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Date : 20230112

Dossier : A-469-19

Référence : 2023 CAF 6

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Présents :

Stéphanie St-Pierre Babin, officière taxatrice

 

ENTRE :

 

 

LA PREMIÈRE NATION DE KEY

 

 

appelante

 

 

et

 

 

STÉPHANIE C. LAVALLÉE, DONALD WORME, RODNEY BRASS, ANGELA DESJARLAIS, SIDNEY KESHANE ET GLEN O’SOUP

 

 

intimés

 

Taxation des dépens sans comparution des parties.

Certificat de taxation délivré à Ottawa (Ontario), le 12 janvier 2023.

MOTIFS DE TAXATION :

STÉPHANIE ST-PIERRE BABIN, officière taxatrice

 


Date : 20230112

Dossier : A-469-19

Référence : 2023 CAF 6

Présents :

Stéphanie St-Pierre Babin, officière taxatrice

 

ENTRE :

 

 

LA PREMIÈRE NATION DE KEY

 

 

appelante

 

 

et

 

 

STÉPHANIE C. LAVALLÉE, DONALD WORME, RODNEY BRASS, ANGELA DESJARLAIS, SIDNEY KESHANE ET GLEN O’SOUP

 

 

intimés

 

MOTIFS DE TAXATION

STÉPHANIE ST-PIERRE BABIN, officière taxatrice

I. Introduction

[1] Par voie de jugement, la Cour d’appel fédérale [CAF] a accueilli l’appel avec dépens le 23 juin 2021, a infirmé la décision précédente de la Cour fédérale dans le dossier T-1464-18 et a accueilli la demande de contrôle judiciaire tout en adjugeant les dépens engagés en Cour fédérale [CF]. À la réception du mémoire de frais de l’appelante, déposé le 30 novembre 2021, une directive a été donnée par un officier taxateur informant les parties que la taxation s’effectuerait par écrit et leur indiquant la date limite pour soumettre leurs observations écrites. Après avoir examiné les documents déposés au nom des deux parties, je vais maintenant me pencher sur les deux questions préliminaires. Par la suite, j’aborderai les services à taxer réclamés successivement pour l’instruction devant la CF, puis pour l’instruction devant la CAF.

II. Questions préliminaires

A. Niveau des dépens

[2] Les deux parties conviennent que le mémoire de frais de l’appelante doit être évalué en conformité avec la colonne III du tableau du tarif B conformément à la Règle 407 des Règles des Cours fédérales, DORS/98/106 (les Règles). Cependant, les deux parties ne s’entendent pas sur le niveau des dépens dans cette fourchette. L’appelante affirme qu’elle a droit au nombre maximal d’unités autorisé compte tenu des facteurs énoncés aux Règles 400(3) et 409 des Règles (réponse de l’appelante aux para. 3, 40 et 41). En revanche, tout au long de leurs observations écrites, les intimés demandent que la taxation des services soit évaluée vers le bas ou au bas de la fourchette de la colonne III.

[3] Il est bien établi que chaque article du tarif B présente ses propres circonstances et qu’il n’est pas nécessaire d’utiliser le même niveau dans toute la fourchette d’unités (Starlight c. Canada, 2001 CFPI 999 au para. 7; Bujnowski c. La Reine, 2010 CAF 49 au para. 9; Aéroport international du Grand Moncton c. Alliance de la fonction publique du Canada, 2009 CAF 72 au para. 7). Bien que les dépens soient généralement évalués autour de la valeur médiane de la colonne III, un officier taxateur est en mesure d’accorder des dépens à un niveau inférieur ou supérieur à cette valeur médiane lorsque des circonstances particulières le dictent (Ligue des droits de la personne de B’nai Brith Canada c. Canada, 2012 CAF 61 au para. 15). Étant donné l’absence d’instructions contraires de la Cour, je déterminerai donc le nombre d’unités admissibles pour chaque article sur une base individuelle dans la fourchette complète de la colonne III (Hoffman-La Roche Limited c. Apotex inc, 2013 CF 1265 au para. 8). Ce faisant, je dois garder à l’esprit le principe selon lequel « les dépens fournissent habituellement une compensation partielle, au lieu de rembourser toutes les dépenses et tous les débours engagés par une partie, ce qui représente un compromis entre l’indemnisation de la partie qui a obtenu gain de cause et l’imposition d’une charge excessive à la partie déboutée » (Compagnie de chemin de fer Canadien Pacifique c. Canada, 2022 CF 392, au para. 23).

B. Responsabilité à l’égard des dépens

[4] En l’espèce, deux des intimés, Stéphanie C. Lavallée et Donald Worme, ont présenté des observations écrites sur les dépens. Ils soutiennent qu’ils n’étaient pas des [traduction] « parties nécessaires à la demande » et qu’ [traduction] « aucune réparation n’a été demandée à leur encontre » (observations des intimés aux para. 4 à 6, 116 et 117). D’autre part, l’appelante affirme qu’ils étaient des parties nécessaires puisqu’ils se sont opposés à la demande, ont déposé des documents volumineux et ont présenté des arguments oraux devant la CF et la CAF (réponse de l’appelante au para. 13).

[5] À la suite de mon examen du jugement et des motifs du jugement rendu le 23 juin 2021, je note que l’appelante a eu gain de cause devant les deux instances et que la CAF n’a pas précisé quels intimés doivent supporter les dépens. Il est pertinent de reproduire le jugement de la CAF :

L’appel est accueilli avec dépens. La décision de la Cour fédérale est annulée. Rendant le jugement que la Cour fédérale aurait dû rendre, la demande de contrôle judiciaire est accueillie avec dépens devant la Cour fédérale, et la résolution du conseil de la bande datée du 10 novembre 2016 ainsi que les décisions connexes ordonnant le transfert des fonds de la bande à Semaganis Worme Legal sont annulées.

[Non souligné dans l’original.]

[6] La Règle 400(1) des Règles confère à la Cour « le pouvoir discrétionnaire de déterminer le montant des dépens, de les répartir et de désigner les personnes qui doivent les payer » De plus, le paragraphe 5(1) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F-7 [la Loi] dispose que « la Cour […] se compose du juge en chef, […] et de quatorze autres juges ». D’après ces définitions, il est clair que, dans mes fonctions d’officière taxatrice, je n’ai pas le pouvoir de déterminer qui doit payer les dépens, car je ne suis pas un membre de la Cour, mais plutôt « un fonctionnaire du greffe » (Règle 2). Si certains intimés avaient des doutes quant à leur responsabilité à l’égard des dépens, ils auraient pu présenter une requête devant la Cour dans les 30 jours suivant le prononcé du jugement (Règle 403(1)a)). Pour ces motifs, dans le cadre de la présente taxation, je déterminerai un montant total payable par tous les intimés en fonction de la loi et de la jurisprudence applicables.

III. Services taxables

A. Cour fédérale (T-1464-18)

1) Article 1 – Préparation et dépôt des actes introductifs d’instance

[7] Dans le mémoire de frais, l’appelante réclame sept unités pour la préparation et le dépôt des actes introductifs d’instance, selon la partie supérieure de la fourchette de la colonne III. En réponse, les intimés soutiennent que le mémoire des frais devrait se situer [traduction] « dans l’extrémité inférieure des unités autorisées ou aux environs de celle-ci » étant donné qu’ [traduction] « il n’y a rien de trop compliqué » (observations des intimés au para. 28). D’autre part, l’appelante soutient que les questions en litige soulevées étaient compliquées et nuancées puisque la CAF [traduction] « a décrit les questions comme étant rares et exceptionnelles » (réponse de l’appelante au para. 24).

[8] L’article 1 a une gamme disponible de quatre à sept unités sous la colonne III du tarif B. À la suite de mon examen du dossier judiciaire, les documents applicables sont les suivants : l’avis de demande (10 pages), l’affidavit de Clinton Key (9 pages), l’affidavit de Clarence Papequash (9 pages) et le mémoire des faits et du droit (28 pages). J’ai examiné les documents précités et les observations des parties en tenant compte de facteurs tels que : (a) le résultat de l’instance en faveur de l’appelante, (c) l’importance et la complexité des questions en litige soulevées dans les actes introductifs d’instance et (g) la quantité de travail accompli en relation avec les actes introductifs d’instance. En ce qui concerne plus précisément la question de la complexité, on peut lire ce qui suit dans les motifs du jugement :

IV. Conclusion et dispositif

[72] Les situations dans lesquelles une bande a qualité pour demander le contrôle judiciaire d’une décision précédente du conseil de bande sont rares et exceptionnelles. […]

[9] Cette déclaration particulière me convainc de l’importance et de la complexité des questions en litige examinées par la CF. Par conséquent, j’estime que l’allocation de sept unités, le nombre maximal d’unités réclamé par l’appelante, illustre bien le litige en l’espèce.

2) Article 13(a) – Honoraires d’avocat pour la préparation des requêtes préalables à l’audience

[10] Dans son mémoire de frais, l’appelante réclame cinq unités pour les procédures préalables à l’audience de contrôle judiciaire tenue le 24 juin 2019. Les intimés soutiennent que l’article 13(a) devrait être réduit à deux unités étant donné que la demande de l’appelante reposait entièrement sur une preuve par affidavit, qu’il n’y a pas eu de contre-interrogatoire et qu’aucun autre service autrement précisé par l’article 13(a) n’a été indiqué (observations des intimés aux para. 30 et 31). Quant à l’appelante, elle affirme ce qui suit : [traduction] « [b]ien que cette affaire ait été entendue exclusivement sur la base d’une preuve par affidavit, cela n’enlève rien au temps et aux efforts considérables requis à la fois pour une audience et un appel de cette nature » (réponse de l’appelante au para. 25).

[11] Dans ses observations écrites, l’appelante n’a pas précisé exactement quelle préparation demandait beaucoup de temps et d’efforts. En l’absence d’observations complètes et d’éléments de preuve étoffés, je m’appuierai sur la décision Carlile c. Canada (ministre du Revenu national), [1997] A.C.F. no 885 [décision Carlile] où l’officier taxateur a déclaré ce qui suit :

Les officiers taxateurs sont souvent saisis d’une preuve loin d’être complète et doivent, tout en évitant d’imposer aux parties perdantes des frais déraisonnables ou non nécessaires, s’abstenir de pénaliser les parties qui ont gain de cause en refusant de leur accorder une indemnité lorsqu’il est évident que des frais ont effectivement été engagés. Cela signifie que l’officier taxateur doit jouer un rôle subjectif au cours de la taxation.

[12] Compte tenu de la décision Carlile et compte tenu de l’importance et de la complexité des questions en litige dans le présent dossier (Règles 400(3)g) et 409), je conclus qu’il est raisonnable d’accorder trois unités pour l’article 13(a).

3) Article 14(a) – Honoraires d’avocat pour la présence à la Cour

[13] L’appelante réclame six unités à titre d’honoraires d’avocat pour l’audience portant sur la demande de contrôle judiciaire tenue le 24 juin 2019. En réponse, les intimés soutiennent qu’aucun élément de preuve n’a été fourni par l’appelante à l’appui de la revendication du nombre maximal d’unités et qu’en conséquence, quatre unités devraient être autorisées pour l’article 14(a) (observations des intimés aux para. 33 et 34). Enfin, l’appelante affirme qu’une approximation raisonnable devrait donner droit à une attribution d’au moins six unités. L’article 14(a) a une fourchette de résultats possibles de deux à trois unités dans la colonne III du tarif B. J’ai examiné les observations des parties et pris en compte des facteurs tels que : a) le résultat de l’instance favorisait l’appelante; et c) l’importance et la complexité des questions discutées lors de l’audience, et j’ai déterminé que les trois unités réclamées en vertu de la colonne III étaient raisonnables (Règles 400(3) et 409).

[14] Quant à la durée de l’audience, l’appelante a réclamé deux heures pour l’audience tenue le 24 juin 2019. Pour leur part, les intimés affirment que, lorsqu’un service réclamé est basé sur un nombre d’heures, ce dernier doit être étayé par un élément de preuve (paragraphe 1(2) du tarif B des Règles). En réponse, l’appelante a fait valoir que l’approximation raisonnable du temps d’audience était de deux heures. Je suis d’accord avec l’appelante. Le résumé d’audience, qui fournit les détails de l’audience dans le dossier de la Cour, montre que la durée totale de l’audition de la demande de contrôle judiciaire du 24 juin 2019 était de 1 heure et 57 minutes. Étant donné que le résumé d’audience est une source d’informations fiable préparé par un agent du greffe, et considérant que l’article 14 comprend « un certain temps passé dans la salle d’audience avant le début ou la reprise des audiences », j’accorde à l’appelante les deux heures qu’elle a demandées (Guest Tek Interactive Entertainment Ltd c. Nomadix, Inc., 2021 CF 848 au para. 51). À la lumière de ce qui précède, j’accorde à l’appelante les six unités selon l’article 14(a) qu’elle a demandées. Cette valeur a été calculée en multipliant les deux heures réclamées par l’appelante par les trois unités permises en vertu de la colonne III.

4) Article 24 – Frais de déplacement de l’avocat

[15] Dans son mémoire de frais, l’appelante réclame cinq unités pour les frais de déplacement encourus par l’avocat pour assister à l’audience de la CF tenue le 24 juin 2019. Pour leur part, les intimés soutiennent que les officiers taxateurs n’ont pas le pouvoir d’autoriser les frais au titre de l’article 24 étant donné que cet article est [traduction] « à la discrétion de la Cour » (Carr c. Canada, 2009 CF 1196 aux para. 7 et 8). Je partage l’avis des intimés.

[16] Comme je l’ai déjà expliqué en détail au paragraphe 6 des présents motifs, en tant qu’officière taxatrice, je ne suis pas membre de la Cour (Règle 2 et paragraphe 5(1) de la Loi). Par conséquent, je n’ai pas compétence pour autoriser les frais visés à l’article 24 en l’absence d’instructions particulières de la Cour (Double Diamond Distribution Ltd c. Crocs Canada, Inc, 2021 CAF 47 au para. 16; Delizia Limited c. Sunridge Gold Corp, 2018 CAF 158 au para. 7 (décision non publiée, numéro de greffe A-119-16); Olumide c. Parti conservateur du Canada, 2016 CAF 168 au para. 14 (décision non publiée, numéro du greffe A-301-15)). Après avoir examiné le jugement et les motifs du jugement, rien n’indique que des frais de déplacement ont été accordés par la Cour et, par conséquent, je n’accorderai pas les cinq unités réclamées qui sont prévues à l’article 24.

B. Cour d’appel fédérale (A-469-19)

1) Articles 17, 18 et 20 – Services non contestés

[17] Les unités réclamées pour les services rendus aux articles 17 (1 unité), 18 (1 unité) et 20 (1 unité) du mémoire de frais ne sont pas contestées (observations des intimés au para. 26). Après un examen minutieux du dossier judiciaire, je considère que ces éléments relèvent de l’autorité du jugement et du tarif B. Ils sont accordés intégralement.

2) Article 19 – Mémoire des faits et du droit.

[18] L’appelante réclame sept unités pour l’article 19, qui correspond à la valeur de dépens maximale de la colonne III. Aux paragraphes 36 et 37 de leurs observations écrites en réponse, les intimés soutiennent que les paragraphes 39 à 86 et d’autres passages du mémoire des faits et du droit déposé par l’appelante auprès de la CAF sont une reproduction « textuelle » du mémoire des faits et du droit déposé auprès de la CF. De plus, ils soutiennent que les principales différences sont liées aux observations concernant un appel par rapport à une demande. En contre-preuve, l’appelante soutient que [traduction] « des dépens n’ont jamais été accordés en première instance » et qu’elle [traduction] « devrait avoir droit au nombre maximal d’unités » (réponse de l’appelante au para. 27).

[19] À la suite de mon examen des deux mémoires, je constate que plusieurs parties sont essentiellement les mêmes. À mon avis, la duplication de certaines parties du mémoire des faits était inévitable puisque l’appel découle du même cadre législatif et des mêmes faits que ceux du contrôle judiciaire (Abi-Mansour c. Commission de la fonction publique, 2014 CAF 166 au para. 10 (décision non publiée, numéro de dossier de la Cour A-82-13)). Par conséquent, je reconnais que certains efforts ont néanmoins été exigés de la part des avocats. Ces efforts ne justifient toutefois pas d’accorder des dépens à l’échelon supérieur de la colonne III du tarif, car contrairement à ce que prétend l’appelante, j’ai déjà accordé des unités pour le mémoire des faits et du droit déposé auprès de la CF au titre de l’article 1. Permettre le nombre maximal d’unités équivaudrait à un trop-payé en faveur de l’appelante. Pour ces raisons, j’accorde cinq unités pour l’article 19.

3) Article 22(a) – Honoraires d’avocat pour présence devant la Cour

[20] L’appelante réclame six unités à titre d’honoraires d’avocat pour présence à l’audience de l’appel tenue le 16 mars 2021. Pour leur part, les intimés soutiennent essentiellement qu’il [traduction] « n’y avait rien de particulièrement complexe » et que, par conséquent, quatre unités devraient être accordées (observations des intimés aux para. 41 et 42). Enfin, l’appelante soutient que les questions en litige en appel étaient [traduction] « importantes, techniques et complexes », et que beaucoup de temps, d’efforts et de dépenses ont été engagés pour préparer l’audience et y assister (réponse de l’appelante au para. 28).

[21] L’article 22a) offre une fourchette de résultats possibles de deux à trois unités dans la colonne III du tarif B. J’ai examiné les observations des parties en tenant compte de facteurs tels que : a) le résultat de l’instance en faveur de l’appelante; c) l’importance et la complexité des questions en litige; et g) la charge de travail liée à l’audience, et j’ai déterminé que les trois unités réclamées en vertu de la colonne III étaient raisonnables (Règles 400(3) et 409 des Règles). Quant à la durée, suite à mon examen du résumé d’audience préparé par un agent du greffe, les deux heures réclamées pour la présence des avocats sont raisonnables puisque la durée totale de l’audience d’appel tenue le 16 mars 2021 était de deux heures et une minute. À la lumière de ce qui précède, j’accorde le total de six unités réclamées par l’appelante. Cette valeur a été calculée en multipliant les deux heures par les trois unités permises en vertu de la colonne III.

C. Article 26 – Taxation des frais

[22] Dans son mémoire de frais, l’appelante réclame six unités pour les services rendus dans le cadre de la taxation des dépens. D’autre part, les intimés soutiennent que l’appelante devrait avoir droit à trois unités au plus, étant donné que le mémoire de frais et l’affidavit de Lynda Troup totalisaient cinq pages (à l’exclusion des pièces à l’appui et des pages de couverture) (observations des intimés au para. 52). Enfin, l’appelante soutient qu’elle devrait avoir droit à six unités, l’échelon supérieur de la colonne III du tarif, puisqu’elle a dû répondre aux 21 pages soumises par les intimés en réponse au mémoire de frais et soutient qu’elle a consacré beaucoup de temps et d’argent à la recherche et à la rédaction de sa réponse (réponse de l’appelante aux para. 29 et 30).

[23] À la suite de mon examen des observations écrites fournies par les deux parties et des affidavits joints à celles-ci, j’estime que cette taxation des dépens est d’une complexité moyenne. En effet, bien que la taxation des dépens ait été faite par écrit et que l’appelante n’ait pas déposé d’observations écrites pour étayer initialement son mémoire de frais, je reconnais que des dépens liés à l’instance devant la CF et la CAF ont été accordés. Il en est résulté que les parties n’étaient pas d’accord sur un nombre considérable d’articles du tarif B et de débours pour lesquels elles ont fait des recherches et présenté des observations écrites. Dans les circonstances particulières de l’espèce, je trouve raisonnable d’accorder cinq unités.

IV. Débours

A. Photocopie et impression

[24] L’appelante a réclamé 851,00 $ pour les photocopies à l’interne et 676,00 $ pour les impressions à l’interne. À l’appui de sa demande, l’appelante a fourni des registres comptables (affidavit de Lynda Troup aux para. 4 et 5). En réponse, les intimés soutiennent qu’aucune observation écrite n’a été fournie pour étayer le caractère raisonnable des montants réclamés et que cela devrait donner lieu à une évaluation prudente. Ils ont également procédé à l’évaluation du nombre de copies déposées par l’appelante dans les deux dossiers judiciaires. De plus, ils ont fourni des observations concernant l’impression couleur de documents. En réfutation, l’appelante soutient essentiellement que les montants réclamés sont raisonnables dans les circonstances de l’espèce, qu’ils ont été suffisamment détaillés dans l’affidavit de Lynda Troup et qu’ils ont été légitimement engagés aux fins de la demande de contrôle judiciaire et de l’appel (réponse de l’appelante au para. 31).

[25] En ce qui concerne tout débours, le principe fondamental demeure qu’une partie qui a gain de cause a droit à des débours qui sont à la fois « raisonnables et nécessaires au déroulement de l’instruction » (Merck & Co. c. Apotex inc., 2006 CF 631 au para. 3). Après avoir examiné les documents déposés, je note que l’appelante n’a fourni aucun élément de preuve confirmant la nature des documents imprimés/photocopiés ni précisé le nombre de copies produites et cherché à le justifier. Les intimés ont souligné à juste titre que, lorsqu’il y a une « documentation limitée dont disposent les officiers taxateurs, la question de savoir quelles dépenses sont raisonnables est souvent tranchée sommairement, ce qui laisse forcément aux officiers taxateurs une large marge d’appréciation discrétionnaire » (Apotex inc. c. Merck & Co. Inc., 2008 CAF 371 au para. 14). Dans ces circonstances, j’exercerai mon pouvoir discrétionnaire de manière prudente dans l’évaluation du nombre de pages nécessaires au déroulement de l’instance devant la CF et la CAF.

[26] En ce qui a trait aux dépens par page, les registres comptables de l’appelante indiquent le montant de 0,25 $. Concernant le montant à facturer lorsqu’un service interne est utilisé, je suis du même avis que le juge Teitelbaum dans la décision Diversified Products Corp. c. Tye-Sil Corp., [1990] A.C.F. no 1056 (QL) :

… Les photocopies ne constituent un débours admissible. que si elles sont essentielles à la conduite de l’action. Elles visent à défrayer le plaideur du coût réel de la photocopie. Les frais de 25 cents la feuille réclamés par le cabinet de l’avocat des demanderesses constituent des frais arbitraires et ils ne correspondent pas au coût réel de la photocopie. Les activités d’un cabinet d’avocats ne consistent pas à réaliser un bénéfice sur ses photocopieurs. Le cabinet d’avocats doit faire payer le coût réel et il incombe à celui qui réclame ces débours de convaincre l’officier taxateur du coût réel des photocopies essentielles.

[Non souligné dans l’original.]

[27] En l’absence de documents justificatifs détaillant les photocopies essentielles et leur débours réel, j’accorderai un montant forfaitaire reflétant la documentation et les copies associées déposées par l’appelante pour satisfaire aux exigences des Règles (Murphy c. Canada (Ministre du Revenu national), 2002 CAF 160 au para. 4; Telford c. Canada (Procureur général), 2008 CF 111 au para. 3).

[28] Je note également que, comme le soulignent à juste titre les intimés, ils ne sont pas responsables des photocopies et des impressions effectuées relativement à la requête en vue d’obtenir une prorogation de délai déposée le 6 septembre 2018 dans le dossier de la Cour T‑1464-18, car l’ordonnance rendue le 26 septembre 2018 n’accordait aucuns dépens (Truehope Nutritional Support Limited c. Canada (Procureur général), 2013 CF 1153 au para. 136).

[29] Après avoir soigneusement examiné les documents déposés dans les deux dossiers de la cour, le nombre de pages par document et la quantité de documents, les exigences des Règles et mes calculs, j’estime raisonnable d’accorder une somme forfaitaire de 1 000,00 $ pour couvrir les débours liés à la photocopie et à l’impression des documents.

B. Signification de l’avis de demande

[30] L’appelante réclame un montant total de 392,80 $ pour la signification de l’avis de requête et a soumis deux factures pour appuyer le mémoire de frais (affidavit de Lynda Troup au para. 6). Conformément à la Règle 138, la signification à personne de l’avis de requête dans le dossier de la Cour T-1464-18 était requise et l’appelante a retenu les services de World Investigation Inc. le 13 août 2018. La distance géographique entre les parties, c’est-à-dire Winnipeg (Manitoba) et Saskatoon (Saskatchewan), a entraîné des coûts plus élevés que la moyenne pour les « services externes » (pièce C, affidavit de Lynda Troup). À cet égard, les intimés soutiennent [traduction] « qu’il y a des huissiers des services judiciaires situés à Saskatoon, en Saskatchewan, qui auraient pu signifier le document aux intimés à un coût plus raisonnable que ceux encourus en s’appuyant sur une entreprise située à l’extérieur de la province » (observations des intimés au para. 114). Quel que soit le bureau des huissiers de justice retenu, qu’il s’agisse d’huissiers des services judiciaires de Saskatoon ou de Winnipeg, la distance aurait inévitablement entraîné des coûts plus élevés. Il n’en reste pas moins que ces dépenses étaient nécessaires et je ne considère pas le montant réclamé comme déraisonnable. Comme l’a décidé la Cour fédérale dans le jugement Smith and Campbell v. Her Majesty the Queen [1985], 85 DTC 5200 (TD) [Smith] pour les frais de messagerie et de téléphone interurbain, je conclus que les frais d’huissier des services judiciaires plus élevés occasionnés par la distance géographique entre les parties sont des services admissibles (Smith au para. 5). Dans ces circonstances, la somme de 392,80 $ est accordée intégralement.

C. Frais judiciaires

[31] L’appelante a réclamé 150,00 $ pour les frais payés au greffe. Un examen approfondi des dossiers judiciaires a confirmé que les frais suivants avaient été payés :

  • 1)Des droits de 50,00 $ ont été reçus par le greffe pour le dépôt de l’avis de demande le 27 juillet 2018, dans le dossier de la Cour T-1464-18 (alinéa 1(1)d), tarif A)

  • 2)Des droits de 50,00 $ ont été reçus par lettre le 15 janvier 2019 pour la demande d’audience dans le dossier de la Cour T-1464-18 (alinéa 1(2)f), tarif A)

  • 3)Des droits de 50,00 $ ont été reçus par le greffe le 19 décembre 2019 pour le dépôt de l’avis d’appel dans le dossier judiciaire A-469-19 (alinéa 1(1)e), tarif A)

[32] Par conséquent, la demande de frais judiciaires de 150,00 $ est acceptée intégralement (paragraphe 1(4), tarif B).

D. Services de messagerie

[33] Comme les intimés n’ont pas contesté les frais de services de messagerie demandés, j’ai examiné attentivement la facture jointe à l’affidavit de Lynda Troup déposé le 30 novembre 2021. J’estime que ce débours est raisonnable et je conclus également qu’il était nécessaire au déroulement du présent contentieux. Par conséquent, la demande de 81,38 $ est acceptée intégralement.

V. Conclusion

[34] Pour tous les motifs précités, les dépens de l’appelante s’élèvent à 6 874,18 $. Cette évaluation cumulative des dépens de taxation s’applique aux dossiers A-469-19 et T-1464-18, et une copie de ces motifs sera également versée au dossier T-1464-18 de la Cour fédérale. Un certificat de taxation sera délivré, la somme de ce dernier étant payable par les intimés à l’appelante.

« Stéphanie St-Pierre Babin »

Officière taxatrice

Ottawa (Ontario)

Le 12 janvier 2023


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


Dossier :

A-469-19

INTITULÉ :

LA PREMIÈRE NATION DE KEY c. STÉPHANIE C. LAVALLÉE, DONALD WORME, RODNEY BRASS, ANGELA DESJARLAIS, SIDNEY KESHANE ET GLEN O’SOUP

AFFAIRE EXAMINÉE À OTTAWA (ONTARIO) SANS COMPARUTION DES PARTIES

MOTIFS DE TAXATION :

STÉPHANIE ST-PIERRE BABIN, officière taxatrice

DATE DES MOTIFS :

Le 12 janvier 2023

OBSERVATIONS ÉCRITES :

Lynda K. Troup

Pour l’appelante

 

Mark Ebert

POUR LES INTIMÉS,

Donald Worme et

Stephanie C. Lavallée

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Thompson Dorfman Sweatman LLP

Winnipeg (Manitoba)

Pour l’appelante

Semaganis Worme

Avocats

Saskatoon (Saskatchewan)

POUR LES INTIMÉS

Donald Worme et

Stephanie C. Lavallée

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