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Date : 20221104


Dossier : A-405-15

Référence : 2022 CAF 189

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE STRATAS

LE JUGE LASKIN

 

 

ENTRE :

MME CAROL A. NICOL,

veuve du lieutenant d’aviation ROBERT DONALD NICOL

appelante

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

intimé

Demande jugée sur dossier sans comparution des parties.

Jugement rendu à Ottawa (Ontario), le 4 novembre 2022.

MOTIFS DU JUGEMENT :

LA JUGE GAUTHIER

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE STRATAS

LE JUGE LASKIN

 


Date : 20221110


Dossier : A-405-15

Référence : 2022 CAF 189

CORAM :

LA JUGE GAUTHIER

LE JUGE STRATAS

LE JUGE LASKIN

 

 

ENTRE :

MME CAROL A. NICOL,

veuve du lieutenant d’aviation ROBERT DONALD NICOL

appelante

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

intimé

MOTIFS DU JUGEMENT

LA JUGE GAUTHIER

[1] Le 2 juillet 1954, Robert Donald Nicol, un lieutenant d’aviation depuis 20 ans de l’Aviation royale canadienne (l’« ARC ») qui servait en Allemagne, a été grièvement blessé dans un tragique accident de la route. En raison des limitations physiques découlant de cet accident, il a été démobilisé de l’ARC avec honneur en 1957.

[2] Entre 1958 et 1978, le lieutenant d’aviation Nicol a fait plusieurs tentatives infructueuses d’obtenir une pension d’invalidité conformément à la Loi sur les pensions, L.R.C. 1985, c P-6 (la Loi sur les pensions). En 2003, il a succombé à un cancer du pancréas.

[3] Il ne fait aucun doute que cet homme a servi son pays avec honneur. Le lieutenant d’aviation Nicol a mérité et mérite notre respect. Les présents motifs, qui seront disponibles en ligne de façon permanente, serviront à accorder une reconnaissance appropriée pour son service remarquable.

[4] Dans le présent appel, nous sommes saisis d’une question plus restreinte que celle sur laquelle se sont penchés les autres organismes qui ont examiné ses demandes de pension d’invalidité.

[5] Il s’agit d’un appel interjeté par l’épouse survivante du lieutenant d’aviation Nicol, Mme Nicol, à l’encontre d’une décision de la Cour fédérale (2015 CF 785) qui a rejeté sa demande de contrôle judiciaire d’une décision du Tribunal des anciens combattants (révision et appel) (le TACRA), rendue le 3 septembre 2014, qui a rejeté la demande de réexamen d’une décision du Conseil de révision des pensions (CRP) rendue en 1978.

[6] Bien que le TACRA fut créé en 1995 en application de l’article 111 de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel), L.C. 1995, c 18 (la Loi sur le TACRA) (toutes les dispositions législatives pertinentes sont reproduites à l’annexe A des présents motifs), il a le pouvoir de réexaminer des décisions rendues par des organismes précis qui l’ont précédé, comme le CRP. Il peut le faire de son propre chef s’il détermine que les conclusions sur les faits ou l’interprétation du droit étaient erronées ou, comme c’était le cas en l’espèce, sur demande si de nouveaux éléments de preuve lui sont présentés.

[7] Le droit de demander le réexamen d’une décision d’un organisme prédécesseur est plus restreint que lorsque la décision en cause a été rendue par le TACRA. Aux termes du paragraphe 32(1) de la Loi sur le TACRA, une personne, comme Mme Nicol, pourrait demander le réexamen d’une décision antérieure du TACRA en raison d’une erreur de fait ou de droit ou à la lumière de nouveaux éléments de preuve.

[8] En l’espèce, Mme Nicol a utilisé le formulaire type applicable à toutes les demandes de réexamen (présentées en application des articles 32 ou 111) et s’est fondée sur un nouveau document intitulé « Narratif historique de l’escadre 3(F) ». Bien qu’elle mentionne que ce document couvre la période comprise entre le 1er juin et le 30 novembre 1954, seule la portion comprise entre le 1er juillet et le 5 juillet 1954 fait partie du dossier de la preuve (voir le dossier d’appel, onglet 4, pièce H, pages 171 et 172). Dans sa demande du 3 octobre 2013, elle écrit que ce nouvel élément de preuve concerne l’argument selon lequel son époux assistait à un pique‑nique de l’escadron, et indique que ses blessures étaient consécutives ou rattachées directement à son service militaire en temps de paix, puisqu’il assistait à cet événement au moment de l’accident. Mme Nicol a aussi rempli la section du formulaire concernant le réexamen fondé sur une erreur de fait, qu’elle a précisé comme étant [traduction] « le défaut de la formation saisie de l’appel d’appliquer correctement les dispositions législatives aux faits ». Dans la section sur le réexamen fondé sur une erreur de droit, elle a simplement écrit ce qui suit : [traduction] « Voir Erreur de fait ».

[9] Dans ses observations de trois pages présentées en son nom par l’avocat-conseil des pensions, elle a soutenu que le seul fait que le narratif historique des 1er et 2 juillet mentionnait le pique‑nique et l’accident [traduction] « revient à accepter que toute cette activité était reliée au service ». Trois décisions administratives antérieures ont été invoquées : la décision de 2005 rendue à l’issue d’un réexamen du TACRA intitulée Frye (décision no 100000973288) (Frye), la décision de 1972 du CRP intitulée Glover (décision no 2B-16320) et la décision de 1975 de la Commission des pensions du Canada intitulée Bingham (P-17112, ZP-137) (voir le dossier d’appel, onglet 4, pièce G-1, pages 103 à 105). Enfin, en se fondant sur les déclarations antérieures du lieutenant d’aviation Nicol, on a fait valoir que l’ancien combattant était [traduction] « de service étant tenu d’assister au pique-nique de l’escadron ». Le dossier ne révèle aucun détail sur ce qui a été dit, le cas échéant, lorsque le TACRA s’est réuni le 15 juillet 2014. Une copie de la décision de la Cour fédérale annulant la décision initiale du TACRA dans la décision Frye figurait dans le dossier dont était saisi le TACRA.

[10] La décision du TACRA était brève. Il a fait remarquer que, lorsqu’une demande est fondée sur de nouveaux éléments de preuve conformément à l’article 111, le tribunal devait appliquer le critère énoncé dans la décision MacKay c. Canada (Procureur général), [1997] A.C.F. no 495 (QL), (1re inst.), pour déterminer si les éléments de preuve présentés étaient en fait de nouveaux éléments de preuve. Cette question préliminaire (ou première étape) détermine si le TACRA peut procéder au réexamen de la décision antérieure. Il a conclu que le narratif historique présenté comme seul nouvel élément de preuve justifiant la demande de réexamen ne satisfaisait pas au quatrième volet du critère, c’est-à-dire que le nouvel élément de preuve doit être tel que, si l’on y ajoute foi, on puisse raisonnablement penser qu’avec les autres éléments de preuve produits, il aurait influé sur le résultat. Il a également mentionné qu’il n’y avait aucune erreur de fait.

[11] Comme je l’ai déjà mentionné, dans sa demande, Mme Nicol avait décrit l’erreur comme le défaut [traduction] « d’appliquer correctement les dispositions législatives aux faits ». Je remarque que, plutôt qu’une erreur de fait précise ou une question de droit isolable, il s’agit en réalité d’une question mixte de fait et de droit, essentiellement une nouvelle appréciation de la preuve. Aux termes de l’article 32 de la Loi sur le TACRA, même de son propre chef, le TACRA ne pourrait pas réexaminer une décision dont il est saisi sans d’abord déterminer si les conclusions sur les faits ou l’interprétation du droit étaient erronées.

[12] Devant la Cour fédérale, Mme Nicol a sollicité le contrôle judiciaire de la décision du TACRA rendue en 2014. La Cour fédérale a rejeté sa demande et Mme Nicol a interjeté appel devant notre Cour.

[13] Mme Nicol s’est représentée seule devant la Cour fédérale et se présente seule devant notre Cour. Par conséquent, il est impératif d’expliquer exactement le rôle que joue notre Cour dans le présent appel. Notre rôle se limite aux nombreuses décisions qui nous lient; la Cour suprême a déclaré que notre Cour n’est pas autorisée à tirer de nouvelles conclusions de fait fondées sur sa propre appréciation du dossier de la preuve. La Cour suprême nous enseigne également qu’en appel d’une décision d’une cour de révision (en l’espèce la Cour fédérale), nous ne sommes tenus de répondre qu’à deux questions : soit de savoir si la Cour fédérale a choisi la norme de contrôle appropriée et si elle l’a appliquée correctement (Agraira c. Canada (Sécurité publique et protection civile), 2013 CSC 36 (Agraira), reconfirmé par Office régional de la santé du Nord c. Horrocks, 2021 CSC 42 aux para. 11 et 12).

[14] La « norme de contrôle » définit la mesure dans laquelle une Cour peut intervenir relativement à une décision rendue par un organisme administratif, comme le TACRA, à qui le législateur a choisi de confier la tâche principale de trancher des questions comme celle de savoir s’il convient de réexaminer ou non une décision antérieure. Cela veut dire que si, comme c’est le cas en l’espèce, la norme de contrôle est celle de la « décision raisonnable », notre Cour n’est pas autorisée à réexaminer la décision du TACRA. Nous devons laisser une certaine latitude au TACRA – ce que l’on appelle en droit la « déférence » – lorsqu’il applique les règles aux faits, puis rend sa décision.

[15] Notre Cour ne peut pas refaire ce que le TACRA ou le CRP ont déjà fait. Elle ne peut pas décider si ces organismes sont arrivés au bon résultat. Nous ne sommes pas autorisés à examiner les éléments de preuve et à tirer notre propre conclusion en ce qui concerne l’admissibilité du lieutenant d’aviation Nicol à une pension d’invalidité : Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Vavilov, 2019 CSC 65 au para. 83 (Vavilov).

[16] Ainsi, lorsque nous confirmons une décision du TACRA, cela ne veut pas dire que nous ne croyons pas la personne qui demande des prestations ou que nous ne nous soucions pas de ce qu’elle ressent, de son piètre état ou de ses souffrances. C’est simplement que la loi limite notre capacité à annuler des décisions comme celle en cause – et nous devons appliquer le droit aux faits de la cause, peu importe la compassion que suscite la cause, que cela nous plaise ou non.

[17] Avant de poursuivre mon analyse, je me dois de mentionner que le présent appel est quelque peu inhabituel en ce que plus de sept ans se sont écoulés depuis le dépôt de l’avis d’appel. Cela exige des explications.

[18] L’appelante a obtenu un sursis du présent appel le 16 mars 2016 afin de pouvoir présenter une autre demande de réexamen auprès du TACRA à la lumière des nouveaux éléments de preuve qu’elle n’avait pas obtenu l’autorisation de déposer dans le présent appel. L’appelante n’a pas informé notre Cour du fait qu’elle a reçu la nouvelle décision du TACRA datée du 25 juillet 2018. En janvier 2019, notre Cour a appris que le TACRA avait rendu sa décision, et a donc accordé à l’appelante un délai de deux mois pour demander un avis juridique quant à savoir si elle devait poursuivre son appel ou demander d’autres mesures de réparation. Puis, deux dates d’audience ont été fixées et les audiences ont par la suite été ajournées en mars et en septembre 2020. En juillet 2021, l’appelante a informé la Cour qu’elle avait retenu les services d’un avocat afin de contester une autre décision du TACRA rendue le 29 juin 2021 concernant une autre demande de réexamen. La Cour fédérale a finalement rejeté cette demande (2022 CF 245). L’appelante n’a pas déposé un avis d’appel de cette décision de la Cour fédérale, et le délai pour ce faire a expiré.

[19] En raison de divers problèmes de santé, l’appelante a demandé un autre ajournement de dernière minute la veille de l’audition du présent appel. Une audience a été tenue par vidéoconférence le 7 septembre 2022 afin de discuter de sa demande et de ce qui devrait être fait pour statuer rapidement sur le présent appel. À la fin de l’audience, l’appelante a accepté que son appel soit tranché sans la tenue d’une audience sur la foi du dossier dont disposait la Cour, y compris les mémoires des faits et du droit des parties. Toutefois, cela ne comprend pas certains nouveaux éléments de preuve que Mme Nicol a inclus dans son mémoire des faits et du droit, bien qu’elle n’ait pas été autorisée à les déposer.

[20] Il est évident que, pour trancher le présent appel, je dois commencer par la décision faisant l’objet d’un réexamen. Je dois également examiner l’historique du dossier et le dossier de la preuve dont le TACRA et le CRP étaient saisis (Vavilov au para. 94). La plupart des instances précédentes (il y en avait davantage depuis 2015) sont décrites dans la décision de la Cour fédérale faisant l’objet du contrôle. Je n’ai pas à les énumérer de nouveau. J’analyserai maintenant le dossier de la preuve dont le TACRA était saisi. Je me reporterai également aux passages les plus pertinents de la décision du CRP rendue en 1978.

I. Dossier de la preuve

[21] La plupart des faits ne sont pas contestés, et je ne les mentionnerai que brièvement. Le lieutenant d’aviation Nicol était un ancien combattant de l’Aviation royale aérienne (ARC), qui a servi du 20 juillet 1952 au 24 décembre 1957 (voir le dossier d’appel, onglet 4, pièce G-1, page 46). Il était basé en Allemagne au moment de l’accident qui lui a causé des blessures et l’invalidité qui en a suivi. Le 1er juillet 1954, le lieutenant d’aviation Nicol a participé à un pique-nique pour les personnes à charge des militaires afin de célébrer la fête nationale du Canada, la fête du Dominion. Même si des dispositions avaient été prises par l’ARC pour que les autres membres des forces militaires, surtout les membres de leur famille vivant dans les logements familiaux, puissent utiliser les moyens de transport fournis par l’ARC, les officiers devaient faire leurs propres arrangements, prendre leurs propres véhicules pour se rendre au pique-nique et en revenir, pique-nique qui se tenait près de Pirmasens, en Allemagne, à une distance d’environ 30 milles de la base militaire. Le lieutenant d’aviation Nicol, comme plusieurs autres officiers qui assistaient au pique-nique, y compris son commandant, se sont rendus au pique-nique dans l’un des cinq véhicules mis à leur disposition. Le lieutenant d’aviation Nicol s’est rendu au pique-nique avec le lieutenant d’aviation Alexander (voir le dossier d’appel, onglet 4, pièce G-1, page 131), mais comme l’a fait remarquer la Cour fédérale, aucun élément de preuve n’a été présenté quant aux autres personnes, le cas échéant, qui se seraient rendues au pique-nique dans le même véhicule. Le lieutenant d’aviation Alexander a déclaré être arrivé au pique-nique aux environs de 15 h.

[22] Le lieutenant d’aviation Nicol a quitté le pique-nique aux environs de 18 h ou 19 h avec deux autres collègues (les lieutenants d’aviation Waldorf et Johnson) dans le véhicule dont le lieutenant d’aviation Alexander était propriétaire et qu’il conduisait (voir le dossier d’appel, onglet 4, pièce G-1, page 129). Ils se sont arrêtés dans un restaurant de Pirmasens pour prendre un repas léger et se sont ensuite rendus dans un casino pour regarder un spectacle et prendre quelques verres. Le groupe (sans le lieutenant d’aviation Johnson) (voir le dossier d’appel, onglet 4, pièce G-1, page 129) a quitté le casino entre 23 h 30 et minuit (voir le dossier d’appel, onglet 4, pièce G-1, pages 129 et 131) pour revenir à Zweibrücken, en Allemagne, à la base militaire. L’accident s’est produit aux alentours de minuit quinze.

[23] Les trois officiers à bord du véhicule au moment de l’accident, y compris le lieutenant d’aviation Nicol, ont été trouvés par des automobilistes qui passaient par là (sans lien avec la base du lieutenant d’aviation Nicol), et ont été emmenés dans un hôpital civil à Pirmasens. Plus tard ce soir-là, après que l’ARC a été informée, ils ont été transférés à l’hôpital militaire américain de Landstuhl. Le lieutenant d’aviation Nicol a été le plus gravement blessé, et, selon le diagnostic établi à son sujet, ses blessures étaient de nature à entraîner une invalidité permanente (voir le dossier d’appel, onglet 4, pièce G-1, page 124).

[24] Une commission d’enquête a été constituée pour faire enquête sur l’accident, établir les faits et proposer des recommandations. Toujours hospitalisé, le lieutenant d’aviation Nicol a été interrogé, tout comme les deux autres officiers à bord du véhicule au moment de l’accident et les autres témoins qui les ont aidés par la suite. Les trois officiers en question ont mentionné qu’ils n’étaient pas en service au moment de l’accident. Dans un rapport de l’ARC sur l’accident du 8 juillet 1954, le commandant de l’escadre 3(F) a déclaré (au paragraphe 5 de sa déclaration) que le lieutenant d’aviation Nicol n’avait pas été blessé dans l’exercice de ses fonctions ou pendant sa participation à [traduction] « un jeu ou à une autre activité physique récréative approuvé par une autorité compétente de la Force aérienne », et qu’il était en « permission rémunérée » à l’époque pertinente (voir le dossier d’appel, onglet 4, pièce G-1, page 125). Le rapport de la commission d’enquête indique que le lieutenant d’aviation Alexander [traduction] « s’est endormi au volant du véhicule en raison d’un épuisement physique généralisé, conjugué au fait qu’il avait consommé des boissons alcooliques » (voir le dossier d’appel, onglet 4, pièce G-1, page 157). Il ressort des déclarations obtenues qu’il conduisait à une vitesse de 70 à 80 milles à l’heure.

[25] Après son congé, le lieutenant d’aviation Nicol a présenté une demande de pension d’invalidité. Il a notamment déclaré qu’il avait fait cette déclaration au cours de la commission d’enquête, alors qu’il était très malade et était sous sédation. Il a ajouté qu’à son avis, il était en service 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 au moment de l’accident parce qu’il servait dans des territoires occupés, en Allemagne. Il a également mentionné que tous les officiers étaient tenus d’assister au pique-nique (voir le dossier d’appel, onglet 4, pièce G-1, pages 61 et 62). Dans son témoignage devant la Commission des pensions du Canada en 1960, le lieutenant d’aviation Nicol a déclaré que lui et d’autres officiers s’étaient rendus à un ou deux endroits avant d’entreprendre le voyage de retour à la maison. Selon lui [traduction] « il était libre de quitter l’événement [après la fin du pique-nique en fin d’après-midi) en tout temps, puis aller là où bon lui semblait » (voir le dossier d’appel, onglet 4, pièce G-1, page 69). À ce moment, il a également mentionné qu’il était incapable de se souvenir des détails liés à l’accident.

[26] Quatorze ans plus tard, le lieutenant d’aviation Nicol a déposé une déclaration solennelle le 1er novembre 1974. Il a déclaré qu’il était en service au moment de l’accident, soit en tant que membre de la force d’occupation en Allemagne ou dans les circonstances qui ont mené à l’accident en tant que tel. Il a encore une fois fait remarquer que le moyen de transport fourni par l’ARC était offert aux autres militaires et aux membres de leur famille qui se rendaient au pique-nique, mais que les officiers avaient [traduction] « reçu instruction ou étaient censés» de prendre leurs propres dispositions pour s’y rendre. Dans cette déclaration, il a ajouté qu’ils ont quitté le site du pique-nique aux environs de 19 h ou 20 h (plutôt que 18 h ou 19 h comme il a été mentionné précédemment), une fois que la majorité du personnel de l’autre unité avait pris le chemin du retour à la base. Au paragraphe 5 de sa déclaration, il ne mentionne pas spécifiquement l’arrêt au casino, mais déclare simplement qu’un groupe, y compris le commandant d’aviation, s’était arrêté dans plusieurs restaurants pour de la nourriture et des rafraîchissements avant de finalement rentrer à la base. Enfin, après avoir décrit l’accident, il a écrit qu’il [traduction] « comprend » que le commandant d’aviation se trouvait dans un véhicule privé qui suivait directement celui du lieutenant d’aviation Alexander (voir le dossier d’appel, onglet 4, pièce G-1, page 62). Bien que cette dernière déclaration ne soit pas fondée sur des souvenirs personnels, elle semble avoir eu une certaine importance pour le lieutenant d’aviation Nicol.

[27] Toutefois, rien n’indique à quoi le lieutenant d’aviation Nicol fait allusion lorsqu’il mentionne que le véhicule du lieutenant d’aviation Alexander a quitté les lieux pour se rendre au pique-nique ou en revenir ou quand il a quitté le casino. Rien ne permet de penser qu’une personne de la base militaire, y compris le commandant d’aviation, se soit arrêtée sur les lieux de l’accident ou en ait été témoin, comme on pourrait s’y attendre puisque leurs véhicules se suivaient au moment où le véhicule du lieutenant d’aviation Alexander a quitté le casino. Aucune preuve n’indique que d’autres personnes de la base militaire sont allées au casino ni quand ou avec qui le lieutenant d’aviation Johnson a quitté le casino.

II. Analyse

[28] Comme je l’ai mentionné, dans l’arrêt Agraira, la Cour suprême du Canada a clairement indiqué que notre tâche consiste simplement à nous assurer que la Cour fédérale a choisi la norme de contrôle appropriée et l’a appliquée correctement.

[29] La Cour fédérale a appliqué la norme de la décision raisonnable pour examiner la décision du TACRA suivant l’arrêt qui faisait alors autorité : Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9 au para. 57. Aujourd’hui, c’est l’arrêt Vavilov qui fait autorité. Cet arrêt exige l’application de la norme de la décision raisonnable (aux para. 23 à 32).

[30] Ainsi, la seule question qui reste à trancher est de savoir si la Cour fédérale a appliqué correctement la norme de contrôle de la décision raisonnable. Pour trancher cette question, notre Cour se concentre sur la décision administrative (Agraira au para. 46) pour déterminer si elle est acceptable et justifiable, compte tenu des contraintes imposées au décideur administratif, et si une explication raisonnée des conclusions tirées peut être avancée. Cela ne signifie pas que nous ne tenons pas compte de la décision de la Cour fédérale, qui en l’espèce est très complète et dans laquelle il a été conclu que la décision du TACRA était raisonnable (Banque de Montréal c. Canada (Procureur général), 2021 CAF 189 au para. 4).

[31] Selon l’appelante, le narratif historique (reproduit dans la décision de la Cour fédérale, par. 14), qui décrit le pique-nique comme étant un [traduction] « pique-nique de la base », aurait dû avoir un effet certain sur la conclusion tirée par le CRP en 1978, parce que cela confirme que le pique-nique était un événement social organisé par l’ARC, au cours duquel le lieutenant d’aviation Nicol était donc en service. Toutefois, il convient de souligner que ce narratif historique ne confirme rien. Il ne confirme pas l’allégation du lieutenant d’aviation Nicol selon laquelle sa participation au pique-nique était obligatoire et qu’il était donc en service à ce moment. En fait, comme l’a mentionné la Cour fédérale, la déclaration contenue dans le narratif historique selon laquelle « [l]es participants étaient nombreux malgré la forte pluie » semble souligner que la participation n’était pas obligatoire. Au mieux, elle indique que plusieurs événements ont eu lieu pour célébrer la fête nationale malgré les conditions loin d’être idéales, parce que cet événement était organisé par l’ARC et visait à remonter le moral des troupes en pleine période de guerre froide. Je ne peux souscrire à l’argument de Mme Nicol selon lequel cet élément de preuve confirme que les officiers s’y rendraient en cas de mauvais temps que s’ils y étaient obligés. Il ne confirme pas non plus son point de vue selon lequel les seules personnes qui pouvaient se soustraire à l’événement étaient les familles, les épouses et les enfants.

[32] Je souligne également que, plus loin dans ce document, en lien avec le 3 juillet, on peut lire que [traduction] « seulement 50 % de la base était en service » ce jour-là (voir le dossier d’appel, onglet 4, pièce H, page 172). Cela, tout comme le rapport d’accident du commandant de l’escadre 3(F) et les déclarations des deux autres officiers concernés, semble contredire la thèse de l’appelante selon laquelle le lieutenant d’aviation Nicol, comme tout le monde à la base, était en service 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 alors qu’il servait en Allemagne, même en temps de paix, parce qu’ils servaient dans des territoires occupés. Le lieutenant d’aviation Nicol aurait fort bien pu considérer qu’il était en service 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Cela ne veut toutefois pas dire que, pour déterminer son droit à une pension d’invalidité, il était effectivement en service.

[33] Plus important encore, même après avoir admis que le pique-nique avait été organisé à l’intention des personnes à charge des militaires, et que le moyen de transport de l’ARC était fourni pour les autres militaires vivant dans les logements familiaux, le CRP a refusé de tenir compte des observations présentées par l’avocat-conseil des pensions parce que, compte tenu de toutes les circonstances, y compris le moment de l’accident et le fait que le lieutenant d’aviation Nicol croyait qu’il était libre d’aller au casino avec ses collègues pour regarder un spectacle et boire quelques verres, les blessures subies par le lieutenant d’aviation Nicol ne sont pas visées par les paragraphes 12(2) et 12(3) de la Loi sur les pensions, L.R.C. 1970, c P-7, modifiée par L.R.C. 1970, c 22 (2e suppl.) (maintenant les paragraphes 21(2) et 21(3) de la Loi sur les pensions actuelle).

[34] En l’espèce, la question n’est pas de savoir, comme le soumet Mme Nicol, s’il était anormal ou inhabituel pour de jeunes officiers d’aller au casino et de prendre quelques verres alors qu’ils se sentaient libres de le faire. La question n’est pas non plus de savoir si son époux a commis une faute. Le CRP ne s’est exprimé qu’en fonction du droit prévu par la loi qui s’appliquait alors.


 

[35] Cela ressort des passages suivants de ses motifs (voir le dossier d’appel, onglet 4, pièce G-1, page 97) :

[traduction]

Pour que l’appelant ait droit à une pension relativement à son état, il est nécessaire d’établir que la naissance ou l’aggravation de son état était consécutive ou rattachée directement à la période de service au cours de laquelle il était membre de la Force régulière. Le Conseil est tenu de tirer des circonstances et des éléments de preuve qui lui sont présentés les conclusions raisonnables les plus favorables possible à l’appelant; il est également tenu accepter tout élément de preuve crédible et non contredit que lui présente l’appelant, et, en soupesant la preuve, de trancher toute incertitude en faveur de l’appelant.

[36] Ce passage indique que le CRP était réceptif et attentif à son obligation d’appliquer les principes qui régissent la preuve, qui sont maintenant énoncés à l’article 39 de la Loi sur le TACRA (antérieurement l’article 85 de la Loi sur les pensions, 1970 dans sa forme modifiée). L’article 39 de la Loi sur le TACRA énonce le principe selon lequel les éléments de preuve présentés doivent recevoir une interprétation libérale en faveur du demandeur.

[37] Après avoir résumé les observations formulées par l’avocat-conseil des pensions sur les éléments de preuve présentés, le CRP a ajouté ce qui suit (voir le dossier d’appel, onglet 4, pièce G-1, pages 98 et 99) :

[traduction]

Notre Conseil a examiné attentivement les documents relatifs à la présente demande, et souligne que les éléments de preuve obtenus par l’intermédiaire de la commission d’enquête du 5 juillet 1954 sont beaucoup plus importants que ceux que l’avocat-conseil des pensions a exposés.

[…]

L’avocat‑conseil des pensions a soutenu qu’il fallait manifestement présumer que le pique‑nique avait été dûment autorisé puisque des mesures avaient été prises pour assurer le transport des autres militaires et leurs personnes à charge, et qu’il était évident que l’appelant était tenu d’y assister. Par conséquent, les dispositions du paragraphe 12(3) devraient s’appliquer et, puisque les incapacités se sont produites dans le cadre de cet événement, elles devraient être réputées consécutives ou rattachées directement au service dans la Force régulière comme le prévoit ce paragraphe. En se fondant sur ces éléments de preuve, le Conseil conclut que l’appelant ou ses compagnons n’étaient nullement tenus de retourner directement à leur base et qu’après le pique‑nique, ils étaient libres de faire ce qu’ils souhaitaient et ont décidé de se lancer dans une autre aventure de leur propre chef. Sur ce point, les circonstances se distinguent nettement de celles de l’affaire GLOVER.

Quant à savoir si le paragraphe 12(3) aurait trouvé application si les blessures s’étaient produites pendant le pique‑nique ou pendant que l’appelant retournait directement à sa base est une question théorique, puisque ces circonstances ne sont pas celles de l’espèce. Le Conseil conclut que les blessures subies par l’appelant, même s’il est évident qu’elles se sont produites pendant son service auprès de la Force régulière, ont été subies dans le cadre d’un accident de voiture à un moment et dans les circonstances où il n’exerçait pas une fonction militaire, et que les invalidités qui en ont découlé n’étaient pas consécutives ou rattachées directement au service dans la Force régulière.

[38] Je souligne que le CRP a employé l’expression « fonction » militaire, cette expression étant celle employée par l’avocat-conseil des pensions qui représentait Mme Nicol pour décrire le fait que le pique-nique était une fonction propre à l’unité, soit un événement organisé par l’ARC. Ainsi, en tirant sa dernière conclusion, le CRP n’a pas simplement mis l’accent sur la question de savoir si le lieutenant d’aviation Nicol était ou non en service lorsqu’il a assisté au pique-nique. Dans le narratif historique, aucun nouvel élément n’a été ajouté puisque le CRP avait déjà convenu qu’il s’agissait d’un événement désigné comme événement propre à la base. Il était donc raisonnable que le TACRA rejette la demande; cet élément de preuve confirmait simplement ce que le CRP avait déjà considéré comme étant un fait à évaluer parmi les diverses circonstances pertinentes dont il pouvait tenir compte. Cet élément de preuve n’aurait pas pu influer sur l’issue.

[39] Le CRP a tenu compte de la disposition législative qui s’appliquait alors, et qui se trouve maintenant au paragraphe 21(3) de la Loi sur les pensions. De plus, même de son propre chef, le TACRA n’a pas le droit de réexaminer la décision d’un organisme qui l’a précédé en l’absence d’une erreur de fait ou d’une erreur dans l’interprétation de la loi. Rien ne permettait d’en trouver une en l’espèce.

[40] En l’espèce, l’approche adoptée par le CRP était conforme à celle approuvée par la Cour fédérale dans la décision Fournier c. Canada (Procureur général), 2005 CF 453 au para. 35, que notre Cour a endossée sans réserve (2006 CAF 19). Le TACRA (et les organismes qui l’ont précédé) peut examiner plusieurs facteurs pertinents, dont aucun n’est en soi déterminant (voir la décision de la Cour fédérale au para. 29). Cela comprend la question de savoir si la personne était en service ou non, de même que le degré de contrôle que le militaire exerçait sur le demandeur au moment de l’accident.

[41] Je réalise que j’analyse davantage de détails et de questions que ne l’exige l’arrêt Vavilov lors d’un examen du caractère raisonnable. Je ressens le besoin de rassurer Mme Nicol sur le fait que j’ai examiné attentivement le dossier et que j’ai tenu compte de ses préoccupations.

[42] Mme Nicol mentionne que le CRP aurait dû accepter la déclaration de son époux selon laquelle il était en service 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, de sorte que tout ce qu’il a fait en tout temps était consécutif à son service militaire. Comme je l’ai mentionné précédemment, le CRP était saisi d’une preuve contradictoire à ce sujet. Le CRP n’était pas tenu d’accepter la déclaration de l’ancien combattant conformément à l’article 39 de la Loi sur le TACRA. Il ne s’agissait pas d’une déclaration non contredite. Mme Nicol indique également que la preuve présentée par les autres officiers selon laquelle ils n’étaient pas en service au moment pertinent aurait dû être interprétée comme signifiant simplement [traduction] « qu’ils ne pilotaient pas d’avions à ce moment-là ». Si cela était la façon dont un lieutenant d’aviation comprenait habituellement le terme « service », il n’aurait pas été nécessaire pour le lieutenant d’aviation Nicol de rétracter la déclaration qu’il a faite au cours de l’enquête, en 1954. Il serait également illogique pour lui de dire, comme tous les autres officiers de la base militaire, qu’il était en service 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 parce qu’ils se trouvaient dans des territoires occupés.

[43] Quant à la réserve émise par l’appelante sur l’emploi de l’expression « zone grise » (décision de la Cour fédérale au au para. 36), il semble qu’elle ait pu mal interpréter le commentaire formulé par la Cour fédérale. Cela ne signifie pas qu’il subsistait un doute dans l’esprit de la Cour fédérale ou des décideurs administratifs, qui devrait être tranché en faveur de l’appelante conformément à l’article 39 de la Loi sur le TACRA. La « zone grise » renvoie plutôt à l’équilibre entre les diverses circonstances pertinentes, y compris le moment et les circonstances uniques menant à cet accident, qui ne convergeaient pas toutes vers une seule issue pour déterminer s’il y avait un lien suffisant avec le service militaire.

[44] L’expression a été employée par la Cour fédérale dans Fournier, qui a cité les propos du juge Evans dans McTague c. Canada (Procureur général), [2000] 1 C.F. 647, une décision qui a fait jurisprudence et qui a été mentionnée à de nombreuses reprises au fil des ans. Cet équilibre est requis par la loi et est un aspect fondamental de la compétence du TACRA et des organismes qui l’ont précédé.

[45] Mme Nicol nous demande de donner des directives au TACRA, semblables à celles données par la Cour fédérale (2004 CF 986) dans la décision Frye, selon lesquelles une pension doit être accordée au terme du réexamen de la demande. Comme je l’ai déjà mentionné, la jurisprudence a évolué depuis la décision Frye. Dans l’arrêt Vavilov, la Cour suprême a souligné que, dans le cadre d’un examen selon la norme de la décision raisonnable, c’est au décideur administratif de rendre la décision, et non à une cour de révision comme la nôtre. Même si j’admettais les nouveaux éléments de preuve selon le critère énoncé dans la décision Mackay, et que j’étais en mesure de conclure que le TACRA avait commis une erreur susceptible de révision, je ne serais pas habilitée à accorder une pension ou à ordonner au TACRA de le faire. Selon le présent régime législatif, seul le TACRA peut habituellement le faire après avoir procédé au réexamen de la décision de 1978 (deuxième étape aux termes de l’article 111 de la Loi sur le TACRA).

[46] Cela m’amène à me pencher sur la dernière préoccupation soulevée par Mme Nicol concernant le fait que le TACRA n’a pas fait mention des trois décisions soulevées dans les observations écrites présentées par l’avocat-conseil des pensions. Je fais d’abord remarquer que chaque affaire dont le TACRA est saisi doit être tranchée au cas par cas, et que le TACRA (ou le CRP) n’est pas lié par les précédents portant sur ce que Mme Nicol estime être des situations de fait similaires. Quoi qu’il en soit, toutes ces affaires se distinguent des faits de l’espèce.

III. Conclusion

[47] Compte tenu de ce qui précède, je propose de rejeter l’appel, sans dépens.

[48] Bien que l’appelante Mme Nicol, dans la quatre-vingtaine, n’ait pas gain de cause dans son appel, je salue le courage dont elle a fait preuve en interjetant le présent appel et en introduisant toutes les instances qui l’ont précédé. J’espère sincèrement que Mme Nicol pourra maintenant jouir de ses dernières années de vie sachant qu’elle a vraiment fait tout ce qui lui était possible pour honorer la mémoire de son défunt mari.

« Johanne Gauthier »

j.c.a.

« Je suis d’accord.

David Stratas, j.c.a. »

« Je suis d’accord.

J.B. Laskin, j.c.a. »


ANNEXE

Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel), L.C. 1995, ch. 18

[…]

Principe général

Construction

3. Les dispositions de la présente loi et de toute autre loi fédérale, ainsi que de leurs règlements, qui établissent la compétence du Tribunal ou lui confèrent des pouvoirs et fonctions doivent s’interpréter de façon large, compte tenu des obligations que le peuple et le gouvernement du Canada reconnaissent avoir à l’égard de ceux qui ont si bien servi leur pays et des personnes à leur charge.

3. The provisions of this Act and of any other Act of Parliament or of any regulations made under this or any other Act of Parliament conferring or imposing jurisdiction, powers, duties or functions on the Board shall be liberally construed and interpreted to the end that the recognized obligation of the people and Government of Canada to those who have served their country so well and to their dependants may be fulfilled.

[…]

Nouvel examen

Reconsideration of decisions

32. (1) Par dérogation à l’article 31, le comité d’appel peut, de son propre chef, réexaminer une décision rendue en vertu du paragraphe 29(1) ou du présent article et soit la confirmer, soit l’annuler ou la modifier s’il constate que les conclusions sur les faits ou l’interprétation du droit étaient erronées; il peut aussi le faire sur demande si l’auteur de la demande allègue que les conclusions sur les faits ou l’interprétation du droit étaient erronées ou si de nouveaux éléments de preuve lui sont présentés.

32. (1) Notwithstanding section 31, an appeal panel may, on its own motion, reconsider a decision made by it under subsection 29(1) or this section and may either confirm the decision or amend or rescind the decision if it determines that an error was made with respect to any finding of fact or the interpretation of any law, or may do so on application if the person making the application alleges that an error was made with respect to any finding of fact or the interpretation of any law or if new evidence is presented to the appeal panel.

[…]

Règles régissant la preuve

Rules of evidence

39. Le Tribunal applique, à l’égard du demandeur ou de l’appelant, les règles suivantes en matière de preuve :

39. In all proceedings under this Act, the Board shall

a) il tire des circonstances et des éléments de preuve qui lui sont présentés les conclusions les plus favorables possible à celui-ci;

(a) draw from all the circumstances of the case and all the evidence presented to it every reasonable inference in favour of the applicant or appellant;

b) il accepte tout élément de preuve non contredit que lui présente celui-ci et qui lui semble vraisemblable en l’occurrence;

(b) accept any uncontradicted evidence presented to it by the applicant or appellant that it considers to be credible in the circumstances; and

c) il tranche en sa faveur toute incertitude quant au bien-fondé de la demande.

(c) resolve in favour of the applicant or appellant any doubt, in the weighing of evidence, as to whether the applicant or appellant has established a case.

[…]

Demande de réexamen

Reconsideration of decisions of predecessor bodies

111. Le Tribunal des anciens combattants (révision et appel) est habilité à réexaminer toute décision du Tribunal d’appel des anciens combattants, du Conseil de révision des pensions, de la Commission des allocations aux anciens combattants ou d’un comité d’évaluation ou d’examen, au sens de l’article 79 de la Loi sur les pensions, et soit à la confirmer, soit à l’annuler ou à la modifier comme s’il avait lui-même rendu la décision en cause s’il constate que les conclusions sur les faits ou l’interprétation du droit étaient erronées; s’agissant d’une décision du Tribunal d’appel, du Conseil ou de la Commission, il peut aussi le faire sur demande si de nouveaux éléments de preuve lui sont présentés.

111. The Veterans Review and Appeal Board may, on its own motion, reconsider any decision of the Veterans Appeal Board, the Pension Review Board, the War Veterans Allowance Board, or an Assessment Board or an Entitlement Board as defined in section 79 of the Pension Act, and may either confirm the decision or amend or rescind the decision if it determines that an error was made with respect to any finding of fact or the interpretation of any law, or may, in the case of any decision of the Veterans Appeal Board, the Pension Review Board or the War Veterans Allowance Board, do so on application if new evidence is presented to it.


Loi sur les pensions, L.R.C. (1985), ch. P-6

[…]

[…]

Milice active non permanente ou armée de réserve en temps de paix

Service in militia or reserve army and in peace time

21. (2) En ce qui concerne le service militaire accompli dans la milice active non permanente ou dans l’armée de réserve pendant la Seconde Guerre mondiale ou le service militaire en temps de paix :

21. (2) In respect of military service rendered in the non-permanent active militia or in the reserve army during World War II and in respect of military service in peace time,

a) des pensions sont, sur demande, accordées aux membres des forces ou à leur égard, conformément aux taux prévus à l’annexe I pour les pensions de base ou supplémentaires, en cas d’invalidité causée par une blessure ou maladie — ou son aggravation — consécutive ou rattachée directement au service militaire;

(a) where a member of the forces suffers disability resulting from an injury or disease or an aggravation thereof that arose out of or was directly connected with such military service, a pension shall, on application, be awarded to or in respect of the member in accordance with the rates for basic and additional pension set out in Schedule I;

[…]

[…]

Présomption

Presumption

(3) Pour l’application du paragraphe (2), une blessure ou maladie — ou son aggravation — est réputée, sauf preuve contraire, être consécutive ou rattachée directement au service militaire visé par ce paragraphe si elle est survenue au cours :

(3) For the purposes of subsection (2), an injury or disease, or the aggravation of an injury or disease, shall be presumed, in the absence of evidence to the contrary, to have arisen out of or to have been directly connected with military service of the kind described in that subsection if the injury or disease or the aggravation thereof was incurred in the course of

a) d’exercices d’éducation physique ou d’une activité sportive auxquels le membre des forces participait, lorsqu’ils étaient autorisés ou organisés par une autorité militaire, ou exécutés dans l’intérêt du service quoique non autorisés ni organisés par une autorité militaire;

(a) any physical training or any sports activity in which the member was participating that was authorized or organized by a military authority, or performed in the interests of the service although not authorized or organized by a military authority;

b) d’une activité accessoire ou se rattachant directement à une activité visée à l’alinéa a), y compris le transport du membre des forces par quelque moyen que ce soit entre le lieu où il exerçait normalement ses fonctions et le lieu de cette activité;

(b) any activity incidental to or directly connected with an activity described in paragraph (a), including the transportation of the member by any means between the place the member normally performed duties and the place of that activity;

c) soit du transport du membre des forces, à l’occasion de ses fonctions, dans un bâtiment, véhicule ou aéronef militaire ou par quelque autre moyen de transport autorisé par une autorité militaire, soit d’un acte fait ou d’une mesure prise par le membre des forces ou une autre personne lorsque cet acte ou cette mesure était accessoire ou se rattachait directement à ce transport;

(c) the transportation of the member, in the course of duties, in a military vessel, vehicle or aircraft or by any means of transportation authorized by a military authority, or any act done or action taken by the member or any other person that was incidental to or directly connected with that transportation;

d) du transport du membre des forces au cours d’une permission par quelque moyen autorisé par une autorité militaire, autre qu’un moyen de transport public, entre le lieu où il exerçait normalement ses fonctions et soit le lieu où il devait passer son congé, soit un lieu où un moyen de transport public était disponible;

(d) the transportation of the member while on authorized leave by any means authorized by a military authority, other than public transportation, between the place the member normally performed duties and the place at which the member was to take leave or a place at which public transportation was available;

e) du service dans une zone où la fréquence des cas de la maladie contractée par le membre des forces ou qui a aggravé une maladie ou blessure dont souffrait déjà le membre des forces, constituait un risque pour la santé des personnes se trouvant dans cette zone;

(e) service in an area in which the prevalence of the disease contracted by the member, or that aggravated an existing disease or injury of the member, constituted a health hazard to persons in that area;

f) d’une opération, d’un entraînement ou d’une activité administrative militaires, soit par suite d’un ordre précis, soit par suite d’usages ou pratiques militaires établis, que l’omission d’accomplir l’acte qui a entraîné la maladie ou la blessure ou son aggravation eût entraîné ou non des mesures disciplinaires contre le membre des forces;

(f) any military operation, training or administration, either as a result of a specific order or established military custom or practice, whether or not failure to perform the act that resulted in the disease or injury or aggravation thereof would have resulted in disciplinary action against the member; and

g) de l’exercice, par le membre des forces, de fonctions qui ont exposé celui-ci à des risques découlant de l’environnement qui auraient raisonnablement pu causer la maladie ou la blessure ou son aggravation.

(g) the performance by the member of any duties that exposed the member to an environmental hazard that might reasonably have caused the disease or injury or the aggravation thereof.


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

A-405-15

 

APPEL D’UN JUGEMENT RENDU PAR LE JUGE YVES DE MONTIGNY LE 24 JUIN 2015, DOSSIER NO T-2054-14

 

 

 

INTITULÉ :

MME CAROL A. NICOL, veuve du lieutenant d’aviation ROBERT DONALD NICOL c. LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

LA JUGE GAUTHIER

 

Y ONT SOUSCRIT :

LE JUGE STRATAS

LE JUGE LASKIN

 

DATE DES MOTIFS :

Le 4 novembre 2022

 

OBSERVATIONS ÉCRITES :

Carol A. Nicol

Pour l’appelante

Hanna Davis

Pour l’intimé

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

A. François Daigle

Sous-procureur général du Canada

Pour l’intimé

 

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