement et mécaniquement lors de l’examen de l’obligation d’accommoder le demandeur, jusqu’à ce que cette obligation prenne fin. Comme nous l’avons vu dans l’arrêt Hydro-Québec, lorsqu’il s’agit de restreindre l’obligation d’accommodement de l’employeur, l’obligation implique que l’employeur fasse preuve de souplesse dans l’application de sa norme si cet assouplissement permet à l’employé en question de retourner au travail sans que l’employeur ne subisse une contrainte excessive (Hydro-Québec au para. 13).

[50] À partir de la lettre de licenciement, la Commission a conclu que la Politique relative aux blessures et maladies avait déclenché les événements ayant mené au licenciement. Contrairement aux affirmations du demandeur, il n’a pas été licencié à l’échéance de deux ans de son CNP. Au contraire, le demandeur était en congé de maladie depuis le 19 avril 2007 et a été licencié le 13 avril 2010 (Décision au para. 264).

[51] La Commission a déterminé que le demandeur avait obtenu plusieurs prolongations pour lui donner l’occasion de fournir des renseignements médicaux établissant ses limites et restrictions afin de permettre un retour au travail. La lettre de licenciement faisait mention de ces prolongations totalisant environ 11,5 mois (Décision aux para. 264, 267, 273). À mon avis, suivant la preuve versée au dossier, il était raisonnable que la Commission en vienne à la conclusion que l’employeur avait fait preuve de souplesse dans l’application de la norme de deux ans établie dans sa Politique relative aux blessures et maladies.

[52] De plus, il était raisonnable que la Commission rejette l’argument du demandeur selon lequel l’employeur aurait dû continuer de lui accorder des prolongations de CNP, car même après trois ans d’absence du travail, il n’y avait aucune indication de la part des médecins du demandeur d’une date éventuelle de retour au travail (Décision au para. 279). Afin de prendre cette décision, la Commission a examiné les éléments de preuve de nature médicale et autres éléments de preuve dont elle disposait pour déterminer si le demandeur était capable de retourner au travail dans un avenir prévisible.

[53] Quant à la preuve médicale et la question de savoir si le demandeur était apte à retourner au travail, la Commission s’est appuyée sur le contenu de la lettre de licenciement qui faisait mention des certificats médicaux fournis à l’employeur, datés du 24 août 2009 et du 30 mars 2010. Dans ces certificats, le médecin déclare que le demandeur n’est pas apte à retourner au travail à ce moment-ci et qu’il n’y a aucune mesure d’adaptation précise qui serait appropriée ou adéquate puisque le demandeur n’était pas en mesure de travailler à ce stade (Décision aux para. 268 à 270).

[54] La Commission a tenu compte de la preuve médicale la plus récente dont disposait l’employeur au moment où l’ARC a décidé de licencier le demandeur, à savoir le certificat du médecin daté du 30 mars 2010 indiquant qu’aucun retour au travail ne serait possible [traduction] « à ce moment-ci […] il n’est pas du tout en mesure de travailler » (Décision aux para. 270 et 275).

[55] La Commission a également examiné un courriel que le demandeur a écrit à l’employeur en février 2010 ayant trait à sa capacité de retourner au travail dans un avenir prévisible. Le demandeur a informé l’employeur qu’il était inapte à retourner au travail selon le rapport de la spécialiste qu’il a reçu en janvier 2010 (Décision aux para. 268 et 276). Plus précisément, la Commission a conclu, au paragraphe 276, que le demandeur avait communiqué avec l’employeur par courriel le 2 février 2010, l’informant que [traduction] « ”M. Babb est actuellement complètement invalide” comme l’a écrit la Dre Ellie Stein dans son rapport daté du 6 janvier 2010, que j’ai récemment reçu par télécopieur. Il n’est pas précisé quand et comment je pourrai reprendre mon emploi [...] ».

[56] Enfin, la lettre de licenciement soulignait également les efforts déployés par la direction pour obtenir une date de retour au travail, y compris les tentatives effectuées pour que le demandeur subisse une évaluation de Santé Canada et pour obtenir des renseignements plus détaillés sur ses limitations (Décision aux para. 263, 267, 268 et 269).

[57] Ainsi, en présence de la preuve médicale de l’inaptitude au travail du demandeur et de l’absence d’une date prévue pour un retour au travail, jumelée à son refus de fournir des renseignements sur ses limites et restrictions permettant à l’employeur de prendre des mesures d’adaptation, la Commission a conclu que l’employeur avait eu raison de déterminer que le demandeur était incapable de retourner au travail dans un avenir prévisible. (Décision au para. 279).

[58] Je fais remarquer que la Commission a conclu que le demandeur n’avait pas informé l’employeur de la partie la plus importante du rapport de la spécialiste, qui indiquait clairement que, non seulement le demandeur était [traduction] « actuellement complètement invalide », mais [traduction] « selon [son] expérience, très peu de personnes avec ce degré de symptomatologie sont en mesure de recommencer à occuper un emploi rémunérateur » et que [traduction] « le pronostic s’approchant d’un rétablissement complet est très faible ». De l’avis de la Commission, il était approprié d’examiner ce rapport, car, au paragraphe 38 de l’arrêt McGill, la Cour suprême a indiqué que le fonctionnaire s’estimant lésé devait fournir à la Commission une preuve lui permettant de conclure en sa faveur (Décision au para. 277). Cela signifiait simplement que, si ce rapport avait été mis à la disposition de l’employeur dans son intégralité avant le licenciement du demandeur, il aurait confirmé que le demandeur était incapable de travailler dans un avenir raisonnablement prévisible (Décision aux para 278 et 279).

[59] À mon avis, il était raisonnable que la Commission détermine que l’obligation de l’employeur de prendre des mesures d’adaptation avait pris fin (Décision au para. 279).

[60] L’obligation qui incombe à l’employeur de prendre des mesures d’adaptation n’est déclenchée que lorsqu’un employé informe un employeur de son désir de retourner au travail et qu’il fournit la preuve de sa capacité à retourner au travail, y compris tout besoin particulier qui lui permettrait de le faire (Katz et al. v. Clarke, 2019 ONSC 2188, 2019 CarswellOnt 6703 au para. 28). Cependant, comme je l’ai affirmé précédemment, en l’espèce, le demandeur n’a jamais fourni de tels renseignements à l’employeur. Il était raisonnable que la Commission en vienne à la conclusion que l’employeur n’était pas tenu de faire quoi que ce soit d’autre, compte tenu de la durée de l’absence du demandeur et de la preuve médicale indiquant qu’il était incapable de retourner au travail dans un avenir prévisible.

[61] La Commission a accepté la preuve de l’employeur et a reconnu qu’il n’était pas tenu de maintenir le demandeur en poste parce qu’il était toujours incapable de travailler pour cause de maladie après trois ans de CNP et qu’il serait incapable de retourner au travail dans un avenir prévisible. La Commission a conclu que l’employeur avait établi l’existence d’une contrainte excessive en se fondant sur cet élément et qu’il s’était acquitté de son fardeau d’établir son moyen de défense relatif à l’EPJ (Décision aux para. 4, 279 et 280). La Commission était consciente de l’argument du demandeur, mais ne l’a pas retenu.

[62] Loin de la proposition du demandeur selon laquelle la Commission a renversé le fardeau de la preuve, elle a plutôt conclu que le demandeur n’avait pas fourni de preuve contredisant celle de l’employeur selon laquelle le demandeur était incapable de retourner au travail dans un avenir prévisible (Décision au para. 277).

[63] Encore une fois, le fait que la Commission se soit appuyée sur l’arrêt Hydro-Québec et l’ait appliqué aux faits dont elle était saisie était raisonnable. L’obligation de prendre des mesures d’adaptation a pour but d’empêcher que des employés qui sont par ailleurs aptes à travailler ne soient pas injustement exclus. Comme je l’ai mentionné précédemment, en l’espèce, l’employeur n’était pas tenu de modifier les conditions du contrat de travail du demandeur étant donné qu’il n’y avait pas de retour au travail en vue et qu’il n’est pas nécessaire d’accommoder un employé qui n’est plus en mesure de remplir les obligations rattachées à la relation de travail dans un avenir prévisible (Hydro-Québec au para. 19).

[64] Je fais remarquer également, comme l’a fait la Cour suprême au paragraphe 21 de l’arrêt Hydro-Québec, qu’une décision de licencier un employé parce qu’il ne peut fournir sa prestation dans un avenir raisonnablement prévisible doit nécessairement reposer sur une évaluation de l’ensemble de la situation. Dans le présent contrôle judiciaire, je conclus, après huit jours d’audience, que c’est exactement ce que la Commission a fait.

[65] À mon avis, la Commission a soupesé tous les éléments de preuve; sa décision découle d’un raisonnement intrinsèquement cohérent et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles pertinentes. Sa conclusion selon laquelle l’employeur s’est acquitté de son fardeau d’établir son moyen de défense relatif à l’EPJ prévu au paragraphe 15(2) de la LCDP est raisonnable.

B. Était-il raisonnable de la part de la Commission de conclure que l’employeur avait agi de bonne foi lorsqu’il avait mis fin à l’emploi du demandeur pour des raisons d’incapacité?

[66] Quant à la question de savoir si l’employeur a agi de mauvaise foi lorsqu’il a mis fin à l’emploi du demandeur pour incapacité, j’estime qu’il était raisonnable de la part de la Commission de conclure que le demandeur ne s’était pas acquitté de son fardeau de démontrer la mauvaise foi.

[67] La Commission a examiné les éléments de preuve de façon logique et objective et a raisonnablement conclu que, pris ensemble ou individuellement, les éléments de preuve ne démontraient pas de mauvaise foi. Je n’accepte pas l’argument du demandeur selon lequel il y a eu défaut de tenir compte de certains éléments de preuve, mais cela me rappelle plutôt l’interdiction générale faite à une cour de révision « d’apprécier à nouveau la preuve examinée par le décideur » (Vavilov au para. 125, cité précédemment au paragraphe [41]). Je ne vois aucune erreur susceptible de révision dans l’analyse de la Commission.

[68] Contrairement aux arguments du demandeur, je conclus que la Commission n’a pas utilisé une norme excessivement élevée lors de l’analyse de l’allégation de mauvaise foi. La Commission renvoie aux termes « pue[nt] la mauvaise foi » parce qu’ils sont tirés d’une décision antérieure intitulée Laird c. Conseil du Trésor (Emploi et Immigration Canada), dossier de la CRTFP 166-02-19981 (19901207), [1990] C.R.T.F.P.C. no 213 (QL), que le demandeur a invoquée. C’est le demandeur, et non la Commission, qui a fait valoir l’argument selon lequel la décision de l’employeur « pu[ait] la mauvaise foi ». En tout état de cause, la Commission a utilisé l’expression « entachée de mauvaise foi » dans l’introduction de son analyse au paragraphe 281 ainsi que dans sa conclusion au paragraphe 303.

VII. Conclusion

[69] En conclusion, je suis d’avis que la décision était raisonnable. Elle découle d’un raisonnement intrinsèquement cohérent et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles pertinentes. La décision est justifiée, claire et intelligible, et nous devons faire preuve de déférence et nous abstenir d’intervenir (Vavilov aux para. 75, 83, 85 et 86).

[70] Pour ces motifs, je rejetterais la demande de contrôle judiciaire. Les parties ont convenu que les dépens devraient être fixés à 1 500 $. J’adjugerais donc des dépens de 1 500 $, tout compris, au défendeur.

« Marianne Rivoalen »

j.c.a.

« Je suis d’accord.

Johanne Gauthier, j.c.a. »

« Je suis d’accord.

Yves de Montigny, j.c.a. »


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


 

Dossier :

A-127-20

INTITULÉ :

DAVID GLENN BABB c. PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

AUDIENCE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 8 février 2022

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

LA JUGE RIVOALEN

 

Y ONT SOUSCRIT :

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE DE MONTIGNY

 

DATE DES MOTIFS :

Le 30 mars 2022

 

COMPARUTIONS :

Wassim Garzouzi

Zachary Rodgers

 

Pour le demandeur

 

Richard Fader

Marie-France Boyer

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

RAVEN, CAMERON, BALLANTYNE & YAZBECK LLP/s.r.l.

Ottawa (Ontario)

Pour le demandeur

 

L’ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

Ottawa (Ontario)

POUR LE DEMANDEUR

A. François Daigle

Sous-procureur général du Canada

Pour le défendeur

 

 

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